La poésie, chemin de paix à Sète au coeur de l’été méditerranéen. Photo dr
Festival Voix Vives, le grand rendez-vous de la poésie méditerranéenne contemporaine fête sa 20e édition du 21 au 29 juillet
Depuis 8 ans la Ville de Sète ouvre la cité à la poésie de l’aube à la nuit. Ce banquet poétique de neuf jours débute ce soir*. Il fédère poètes, musiciens, comédiens et habitants, et séduit un public averti ou amateur, autour d’une expérience unique.
Vivre librement (l’accès est gratuit) au rythme de la poésie et aux contacts des poètes en dehors des temples de la culture ouvre un accès indéniable à cet art réputé (à tord) difficile.
« C’est sous un ciel de combat que s’ouvre cette édition, pour que la poésie existe, indique la directrice du festival Maïthé Vallès-Bled, un ciel qui accueille à Sète une centaine de poètes en provenance de toute les méditerranées. Beaucoup des pays représentés sont en guerre. Cette présence forte des poètes permet d’ouvrir un espace à l’identité de l’autre. Cela se produit entre les poètes mais aussi au-delà, car cette force souterraine qui nous meut vers la compréhension de l’autre, nous permet de mieux nous comprendre nous-même. C’est un chemin de paix qui s’ouvre.»
Voix Vives offre aussi aux éditeurs et professionnels du secteur les conditions d’un échange fécond sur la place aux livres au coeur du festival. Ces rencontres entre poètes et éditeurs aboutissent chaque année à de nombreuses traductions et recueils qui n’auraient pas vu jour sans le festival.
Impossible ici de rendre compte des 80 rendez-vous quotidien qui cadencent ce flux poétique sous la lumière tranquille de la méditerranée. Le plus indiqué est encore de se rendre à Sète, et de se laisser porter par l’excédent d’énergie qui embrase la ville sans négliger de vivre les instants qui s’offrent.
JMDH
* A 21h30 dans le jardin du Château d’eau avec le spectacle Poésicales 2017, entrée libre.
2016 fut une année de rebondissements dans le domaine des politiques culturelles impactées par la réforme territoriale.Cette rétrospective se concentre sur l’énergie artistique qui demeure et doit plus que jamais être défendue.
La boite à joujoux. Photo Marc Ginot
Janvier. Fondé sur les écritures contemporaines le festival Marseillais Actoral fait escale à Montpellier à l’invitation de Rodrigo García. Dirigé par Hubert Colas, le festival propose des rencontres inédites et surprenantes entre des auteurs, on retient notamment la performance du jeune chorégraphe croate, Matija Ferlin, celle de Anne-James Chaton à la Panacée et la rayonnante présence de Lydie Salvayre. A l’Opéra Comédie, l’ONM et Montpellier Danse s’associent autour de l’univers onirique de Debussy. Le chorégraphe Hamid El Kalmouse livre une version inédite de La boite à Joujoux. Invité par la librairie Sauramps, l’auteur américain des Appalaches Ron Rash évoque son oeuvre de roc à Montpellier.
Février. Le Sonambule innove à Gignac avec un BD concert initié par le groupe rock Skeleton Band. Au théâtre La Vignette à Montpellier la compagnie Moébus, s’attaque à la figure du bouc émissaire avecPharmakos. Dans La brebis galeusede Celestini donnée à Béziers et mis en scène par Dag Jeanneret à sortieOuest, Nicola superbement interprété par Christian Mazzuchini rêve de supermarchés merveilleux, de films intergalactiques, de chansons à la guimauve et de femmes dociles. La réalisatrice actrice et chanteuse, Agnès Jaoui interprète son dernier album Nostalgias au Théâtre de Sète.
3e volet de La France vue d’ici pour la 8e édition du festival sétois . Photo Patrice Terraz
Mars. La documentaliste néerlandaise Heddy Honigmann, le polonais Jerzy Skolimowski, l’algérien Farid Bentoumi, l’écrivain et réalisateur français Pascal Bonitzer, comptent parmi les invités du Festival de cinéma Itinérances d’Alès qui place le cirque et la musique au coeur de sa 34e édition. Quatre photographes chiliens tirent le portrait de Sète dans le cadre de la 8e édition du festival ImageSingulières. L’équipe célèbre les 30 ans de l’Agence VU à travers un coup de projecteurs sur sept grands photographes espagnols. L’Espagnol Alberto Garcia-Alix et le Suédois Anders Petersen confrontent leur regard. Au Corum, la mise en scène de l’Opéra Bouffe Geneviève de Brabant par Carlos Wagner reconduit sans mignardise l’immédiateté sensible d’Offenbach vers de nouvelles potentialités.
Marlène Monteiros Freitas « Jaguar »
Avril. Invité par Montpellier Danse, la chorégraphe Marlène Monteiros Freitas pose ses valises pour une semaine à Montpellier. Ses figures du grotesque et son esprit subversif et sensible transpercent les murs. Elle présente Jaguar, à La Vignette et Paradis au CDN hTh. Le plasticien brésilien Mauricio Oliveira fait étape à l’hôpital de Lodève où ses travaux sont exposés. Invitée par la librairie L’Échappée belle, Patti Smith débarque à Sète pour une lecture de son dernier opus M Train qui dessine la carte de son existence. A Pézenas, la 17e édition du festival de chanson le Printival met à l’honneur la chanson francophone dans toute sa diversité.
L’ Orchestre arabo-andalou de Fès
Mai. Le 11e festival Arabesques met en lumière la richesse des cultures arabes. Il débute avec la présence exceptionnelle de l’Orchestre arabo-andalou de Fès à l’Opéra Comédie. L’hypnotisante outiste syrienne Waed Bouhassoun, offre un superbe récital. Au Théâtre Jean-Claude-Carrière, elle chante des poèmes d’Adonis, Mansur al-Hajjal, d’al-Mulawwah, et d’Ibn Arabi sur ses propres compositions. Le thème des Vanités revu et corrigé par huit artistes contemporains donne lieu à une expo au musée d’Arts et d’archéologie aux Matelles. La Comédie du Livre de Montpellier convoque les meilleures plumes de l’Italie pour une édition ardente. A Sérignan, le Mrac pousse les murs avec la complicité de l’artiste contemporain, Bruno Peinado.
Juin. Le Musée Fabre de Montpellier est à l’initiative d’une rétrospective internationale consacrée à l’une des figures majeures du pré-impressionnisme. L’exposition Frédéric Bazille, la jeunesse de l’impressionnisme, est organisée avec le musée d’Orsay à Paris et la National Gallery of Art de Washington. Elle présente les travaux de ses contemporains (Delacroix, Courbet, Corot, Manet, Monet, Renoir, Sisley…). François Guérif est l’invité d’honneur du Firn à Frontignan à l’occasion des 30 ans de la collection Rivages/Noir. Autour du thème Mort de rire, cette 19e édition reçoit la participation exceptionnelle de quatre auteurs américains venant pour la première fois en France : Christa Faust, Daniel Friedman J. David Osborne et P.G. Sturges.
« Le Sacre du Printemps », une chorégraphie de Pina Bausch, interprétée par le Tanztheater Wuppertal Pina Bausch dans les Arènes de Nîmes.
Aux Arènes de Nîmes, la chorégraphe Pina Bausch s’offre un triomphe posthume avec la reprise de Café Müller et du Sacre du printemps accompagnés par un orchestre de 100 musiciens. The Encounter, première française de l’auteur britannique Simon Mc Burney embarque le public du Printemps des Comédiens au fin fond de la forêt amazonienne pour y vivre une expérience onirique qui frappe à la porte du réel. Proposé par hTh, Nowhere, la performance en solo du chef Marino Formenti, ouvre un espace musical urbain de sept jours où le temps s’abolit.
Albert Ibokwe Khoza dans une chorégraphe performance de Robyn Orlin
Juillet. Avec Du désir d’horizons présentée au Festival Montpellier Danse, Salia Sanou approche l’indicible et l’absurde condition de vie d’un camp de réfugiés. La rencontre inévitable entre le performer Albert Ibokwe Khoza et la chorégraphe sud africaine Robyn Orlin nous transporte dans la radicalité de l’histoire. La 26e édition du Festival de Thau qui mixe cultures musicales de la planète et conscience écologique affirme sa singularité. La programmation s’affiche avec une forte présence africaine doublée d’une thématique sur les femmes engagées à l’image des Amazones d’Afrique. Cent poètes traversent les rives tels des prophètes de la paix, pour investir la ville de Sète à l’occasion du Festival Voix Vives en Méditerranée. Le Festival de Radio France défie la peur sur le thème Voyage en Orient, à l’instar de la soirée d’ouverture Mille et quelques nuits réunissant Lambert Wilson, Karine Deshayes, Michael Schønwandt et l’Orchestre national de Montpellier autour des secrets de Shéhérazade.
Ballake Sissoko & Vincent Ségal
Août. Fiest’A Sète poursuit le défrichage des musiques du monde associant fraîcheur et pertinence musicale inédites comme la rencontre entre le Libanais Bachar Mar-Khalife et la sublime Natacha Atlas où celle entre Ballake Sissoko & Vincent Ségal.
Patrick Boucheron aux Chapiteaux du livre
Septembre. A sortieOuest, la rentrée culturelle se fête en lecture avec Les Chapiteaux du Livre. Les auteurs invités à Béziers s’emparent de l’histoire contemporaine pour la mettre en débat, s’y retrouvent notamment Patrick Boucheron, Chloé Delaume, Jean-Hugues Oppel.
Au Cinemed Jo sol Antigone D’or 2016
Octobre. Avec une vingtaine de films projetés, le Cinemed consacre cette année une large place à l’émergence cinématographique tunisienne. Présidé par Laetitia Casta, le jury de la 38ème édition du Cinemed attribue le prix de l’Antigone d’or à Vivre et autres fictions de Jo Sol.
Hearing de Koohestani au Théâtre La Vignette
Novembre. Le pôle culturel de l’université Paul-Valéry et le Théâtre La Vignette reçoivent le dramaturge iranien Amir Reza Koohestani pour deux jours. Le Rockstore fête ses 30 ans. A cette occasion la salle de concert mythique de Montpellier concocte une programmation béton et éclectique sur un mois complet.
Dave Clarke I love Techno
Décembre. Laurent Garnier, Dave Clarke, Ben Klock, Marcel Dettman… Les plus grands noms de la techno se retrouvent au Parc Expo de Montpellier pour I Love Techno Europe. Le cinéaste Costa-Gavras évoque la première partie de sa carrière à Montpellier à la Médiathèque Fellini.
Claudio Magris «La vérité fait une concurrence déloyale à la littérature». Photo dr
Ecrivain chercheur et voyageur né à Trieste Claudio Magris fait partie du patrimoine, bien vivant, de la littérature mondiale
A l’invitation de la Comédie du livre Claudio Magris est revenu vendredi sur son rapport à la littérature dans le cadre d’un grand entretien. La question des racines triestines de l’auteur né aux frontières orientales de l’Italie, habite son oeuvre. «Les problèmes d’identité liés à l’histoire incroyable de cette ville nous poussent à une continuelle mise-en scène. Quand on ne sait pas qui l’on est, la littérature s’impose comme le seul royaume possible...»
A 18 ans Claudio Magris quitte Trieste pour étudier à Turin l’autre ville qui marque son parcours «Turin est le contraire de Trieste, pour la liberté de pensée. La ville est à l’origine du communisme italien, la capitale de 68, des Brigades Rouges et de la réaction contre les Brigades rouges. Turin a aussi accueilli massivement les immigrants venus du Sud de l’Italie. Je suis poursuivi par une bigamie entre Trieste pour la liberté gitane, et Turin ville de fièvre et de connaissance. Sans Trieste je ne serais pas devenu un écrivain. Sans Turin , je n’aurais pas pu écrire.»
Pour Magris le processus d’écriture ne peut se prédéfinir, il participe d’une démarche. Comme un voyage qui suit le fleuve en se détournant parfois de son lit. « C’est comme une aventure. Je suis entré dans un bois où j’avais des racines sans savoir ce que j’allais écrire et puis des sentiers se sont ouverts», rapporte-il à propos de son grand roman Danube.
Claudios Magris exerce de longue date une activité de journaliste pour le Corriere della Serra qu’il envisage comme une tentative de se confronter à la réalité. « Cela exige précision d’un côté et imagination de l’autre. La vérité fait une concurrence déloyale à la littérature. Je suis fasciné par la vérité. Dans mes romans je considère que chaque personne à le même droit à la philologie. J’ai le sentiment d’écrire à partir d’une mosaïque composé de morceaux de réalité avec lesquels je crée de la fiction.»
JMDH
Les éditions Liana Levi : L’Italie au coeur
Liana Levi
Liana Levi est une éditrice d’exception, discrète et exigeante. livre après livre, elle a offert aux lecteurs français un des plus beau catalogue de littérature contemporaine, française comme étrangère. L’itale au coeur, elle a révélé en France des auteurs transalpins importants. Autour d’elle, la célèbre romancière sarde Milena Agus, Giorgio Scianna, très beau romancier récemment traduit en France, et l’agent littéraire Marco Vigevani, fils d’Alberto Vigevani, auteur de Un été au bord du lac. Une rencontre débat se tient à 11h30 avec Liana Levi et les écrivains Milena Agus et Giorgio Scianna et l’agent littéraire Matco Vigevani. A 11h30 Espace Rencontre Comédie.
Auteur : Milena Agus
Milena Agus
Milena Agus enthousiasme le public français en 2007 avec Mal de pierres. Le succès se propage en Italie et lui confère la notoriété dans les 26 pays où elle est aujourd’hui traduite. Après Battement d’ailes, Mon voisin, Quand le requin dort, La Comtesse de Ricotta et Prends garde (janvier 2015, Piccolo 2016), Milena Agus poursuit sa route d’écrivain, singulière et libre. Mal de pierres, adapté au cinéma par Nicole Garcia avec Marion Cotillard, sortira en salle le 19 octobre 2016.
Milena Agus vient de collaborer avec l’historienne Luciana Castellina, figure de la gauche italienne à une expérience éclairante dans le livre Prends gardes. L’ ouvrage offre deux approches, l’une fictionnelle, l’autre historique d’un même fait divers.Chacune à sa manière raconte les tragiques événements des Pouilles. En 1946, dans les Pouilles, des ouvriers agricoles se révoltent contre l’iniquité des propriétaires fonciers. Les soeurs Porro, quatre femmes aisées, à la vie monotone, sont agressées dans leur palais par la foule de paysans en colère. Deux d’entre elles, Luisa et Carolina, périssent lynchées.
Prends gardes Liana Levi 2016.
Goncourt 2015. Grand entretien avec Mathias Enard
Mathias Enard avait usé de sa carte blanche en offrant une superbe programmation en 2013. Il est de retour à la Comédie du livre cette année après avoir remporté le prix Goncourt 2015 pour son roman Boussole, une exploration sensible et érudite des liens qui rapprochent depuis des siècles Orient et Occident en une fascination réciproque. Boussole est le dixième livre de Mathias Enard, né à Niort en 1972, diplômé de persan et d’arabe, qui a beaucoup voyagé au Liban, en Syrie et en Turquie, notamment, et dont toute l’œuvre porte la trace de sa passion pour cette partie du monde. Entré en littérature en 2003 avec La Perfection du tir (Actes Sud), où l’on se tenait au plus près d’un sniper, dans un pays ressemblant furieusement au Liban, il s’est imposé comme l’un des grands auteurs de sa génération grâce à son quatrième roman, Zone (Actes Sud, 2008), tour de force sans point, embrassant l’histoire du XXe siècle sur le bassin méditerranéen, récompensé par le prix Décembre et le prix du livre Inter.
A l’occasion de cet entretien animé par Thierry Guichard, du Matricule des Anges, le romancier reviendra sur l’ensemble de son oeuvre. A 15h30 Salle Molière.
Roman
Rome. Walter Siti La Contagion Walter Siti. Voyage dans les zones sombres de la société italienne Professeur de littérature, romancier, essayiste et critique littéraire, Walter Siti est un spécialiste de Paolo Pasolini dont il prolonge l’héritage tout en le renouvelant dans un monde un peu plus usé. Chez Siti les coupables ne sont pas toujours les autres. On en trouve la preuve dans La contagion son dernier roman traduit en français (Verdier 2015).
A partir de l’immeuble de la rue Vermeer, l’auteur trace un portrait saisissant de la borgata quartier périphérique romain où se retrouvent les pauvres, les paumés et la faune, en gros les victimes de la crise. La structure du roman, évoque un peu la Vie mode d’emploi de Perec pour le réalisme baroque, mais avec beaucoup plus de noirceur, de came et de sexe. La vie de chaque foyer et les liens entre les habitants dressent une toile pasolinienne de notre siècle d’un pessimisme effrayants.
On y croise Chiara et son mari Marcello, ancien bodybuilder entre deux sexes, Francesca, handicapée militante, Bruno supporter de la Roma, Gianfranco, dealer qui veut s’élever, Eugénio ouvrier amoureux d’une prostituée… Walter Siti observe avec délectation ce petit laboratoire au quotidien qui révèle tout ce que la bienséance laisse dans le noir. Pour pénétrer ce monde l’auteur semble s’être inoculer une partie du mal pour mieux en traduite son effet. La contagion morale, celle des péchés, des vices et des hérésies, est un de ses thèmes récurrents. Elle est antérieure au modèle théorisé par la médecine. Ne dit on pas que l’amour est une maladie contagieuse ?
L’oeuvre de Siti l’est aussi, parsemée d’éléments soulevant le comportement discutable de ses semblables. La cruauté provocatrice et destructrice de ses personnages, renvoie à certaines évidences. Pourquoi les gens agissent-ils de la sorte ?
« C’est qu’ils y prennent du plaisir, sinon ils ne le feraient pas » indique l’auteur qui prend également un certain plaisir à imbriquer de manière obscène le cynisme, l’opulence, la politique, le sexe, l’affairisme, la drogue, la spéculation, la corruption, les assassinats commandités, les pots de vin et l’impuni.
Tous ces ingrédients font de La contagion un roman romain polymorphique incontournable.
La Fable d’Antonio Moresco régénère le territoire du roman
Roman. Fable d’amour, Antonio Moresco, éditions Verdier.
« Il était une fois un vieil homme qui s’était éperdument pris d’amour pour une fille merveilleuse. Ce n’était pas simplement un vieil homme, c’était aussi un clochard, un de ceux qui dorment dans la rue sur des cartons, un homme perdu, un déchet humain.»
On ne saura pas avec précision ce que fuit le narrateur, sans doute le monde urbain contemporain, son désordre, ses dissonances, sans doute aussi une lassitude, un désarroi plus intime et plus secret. Quand s’ouvre le roman, il est déjà là, solitaire et attentif, immergé dans ce paysage. Fin observateur de ses contemporains, Antonio Moresco se saisit du pouvoir de la fable à travers une histoire d’amour qui se démarque de l’ordinaire mais comme toute histoire d’amour reste plausible.
Il séduit le lecteur avec ce récit rythmé, limpide et plaisant tout en dénonçant les travers humains. Les deux personnages affrontent leur propre destin au cœur duquel l’auteur fait briller le véritable enjeu, celui d’aimer.
Moresco capture l’attention en faisant appel à notre sensibilité enfantine. Il use de l’art poétique, plus efficace que les discours sérieux et les dénonciations politiques bien que cela en soit une. Les deux personnages principaux sont animés du désir d’échapper à tous les régimes de restriction qui étouffent l’existence et l’imaginaire, ce qui les entraîne dans un abîme de perdition.
L’univers onirique se dessine en dépit de la précision. Comme les protagonistes, le lecteur est porté par une voix créative venue des profondeurs qui libère une énergie enfouie et régénère les territoires du roman d’une multitude de visions littéraires inédites.
A qui parle l’écriture de Moresco ? à nos doutes. Elle rallume un élan de désir, qui pourrait être aussi élan d’amour. La limpidité incandescente de cette écriture laisse entendre une voix mi enfantine-mi adulte, prose dépouillée de tout mouvement pathétique, tragique, ou sentimental. Face au monde qui est en train de disparaître, l’amour prend le dessus.
JMDH
Les frontières poreuses entre pouvoir et crime
Comédie du livre samedi à 15h à la Panacée
Débat Paris Palerme Roberto Scarpinato procureur général auprès du parquet de Palerme et le directeur de Médiapart, Edwy Plenel évoquent leurs combats pour la démocratie.
La Comédie du livre ne permet pas seulement de découvrir l’actualité éditoriale et de faire connaissance avec les auteurs des oeuvres qui partagent nos nuits. L’échange d’idées permettant d’affûter notre pensée et de développer l’esprit critique figure dans l’ADN même de la manifestation.
Deux rencontres programmées cette année font passerelles avec la crise démocratique que nous traversons, en questionnant le contexte d’une transformation radicale du modèle étatique qui nous est familier. Dans le cadre d’une conférence, Jean-Claude Milner est revenu hier sur la déclaration des Droits de l’homme et du citoyen de 1789 en l’éclairant à la lumière du XXIe siècle.
Après avoir distingué les droits du citoyens des droits de l’homme, toujours inscrits dans notre constitution, Milner, en vient à la question : Les non citoyens ont-ils des droits aujourd’hui ? Ce qui pose de manière très sérieuse le problème des réfugiés sans autre statut que celui d’être humain.
Roberto Scarpinato et Edwy Plenel abordent aujourd’hui les liaisons dangereuses qu’entretiennent le pouvoir et le crime en l’Italie ( à 14h Auditorium de la Panacée). À travers le prisme d’une vie que la violence mafieuse a irrémédiablement bouleversée, Roberto Scarpinato a livré en 2011, un premier témoignage avec Le dernier des juges. Il poursuit son analyse avec Le retour du prince pouvoir et criminalité, sorti l’année dernière aux éditions de la Contre allée.
« En début de carrière, je croyais qu’il existait une ligne de démarcation précise entre le monde des criminels et celui des honnêtes gens.Mais j’ai dû me rendre compte que les deux mondes communiquaient entre eux par des milliers de chemins secrets(…) Suivant les traces des assassins aux mains tachées de sang, et celles des capitaux de la corruption et de la mafia blanchis dans le monde entier, je me suis retrouvé à juger plusieurs insoupçonnables hommes au sommet des institutions, de la politique et de la haute finance.» Ce constat sera croisé avec celui d’Edwy Plenel qui vient de publier Dire nous. un plaidoyer contre la peur et le renoncement politique. Ce renoncement des politiques à affirmer l’intérêt générale face au pouvoir de l’argent, et celui des citoyens à être représentés par leurs élus, devraient apparaître dans ce débat.
«Les secrets du pouvoir sont l’instrument de la corruption et le poison de la démocratie» avance le procureur de Palerme. Mais les contraintes budgétaires imposées par l’UE, ne rendent plus possible de soutenir les coûts de la corruption en augmentant la dette publique. « Aujourd’hui, les coûts de la corruption sont payés en détournant les fonds et l’argent de l’Etat destinés aux services publics» explique Scarpinato. «Ainsi, après avoir épuisé le gras des finances publiques, la corruption s’attaque désormais au tissu connectif de la nation, c’est-à-dire au réseau de solidarité collectif garanti par les services assurés par l’Etat.» Ce qui ne semble pas concerner seulement l’Italie…
JMDH
Rencontre L’Italie et ses fantômesViolence et poids de l’Histoire
Francesca Melandri
Dans, Les Oeuvres de miséricorde, (Verdier) Mathieu Riboulet s’interroge sur le mal tel qu’il s’insinue dans l’histoire des hommes. Singulièrement sur les violence qui les font s’entretuer, violences multiformes, «historiques, guerrières, sociales, individuelles, sexuelles, massivement subies mais de temps à autre consenties». Un poids qui continue à peser sur les épaules des survivants et de leurs descendants. Cette question universelle fait lien avec le débat animé par Fabio Gambaro intitulé L’Italie et ses fantômes : Violence et poids de l’Histoire dans le roman italien qui réunit les auteurs Francesca Malandri, Giorgio Vasta, et Kareen De Martin Pinter. La violence est une composante fondamentale de l’Histoire de l’Italie de la seconde moitié du XXe siècle : les troubles communautaires dans le Haute-Adige, les années de plomb et les actions menées par les Brigades rouges, la mémoire douloureuse de ses drames qui continuent à hanter l’Italie aujourd’hui sont au coeur des fictions des trois écrivains réunis lors de cette rencontre.Aujourd’hui à 18h Auditorium de la Panacée.
BD Le dessinateur scénariste Fabcaro lauréat du prix des Libraires
Chaque année, les libraires du réseau Canal BD réseau de libraires spécialisés dans la bande dessinée en Belgique, France, Italie, Québec et Suisse sélectionnent plusieurs albums qui devront par la suite concourir pour remporter le Prix des Libraires de Bande Dessinée. Ce dernier récompense le meilleur album après un vote organisé entre les différentes librairies du réseau. Les libraires des réseaux Canal BD et Album soutiendront les auteurs et le livre primé durant une année entière. Cette année La bande dessinée Zaï zaï zaï zaï de Fabcaro, publiée par les éditions montpelliéraine 6 pieds sous terre, a reçu le Prix des Libraires de Bande Dessinée. L’auteur qui vit à Bédarieux signe un album critique et spirituel, un brun paranoïaque, inspiré de situations du quotidien où le schéma de narration joue du miroir pointant l’idéologie fallacieuse qui nous conduit nulle part. Il dédicace son ouvrage hilarant sur le stand de la Région qui regroupe cette année 46 éditeurs.
Auteurs Christine Avel, montpelliéraine, dédicace «Autoportrait à la valise»
S’éloigner, la narratrice en a rêvé toute son enfance. Adulte, elle s’est spécialisée en départs, et son métier l’entraîne sur tous les continents. Piégée dans un aéroport birman par un malentendu administratif, elle attend la décision d’ubuesques autorités. Cernée de faux balayeurs qui sont de vrais espions et de fausses grand-mères aux allures de sorcières, elle s’interroge : d’où lui vient son obsession du départ? C’est ainsi qu’elle nous mène aux quatre coins de nos contradictions entre désir de fuite, d’aventures, de mouvement perpétuel et d’immobilité nostalgique.Christine Avel a travaillé pour des projets de développement en Afrique et en Asie. Elle en a profité pour beaucoup voyager, avant de poser ses valises à Montpellier.
Autoportrait à la valise (Seuil 2016) Christine Avel Une éloge moderne du mouvement et de la fuite, une ode au désir de monde, qui fait décoller quand tout va de travers.
Pierre Assouline
L’écrivain membre de l’Académie Goncourt Pierre Assouline sera à Montpellier aujourd’hui où il participera notamment a la rencontre Mitteleuropa?: les réécritures d’un mythe littéraire. à 15h au Centre Rabelais. Ecrivain, journaliste, enseignant. Chroniqueur et conseiller, il collabore avec l’Histoire, le Magazine littéraire, ou encore la République des livres qu’il crée en 2005. Avec plus d’une trentaine de titres, Pierre Assouline est l’auteur de dix biographies (Hergé, Gallimard, Kahnweiler…) et de plusieurs romans (Lutetia, Les invités, Le Portrait…). Il produit également plusieurs séries sur France Culture et enseigne l’écriture depuis plus d’une quinzaine d’années à Sciences Po Paris. Pierre Assouline dédicacera son dernier roman Golem
Auteurs Entretien littéraire avec Sorj Chalandon Espace rencontre à 11h
« Mon père disait qu’il avait été chanteur, footballeur, professeur de judo, parachutiste, espion, pasteur d’une Église pentecôtiste américaine et conseiller personnel du Général de Gaulle jusqu’en 1958. Un jour, il m’a dit que le Général l’avait trahi. Son meilleur ami était devenu son pire ennemi. Alors mon père m’a annoncé qu’il allait tuer de Gaulle. Et il m’a demandé de l’aider. Je n’avais pas le choix. C’était un ordre. J’étais fier.»
Profession du père, le dernier roman de Sorj Chalandon, a récemment reçu le prix du Style 2015. Il met en scène avec force et pudeur une enfance tyrannisée par le comportement d’un père violent et mythomane. A l’occasion de cet entretien animé par Oriane Jeancourt, le grand romancier évoquera également ses livres précédents.
Dialogue entre Maylis de Kerangal et Joy Sorman
Dans le cadre de la liberté de programmation offerte à Maylis de Kerangal par la Comédie du livre. L’auteur dont l’écriture mêle fiction et documentaire, propose une carte blanche collective en invitant des écrivains dont les travaux entrent en échos avec ses thématiques. C’est notamment le cas de Joy Sorman qui navigue à la frontière des métiers dérivés de la littérature. Dans Comme une bête, qui dressait le portrait d’un boucher tout en chair et sensualité elle abordait le lien homme-animal, Dans Boys, Boys, Boys, elle exhortait les filles à prendre la parole et dans son dernier roman, L’inhabitable (Gallimard 2016) Joy Sorman reprend l’enquête de terrain sur les immeubles insalubres à Paris qu’elle avait réalisé en 2010, pour voir où en sont les choses. Une expérience aux frontières du reportage et du récit, de l’enquête et de la dérive urbaine qui devrait donner du grain à moudre à cette rencontre. Aujourd’hui à 11h30 au Gazette café.
Sélection Verdier du jour
Ecrire la peinture avec Mathieu Riboulet et David Bosc
Une rencontre à l’auditorium du musée Fabre dans le cadre de l’hommage rendu à l’éditeur Verdier sur le thème Ecrire la peinture. Le riche catalogue des éditions Verdier est peuplé de textes qui placent l’acte de peindre, et les figures de peintre, au coeur du récit. Dans un roman de Mathieu Riboulet le narrateur est hanté par les oeuvres du Caravage, au point d’en reconnaître les personnages principaux dans les corps de ceux qui l’émeuvent. «?Quand il peignait, Courbet plongeait son visage dans la nature, les yeux, les lèvres, le nez, les deux mains, au risque de s’égarer, au risque surtout d’être ébloui, soulevé, délivré de lui-même?», écrit David Bosc dans le roman qu’il a consacré à Gustave Courbet La claire fontaine (Verdier 2012). Ce dialogue dans l’enceinte du Musée Fabre entre les deux écrivains semblait couler de source. Il sera précédé d’une lecture de texte de Pierre Michon autre grande plume de la maison d’édition qui écrit environné d’images qui sollicitent en permanence son imagination. L’échange sera suivi d’une promenade dans les collections du musée, ponctuée de lectures par les romanciers et le comédiens Jean-Marc Bourg. Gratuit mais places limitées. Photo David Bosc
Source La Marseillaise 28/05/2016
Edition Verdier ou les trois bonnes raisons de mettre cet éditeur à l’honneur.
Plusieurs raisons pourraient concourir à expliquer les motifs de la mise en lumière des éditions Verdiers à l’occasion de cette 31e édition de la Comédie du livre. Nous en retiendrons trois.
La première concerne le lieu de naissance de la maison dans notre région en suivant le sens que lui donne Colette Olive, une de ses fondatrices : « Le choix de Lagrasse (Aude) s’est imposé à nous naturellement parce que nous y étions bien. » « La misère au soleil c’est quand même mieux » aurait ajouté Gérard Bobillier, autre fondateur, disparu en 2009. « Bien que très attachés à cette région, notre implantation n’induit pas un positionnement régionaliste, précise Colette, nous sommes dans cette région pour l’offrir au monde.»
Une formule empruntée à Joë Bousquet dont la maison garde les traces écrites. En d’autres termes se trouver dans une région suppose qu’on participe à sa vie. Ce que font volontiers les éditions Verdier en organisant depuis 1995 l’événement littéraire, Le Banquet de Lagrasse programmé cette année du 5 au 12 août. « Pour nos auteurs, Le Banquet est une occasion de rencontres. Il permet de cultiver l’échange de la pensée en public, de célébrer l’humanité et le vivre ensemble », indique Colette Olive. Ce qui pourrait laisser penser que vivre dans une région signifie entreprendre sa métamorphose, et participer au changement…
La seconde raison d’inviter les éditions Verdier à la Comédie du livre est liée à l’ attachement de la maison au pouvoir de l’écriture.
L’écrit comme un combat
« La maison fut conçue comme le dépassement et le fruit d’une longue expérimentation politique des anciens membres de la gauche prolétarienne », expliquait Gérard Bobillier en 1992 dans le 1er numéro du Matricule des Anges. Depuis, ce dépassement pousse vers la subjectivation politique. Il n’a eu de cesse de se développer, sans pour autant renier la force du lien initial. « Nous formions un groupe qui militait ensemble. On s’est jamais trop quitté, confirme Colette Olive. Verdier est né dix ans après que nous ayons mis fin à cet engagement de jeunesse, nous avons eu le désir d’exprimer des idées par le biais de la littérature, de la philosophie. Et on a poursuivi sous cette bannière. »
Démonstration élégante
L’engagement et l’ouverture littéraire dont fait preuve la ligne éditoriale conjuguée à l’exigence de qualité qui émerge comme une évidence à la lecture du catalogue, est une troisième raison d’inviter Verdier. La collection Hébraïque constitue les premiers pas de la maison. A l’instar de l’ œuvre majeure Le Guide des égarés de Moïse Maïmonide (1135-1204) apôtre du savoir et d’une pratique épurés des superstitions fondées sur l’intelligence.
Cette collection sera suivie d’autres initiatives aussi passionnantes que nécessaires comme L’islam spirituel, ou la collection italienne Terre d’Altri inspirée du poète Vittorio Sereni. Verdier abrite des grands noms de la littérature française qui envisagent le rapport au temps présent, comme David Bosc, Patrick Boucheron, Mathieu Riboulet… A (re)découvrir d’urgence en trois jours…
Jean-Marie Dinh
Dans son dernier roman Cris murmures et rugissements, Marcello Fois livre un somptueux rendu du silence de l’impensé et de l’absence.
Sardaigne
Né à Nuoro, en Sardaigne en 1960, Marcello Fois fait ses premiers pas dans le noir. A trente ans, il cofonde le groupe des treize avec des écrivains de polar bolonais. Deux ans plus tard il emporte le prix Calvino avec son premier roman Picta. Il partage sa vie entre Bologne et son petit village insulaire Gavoi où il a fondé un festival littéraire.
Très attaché à sa terre natale, il la dépeint à travers son héros Bustianu, avocat et journaliste dans la Sardaigne du XIXème siècle ou la saga Mémoire du vide… Le titre de son dernier roman Cris, murmures et rugissement apparaît comme un clin d’œil à Berman. Dans ce court et intense roman, Marcello Fois rétrécit le champ panoramique de son approche habituelle pour pénétrer la sphère intime, sans délaisser les thèmes récurrents de la mémoire, de l’identité et du silence omniprésents dans son œuvre.
Huis clos
A la mort de leur père qui les a abandonnées alors qu’elles étaient petites, Marinella et Alessandra, deux sœurs jumelles se retrouvent dans l’appartement de leur enfance. Il n’y a pas de description de la situation ou des personnages, juste la règle des trois unités de la tragédie antique chère à l’auteur.
L’univers apparaît en arrière-fond, dans les recoins, sur le papier peint des pièces, comme les morceaux d’une jungle dans laquelle les deux sœurs participent à la faune sauvage que le deuil révèle. L’auteur sculpte dans le temps les silences présents et passés. « Dans l’appartement on n’entend que les lointains cris d’hyènes affamées dans les tuyaux, et les radiateurs, les sifflements de serpents venimeux. »
Alessandra, celle qui n’a pas le droit de s’exposer au chagrin, mesure l’abîme de sa tristesse. « Elle en vint à songer aux absurdités qu’il lui avait fallu accomplir pour balayer toutes manifestations de son mal-être. » Marinella hésite à confier son secret.
Phrases avortées, sentiments fugitifs, mouvement des ondes transversales issu d’une profonde souffrance, l’auteur sarde pose un climat subtil et féroce invitant à une perception émotionnelle qui dit peu ou rien des faits mais beaucoup sur la vie. Non à travers ce qu’elle est mais selon la manière dont elle est vécue.
« J’ai voulu me situer en un lieu mixte. Le point de rencontre du théâtre et du roman », confie l’écrivain. Comme un accompagnateur invisible, l’auteur place le mystère, la force et le potentiel féminin au cœur de son roman. A l’instar des contours quasi fantomatiques de la voisine, troisième personnage du roman, ou de l’histoire vraie d’une île remontée à la surface au large de la côte sicilienne, à la suite d’un tremblement de terre, puis disparue.
Le livre émerge comme une vision métaphorique d’un morceau de terre présent et invisible qui existe à l’insu des êtres. L’écriture ciselée de Marcello Fois n’a rien d’inoffensif. Il a dédié son roman au féminin karstique qui est en lui.
JMDH
Cris, murmures et rugissements édition du Seuil 16,50 euros.
Milena Argus son roman Mal de pierres sera porté au cinéma par N. Garcia. dr
La 31e Comédie du Livre se déroulera du 27 au 29 mai 2016. L’événement se classe dans le top 5 des manifestations littéraires françaises . Plus de 100 000 visiteurs sont attendus.
Après la littérature Ibérique en 2015, la manifestation confirme l’ancrage méditerranéen de la Métropole en mettant cette année à l’honneur la littérature italienne. Le plateau d’auteurs invités compte pas moins de 35 écrivains italiens. La disparition de géants mondiaux comme Antonio Tabucci en 2012, ou plus récemment Umberto Ecco démontre la fertilité de la péninsule italienne en matière de monstres de la littérature. C’est-à-dire la capacité de l’Italie à produire des écrivains dont les oeuvres structurent notre imaginaire et notre rapport au monde.
Parmi ceux qui seront présents à Montpellier Claudio Magris héritier de la La Mitteleuropa qui connaît un grand succès public et critique, ou encore Erri De Luca dont les écrits lumineux frappent l’imaginaire autant que ses textes plus engagés. Luviana Castellina ex députée européenne, incarnera l’une des grandes consciences politiques en l’Italie tandis que Milena Agus représentera la nouvelle vague littéraire sarde.
Les maisons d’édition réputées pour leur catalogue italien débarquent avec leurs auteurs : Francesca Melandri, Giorgio Vasta, Andréa Bajani, et Ronerto Innocenti pour Gallimard, Stefano Benni, Giorgio Pressburger Valerio Magrelli et Antonella Cilento, pour Actes Sud, ou encore Paolo Giordano, Marcello Fois, pour les éditions du Seuil. Michela Murgia les Antonio Moresco, Walter Siti et l’historien Giacomo Todeschini pour Verdier. A noter que l’éditeur invité cette année viendra aussi accompagné de talentueux auteurs français tels que Patrick Boucheron, Pierre Bergounioux et David Bosc.
Cette liste n’est pas exhaustive, mais elle révèle déjà le vaste panorama littéraire italien qui sera offert à travers la vitalité de ses écrivains, y compris dans le domaine du Roman noir et policier où les auteurs mettent souvent au centre de leurs intrigues les mensonges et les secrets de l’histoire officielle représenté par Maurizio De Giovanni et Luca Poldelmengo (Rivages) ou Giancarlo De Cataldo, l’auteur de Romanzo criminale qui est à la fois écrivain, scénariste et magistrat accompagné de Carlo Bonini (Métailié) et Paola Barbato (Denoël).
Le grand dessinateur Lorenzo Mattoti (Casterman) qui signe l’affiche de cette édition viendra illustrer l’élégance et la pureté du trait très présentes dans la bande dessinée italienne. Pour conclure, on doit se préparer à tout et prendre un peu d’avance sur les lectures.
JMDH
Les préfaces en médiathèques : L’Italie à l’heure des bilans
Massimo Tramonte
Le réseau des médiathèques de la Métropole propose un avant goût de la 31e Comédie du livre jusqu’au 26 mai 2016. Aujourd’hui à 18h30, au Grand auditorium de la Médiathèque Emile Zola à Montpellier, le maître de conférence Massimo Tramonte donnera une conférence sur le thème : L’Italie à l’heure des bilans.
L’universitaire entend dresser un bilan réaliste et sans concession. « L’Italie est l’un des pays fondateurs de l’Union européenne et de la zone euro. Malgré cela l’Italie vit depuis de nombreuses années une crise économique, politique et morale dont on ne voit pas l’issue.
Des écrivains comme Roberto Saviano et Giancarlo De Cataldo, entre autres, ont bien décrit dans des ouvrages de fictions construites comme des enquêtes journalistiques, les dérives de l’Italie actuelle.
L’Italie est un pays en déclin avec des inégalités toujours plus importantes où 5% des familles les plus riches détiennent 35% de la richesse du pays et où 20% des plus pauvres s’acheminent vers une pauvreté absolue. Un pays où un jeune de 27 ans, qui a la chance de travailler, gagne en moyenne 26% de moins qu’un jeune de 27 ans en 1993 (données officielles).
Un pays où la distance entre la politique et la réalité du pays est toujours plus grande. A l’heure des bilans, il faudrait, pour « sauver » l’Italie, comme le disait il y a quelques années l’historien Paul Ginsborg : faire confiance à des éléments fragiles mais toujours présents dans le passé de l’Italie : l’expérience des autonomies locales, l’européisme, les aspirations égalitaires et l’idéal de la paix, toutes choses inscrites dans cette Constitution qu’on voudrait changer en profondeur. »
Le 8 avril Dominique Fernandez présentera son dictionnaire amoureux de l’Italie.