Thomas Piketty : Un capital moderne

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Essai. Remettre en question la répartition au cœur de l’analyse économique.

Retour sur un essai qui fait couler beaucoup d’encre :  Le Capital au XXIème  siècle (Le Seuil) de Thomas Piketty * qui a prononcé  la leçon inaugurale des Rencontres Pétrarques à Montpellier en juillet . Une des idées centrales de ce chercheur en sciences-sociales, est que la question de la répartition des richesses, qui intéresse et concerne tout le monde, est trop importante pour être laissé aux mains des seules économistes.

Thomas Piketty s’intéresse à l’évolution de l’accumulation du capital privé en se gardant des préjugés idéologiques qui ne manquent pas sur le sujet. Pour se faire il a rassemblé des données historiques et comparatives portant sur trois siècles et vingt pays.

Best-seller aux Etats-Unis

Son travail établit patiemment des faits, et des régularités, et analyse les mécanismes, économiques, sociaux, politiques susceptibles d’en rendre compte. Une vaste entreprise d’enquête, en partie partagée par des chercheurs britanniques et américains, qui renouvelle le cadre théorique pour se baser sur les mécaniques actuellement à l’oeuvre. La démarche reconnue internationalement éclaire le débat démocratique sur la question des inégalités et contribue à redéfinir le débat. Le livre a rencontré un immense succès dans le monde anglo-saxon où il s’est vendu à 450 000 exemplaires contre 150 000 pour la version francophone (chiffres en juin 2014). Avec l’écho  rencontré, l’ouvrage fait l’objet de nombreuses controverses auxquelles l’auteur répond point par point. «Dès lors que Le taux de rendement du capital dépasse durablement le taux de croissance de la production et du revenu, le capitalisme produit mécaniquement, des inégalités insoutenables, arbitraire, remettant radicalement en cause  les valeurs méritocratiques sur lesquels se fondent notre société démocratique», souligne l’auteur qui revisite les théories généralement admises sans approfondissement par les économistes.

Les grandes théories revisitées

L’approche transversale, notamment historique et spaciale, de la démarche permet à Piketty de recontextualiser le débat. Ainsi à propos de L’essai sur le principe de population de l’économiste Thomas Malthus publié en 1798, il commente : «Tout n’est pas faux mais Malthus était très inquiet des nouvelles politiques et persuadé que la France courait à sa perte en acceptant de faire siéger le Tiers état au Parlement.» De même il souligne à propos de Marx : « Il écrivait dans un climat de grande exaltation politique (…) Il ne s’est guère posé la question de l’organisation politique et économique d’une société où la propriété privée du capital aurait été entièrement abolie.» Tout en reconnaissant : il conserve sur plusieurs points une certaine pertinence. Il part d’une vraie  question, celle de l’invraisemblable concentration des richesses pendant la révolution industrielle, une démarche dont les économistes d’aujourd’hui ferait bien de s’inspirer. Le principe de l’accumulation infinie qu’il défend contient une intuition fondamentale pour l’analyse du XXI.»  Et Piketty démontre l’ampleur du déséquilibre avec la très forte hausse de la valeur totale des patrimoines privés, mesurés en années de revenu national depuis les années 70 dans l’ensemble des pays riches.

Kuznets et la guerre froide

Plus proche de nous, l’auteur revient sur la théorie de Kuznets proposée en 1955, selon laquelle les inégalités de revenus sont spontanément appelées à diminuer dans les phases avancées du développement capitaliste, quelles que soient les politiques suivies  ou les caractéristiques du pays, puis à se stabiliser à un niveau acceptable. S’il s’inspire du travail statistique approfondie de Kuznets, Piketty élargie l’étude des revenus dans le temps et l’espace et montre que la réduction des inégalités de revenus observée entre 1914 et 1945 est avant tout le produit des guerres mondiales et des chocs économiques et politiques qu’elles ont entraînés.

Dans sa dernière partie il tente de faire des propositions, comme l’impôt progressif sur le patrimoine privé, l’imposition des multinationales,  ou des sanctions contre les paradis fiscaux… pour que la démocratie et l’intérêt général parviennent à reprendre le contrôle du capitalisme et des intérêts privés. «Trop lourd». C’est dans ces mots que Michel Sapin, ministre du Travail, a justifié son refus de lire le livre de Thomas Piketty

Jean-Marie Dinh

* Directeur d’études à l’EHESS il a publié Les Hauts Revenus en France au XXe siècle (Grasset), Pour une révolution fiscale (Seuil)

Source : La Marseillaise 08/08/14

Voir aussi :  Rubrique Livre, Essai, rubrique Actualité Internationale, rubrique Finance, rubrique Politique politique économique, rubrique Science, Sciences Humaines, Science politique, rubrique Festival, ,29e Rencontres de Pétrarque. La difficile réinvention du progrès,

 

 

Fiest’A Sète : les notes métisses débarquent en force

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Le Festival des musiques du monde débute avec une semaine de concerts gratuits dans les communes du bassin de Thau. Il se poursuivra au théâtre de la mer du 2 au 8 août..

Dix-huit ans, voilà le festival devenu majeur. Dix-huit années qu’il propage à Sète et alentours, le meilleur des musiques du monde. Il n’est plus le seul à œuvrer dans ce secteur, ni le seul festival de la cité. Un collier de sept perles festivalières scintille autour du cou de l’île singulière. Localement, la multiplication de l’offre culturelle est une chance qui profite à tous mais complique parfois la vie des directeurs artistiques.

Pour avoir traversé modes et mandatures en tenant bien la barre, José Bel le fondateur passionné de Fiest’A Sète en sait quelque chose. Dans le monde de la navigation, on dit que les meilleures voiles du monde ne feront jamais gagner une régate à une vielle coque de noix. On peut dire que l’embarcation Fiest’A Sète est une coque pleine de trésors qui tient l’allure débridée sans prendre systématiquement le vent porteur du moment. Et le fidèle public du festival sur lequel repose la pérennité de cette ouverture au monde, fait la distinction.

Parmi les éléments identitaires du festival on retrouve : l’exigence d’une programmation de haut niveau, la chaleur de l’accueil artistique, la curiosité, le goût du risque et des rencontres alliés à un indéfectible amour de la musique. « Musique qui éclaire, rassemble, au-delà des frontières et des croyances » souligne José Bel. Les membres de l’association Métisète gardent à l’esprit l’idée que les musiques du monde sont avant tout des musiques vivantes, qui parlent au présent de notre monde d’aujourd’hui. Il suffit de se rendre à Fiest’A sète pour le mesurer ou le vivre.

Grands horizons

Cette nouvelle édition s’ouvre avec trois séances de cinéma et une semaine de concerts gratuits. Dès ce soir en prélude à la Noche Flamenca (le 6 août au Théâtre de la Mer) on pourra voir ou revoir le film de Carlos Saura Flamenco, flamenco au Cinéma Le Comoedia, à Sète. Comme chaque année le festival débute avec une série de concerts gratuits dans les communes qui bordent l’étang de Thau. Dans l’esprit de Fiest’A Sète, la gratuité s’allie à la qualité à partager avec le plus grand nombre. Pas moins de dix concerts seront donnés dans ce cadre à commencer par ce week-end où Balaruc-les bains accueille samedi le groupe franco-irlandais Les Ballyshannons qui revisite le répertoire traditionnel irish folk et Le Malien Mamani Keita. Dimanche les Jamaîquains de The Jolly Boys chaufferont la scène de Marseillan aux rythmes traditionnels entêtants du ska et du rocksteady. Ils seront suivis de Anavantou une formation formée de musiciens belges et brésiliens.

Au Théâtre de la mer

Le Théâtre de La Mer ouvrira ses portes le 2 août pour une série de rencontres exceptionnelles. A commencer par la soirée Soul & Funk Session du samedi avec Ester Rada une diva de la soul issue de la communauté juive éthiopienne et Bootsy Collins génie excentrique du funk dont les collaboration avec James Brown, Fred Wesley, ou Macéo Parker donnent une petite idée de la pointure.

Dimanche le festival se déplacera sur la diagonale afro-cubaine avec le duo renversant Fatoumata Diawara/Roberto Fonseca, suivi de l’orchestre légendaire la « Aragon » qui célèbre cette année son 75 e anniversaire.

Goran Bregovic, Juan Carmona, Keziah Jones, Trilok Gurtu, Susheela Raman… comptent parmi la longue liste des invités attendus et que nous retrouverons dans nos pages qui suivent cette année encore l’événement de près.

Jean-Marie Dinh

Source : La Marseillaise jeudi 24 juillet 2014

Voir aussi : Rubrique Actualité Locale, Rubrique Musique, rubrique Festival, Ouverture, Le Mento historique des Jolly boys, Des esthétiques et des déferlantes qui embarquent le public, Fiest’A Sète archives, On Line Site Officiel.

Ce que le futur président de la Commission européenne a promis au Parlement

Photo The Guardian

Photo The Guardian

À l’image de ce qui se produit en Allemagne ou en Autriche, Jean-Claude Juncker a présenté un programme de « grande coalition » aux députés. Désormais élu, il a jusqu’à la fin du mois de juillet pour constituer son équipe.

Pendant une trentaine de minutes, Jean-Claude Juncker a exposé aux députés, mardi 15 juillet, les principaux axes du programme qu’il compte développer une fois à la tête de la Commission européenne.

Les idées détaillées sont le résultat de plusieurs jours de négociations avec les différentes familles politiques, aucune ne disposant de la majorité à elle seule au sein de l’hémicycle. Le groupe du Parti populaire européen (PPE), auquel appartient M. Juncker, ne détient que 221 sièges sur les 751.

Les lignes directrices proposées par le nouveau chef de l’exécutif reflètent ainsi le compromis noué avec le groupe des socialistes et démocrates européens (S&D, 191 sièges). Des concessions ont aussi été faites aux Libéraux (ALDE, 67 élus).

Pour tenter de convaincre les réfractaires, l’ancien Premier ministre luxembourgeois a pris soin d’envoyer un document explicatif d’une quinzaine de pages, traduit dans toutes les langues de l’UE, à chacun des élus.

Économie et finances

  • 300 milliards d’euros d’investissements publics-privés d’ici trois ans dans l’économie réelle. Une mesure à prendre avec des pincettes puisque le document laisse entendre qu’il s’agit avant tout de mieux utiliser l’argent existant. Une recapitalisation de la Banque européenne d’investissement (BEI) est toutefois évoquée, même si elle n’est pas chiffrée. En 2012, 10 milliards d’euros avaient déjà été injectés au capital de la BEI pour cofinancer des projets d’infrastructures.
  • En lien avec ces investissements, Jean-Claude Juncker souhaite ramener la part de l’industrie de 16 à 20% dans le PIB communautaire.
  • Il propose aussi de stimuler le marché unique du numérique en harmonisant les réglementations des télécoms, du droit d’auteur, de la gestion des ondes radio, et de la protection des données. Il estime le gain à 250 milliards d’euros sur cinq ans.

Social

  • “Révision ciblée” de la directive sur le détachement des travailleurs. Malgré la réforme de la fin de l’année 2013, les socialistes, en particulier français, ont poussé pour que le chantier soit à nouveau ouvert afin de réduire un peu plus les possibilités d’abus.
  • Extension de la garantie jeunesse de 25 à 30 ans. Cette disposition existe toutefois déjà. Chaque État est libre de la mettre en oeuvre.
  • Encourager les États à mettre en place un salaire minimum.

Énergie

  • Miser sur les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique. Lire  l’article.
  • Renforcer l’indépendance de l’UE, pour qu’elle soit “capable d’avoir accès” à d’autres ressources rapidement si les prix fixés par un partenaire deviennent trop élevés. Un message à peine voilé à l’intention de la Russie.

Institutions

  • Nommer un commissaire, qui aura le titre de vice-président, pour gérer la simplification et l’allègement de la législation européenne.
  • Réformer certaines procédures, comme celle d’autorisation des OGM, qui permet à la Commission d’autoriser une culture alors qu’une majorité d’États y est opposée.
  • Les contacts entre lobbyistes, commissaires ou représentants de la Commission européenne devront être publics. Le registre de transparence des institutions, qui existe depuis 2010, deviendra obligatoire,

Accord de libre-échange avec les États-Unis :

  • Jean-Claude Juncker s’est engagé à s’opposer à un abaissement des normes européennes. Il refuse également que les données personnelles soient incluses dans le traité. De plus, il rejettera la mise en place de juridictions qui règleraient les litiges entre entreprises et États et empiéteraient sur les systèmes nationaux.
  • Pour satisfaire aux demandes des Verts, M. Juncker a insisté sur le renforcement de la transparence. L’accès des députés aux documents sera plus grand.  L’UE n’a rien à cacher, a insisté le futur président de la Commission.

Élargissement et immigration :

  • «Aucun élargissement d’ici 2019”, a assuré M. Juncker. Même si les négociations avec les pays candidats à l’UE, en particulier les Balkans, se poursuivront. Aucune allusion directe à la Turquie.
  • Mise en place d’une politique migratoire européenne calquée sur les modèles américain ou canadien, qui permettent de faire venir des personnes pour répondre aux besoins de l’économie et “d’attirer les talents”.

Marathon jusqu’au 1er novembre

Un peu avant 13h, à l’issu d’un vote à bulletin secret, Jean-Claude Juncker a été officiellement élu à la présidence de la Commission européenne, avec 422 voix pour, 250 contre et 47 abstentions.

Parmi les partis français, l’UMP, et l’UDI-Modem ont voté en sa faveur. Le Front national et le Front de Gauche ont voté contre, et le PS s’est abstenu. Les Verts sont divisés, José Bové ayant soutenu le Luxembourgeois.

M. Juncker doit désormais constituer son équipe, le « collège des commissaires ». Lors de sa conférence de presse finale, il a pointé du doigt le manque de femmes parmi les noms proposés par les capitales.

L’objectif est d’arrêter une liste, et une répartition des portefeuilles, d’ici la fin du mois de juillet. Les 27 prétendants seront ensuite auditionnés par les députés entre le mois de septembre et le début du mois d’octobre. L’ensemble de l’équipe devra enfin être adoubé par le Parlement en séance plénière. La nouvelle équipe prendra ses fonctions le 1er novembre. Si tout va bien.

Source : Contexte 15/078/2014

Synthèse des principales propositions

Voir aussi : Rubrique UE, Juncker archives, rubrique Luxembourg, Politique Affaires, On Line : Élection de Juncker : méfiance au PS, confiance à l’Élysée,

29e Rencontres de Pétrarque. La difficile réinvention du progrès en débat

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Thomas Piketty animera la séance inaugurale ce soir au rectorat. Photo DR

Festival de Radio France. L’hypothèse joyeuse combat le discours de la déploration aux 29e Rencontres de Pétrarque qui débutent ce soir au Rectorat et se poursuivront jusqu’au 18 juillet.

Dans le cadre du festival Radio France, les 29e Rencontres de Pétrarque* débutent aujourd’hui à Montpellier. Elles se tiendront jusqu’au 18 juillet sur le thème  « De beaux Lendemains ? Ensemble, repensons le progrès ».

Lundi, Thomas Piketty ouvrira le bal des neurones au rectorat avec une attendue leçon inaugurale. L’économiste est cette année le lauréat du Prix Pétrarque de l’Essai France Culture Le Monde pour son livre Le Capital au XXIème siècle paru au Seuil. Un ouvrage  qui porte sur le retour en force des inégalités dans lequel Thomas Piketty émet l’idée que supprimer la catégorie des rentiers, peu active économiquement, mais dominant pourtant la hiérarchie, permettrait de dynamiser la croissance économique.

Ces rencontres interrogeront la notion de progrès sous l’angle du politique. La soirée du mardi 15 juillet a pour thème « La politique peut-elle se passer de l’idée de progrès » ou en d’autres termes l’idée répandue d’un peuple de gauche progressiste dans l’âme et d’un peuple de droite conservateur par nature ayant vécu, comment mobiliser l’imaginaire collectif ?

Elle réunira Cécile Duflot et la philosophe Blandine Kriegel, ex députée communiste devenue conseillère de Jacques Chirac et ex membre du Comité consultatif national d’éthique. Les lumières du physicien Etienne Klein spécialiste de la physique quantique seront peut être utiles à ce débat.

Mercredi les Rencontres se proposent de répondre à la question
« La révolution technologique nous promet-elle un monde meilleur ? »

Jeudi, il s’agira du déclin de l’occident et de la ré-émergence du progrès en provenance d’autres latitudes, l’Inde, la Chine, l’Afrique. Mais il sera vraisemblablement difficile de contourner l’ethnocentrisme vu que trois des quatre invités sont des intellectuels français reconnus.

Retour à la finance vendredi 18 avec un débat sur le thème : « Peut-on remettre l’économie au service du progrès ? » où l’on guettera l’intervention de l’économiste Gérard Dumenil, auteur de La Grande bifurcation (La Découverte) dans lequel il défend l’idée d’une structure de classes tripolaire comprenant capitalistes, cadres et classes populaires, et conçoit la réouverture des voies du progrès dans de nouvelles coalitions.

Jean-Marie Dinh

* Du 14 au 18 juillet de 17h30 à 19h30 Rectorat, rue de l’université à Montpellier.

 

 

Entretien avec Sandrine Treiner, directrice adjointe de France Culture en charge de l’éditorial.

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Sandrine Treiner. Photo France Culture

« De beaux Lendemains ? » « Ensemble, repensons le progrès ». Comment décrypter cette thématique à tiroir ?

Depuis plusieurs années nous nous étions positionnés sur des thématiques un peu pessimistes comme La crise démocratique ou Guerre et Paix l’année dernière, quand nous avions été rattrapés par l’actu. En préparant cette édition, nous nous sommes dit que nous nous laissions un peu porter par l’état d’esprit de la France et qu’il serait temps de proposer à nos invités de faire l’effort d’envisager l’avenir de manière positive et dynamique.

La notion de progrès porte interrogation. Elle nous renvoie une dimension idéologique qui est aujourd’hui totalement bouleversée…

Le terme progrès est en effet porteur d’une idéologie qui semble en panne. Sur ce point la question se pose à droite comme à gauche. Nous allons tenter de travailler ce que veut dire l’idée de progrès aujourd’hui en déclinant notre sujet à partir de grands thèmes qui remettent en cause l’idée de l’avenir comme la révolution technologique, le déclin de l’occident, l’orientation des politiques économiques…

Comment se porte France Culture ?

Très bien, je pense que les gens sont de plus en plus demandeurs de sens et que nous répondons à notre mission qui est à la fois de réinventer et d’éclairer le monde sur une base d’ouverture et de connaissances. En quatre ans notre audience a évolué de 22% passant de 1,6 à 2,1%. Nous avons passé la barre d’un million d’auditeurs/jour. En conservant notre public d’aficionados et en élargissant notre audience à des personnes qui ne pensaient pas que France Culture pouvait s’adresser à elles.

Quelle seront les innovations de la grille de rentrée ?

La grille sera assez stable dans l’ensemble. Il n’y aura pas de grand changement dans les fondamentaux, parce que ça marche bien et que nous avons déjà opéré beaucoup  de modifications depuis quatre ans. Denis Podalydès, sera une nouvelle voix quotidienne pour la littérature.

Quels ont été les grands axes du changement depuis l’arrivée d’Olivier Poivre d’Arvor ?

Le changement le plus important n’est pas forcément visible. Il a consisté à rendre la grille lisible. Nous avions beaucoup d’émissions thématiques éparpillées. Nous avons reclassé un peu comme on reclasse sa bibliothèque. Nous avons aussi rajeuni et féminisé l’équipe. Enfin on a réchauffé l’actu en proposant beaucoup plus de directs.

Craignez-vous des réductions budgétaires ?

Nous en avons déjà connu l’an dernier et sommes parvenus à faire des économies en évitant d’impacter les productions. Pour cette année notre budget ne sera pas en augmentation mais rien ne dit qu’il sera une nouvelle fois revu à la baisse.

Recueilli par JMDH

 Voir aussi :  Rubrique Festival, Festival de Radio France, rubrique Médias, rubrique Politique Politique culturelle, rubrique Rencontre, Jérome Clément, rubrique Livre, Essai, Thomas Piketty : Un capital moderne,

Montpellier Danse. Rapports aux filiations

ISRAEL_GALVAN_SOLO_(C)_LUIS_CASTILLA_1Néo-classique. Deux spectacles où le rapport à la forme joue à plein. Alonzo King s’enlise tandis que Galvan décolle.

La danse contemporaine est un art riche de filiations et de ruptures. Montpellier Danse a pour coutume d’offrir un vaste panorama des formes qui coexistent : classique, postmoderne, contemporaine, danse abstraite, non danse… Bien au-delà du catalogue, la marque de fabrique du festival est de proposer une danse qui bouscule nos codes de référence, en nous interrogeant, entre autres, sur les visions académiques du « beau » et les représentations esthétiques dominantes.

Ce n’est pas le cas avec le spectacle  d’Alonzo King dont la réputation n’est plus à faire mais qui semble vivre sur ses acquis. Son Concerto for two violins autour du corps idéal est renversant de classicisme, surjoué et contraignant pour les danseurs dont on sent poindre le stress infligé sous le vernis de plasticité. Dans le second volet le mariage entre modernité et tradition aboutit à une mise en espace à grosses ficelles qui véhicule une piteuse et datée représentation de la femme. Malgré les bras et les jambes on ne décolle pas un instant.

Le solo présenté par Israel Galvan est d’une tout autre facture. L’artiste nourri au biberon du flamenco a lui aussi à faire à un art où l’on ne plaisante pas avec la forme. Habitué des grandes scènes, avec Solo, Israel Galvan transgresse nos habitudes chorégraphiques, pour aller chercher l’essence même de la danse. Seul, sans musique, à même le sol de poussière, le danseur instaure de nouveaux référents poétiques. Pour se livrer entier, un peu comme Préljocaj l’avait fait dans un autre registre avec Le funambule. L’épuration conduit à un rituel d’effervescence esthétique où se jouent le passé incarné par la force du pur présent. Le rythme dans le corps jusqu’au bout de la dent qui vous mord au coeur.

JMDH

Voir aussi : Rubrique Danse, rubrique Festival, Montpellier Danse 2014, rubrique Montpellier