Le siège de la Commission européenne à Bruxelles. AFP Emmanuel Durand
EXCLUSIF La Commission européenne s’appuie sur une étude du think tank libéral Ifrap pour inciter la France à réduire ses dépenses de retraite. Plus de 5 milliards d’euros pourraient être dégagés sur les régimes des fonctionnaires en 2022.
Et si Emmanuel Macron profitait de la grande réforme des retraites à points de 2019 pour revoir à la baisse les dépenses de pension ? C’est en tout cas ce que lui suggère la Commission européenne. La France doit « uniformiser progressivement les règles des différents régimes de retraite pour renforcer l’équité et la soutenabilité de ces régimes », écrit-elle dans une récente « Recommandation » qui doit être validée le 22 juin par les ministres des Finances européens réunis à Luxembourg.
« Si les réformes des retraites déjà adoptées devraient réduire le ratio des dépenses publiques de retraite à long terme, relève-t-elle, un système de retraites plus simple et plus efficient générerait des économies plus importantes et contribuerait à atténuer les risques qui pèsent sur la soutenabilité des finances publiques à moyen terme. »
Pour appuyer sa requête, la Commission européenne cite une « étude récente » qui estime qu’un alignement des régimes de retraite des fonctionnaires sur ceux du privé « réduirait de plus de 5 milliards d’euros les dépenses publiques à l’horizon 2022 ». Une mention qui a surpris nombre de spécialistes des retraites à Matignon et Bercy. « J’ai cherché mais je ne vois absolument pas de quelle étude il s’agit, confie un haut fonctionnaire. Il est d’ailleurs étonnant que Bruxelles ne cite pas sa source. » En 2015, les statisticiens du Conseil d’orientation des retraites avaient conclu, eux, que « les règles du privé s’avéreraient plus avantageuses que celles du public pour un peu plus de la moitié des fonctionnaires nés en 1958 et moins avantageuses pour l’autre moitié ».
Prévue ce mardi, l’adoption de la loi par les sénateurs pourra-t-elle mettre fin à une grève qui a déjà coûté plus de 400 millions d’euros à la SNCF ? Pas sûr.
La sortie de crise de la SNCF se rapproche-t-elle enfin ? Après son passage au Sénat, le texte prévoyant l’ouverture du secteur ferroviaire à la concurrence à partir de 2020, mettant fin au recrutement au statut à partir de 2020 à la SNCF et transformant celle-ci en société nationale à capitaux publics a été fortement amendé. Prévue ce mardi 5 juin, l’adoption de ce texte par les sénateurs marque une nouvelle étape importante de la réforme.
Cela peut-il mettre fin à une grève qui a déjà coûté quelque 400 millions d’euros, selon la direction de la SNCF ? Pas sûr. D’abord, il va falloir que la commission mixte paritaire entérine le 11 juin prochain les évolutions décidées par le Sénat. Une douzaine de points seraient encore à régler, Sénat et Assemblée nationale campant toujours sur des positions différentes à propos de points techniques de la réforme.
Enfin, il faudra que les organisations syndicales appellent à reprendre le travail… Même si certains syndicats ont participé grandement à l’élaboration des amendements adoptés au Sénat, ils cherchent toujours à maintenir la pression et seraient prêts à appeler à une nouvelle « journée sans cheminots » le 12 juin, lors de leur quinzième séquence de deux jours de grève.
Le 14 mai, avec 30 % de grévistes, avait été un succès alors que la mobilisation s’effritait. Le 12 juin pourrait donc être un dernier baroud d’honneur, notamment pour l’UNSA et la CFDT, les deux syndicats réformistes. Tour d’horizon de la réforme en passe d’être adoptée.
Les points intangibles de la réforme
Les organisations syndicales ont beau toujours refuser l’ouverture à la concurrence et la réforme de la gouvernance du groupe SNCF, et exiger le maintien du recrutement au statut des cheminots, le gouvernement, soutenu par les deux assemblées, n’a pas bougé sur ces principes « intangibles » de la réforme.
Le projet de loi prévoit une ouverture progressive du secteur ferroviaire national : à partir de 2020 pour les TGV, entre 2019 et 2023 pour les TER et en Ile-de-France, à partir de 2025 pour certaines lignes, et 2033 pour les autres. Quant à la fin du recrutement au statut, il est prévu au 31 décembre 2020, comme les sénateurs l’ont enfin écrit dans la loi.
En parallèle, le gouvernement a annoncé une augmentation de 200 millions d’euros des investissements pour la maintenance à partir 2022, portant l’effort annuel à 3,6 milliards d’euros, ainsi que la reprise de 35 milliards d’euros (sur 46,6 milliards d’euros à fin 2017) de dette de SNCF Réseau.
C’était un préalable au passage de SNCF Réseau d’établissement public industriel et commercial en société nationale. Cette somme sera transférée en deux temps dans les comptes publics de la nation, en 2020 et 2022. Cela devrait augmenter d’autant la dette publique de l’Etat mais, espère le gouvernement, soutenu dans son raisonnement par l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), ce ne sera pas comptabilisé dans le déficit des années 2020 et 2022, permettant à la France de rester dans les clous de la règle des 3 % de déficit prévue par le traité de Maastricht.
Les adaptations apportées par le Sénat
Après l’avoir refusé aux députés de la France insoumise, le gouvernement l’a finalement accordé au Sénat : la SNCF sera non seulement une entreprise à capitaux publics détenus par l’Etat, mais ces capitaux seront également « incessibles ». Elisabeth Borne, la ministre des transports, a accepté d’intégrer ce terme.
« La SNCF est une entreprise publique dont les titres sont intégralement détenus par l’Etat. Ce qui veut dire qu’elle est strictement incessible, rappelait-elle lundi 4 juin dans La Provence.Mais j’ai bien vu que le fait que ce terme d’incessibilité ne figure pas dans le texte suscitait inquiétudes, rumeurs et faux débats. Alors, nous l’avons ajouté au Sénat. La pédagogie, c’est la répétition. »
Par ailleurs, les sénateurs ont voté en faveur de la création d’un périmètre social ferroviaire qui permettra à un cheminot actuel d’être au statut et de bénéficier du cadre social global du cheminot, y compris dans les filiales Fret et Gares. « En clair, tous les salariés des différentes filiales de la holding SNCF travailleront dans un groupe unifié, traduit-on au ministère des transports. C’était une exigence forte des syndicats. Les cheminots pourront, par exemple, bénéficier d’une mobilité interne à ce périmètre ou pourront relever d’un même comité d’entreprise. »
De la même manière, le Sénat a encadré plus finement le transfert des salariés de la SNCF vers d’autres sociétés dans le cas de la perte d’un appel d’offres de la société publique face à des entreprises de droit privé. Les organisations syndicales n’ont pas obtenu que seuls les cheminots volontaires soient transférés à un opérateur concurrent, mais le Sénat leur a apporté un certain nombre de garanties.
Par exemple, dans le cas d’une ligne transférée à la concurrence, un cheminot qui y consacre moins de 50 % de son activité globale ne sera pas transféré automatiquement à l’opérateur concurrent. La SNCF devra lui proposer un reclassement interne, soit dans la même région, soit au niveau national. De même, pour baisser le recours aux transferts obligatoires, tout cheminot volontaire et installé dans la région pourra rejoindre l’opérateur concurrent. Les syndicats ont enfin obtenu un droit au retour pour les cheminots transférés. Ils pourront revenir à la SNCF entre trois et huit ans après leur départ, et retrouver alors leur statut s’ils le souhaitent.
Parallèlement, le Sénat a précisé que les cheminots transférés à la concurrence conserveront non seulement leur salaire, mais également les autres éléments de leur rémunération (primes, allocations, etc.). Les syndicats tentent toujours d’obtenir davantage, notamment la suppression de l’obligation de transfert. Car si un cheminot refuse un transfert ou les propositions de reclassement, il risque d’être licencié.
Ce qui pose encore problème
Tous les acteurs entendent en finir avec la rédaction de la loi lors de la commission mixte paritaire (CMP), programmée le 11 juin. Cependant, le texte voté par le Sénat ne plaît pas complètement aux députés. Si ces derniers sont d’accord avec les modifications d’ordre social en faveur des cheminots, il reste quelques désaccords plus techniques, concernant notamment la régulation de l’offre vers certaines destinations.
De même, pour protéger certaines régions, le Sénat a introduit des exceptions à la mise en concurrence qui complexifient le système ferroviaire. Enfin, l’accélération du calendrier d’ouverture à la concurrence en Ile-de-France n’est pas partagée par les députés. « Il y aura encore d’importants débats de fonds lors de la CMP, présage un député. Et cela pourrait être long ! »
Le directeur général de Pôle emploi, Jean Bassères, a annoncé que 4.000 emplois pourraient disparaître lors d’une convention managériale. – WITT/SIPA
D’après les informations du « Journal du dimanche », le directeur général de Pôle emploi, Jean Bassères, a annoncé que 4.000 postes pourraient disparaître d’ici à trois ans au sein de l’établissement public. La baisse du chômage est évoquée pour justifier ces mesures drastiques. Pourtant, Pôle emploi va hériter de nouvelles missions.
Quand le bonheur des uns fait le malheur des autres. L’embellie sur le marché de l’emploi constatée depuis plusieurs mois pourrait faire perdre leur travail à plusieurs milliers de salariés de… Pôle emploi, l’établissement public chargé d’aider les chômeurs à trouver un job. Le Journal du dimancherévèle en effet que Jean Bassères, le directeur général de Pôle emploi, a confié lors d’une convention managériale il y a trois semaines que « 4.000 postes pourraient disparaître » d’ici à 3 ans, sur les 55.800 agents que compte l’établissement. Ceci alors que 5,6 millions de Français sont tout de même toujours inscrits à Pôle emploi.
La volonté de diminuer les ressources de Pôle emploi n’est pas nouvelle. Dans la loi de Finances 2018, la mission Travail a perdu 1,5 milliard d’euros de crédits, et la subvention accordée à Pôle emploi a baissé de 50 millions d’euros. A tel point, d’après le JDD, que « l’équilibre financier de la structure » est « en péril« . 4 milliards d’euros de coupes budgétaires devraient être atteints d’ici à 2022. Cette année, 297 équivalents temps plein et 1.380 contrats aidés ont été supprimés : une peccadille en comparaison de ce qui pourrait suivre. De plus, avant la fusion entre l’ANPE et les Assédic, les départs à la retraite étaient systématiquement remplacés. Ce n’est plus le cas depuis que Pôle emploi a été créé. Conséquence de tous ces bouleversements : les conditions de travail se sont considérablement dégradées, à tel point que de nombreux conseillers de Pôle emploi se déclarent au bord de la rupture.
Pour justifier ces changements, le gouvernement invoque la baisse durable du chômage : avec moins de demandeurs d’emploi, il n’y aurait plus besoin d’autant de conseillers. Un argumentaire battu en brèche par les représentants syndicaux de Pôle emploi, comme David Vallaperta, de la CFDT : « La baisse du chômage ne signifie pas une diminution de notre charge de travail, car il y a une forte hausse des demandeurs d’emploi cumulant une activité partielle et une allocation« , observe-t-il.
De nouvelles missions avec la réforme de l’assurance chômage
Surtout, les missions de Pôle emploi sont appelées à s’élargir. Le Plan d’investissement dans les compétences prévoit ainsi un accompagnement privilégié pour un million de chômeurs de longue durée et un million de jeunes sans emploi. Et le gouvernement a promis de faire passer de 200 à 1.000 le nombre de conseillers affectés… au contrôle des chômeurs.
Une mission dont le directeur général Jean Bassères devrait s’acquitter avec enthousiasme : après la victoire d’Emmanuel Macron, évoquant le contrôle accru des demandeurs d’emploi, il avait, d’après le Canard enchaîné déclaré au comité d’entreprise que Pôle emploi devait se mettre « en marche accélérée » pour « mettre en oeuvre la politique voulue par le président de la République« .
Les conflits internes, autour des ordonnances de la loi travail, connaîtront leur épilogue à l’occasion du congrès de Force ouvrière qui s’ouvre lundi 23 avril à Lille. Contesté à l’automne, Jean-Claude Mailly passera la main à son successeur, Pascal Pavageau, dont la ligne pourrait être plus dure vis-à-vis du gouvernement.
Ambiance à couteaux tirés à Force ouvrière où, pour la première fois de son histoire, le congrès pourrait de ne pas voter le rapport d’activité de Jean-Claude Mailly, son secrétaire général. Ses prises de position accommodantes pendant la loi travail ont laissé des fractures profondes dans la troisième organisation syndicale de salariés. Ainsi, le congrès qui se tient à Lille du 23 au 27 avril s’est préparé dans une extrême tension. Malgré une nouvelle carrière déjà anticipée au sein du Comité économique et social européen, la fin du mandat de Jean-Claude Mailly n’est pas un long fleuve tranquille.
La posture bienveillante de Force ouvrière au début des concertations sur les ordonnances avec le gouvernement a été désavouée en septembre 2017. Lors de la réunion de la Commission exécutive (CE) du mois de mai, seulement deux abstentions se sont exprimées sur la ligne ouverte de la confédération. En juin, l’opposition a pointé le bout de son nez avec cinq votes contre sur les 34 membres de la CE. Après l’été, plus de 80 % des unions départementales (UD) et des fédérations se sont opposées à la ligne défendue par Jean-Claude Mailly. Résultat : le 4 septembre 2017, la CE prend ses distances avec la position défendue par son secrétaire général. Puis vient le tour du Conseil confédéral national composé des 130 responsables de fédération et d’UD, qui imposent au bureau confédéral un appel à manifester contre la loi travail. Une mise en minorité sévère, même si le secrétaire général n’est pas débarqué.
Défiance sur l’indépendance de Force ouvrière
« Nous avons eu un problème avec l’indépendance du syndicat quand Stéphane Lardi a intégré le ministère du Travail », affirme en off un responsable syndical qui évoque les rendez-vous hors agenda du secrétaire général de FO avec le ministère dans cette période. Stéphane Lardi, ancien secrétaire confédéral chargé de l’emploi et la formation, était même pressenti jusque-là comme successeur possible de Jean-Claude Mailly. « Pas d’indépendance, pas de fédéralisme, pas de respect et de compte rendu du mandat », constate un autre militant sous couvert d’anonymat pour qualifier la fin de mandat du secrétaire général.
Depuis, Pascal Pavageau est le seul à avoir postulé au poste de secrétaire général. Ce dernier revendique la ligne d’indépendance syndicale défendue par Force ouvrière, rappelant qu’il n’a ni carte politique ni appartenance à la franc-maçonnerie. Nettement critique vis-à-vis de la poitique du « chacun pour soi » du gouvernement, il n’exclut pas un retour à l’unité d’action avec les autres forces syndicales, dont la CGT. Lors de la seule manifestation contre la loi travail à laquelle Force ouvrière avait participé, Pascal Pavageau manifestait à Paris aux côtés de Philippe Martinez, pendant que Jean-Claude Mailly défilait à Marseille pour se démarquer. « Je ne le vois pas signer un accord comme celui de la loi travail », avance un militant plutôt confiant sur la ligne poursuivie par le prochain secrétaire général.
Cela suffira-t-il à un retour à la normale au sein de la « vieille maison » qui revendique encore près de 500 000 adhérents ? Pas sûr. Les fédérations proches de Jean-Claude Mailly manœuvrent en amont du congrès pour obtenir des voix et des mandats afind’éviter un camouflet à l’ancien secrétaire général lors du vote du rapport d’activité. Autre enjeu des proches de la ligne de l’ancien bureau confédéral : placer les leurs dans la prochaine direction entourant Pascal Pavageau. Pour le reste, les résolutions générales, sociales et revendicatives du congrès fixeront la ligne de conduite donnée à la prochaine direction. Probablement la confirmation de la ligne traditionnelle de la confédération réformiste.
La fin de la bataille aura lieu à l’issue du congrès, lorsque le Conseil confédéral national nommera les 34 membres de la Commission exécutive. Les luttes d’appareil s’y révéleront et donneront la température des rapports de force internes entre partisans d’un accompagnement dupouvoir et partisans d’une ligne indépendante et plus contestataire. Résultat le 27 avril.
Un trader après la clôture de la bourse de New York et la chute de l’indice Dow Jones, le 5 février. Brendan Mcdermid /Reuters
La hausse des salaires aux Etats-Unis a suscité un retour des craintes inflationnistes. Mais il n’est pas encore question de krach boursier.
Sévère correction à Wall Street : l’indice Dow Jones a perdu, lundi 5 février, 1 175 points à 24 345 points, soit un recul de 4,6 % tandis que le Nasdaq, l’indice riche en technologies, perdait 3,8 %. Cette séance, la pire depuis août 2011, fait suite à celle de vendredi où l’indice américain avait déjà perdu 2,54 %.
Ces événements ne font pas l’affaire de Donald Trump, qui n’a eu cesse de citer la Bourse comme juge de paix de son action. Dans un discours dans le MidWest, le président n’a pas évoqué la chute de Wall Street. Mais Sarah Sanders, porte-parole de la Maison Blanche a réagi: « Le président se concentre sur nos fondamentaux économiques à long terme qui restent exceptionnellement forts, avec le renforcement de la croissance économique, un taux de chômage historiquement bas et des salaires en hausse pour les travailleurs américains ».
Le déclencheur de ce mouvement de vente a été la publication vendredi matin par le département du travail américain de chiffres exceptionnellement bons pour l’emploi : non seulement l’économie américaine a créé 200 000 emplois en janvier, soit plus qu’attendu, mais surtout, les salaires ont progressé au rythme annuel de 2,9 %, contre 2,5 %. Du jamais vu depuis la fin de la récession en juin 2009. Cette tension sur les salaires était attendue en vain depuis des années, ceux-ci ne progressant pas aux Etats-Unis en dépit d’un taux chômage au plus bas depuis le début du siècle (4,1 %).
En attente de la nouvelle politique de la Fed
Ce retour à la normale a immédiatement suscité un retour des craintes inflationnistes du côté des opérateurs financiers. Si les actions sont élevées, c’est en raison des taux d’intérêts bas. Il est trop tôt pour parler de krach. Si la Bourse a effacé ses gains depuis le début de l’année et perdu 9 % depuis le plus haut historique atteint le 26 janvier, sa progression sur un an reste de 21,5 % et sur trois ans de 64 %. Visiblement, la baisse a été accélérée par les ventes automatiques.
Hasard du calendrier, ce lundi était le jour où Jerome Powell prêtait serment pour devenir président de la Réserve fédérale. Le successeur de Janet Yellen, dans une allocution podcastée, a assuré qu’« aujourd’hui, le chômage est bas, l’économie est en croissance, et l’inflation est basse. Par nos décisions de politique monétaire, nous soutiendrons une croissance économique continue, un marché du travail sain et la stabilité des prix », a déclaré M. Powell.
Le retour de la hausse des prix pourrait inciter la Réserve Fédérale Américaine à augmenter plus rapidement ses taux que prévu. En décembre, en augmentant ses taux directeurs d’un quart de points (compris entre 1,25 et 1,5 %), elle a laissé entendre qu’elle pourrait procéder à trois resserrements supplémentaires du crédit.
Ce rythme pourrait s’accélérer en période de surchauffe économique, d’autant que les colombes se font rares à la Fed avec le départ de Janet Yellen et de son adjoint Stanley Fischer. Toutefois, il n’y a pas eu de panique sur le marché obligataire. Les taux d’intérêt à dix ans sont retombés lundi à 2,794 % après avoir touché un plus haut de 2,852 vendredi soir. Ce mouvement s’explique parce que des vendeurs d’actions ont réinvesti sur les bons du trésor américain pour limiter leurs risques.
Une hausse du dollar
Dans ce contexte, la crise boursière américaine, qui a fait chuter les autres bourses mondiales (Tokyo a reculé lundi de 2,5 % et reculait mardi de 5,3% tandis quele Stoxx Europe 600 perdait lundi 1,6 %), a conduit à une hausse paradoxale du dollar. En cas de crise, les opérateurs choisissent la devise américaine, qui a gagné 0,2 % vis-à-vis des monnaies extérieures et 0,3 % par rapport à l’euro. Ce phénomène a été amplifié par le discours de Mario Draghi, le président de la banque centrale européenne mettant en garde contre une hausse de l’euro, dans des propos tenus devant le Parlement européen. « La récente volatilité du taux de change a suscité de nouveaux vents contraires et ses implications pour les perspectives de stabilité des prix à moyen terme sont à surveiller de près », a déclaré M. Draghi.
La surchauffe américaine peut s’expliquer par un triple phénomène : la politique monétaire très accommodante depuis des années, mais aussi la réforme fiscale : celle-ci a conduit les entreprises qui regorgeaient de liquidités à les rapatrier aux Etats-Unis et va accentuer le déficit budgétaire des Etats-Unis, qui était encore supérieur à 3 % en 2017. Depuis le début des débats, la plupart des économistes estiment ce stimulus budgétaire inutile, voire dangereux.
Toutefois, sur le fond, la hausse des salaires aux Etats-Unis, si elle était confirmée, est une des meilleures nouvelles économiques engrangée depuis longtemps. Leur stagnation, conjuguée à une hausse des inégalités qu’incarne l’envolée de Wall Street, a conduit à une grave dégradation de la cohésion sociale aux Etats-Unis. Logiquement, ce retour à la normale marquerait la fin de l’argent gratuit et donc une valorisation plus faible des actifs, même si les profits des entreprises restent, pour 80 % des entreprises, supérieurs aux prévisions.
Un tableau répertoriant la chute du Nikkei à Tokyo, au Japon, mardi 5 février. Toru Hanai / Reuters
La Bourse de Tokyo emboîte le pas à Wall Street, dévissant de plus de 4 % à l’ouverture mardi 6 février. Dans les premières minutes des échanges, l’indice Nikkei des 225 valeurs vedettes lâchait jusqu’à 4,41 % (-999,83 points) à 21 682,25 points, et l’indice élargi Topix de tous les titres du premier tableau perdait 4,28 % (-78,01 points) à 1 745,73 points.
Les deux indices avaient déjà lâché plus de 2 % lundi, dans un contexte de nervosité des investisseurs face à la hausse des taux d’intérêt aux Etats-Unis. « Le marché prend acte des inquiétudes sur l’inflation et une possible dégradation de l’économie américaine alors que les taux d’emprunt ont augmenté trop rapidement », a commenté pour l’agence Bloomberg Toshihiko Matsuno, de SMBC Nikko Securities.
La place tokyoïte était en outre affectée par une appréciation du yen, valeur refuge prisée en période d’incertitudes : le dollar s’affichait ainsi à l’ouverture à 109,23 yens, contre 109,91 yens lundi à la fermeture, tandis que l’euro fléchissait à 135,16 yens contre 136,92 yens, des mouvements défavorables aux titres des sociétés exportatrices japonaises.