Camille Tolédo : « Le massacre d’Utoya révèle un état politique réactionnaire en Europe ». Photo dr
L’auteur Camille Tolédo évoque son drame contemporain « Sur une île » donné au Théâtre de la Vignette. Une pièce inspirée de la tragédie d’Utoya en Norvège où le raid d’Anders Bechring Breivik s’est soldé par la mort de 69 jeunes et une dizaine de blessés
Sur une île fait suite à votre texte « L’inquiétude d’être au monde » paru chez Verdier, comment s’est opéré ce passage au théâtre ?
J’avais écrit ce texte suite au carnage d’Utoya où ce gamin, qui s’est mis à tirer sur des enfants comme dans un jeu vidéo, m’est apparu comme le marqueur d’un cycle historique qui se réveille en Europe sous le fantasme de la pureté des origines, comme un besoin de revenir aux fondamentaux identitaires et religieux réducteurs. Cela révèle un état politique réactionnaire en Europe. Une vague très lourde, qui m’a inspiré un chant pour prendre à rebours et inverser ce cycle de mort. Le metteur en scène Chistophe Bergon avec le Théâtre Garonne de Toulouse et le TNT qui produisent la pièce, m’ont demandé d’écrire une adaptation.
Cette adaptation, que l’on vient de découvrir à Montpellier, nous donne une nouvelle perception de cet événement plus intime et prégnante que celle véhiculée par les médias. Est-ce à vos yeux le rôle politique et social du théâtre ?
J’aurais du mal à assigner une fonction au théâtre. Chacun s’en saisit à sa manière. Le théâtre dans sa forme classique, qui met des gens dans une assemblée, recoupe la fonction politique. Aujourd’hui on le voit avec ses formes stéréotypées de discours, l’arène politique est ruinée. J’observe dans l’art contemporain et dans la littérature une reprise de l’activité politique. L’expression artistique propose des scénarii. Pour cette pièce, je voulais aller sur ce terrain. Je souhaitais que l’assemblée réunie au théâtre se retrouve face à ces grands cortèges souverainistes extrémistes qui défilent massivement en Europe. Dans la pièce, on fait face à l’angle mort de l’histoire, face à une Europe putréfiée qui fait histoire.
Vous faites remonter la conscience d’un temps historique et générationnel, ce sont les premiers enfants du siècle qui sont morts à Utoya écrivez-vous. Pensez-vous que la perception de votre pièce par les jeunes diffère de celle de leurs aînés sans doute moins aptes à agir ?
Quelque chose chez moi fait appel à nos enfances. Après le virage néo-libéral, il est juste de dire que le discours dominant depuis une vingtaine d’année, s’est accommodé de ce monde sans perspective. La génération des trente glorieuses et celle qui lui succède n’ont pas les capteurs sensoriels aiguisés. Ils n’ont pas vu venir la violence et cette violence s’est installée. Là, on retombe sur deux enfances captées par le désir des petits soldats radicaux qui tuent pour exister, celle des Breivik et celle des islamiques et puis il y a la jeunesse d’Utoya, la jeunesse sociale démocrate. Celle qui se réveille le lendemain du Bataclan soudainement face au loup, à la verticalité de l’Histoire et à la mort.
Sur une ïle. Production Théâtre Garonne, TNT, programmé au Théâtre La Vignette
Vous pointez la soumission, l’obéissance à un monde révolu. Dans la pièce, Jonas le bon enfant de Norvège, finit par tuer Breivik devenu un décideur européen. Assumez-vous ce rapport à la violence ?
Je la mets très clairement dans la bouche de Jonas, mais son acte individuel doit questionner nos impuissances. La séquence ouverte par François Furet, qui a enterré la Révolution française dans les année 80, s’ouvre à nouveau aujourd’hui. Nous sommes dans un moment où nous devons prendre en charge la question du politique. Face à la résurgence du KKK sous sa forme trumpiste ou à l’ordre nihiliste de type islamiste, il est temps de sortir de la vision : la violence c’est mal. Je crois qu’une violence peut être plus légitime qu’une autre.
On sait qu’un ordre politique naît souvent du meurtre. Ce savoir tragique a été complètement oublié. Le pouvoir tyrannique qui règle la question de nos peurs fonde les dérives de la démocratie avec toujours plus de sécurité et d’Etat d’urgence. L’Etat reste en suspension mais la question demeure. Quel meurtre dois-je commettre pour fonder un autre monde ?
Une référence au roman « 1984 », utilisée, de manière involontaire, par une conseillère de Donald Trump, a dopé les ventes de l’ouvrage de George Orwell, au point de pousser l’éditeur à commander 100.000 livres supplémentaires mercredi.
Pour défendre le porte-parole de la Maison Blanche, Sean Spicer, qui avait assuré contre toute évidence que l’audience de l’investiture du nouveau président était la plus importante jamais vue, la conseillère Kellyanne Conway a qualifié dimanche ces éléments de « faits alternatifs ».
Il a été démontré que la foule présente vendredi pour la cérémonie à Washington était nettement moins nombreuse que celle venue saluer l’investiture de Barack Obama en 2009.
Plusieurs médias ont rapidement relevé que le terme utilisé par Kellyanne Conway était employé dans le roman « 1984 », qui décrit une société dans laquelle le gouvernement contrôle étroitement l’information.
L’auteur, le Britannique George Orwell, introduit la notion de « double pensée », qui amène le gouvernement à fabriquer sa version des faits et à l’imposer comme « vérité », qui cohabite avec le réel.
Durant les heures qui ont suivi la polémique, les ventes de « 1984 », initialement publié en 1949, se sont envolées. L’ouvrage était mercredi en tête des ventes du site américain de la plateforme de vente Amazon.
Selon un porte-parole de Signet, filiale de la maison d’édition Penuguin Random House, qui détient les droits du livre aux Etats-Unis, les ventes du roman ont été multipliées par près de cent depuis l’investiture de Donald Trump (+9.500%).
Après avoir lancé l’impression de 75.000 exemplaires supplémentaires du livre en début de semaine, Signet a passé mercredi une nouvelle commande de 100.000 unités de plusieurs livres de George Orwell, dont « 1984 », « pour répondre à la demande », a indiqué le porte-parole à l’AFP.
Depuis sa première publication, « 1984 » a été vendu à 30 millions d’exemplaires aux Etats-Unis, selon Signet.
Pour la psychologue Marilyn Wedge, qui a publié une tribune sur le site Psychology Today, il est possible d’opérer un rapprochement entre « 1984 » et les pratiques de la jeune administration Trump.
Donald Trump « essaye de nous faire croire ce que lui et ses conseillers déclarent plutôt que ce que nous disent nos propres yeux », estime-t-elle.
Ceux qui doutaient que Donald Trump allait « discipliner » sa communication en entrant au Bureau ovale sont en passe de gagner leur pari. L’investiture à peine terminée, le nouveau président américain et son équipe ont passé le week-end à dessiner une ère des « faits alternatifs », autrement dit des éléments tangibles passés au prisme du milliardaire, une habitude prise pendant la campagne qui pourrait bien s’installer durablement à la Maison Blanche.
C’est Donald Trump lui-même qui a ouvert le bal samedi. A l’occasion d’une visite au siège de la CIA, il a commencé par dire tout le mal qu’il pensait des médias qui avaient selon lui minimisé le nombre de badauds venus assister la veille à son investiture. Dénonçant un « mensonge », il a alors estimé que les journalistes faisaient partie « des êtres humains les plus malhonnêtes de la terre ».
« Les « faits alternatifs » ne sont pas des faits. Ce sont des mensonges »
Le soir même, le nouveau porte-parole de la Maison Blanche, Sean Spicer, a remis le couvert, s’en prenant avec force aux journalistes et lâchant lors de sa toute première conférence de presse : « Ce fut la plus grande foule jamais vue lors d’une investiture, point barre ». Soignant son passage de l’ombre à la lumière, Sean Spicer a immédiatement hérité d’un hashtag moqueur à son nom sur Twitter : #SpicerFacts (« Les faits de Spicer »).
Mais le coup de grâce, si l’on peut dire, a été asséné dimanche par Kellyanne Conway, la conseillère du président, lors d’un échange ubuesque (disponible dans son intégralité ici) avec un journaliste de NBC News. « Pourquoi, lui demandait Chuck Todd, le président a-t-il envoyé son porte-parole, qui n’est pas seulement celui de Donald Trump mais aussi celui de tout le pays, pourquoi l’a-t-il envoyé pour la toute première fois devant les journalistes pour proférer un mensonge ? La première fois qu’il est face au public, il ment ? »
ETATS-UNIS L’expression a été employée par Kellyanne Conway, la conseillère du nouveau président, pour désigner les « vérités » du milliardaire…
« Ne soyez pas si dramatique, Chuck, lui a répondu Kellyanne Conway. Vous parlez de mensonge […] Sean Spicer, notre porte-parole, a donné des faits alternatifs. » Estomaqué, le journaliste l’interrompt : « Attendez un instant. Des faits alternatifs ? […] Quatre des cinq choses qu’il a dites étaient fausses. Les « faits alternatifs » ne sont pas des faits. Ce sont des mensonges ».
Source 20 Minutes 23.01.2017
Les alarmants “faits alternatifs” du président Trump
Le nouveau président et son entourage ont soutenu des contre-vérités manifestes sur le nombre de personnes ayant assisté à son investiture le vendredi 20 janvier. Une proche conseillère a expliqué qu’il s’agissait de “faits alternatifs”. Des déclarations alarmantes, estiment plusieurs journaux américains.
Des “faits alternatifs”. C’est le nouveau concept invoqué à la télévision par une proche conseillère de Donald Trump, Kellyanne Conway, pour caractériser les affirmations fantaisistes du nouveau porte-parole de la Maison-Blanche, Sean Spicer, lors de son tout premier point de presse, le samedi 21 janvier. L’idée n’a pas rencontré le succès escompté : “Les faits alternatifs ne sont pas des faits ; ce sont des contre-vérités”, lui a répondu le présentateur de l’émission, Chuck Todd.
Sean Spicer a plutôt “menti de façon éhontée”, préfère dire une chroniqueuse du Washington Post. Le porte-parole avait soutenu que la foule présente à Washington le vendredi 20 janvier pour l’investiture de Donald Trump était “la plus large audience à avoir jamais assisté à une investiture – point final”. Les photos montrent pourtant que le rassemblement était de moindre ampleur que pour la première investiture de Barack Obama, le 20 janvier 2009.
Le président lui-même a avancé des chiffres évidemment faux (de 1 à 1,5 million de personnes) lors d’une visite à la CIA le samedi 21 janvier, tout en accusant les chaînes de télévision d’avoir menti sur le nombre de personnes présentes (qui a été estimé à 250 000) et d’avoir montré “un terrain vide” dans leurs photos du Mall, l’esplanade centrale de Washington, où la foule était rassemblée. Trump a carrément lancé :
« Je suis engagé dans une guerre contre les médias. Ce sont les êtres humains les plus malhonnêtes sur Terre, pas vrai ? » Une stratégie dangereuse
En somme, constate The Boston Globe dans un éditorial, le nouveau gouvernement a cherché à “construire une réalité alternative” sur cet événement – ce que le journal juge “alarmant”. Bien sûr, rappelle le quotidien, cette réponse de l’équipe Trump s’inscrit dans la droite ligne de la campagne, où de nombreuses informations bidon et contre-vérités manifestes ont circulé, souvent lancées ou relayées par les partisans de Trump, voire par son entourage ou par le candidat lui-même. Dans “l’univers alternatif” où vivent de nombreux supporters de Trump, estime le quotidien, toute information embarrassante pour le milliardaire est une fiction fabriquée de toutes pièces par des médias biaisés.
La presse américaine est néanmoins choquée de voir le nouveau président, son équipe et le porte-parole de la Maison-Blanche reprendre la même stratégie, aussi ouvertement et avec une telle agressivité. Dans des domaines aussi sensibles que le renseignement ou la politique étrangère, les “faits alternatifs” pourraient mettre des vies en danger, estiment de hauts responsables interrogés par Politico. Le chef d’État américain n’est pas vraiment en guerre contre les médias, estime toutefois un journaliste du site Vox. “Sa vraie guerre est contre les faits”, rien de moins.
Prise de conscience
Pour la chroniqueuse du Washington Post précédemment citée, les premières déclarations du porte-parole de la Maison-Blanche doivent conduire les médias à une prise de conscience. Les journalistes ne doivent plus se fonder sur la parole officielle émanant de ces points de presse. Comme l’a dit une journaliste de ProPublica, citée par le Post : “Les journalistes n’auront pas de réponse de Sean Spicer. Nous aurons des réponses en fouillant. En mettant les mains dans le cambouis. Alors allons-y tous.
Critique de cinéma, journaliste et commissaire de l’exposition Jarmusch, à découvrir à la Galerie de Bruxelles jusqu’au 12 février, Philippe Azoury signe un petit essai qui suit et épouse le cours d’une grande œuvre.
La singuliarité des films de Jim Jarmusch n’a d’égal que celle des francs-tireurs indépendants du septième art, tels David Lynch, John Cassavetes, de ce côté de l’Atlantique, on songe à Godard, Fassbinder, ou Wenders, c’est-à-dire des cinéastes qui ont inventé leur propre langue cinématographique et développé un style propre qui personnalise le cinéma, en se tenant souvent à distance de la cavalerie. Ceux qu’on ne supporte pas ou qui nous font succomber.
Le sens de la narration
Dans le bel hommage que lui rend Philippe Azoury avec son livre, Jim Jarmusch une autre allure (éditions Capricci), le journaliste critique, évoque les premières grandes leçons que retiendra Jim qui vit sa jeunesse les pieds dans le rock, la tête dans la poésie. » Jim Jarmusch a appris à faire du cinéma dans la rue, Nicholas Ray lui a instruit les rudiments de la bagarre. William S. Burroughs – qu’il allait visiter dans son bunker avec Howard Brookner, son meilleur ami à la fac – lui a montré comment charger une arme dans le respect, au sens politique et poétique du terme. Le punk et la no wave ont fait le reste ».
Jim Jarmusch est né à Akron dans l’Ohio en 1953. Il débute sa carrière au cinéma à 26 ans avec Permanent Vacation. Les première images de son premier film sont des ralentis rappelle Philippe Azoury dont le livre se découpe film par film dans un montage maillé de traces émotives et de réflexions. « Dans Wall Sreet, une armée de zombies avance d’un pas cotonneux et amniotique. Ils vont sans désir et par grappes en direction d’un travail, où invariablement on les exploite. » Les dés ont été jetés le réalisateur va tracer son sillon. On pense à Peterson actuellement sur les écrans où le quotidien répétitif du personnage principal, un chauffeur de bus poète, se révèle passionnant par la qualité de la lenteur du temps qui passe. Les images de Jirmusch font toucher l’éternité à la portée de notre main. La composition allie une retenue émotionnel et une ouverture totale à l’expérience qui nous attend au coin de la rue. La poésie y trouve toujours une place de William Blake à William Carlos Williams en passant par Emily Dickinson.
Modernité dans les décombres
Philippe Azoury signe un livre sensible et juste dans lequel les amateurs des films de Jarmusch se retrouvent. Sa filmographie compte une quinzaine d’oeuvres, qui ont toutes connu une carrière internationale. Parmi lesquelles on peut citer, Down by Law (1986), Dead Man (1995), Gosth Dog (1999), Broken FLowers (2005), Only Lovers Left Alive (2013), Paterson (2016). Le cinéaste aime l’élégance Mitelleuropa comme il aime les néons des zones urbaines asiatiques et le monde en général. Un monde toujours ouvert avec lequel il prend des distances pour mieux le réinterpréter. « New-York, ça n’existe pas, Eva. Cela tu dois le savoir. Ce que tu prends pour New York, c’est juste le son d’un moteur d’avion posé sur le terrain vague au milieu de nulle part. » On peut se demander pourquoi ce film, Stranger than Paradise, où les personnages apparaissent comme des atomes perdus dans le vide, a fait un carton ?
Cet étrange ralliement des spectateurs autour de l’oeuvre de Jim Jirmusch tient sans doute au fait que son cinéma s’adresse au sens. Si bien que quand Philippe Azoury évoque ce sentiment d’appropriation de l’univers Jarmuschien, au point de pénétrer dans les rues que le réalisateur dessine avec sa caméra pour s’y établir un espace de survie, on saisit parfaitement de quoi il parle. « J’adore habiter chez Jarmusch quand j’en ai marre d’ici – et je sais trop combien j’en ai marre d’ici. »
2016 fut une année de rebondissements dans le domaine des politiques culturelles impactées par la réforme territoriale.Cette rétrospective se concentre sur l’énergie artistique qui demeure et doit plus que jamais être défendue.
La boite à joujoux. Photo Marc Ginot
Janvier. Fondé sur les écritures contemporaines le festival Marseillais Actoral fait escale à Montpellier à l’invitation de Rodrigo García. Dirigé par Hubert Colas, le festival propose des rencontres inédites et surprenantes entre des auteurs, on retient notamment la performance du jeune chorégraphe croate, Matija Ferlin, celle de Anne-James Chaton à la Panacée et la rayonnante présence de Lydie Salvayre. A l’Opéra Comédie, l’ONM et Montpellier Danse s’associent autour de l’univers onirique de Debussy. Le chorégraphe Hamid El Kalmouse livre une version inédite de La boite à Joujoux. Invité par la librairie Sauramps, l’auteur américain des Appalaches Ron Rash évoque son oeuvre de roc à Montpellier.
Février. Le Sonambule innove à Gignac avec un BD concert initié par le groupe rock Skeleton Band. Au théâtre La Vignette à Montpellier la compagnie Moébus, s’attaque à la figure du bouc émissaire avecPharmakos. Dans La brebis galeusede Celestini donnée à Béziers et mis en scène par Dag Jeanneret à sortieOuest, Nicola superbement interprété par Christian Mazzuchini rêve de supermarchés merveilleux, de films intergalactiques, de chansons à la guimauve et de femmes dociles. La réalisatrice actrice et chanteuse, Agnès Jaoui interprète son dernier album Nostalgias au Théâtre de Sète.
3e volet de La France vue d’ici pour la 8e édition du festival sétois . Photo Patrice Terraz
Mars. La documentaliste néerlandaise Heddy Honigmann, le polonais Jerzy Skolimowski, l’algérien Farid Bentoumi, l’écrivain et réalisateur français Pascal Bonitzer, comptent parmi les invités du Festival de cinéma Itinérances d’Alès qui place le cirque et la musique au coeur de sa 34e édition. Quatre photographes chiliens tirent le portrait de Sète dans le cadre de la 8e édition du festival ImageSingulières. L’équipe célèbre les 30 ans de l’Agence VU à travers un coup de projecteurs sur sept grands photographes espagnols. L’Espagnol Alberto Garcia-Alix et le Suédois Anders Petersen confrontent leur regard. Au Corum, la mise en scène de l’Opéra Bouffe Geneviève de Brabant par Carlos Wagner reconduit sans mignardise l’immédiateté sensible d’Offenbach vers de nouvelles potentialités.
Marlène Monteiros Freitas « Jaguar »
Avril. Invité par Montpellier Danse, la chorégraphe Marlène Monteiros Freitas pose ses valises pour une semaine à Montpellier. Ses figures du grotesque et son esprit subversif et sensible transpercent les murs. Elle présente Jaguar, à La Vignette et Paradis au CDN hTh. Le plasticien brésilien Mauricio Oliveira fait étape à l’hôpital de Lodève où ses travaux sont exposés. Invitée par la librairie L’Échappée belle, Patti Smith débarque à Sète pour une lecture de son dernier opus M Train qui dessine la carte de son existence. A Pézenas, la 17e édition du festival de chanson le Printival met à l’honneur la chanson francophone dans toute sa diversité.
L’ Orchestre arabo-andalou de Fès
Mai. Le 11e festival Arabesques met en lumière la richesse des cultures arabes. Il débute avec la présence exceptionnelle de l’Orchestre arabo-andalou de Fès à l’Opéra Comédie. L’hypnotisante outiste syrienne Waed Bouhassoun, offre un superbe récital. Au Théâtre Jean-Claude-Carrière, elle chante des poèmes d’Adonis, Mansur al-Hajjal, d’al-Mulawwah, et d’Ibn Arabi sur ses propres compositions. Le thème des Vanités revu et corrigé par huit artistes contemporains donne lieu à une expo au musée d’Arts et d’archéologie aux Matelles. La Comédie du Livre de Montpellier convoque les meilleures plumes de l’Italie pour une édition ardente. A Sérignan, le Mrac pousse les murs avec la complicité de l’artiste contemporain, Bruno Peinado.
Juin. Le Musée Fabre de Montpellier est à l’initiative d’une rétrospective internationale consacrée à l’une des figures majeures du pré-impressionnisme. L’exposition Frédéric Bazille, la jeunesse de l’impressionnisme, est organisée avec le musée d’Orsay à Paris et la National Gallery of Art de Washington. Elle présente les travaux de ses contemporains (Delacroix, Courbet, Corot, Manet, Monet, Renoir, Sisley…). François Guérif est l’invité d’honneur du Firn à Frontignan à l’occasion des 30 ans de la collection Rivages/Noir. Autour du thème Mort de rire, cette 19e édition reçoit la participation exceptionnelle de quatre auteurs américains venant pour la première fois en France : Christa Faust, Daniel Friedman J. David Osborne et P.G. Sturges.
« Le Sacre du Printemps », une chorégraphie de Pina Bausch, interprétée par le Tanztheater Wuppertal Pina Bausch dans les Arènes de Nîmes.
Aux Arènes de Nîmes, la chorégraphe Pina Bausch s’offre un triomphe posthume avec la reprise de Café Müller et du Sacre du printemps accompagnés par un orchestre de 100 musiciens. The Encounter, première française de l’auteur britannique Simon Mc Burney embarque le public du Printemps des Comédiens au fin fond de la forêt amazonienne pour y vivre une expérience onirique qui frappe à la porte du réel. Proposé par hTh, Nowhere, la performance en solo du chef Marino Formenti, ouvre un espace musical urbain de sept jours où le temps s’abolit.
Albert Ibokwe Khoza dans une chorégraphe performance de Robyn Orlin
Juillet. Avec Du désir d’horizons présentée au Festival Montpellier Danse, Salia Sanou approche l’indicible et l’absurde condition de vie d’un camp de réfugiés. La rencontre inévitable entre le performer Albert Ibokwe Khoza et la chorégraphe sud africaine Robyn Orlin nous transporte dans la radicalité de l’histoire. La 26e édition du Festival de Thau qui mixe cultures musicales de la planète et conscience écologique affirme sa singularité. La programmation s’affiche avec une forte présence africaine doublée d’une thématique sur les femmes engagées à l’image des Amazones d’Afrique. Cent poètes traversent les rives tels des prophètes de la paix, pour investir la ville de Sète à l’occasion du Festival Voix Vives en Méditerranée. Le Festival de Radio France défie la peur sur le thème Voyage en Orient, à l’instar de la soirée d’ouverture Mille et quelques nuits réunissant Lambert Wilson, Karine Deshayes, Michael Schønwandt et l’Orchestre national de Montpellier autour des secrets de Shéhérazade.
Ballake Sissoko & Vincent Ségal
Août. Fiest’A Sète poursuit le défrichage des musiques du monde associant fraîcheur et pertinence musicale inédites comme la rencontre entre le Libanais Bachar Mar-Khalife et la sublime Natacha Atlas où celle entre Ballake Sissoko & Vincent Ségal.
Patrick Boucheron aux Chapiteaux du livre
Septembre. A sortieOuest, la rentrée culturelle se fête en lecture avec Les Chapiteaux du Livre. Les auteurs invités à Béziers s’emparent de l’histoire contemporaine pour la mettre en débat, s’y retrouvent notamment Patrick Boucheron, Chloé Delaume, Jean-Hugues Oppel.
Au Cinemed Jo sol Antigone D’or 2016
Octobre. Avec une vingtaine de films projetés, le Cinemed consacre cette année une large place à l’émergence cinématographique tunisienne. Présidé par Laetitia Casta, le jury de la 38ème édition du Cinemed attribue le prix de l’Antigone d’or à Vivre et autres fictions de Jo Sol.
Hearing de Koohestani au Théâtre La Vignette
Novembre. Le pôle culturel de l’université Paul-Valéry et le Théâtre La Vignette reçoivent le dramaturge iranien Amir Reza Koohestani pour deux jours. Le Rockstore fête ses 30 ans. A cette occasion la salle de concert mythique de Montpellier concocte une programmation béton et éclectique sur un mois complet.
Dave Clarke I love Techno
Décembre. Laurent Garnier, Dave Clarke, Ben Klock, Marcel Dettman… Les plus grands noms de la techno se retrouvent au Parc Expo de Montpellier pour I Love Techno Europe. Le cinéaste Costa-Gavras évoque la première partie de sa carrière à Montpellier à la Médiathèque Fellini.
Le Ring-Théâtre laisse libre court à son imagination Crédit Photo dr
Le Ring-Théâtre présente Edward II du sulfureux auteur élisabéthain Christopher Marlowe dans une version débridée à souhait au Chai du Terral de St-Jean-de-Védas
La tragédie élisabéthaine ne se résume pas au seul Shakespeare. Il faut notamment compter avec le mystérieux Christopher Marlowe (1564-1593) dont la compagnie Ring-Théâtre a la bonne idée de nous rappeler l’existence avec une adaptation d’Edward II qui sort des carcans sclérosant. En cela, l’équipe de douze comédiens applique les principes même du théâtre élisabéthain dont la théorie comme la pratique mettent en évidence une certaine liberté de composition.
Concernant la règle de bienséance, il ne faut pas trop en attendre de Christopher Marlowe. Ce tumultueux dramaturge figure comme l’un des précurseurs de la tragédie moderne, pour le créateur du vers blanc (non rimés) et pour un père fondateur du drame élisabéthain. On le soupçonne d’avoir été un espion d’Élisabeth Ière et surtout de professer l’athéisme, ce qui lui valu quelques démêlées judiciaires. Il connaît une fin précoce à 25 ans, suite à une rixe ou un assassinat, on le retrouve avec un couteau dans l’œil. C’est dire si Marlowe reste un auteur stimulant pour les artistes contemporains en peine de transcrire la violence du monde ordinaire dans lequel ils baignent.
Pour revenir au sujet du drame, Edward II (1592) met en scène le meurtre par empalement du roi éponyme. Le Ring-Théâtre se saisit du drame, de la guerre, des combats, et des crimes de sang pour laisser libre court à son imagination qui ne se satisfait d’aucune limite. La tragédie du malheureux Edward II, trop raffiné pour les brutalités de son temps prend parfois une tournure inattendue et cette grande fresque, passe du tragique à la joyeuseté.