La Chine tire la première salve dans la guerre de l’eau

Anuwar Hazarika

Anuwar Hazarika

Ces derniers mois, Pékin a refusé de livrer des données à l’Inde sur le flux du Brahmapoutre, provoquant des inondations meurtrières en aval. Le pays a aussi prévu de détourner une partie des eaux de ce fleuve pour irriguer ses champs

Cette année, la mousson a été particulièrement meurtrière dans le nord-est de l’Inde. Quelque 600 personnes ont perdu la vie dans des inondations, des millions d’autres ont dû fuir et plusieurs milliers d’hectares de terres arables ont été noyés. Au total, 32 millions de citoyens ont été affectés. La plupart des régions touchées se trouvaient le long du Brahmapoutre et du Sutlej, deux rivières qui puisent leurs origines sur le plateau tibétain, en Chine. Les pluies n’ont pourtant pas été très fortes en 2017, s’inscrivant même en deçà des moyennes annuelles.

Le responsable se trouve à plus de 2500 kilomètres de là, dans la capitale chinoise. «Pékin a omis de transmettre des données hydrologiques à l’Inde durant la mousson, ce qui a empêché Delhi de prévoir les inondations et de mettre en place un système d’alerte pour avertir la population», relève Brahma Chellanay, un expert au Centre for Policy Research, un think tank indien.

Relations bilatérales tendues

Un accord signé en 2002 l’oblige pourtant à fournir à l’Inde des informations sur le niveau des eaux et les quantités de pluie enregistrées au Tibet chaque année entre le 15 mai et le 15 octobre. Comme seule justification, Pékin a affirmé que ses stations de surveillance sont en réfection. Le Bangladesh – là où le Brahmapoutre finit sa course – a pourtant reçu des données chinoises sur le flux de la rivière.

a plupart des observateurs pensent que Pékin a cherché à punir Delhi. «Le refus de livrer ces informations reflète la dégradation des relations bilatérales entre ces deux pays engagés dans plusieurs conflits frontaliers», souligne Zhang Hongzhou, un chercheur auprès de l’Ecole d’études internationales S. Rajaratnam de Singapour. Cet été, des escarmouches ont opposé leurs armées sur le plateau du Doklam, une région himalayenne qu’ils se disputent.

Une source de conflit

L’eau pourrait devenir une source de conflit récurrente entre les deux géants asiatiques. «Ces dernières années, la Chine a entamé la construction de plusieurs barrages le long du Brahmapoutre, dit Brahma Chellanay. Cela va affecter la quantité et la qualité de l’eau qui se déverse en aval.» Une première structure, le barrage hydroélectrique du Zangmu, a été mise en service en 2015. Elle se trouve à quelques kilomètres à peine de la frontière avec l’Inde.

Ce printemps, la Chine annonçait un projet plus fou encore: la construction d’un tunnel long de 1000 kilomètres, qui a pour but de détourner une partie des eaux du Brahmapoutre depuis le plateau tibétain jusqu’au désert du Xinjiang, pour y effectuer de l’agriculture. La structure sera composée d’une série de chutes d’eau souterraines et de tuyaux reliés par des joints élastiques, inspirés par ceux des wagons de métro. Cela lui permettra d’absorber l’important dénivelé entre le Tibet et le Xinjiang, ainsi que les secousses qui frappent régulièrement cette zone sismique.

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L’eau, la nouvelle obsession de la Chine

Si la Chine s’est lancée dans ces coûteux projets hydrauliques, c’est qu’elle manque cruellement d’eau. Dans les plaines arides du nord-est du pays, surtout. «A cause du réchauffement climatique, cette région a subi plusieurs sécheresses ces dernières années, note Gabriel Eckstein, un spécialiste de la gestion de l’eau à l’Université A&M du Texas. Elle a aussi connu une urbanisation rapide, notamment dans la zone de Pékin, et abrite les principales provinces céréalières du pays.» Tout cela a eu pour effet de faire baisser spectaculairement le niveau des nappes phréatiques. Plus de la moitié d’entre elles se trouvent désormais en dessous du niveau de la mer.

Pour y remédier, Pékin a lancé un gigantesque projet de détournement des eaux du Yangtze, au sud du pays, vers le nord de la Chine. «Il comporte deux volets, détaille Michael Webber, un expert de ce projet à l’Université de Melbourne. Le premier achemine de l’eau depuis la région de Shanghai jusqu’à Tianjin, par l’entremise d’un canal construit en 500 av. J.-C. doté d’une série de stations de pompage. Le second part du réservoir de Danjiangkou sur la rivière Han, un affluent du Yangtze, et est constitué d’une série de canaux en pente qui permettent à l’eau de s’écouler naturellement jusqu’à Pékin.»

Détournement massif

La capitale obtient désormais 73% de ses ressources hydrauliques par ce biais. Ce projet, dont la réalisation a coûté 80 milliards de dollars, permet de détourner 25 milliards de mètres cubes d’eau du sud vers le nord du pays. Une troisième voie est à l’étude. Elle permettrait de transférer de l’eau depuis le Mékong, qui puise lui aussi ses origines au Tibet, vers le Yangtze et le fleuve jaune. Au grand dam des pays situés en aval, comme le Laos, le Cambodge ou le Vietnam.

Les effets sur les régions qui fournissent cette eau ne sont pas non plus anodins. «Durant la saison sèche, le Yangtze risque de subir des intrusions d’eaux salées au niveau de son embouchure», indique Mark Wang, un professeur de géographie de l’Université de Melbourne. Celle-ci se trouve à proximité de la ville de Shanghai, ce qui pourrait affecter son approvisionnement en eau. La construction de ces canaux a en outre nécessité le déplacement de dizaines de villages. «Quelque 300?000 personnes ont dû être relogées», indique Michael Webber.

Julie Zaugg

 

Source : Le Temps 16/11/2017

Voir aussi : Actualité Internationale, Rubrique Asie, rubrique Chine, rubrique Inde, rubrique Géographie,Politique, Politique économique, On Line,  Dans l’enfer des «villages du cancer» chinois

Inde. Les enfants sont voués à mourir

enfants

La mort atroce de 85 enfants à l’hôpital universitaire Baba Raghav Das, à Gorakhpur dans le nord-ouest du pays], reflète avec justesse ce que nous sommes devenus : une nation dépourvue de tout pragmatisme, de toute décence et de toute compassion. Car il faut cumuler plusieurs manquements politiques et administratifs pour que des enfants meurent privés d’oxygène. Il faudra trouver les personnes responsables. Mais ce drame est aussi le procès de notre indépendance, de ce que nous en avons fait, du genre de population que nous sommes devenus et de l’échelle des valeurs sur laquelle nous nous plaçons.

Cet épisode nous plonge dans l’abattement, car il nous rappelle que les enfants pauvres de notre république sont en partie voués à mourir à cause de nos choix. Les enfants sont voués à mourir, car dans cette république nos priorités ne sont pas les bonnes.

La crise du système de santé indien n’est un secret pour personne. Et malgré tout, elle ne suscite aucune colère dans l’opinion publique, ne mobilise pas notre intelligence collective et n’émeut pas nos consciences. Les enfants sont voués à mourir, car, même face au tragique, nous trouvons toujours une excuse pour ressasser de fausses querelles. Le deuil n’a pas sa place en Inde, où la récrimination est reine. Personne ne s’attarde sur ce qui a été perdu. Personne ne consacre un seul instant au vide béant que laissent ces disparitions.

Au contraire, ce vide sera immédiatement comblé par le cocktail habituel – revendications, clivages, distractions – qui a précisément mené à la tragédie.Les enfants sont voués à mourir en Inde, car régler des comptes ancestraux et entretenir les rancœurs épuise nos ressources sociales, politiques et affectives.

La véritable individualité de nos citoyens, les enfants qui ont un avenir, les parents pleins d’espoir, tout cela est éclipsé par des batailles plus abstraites et meurtrières qui opposent divers groupes et clans. Le poids mort d’une vie politique prise au piège du passé voile les souffrances du présent.

Les enfants sont voués à mourir, car les structures incarnant la réalité sont anéanties. Au lieu de nous permettre de comprendre pleinement notre contexte, elles dissimulent tématiquement la réalité. Elles assouvissent notre appétit pour les faux combats qui mêlent le bruit et la fureur, mais dont l’unique effet est d’isoler les citoyens les uns des autres.

Les enfants sont voués à mourir, car, en Inde, le mal reste structurel. Ce mal sournois est profondément ancré dans la structure des privilèges, il marginalise les pauvres et les rend invisibles, au point que nous pouvons pour suivre notre vie confortablement, en toute innocence. La réalité brutale de la violence économique tourne en dérision nos platitudes constitutionnelles sur la liberté et l’égalité.

Les enfants sont voués à mourir, car l’Inde excelle dès qu’il s’agit de manifester et d’intervenir épisodiquement. Pour une mission ponctuelle, si c’est une exception, rien n’est trop ambitieux pour ce pays. Mais l’Inde est incapable d’institutionnaliser des mécanismes quotidiens au sein de l’État. Elle est incapable de mettre en œuvre de petits actes de coopération. Il y a aussi en Inde une banalité du mal. Le mal est tenace, car il est le résultat de petits dysfonctionnements accumulés.

Les enfants sont voués à mourir, car la force du symbolisme et du prestige prend encore le pas sur le factuel et le scientifique. Pour éradiquer tous les cas d’encéphalite [qui est la maladie la plus répandue dans la région] à Gorakhpur, un énième institut de recherche dysfonctionnel sera créé, au lieu de mobiliser les connaissances existantes.

Les enfants sont voués à mourir, car la population n’est pas soudée, il n’y a qu’un long défilé de prestataires, de bureaucrates et de techniciens qui tentent d’intervenir dans des contextes où il n’existe pas de communauté locale : Gorakhpur n’est pas un espace partagé et ne désigne pas un groupe maîtrisant plus ou moins son destin. En un sens, l’indépendance nous a condamnés non à la liberté, mais à une fatalité d’autant plus accablante, d’autant plus insidieuse qu’elle porte le vernis de la légitimité démocratique.

Sur notre échelle des valeurs, le savoir s’incline devant le déni, la connaissance de soi capitule devant la piété et l’arrogance négligentes, le détachement laisse place au péché véniel, la liberté d’esprit est remplacée par la conformité et, surtout, la compassion plie face au mépris. Si nous nous regardons dans le miroir de Gorakhpur pour déterminer qui nous sommes devenus, le reflet n’est pas beau à voir. Mais même si nous laissons le passé dans le passé et que nous nous tournons vers l’avenir, la réponse n’est pas plus réconfortante. Il est très probable qu’au cours des prochains mois, les préparatifs politiques et judiciaires liés à la construction d’un temple en l’honneur du dieu Rama s’intensifieront.

Il est improbable que ce soit un monument dédié à la karuna – la compassion. Ce sera plutôt un monument consacré à notre narcissisme collectif, à notre envie de batailler et de diviser. C’est un fol espoir, mais il serait réellement extraordinaire, après la tragédie de Gorakhpur, qu’un hôpital et non un temple soit construit à Ayodhya (une revendication des nationalistes hindous proches du Premier ministre, Narendra Modi). C’est un fol espoir que ce site parvienne à symboliser notre capacité à surmonter tout ce qui nous freine : la distraction, les divisions et la dissimulation qui entravent la dignité.

L’Inde a 70 ans. C’est une jeune nation. Mais chaque minute compte, car elle vieillit rapide ment. Peut-être sera-t-il bientôt “trop tard”. Martin Luther King a écrit : “Nous devons admettre que demain est aujourd’hui. Nous sommes confrontés à l’urgence implacable du présent. Face à l’énigme perpétuelle que sont la vie et l’histoire, on peut arriver ‘trop tard’ sur les os blanchis et les vestiges amoncelés de nombreuses civilisations, on trouve souvent ces mots pathétiques : ‘trop tard’. ” Après le drame de Gorakhpur, une question se pose : à 70 ans, est-il trop tard pour que l’Inde retrouve non pas une gloire artificielle, mais simplement son humanité ?

Pratap Bhanu Mehta

Source The Indian Express Bombay  15/08/2017<
traduction Courrier International 24 août 2017.

>Voir aussi : Actualité Internationale, Rubrique Asie, Inde, rubrique Société, Santé, Justice, rubrique Politique, Politique économique, On Line 34 enfants meurent en deux jours dans un hôpital,

 

Montpellier : « Une chambre en Inde » d’Ariane Mnouchkine ouvre le Printemps des Comédiens

Photo Marie Clauzade

Photo Marie Clauzade

Donné à la Cartoucherie, ce spectacle d’Ariane Mnouchkine n’est pas une création, mais à Montpellier, ce fil d’Ariane ouvre le Printemps des Comédiens comme système d’aide à la navigation dans une 31e édition où le théâtre interroge le monde par différents endroits.

Pour Une chambre en Inde, Mouchkine a emmené toute sa troupe du Soleil au Sud de l’Inde, à la découverte d’une tradition théâtrale tamoule populaire. Ce n’est pas pour autant une pièce sur l’Inde, plutôt une tentative d’éclairer les impasses du monde, et la façon dont elles sont vécues en France à la lumière indienne.

Cette lumière nous déshabille des jugements préfabriqués qui polluent notre regard en le rendant trouble et incertain. Cette lumière repose sur la confiance et le courage. Elle induit de l’optimisme sans emprunter les chemins de fuite du sécuritaire ou du prêt à consommer. Une chambre en Inde est une transposition loufoque de l’angoisse. On lutte contre le drame en érigeant une névrose… La névrose du bonheur, celle d’être là ensemble, prêt à mourir et à rire.

Jean-Marie Dinh

 Les 2,3,4,7,8,9 et 10 juin . Informations et réservations : www.printempsdescomédiens.com

Source : La Marseillaise

02/06/2017

Voir aussi : Rubrique Théâtre, rubrique Montpellier rubrique Festival,

« Une chambre en Inde » d’Ariane Mnouchkine et le Théâtre du soleil

Photo Marie Clauzade

Photo Marie Clauzade

Festival Printemps des Comédiens.

Donné à la Cartoucherie, ce spectacle d’Ariane Mnouchkine n’est pas une création, mais à Montpellier, ce fil d’Ariane ouvre le Printemps des Comédiens comme système d’aide à la navigation dans une 31e édition où le théâtre interroge le monde par différents endroits.
Pour Une chambre en Inde, Mouchkine a emmené toute sa troupe du Soleil au Sud de l’Inde, à la découverte d’une tradition théâtrale tamoule populaire. Ce n’est pas pour autant une pièce sur l’Inde, plutôt une tentative d’éclairer les impasses du monde, et la façon dont elles sont vécues en France à la lumière indienne. Cette lumière nous déshabille des jugements préfabriqués qui polluent notre regard en le rendant trouble et incertain. Cette lumière repose sur la confiance et le courage. Elle induit de l’optimisme sans emprunter les chemins de fuite du sécuritaire ou du prêt à consommer. Une chambre en Inde est une transposition loufoque de l’angoisse. On lutte contre le drame en érigeant une névrose… La névrose du bonheur, celle d’être là ensemble,  prêt à mourir et à rire.

Jean-Marie Dinh 

Les 2,3,4,7,8,9 et 10 juin . Informations et réservations : www.printempsdescomédiens.com

Source La Marseillaise 02/06/2017

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Inde: Bollywood et Bombay cèdent au chantage d’ultra-nationalistes

Dans les rues de Bombay, fin septembre 2016. Reuters

C’est l’un des films les plus attendus en Inde, le blockbuster de cette période de la Fête des lumières : Ce cœur est difficile doit sortir ce jeudi 27 octobre 2016 dans le pays. Mais un drame bien réel est en train de perturber sa sortie. L’un des acteurs du film est pakistanais, et alors que New Delhi et Islamabad sont sur le pied de guerre, un groupe ultra-nationalistes de Bombay a menacé de saccager les salles de cinéma qui le montreraient. Cette controverse a paralysé une partie de l’industrie du cinéma et a obligé le gouvernement de s’en mêler.

A la mi-septembre, a eu lieu la pire attaque des dernières années contre une base militaire indienne : elle a coûté la vie à 19 soldats. L’assaut a été organisé, selon New Delhi, par des terroristes pakistanais. Depuis, l’armée indienne a répliqué, les deux pays sont sur le pied de guerre et les nationalistes ont appelé au boycott de tout ce qui est pakistanais.

Un petit parti ultra-nationaliste, le MNS, qui détient 10 % des sièges au conseil municipal de Bombay, a ainsi menacé de saccager toute salle de cinéma qui montrerait Ce cœur est difficile, sous prétexte qu’il compte un acteur pakistanais. Une menace prise au sérieux car ce groupe a déjà réalisé de tels actes de vandalisme dans le passé.

Bollywood et le gouvernement régional ont donc cherché à l’apaiser. Ce parti a beau être marginal au niveau national, il jouit d’une grande capacité de nuisance à Bombay, et les producteurs de Bollywood ne peuvent donc pas l’affronter de peur qu’il paralyse leur activité dans le futur.

Les producteurs vont verser près de 680 000 euros aux vétérans de l’armée

Le réalisateur du film incriminé a donc dû jurer, dans une vidéo, face caméra, tel un otage demandant sa libération, qu’il n’emploierait plus d’acteurs ou de techniciens pakistanais. Et il a supplié pour qu’en échange, ce film à gros budget puisse être diffusé.

Le gouvernement régional, lui, au lieu d’essayer de protéger la libre diffusion de ce film, a réuni les producteurs et les chefs du parti nationaliste pour trouver un compromis. Le parti extrémiste vient d’abord d’obtenir la diffusion, avant chaque projection de ce film, d’un message en l’honneur des militaires tués lors de l’attaque de septembre, et surtout, que ses producteurs versent l’équivalent de 680 000 euros au fonds pour les vétérans de l’armée, en échange de quoi ses partisans ne saccageront pas les cinémas.

Le ministre de la Défense a fustigé cette démarche de donation forcée, que des vétérans ont même qualifié d’extorsion. Certains élus, eux, s’indignent que le gouvernement, préoccupé par les élections municipales de Bombay en février 2017, ait approuvé cet accord et tolère le harcèlement d’un acteur pakistanais qui n’a rien à voir avec ces attaques terroristes. Mais ce n’est pas la fin des problèmes pour ce film : dans un zèle de patriotisme, l’une des associations de propriétaires de cinémas a annoncé que ses membres refuseront de le distribuer.

Par Sébastien Farcis

Source RFI 27-10-2016

Voir aussi : Actualité Internationale, Rubrique Asie, Inde, Rassemblement d’Intouchables contre les violences et les discriminations, rubrique Politique, Politique Culturelle,