Sous le double feu des réductions budgétaires et de la compétition politique le monde culturel et artistique démontre sa vivacité.
2015 fut une année riche en propositions culturelles et artistiques dans l’Hérault, avec la persistance d’un poids économique et politique qui pose plus de questions qu’il ne fournit de perspective. On s’est évertué à calmer les inquiétudes légitimes des artistes et acteurs culturels. Et on s’est souvent agité avec des spéculations fantaisistes sur l’apport culturel à l’économie ou aux stratégies politiques, mais la valeur de la culture en termes de socialisation, d’ouverture, et d’imagination demeurent largement ignorées. Ce qui n’a pas empêché les citoyens, trop souvent cantonnés dans le rôle de spectateurs, de nourrir leur appétit pour le changement et la curiosité.
Pavillon Populaire. Exposition consacrée à Aaron Siskind
Janvier. Au Pavillon populaire, Gilles Mora renoue avec sa passion pour les photographes américains, avec l’exposition Siskind, le photographe poète qui enquêtait sur la vie dans les quartiers populaires durant la grande dépression. Montpellier Danse invite la mythique Carolyn Carlson en prise avec l’inconscient et le comos. Serge Avedejian, évoque au cinéma Diagonal son dernier film le Scandale Paradjanov et la vie mouvementée de ce génial réalisateur.
Carolyn Carlson
Février. Les lodévois défendent la poésie et leur festival les Voix de la Méditerranée mais les plumes poétiques coulent sous le plomb de l’austérité. A Béziers, les irréductibles de SortieOuest résistent au coeur d’un combat politique et culturel exacerbé par les élections départementales.
Mars. A Montpellier, La Baignoire ouvre grand les portes aux auteurs dramatiques contemporains, avec Horizons du texte. Faute de soutient elle ne reconduira pas cet événement en 2016. Invité par les K-fé-Krime Sauramps, l’inquiétant auteur de roman noir américain Jake Hinkson nous explique pourquoi son héros Geoffrey kidnappe son kidnapper… «Je crois qu’il fait cela parce qu’à ce moment c’est le grand vide.» Dans le cadre de la saison hTh, le collectif de jeune acteur La carte Blanche, présente au Domaine d’O Lost in the same woods. avec un regard autocritique sur une génération qui tente de «réconforter son besoin d’être autre chose que des solitudes.» Le festival de théâtre novateur Hybrides, se voit couper les vivres par la mairie de Montpellier. Il organise sa soirée d’annulation qui donne matière à un débat sur la place des artistes dans la société. Piqué par la mouche des petits roitelets, Noël Ségura, le maire (Dvg) de Villeneuve-lès-Maguelone illustre sa détermination à faire disparaître la scène nationale jeune public qui rayonne depuis vingt-deux ans sur sa commune. Et y parvient au grand dépit de la région et de la Drac qui soutiennent le financement du projet.
Horizons du Texte. Béla Czuppon
Avril. Invité du festival de cinéma social de la CGT, le réalisateur Patrice Chagnard vient débattre de son film Les règles du jeuqui pointe les principales clés pour réussir dans le nouveau monde professionnel.
Festival Arabesques
Mai. Au Domaine d’O, Arabesques, le festival des arts arabes célèbre sa dixième année d’existence dans une clairvoyante chaleur humaine. La thématique des littératures ibériques de la Comédie du livre, offre l’occasion d’ouvrir le débat sur les drames ayant traversés l’histoire de l’Espagne et du Portugal au XXe. Douleurs d’un passé largement revisité par les auteurs contemporains portugais et espagnols. On y croise aussi de grands auteurs français, Lydie Salvayre, Jérôme Ferrari Antoine Volodine… L’édition 2015 est une réussite mais l’édition 2016 se fera sans l’association des libraires Coeurs de livres qui perd son financement municipal.
Jérôme Ferrari et Lydie Salvayre
Au Diagonal, Daniel Mermet passe présenter le premier volet du film Howard Zinn Une histoire populaire américaine, coréalisé avec Olivier Azam. A Sète, le Musée Paul-Valéry revient au source de la Figuration libre. Trois jours durant, le CDN hTh ouvre ses portes à tous vents à l’expression plurielle du sexuel. La Cie « A contre poil du sens » du chorégraphe Matthieu Hocquemiller assure la programmation du Festival Explicit. Les Amis de RKK dont l’équipe de Fiest’A Sète et de Nova, témoignent d’une perte énorme après la disparition de l’artiste attendu dans la région.
Go down Moses. Castellucci au Printemps des comédiens,
Juin. Pour sa 18e édition, le Firn convoque le monde à la grande table du noir à Frontignan sur le thème Etrange étrangers. Il édite un recueil de quatorze nouvelles noires sur ce thème en partenariat avec la Cimade. Le monde contemporain se croise pour dresser un état de la scène chorégraphique au 35e Festival Montpellier Danse. Après l’année blanche et sociale de 2014, Jean Varéla et son équipe passent brillamment la barre de la 29e édition du Printemps des Comédiens en gardant l’esprit d’un festival ouvert sur le monde
Boualem Sansal. En lice pour le Goncourt, l’auteur algérien fait escale à Montpellier pour présenter son roman « 2084 La fin du monde » fenêtre sur le totalitarisme du big brother islamiste.
L’écrivain algérien francophone Boilem Sansal vit à Boumerdès, près d’Alger. Censuré dans son pays d’origine à cause de sa position très critique envers le pouvoir en place et l’obscurantisme islamiste. Il était l’invité de la librairie Sauramps à Montpellier où il a évoqué son dernier roman 2084* La fin du monde.
Dans 2084, vous reprenez la matrice de 1984 d’Orwell pour offrir un panorama de réflexions sur le totalitarisme islamique. Qu’est-ce qui a motivé ce choix ?
La réalité. L’islamisme se propage de manière préoccupante. Sur le plan théorique, il a démarré en 1928 avec la création de l’association des Frères Musulmans et d’une idéologie de reconquête des terres d’Islam puis à travers la volonté d’étendre la prédication à l’ensemble de la planète. Au départ la stratégie reposait sur l’armée et sur un rapprochement avec le peuple. Avec l’idée que la force c’est le peuple, celui qui rendra l’islam invincible. Ensuite ils ont évolué en choisissant de travailler de manière pacifique mais aussi plus insidieuse en empruntant toute une série de techniques au marketing et à la politique, pour conquérir des marchés et des territoires.
A partir de l’Afghanistan on a vu l’islamisme basculer. Cet islamisme radical, a été artificiellement créé par la CIA qui a joué le développement de l’islam comme rempart au communisme afin de préserver l’accès au pétrole. Les Etats-Unis ont trouvé dans cette démarche des alliés très intéressés comme l’Arabie Saoudite et le Qatar. Tout cela est arrivé dans mon pays dans les années 80. On a vu que la démarche commençait par la destruction de l’ordre et de notre manière de vivre.
C’est un roman d’anticipation essentiellement politique. Vous ne décrivez pas d’autres évolutions ?
Un système totalitaire fige la situation. Après la prise du pouvoir, il entre dans une logique nouvelle. Celle de conserver le pouvoir. Et pour cela, met en place une dictature qui efface la langue, la culture, l’histoire, et toutes perspectives d’avenir afin de mettre en place un système carcéral. La pensée des prisonniers s’éteint et finalement, ils ne souhaitent plus être libérés.
Pour l’adversaire à l’obscurantisme déterminé que vous êtes, est-ce que le choix de la fiction permet de mettre en place un appareil critique plus éclairant que l’essai ou l’engagement politique ?
Si vous militez, vous devenez partisan. Par exemple de la démocratie, mais cela reste une vision parcellaire, et du coup, vous ne pouvez pas globaliser votre démarche. Je cherchais à trouver l’élément le plus fédérateur. L’univers romanesque permet de s’adresser à tous. Il transcende les visions partisanes et permet de construire une alliance sacrée contre l’islamisme. L’avantage de la fiction permet peut être de concerner les musulmans tandis que les appels partisans les rebutent parce qu’on critique l’islam qui est une partie d’eux-mêmes.
Quel regard portez-vous sur la révolution de Jasmin et ses suites ?
Connaissant toutes les inhibitions, les freins et les contradictions, religieuses, ethniques, qui traversent ces sociétés, je n’ai jamais cru au Printemps arabe. La démocratie ne se réduit pas au vote. A la base cela suppose une révolution philosophique. Cette révolution ne s’est pas faite dans les pays arabes. On adopte les élections comme on l’a fait en Egypte où en Algérie où les gens ont voté pour Bouteflika. On pourrait dire que c’est une démocratie mais on sait que l’on peut faire voter des ânes et faire élire un âne.
Il semble qu’il se passe quelque chose en Tunisie mais je n’y crois pas à long terme. Les questions fondamentales, comme la religion ou le statut des femmes ne sont pas traitées. La symbolique de la violence reste le pilier de l’Etat, ce qui est propre aux sociétés féodales. Il reste un long chemin, on peut considérer que l’on avance, mais comme on fait un pas en avant un pas en arrière, je n’y crois pas.
La réduction de l’autonomie individuelle passe par le vecteur de la peur, notamment du terrorisme qui conduit l’occident depuis le 11 septembre 2001 à une société sécuritaire. De la même façon, l’intégrisme n’est pas seulement islamique. Ne craignez-vous pas que certaines interprétations de votre livre n’entrent en contact avec l’islamophobie ambiante ?
Lorsque j’écrivais, je voyais à chaque ligne, l’exploitation que l’on pourrait faire de mon travail, dans le bon et le mauvais sens. La société occidentale se radicalise on est dans l’atmosphère des années 30. L’Europe se délite, les contrôles aux frontières sont rétablis.
Cette question est vraiment centrale, est ce que la crainte que sa parole soit exploitée est une raison suffisante pour ne pas dire ? Est-ce qu’on ne fait pas en sorte de nous empêcher de nous exprimer ? Parce que dès qu’on dit un mot, on peut être taxé de raciste, à l’égard des blancs, des noirs, des islamophobes, des anti européens. Les accusations fusent dans tous les sens.
On dit que tel texte est récupéré par l’extrême-droite mais beaucoup de textes sont aussi récupérés par le discours islamiste. Le fait est, que partout dans le monde on ne peut plus parler. Je pense que comme les gens qui prennent les armes pour leur liberté politique, il y a des gens qui doivent se battre pour leur liberté d’expression quelle que soit l’exploitation que l’on peut en faire. Si j’avais tenu compte de ce paramètre, je n’aurais jamais écrit.
Vous dessinez un islam global, sans marquer la différence entre chiites et sunnites qui est actuellement un enjeu géopolitique majeur…
C’est actuel, mais je situe l’action de mon livre dans un siècle. A la différence de l’islamisme qui n’évolue guère, l’islam lui, évolue. Regardez ce qui s’est passé en trente ans. Tout cela est appelé à changer très vite. Dans un siècle, l’islam pourrait très bien se situer entre le chiisme, le sunnisme et la démocratie.
Rejoignez-vous la pensée d’Orwell qui préférait les mensonges de la démocratie au totalitarisme ?
Absolument, j’ai un compagnonnage politique de longue date avec Orwell qui a écrit beaucoup de textes en dehors de son oeuvre romanesque. On a différé sur un point, malgré le fait que j’ai été très tenté de le suivre. 1984 s’articule autour d’une histoire d’amour. J’avais envie de reprendre cela mais dans l’environnement de l’islam, cela paraissait très difficile sur le plan de la narration. Comment envisager l’amour dans un pays où des amoureux de 17 ans mettent des mois pour parvenir à se toucher la main ?
Vous concluez votre livre sur une note positive ; le passage d’une frontière…
C’était pour le plaisir. Après une année à mariner dans cet univers carcéral, j’étais fatigué donc je me suis dit : sois un peu optimiste. Et puis cette idée de frontière qui est là bas et qu’il suffit de franchir m’est apparue très romantique. J’ai succombé à cette porte de sortie en me disant que cela ferait plaisir aux lecteurs.
Invitée au Festival Voix Vives à Sète, la poétesse iranienne Roja Chamankar est une des voix émergentes de la littérature persane. Roja Chamankar est née en 1981 à Borazjân, au sud de l’Iran, après des études de cinéma et de littérature à Téhéran, elle prépare un doctorat de littérature persane à Strasbourg. Oscillant entre littérature et cinéma, elle est la réalisatrice du film Souvenir, bisous, poignards et l’auteur de plusieurs recueils de poésie publiés en Iran. Je ressemble à une chambre noire, son second recueil de poésies traduit en français par Farideh Rava, paraîtra le 1er octobre dans la collection « Soleil noir », aux Éditions Bruno Doucey diffusion Harmonia Mundi.
Comment s’est opérée votre rencontre avec la poésie ?
J’ai grandi dans la poésie, mes parents m’ont baignée dans la littérature dès mon plus jeune âge, tant et si bien qu’il m’arrive encore de penser que les histoires que l’on trouve dans les livres sont plus réelles que celles du monde tangible. J’avais onze ans quand mon premier poème a été publié dans un journal local.
L’écart entre la réalité et la fiction retentit souvent au sortir de l’enfance, et peut-être davantage, lorsque le contexte du réel est tendu…
Il m’arrive de céder au monde de la littérature lorsque je suis fatiguée et déçue de la vie. Parfois c’est l’inverse. C’est paradoxal, je fais des aller-retours entre les deux mondes. Je suis née juste après la révolution, dans un contexte complexe. Après avoir soulevé une vague d’enthousiasme, cette révolution s’est convertie en désastre avec le conflit Iran/Irak. La guerre a eu beaucoup d’influence sur la conception de la vie de ma génération. C’est pour cela que nous espérons la fin de toutes les guerres dans le monde.
Ce que vous dites concerne-t-il vraiment toute votre génération qui semble avide de liberté et de consumérisme, ou une intelligentsia éprise de culture ?
C’est un sentiment générationnel partagé qui n’a rien à voir avec l’intelligentsia. Je pense que le désir de consommation tient plutôt à une forme d’échappatoire et à la disette que nous avons connue pendant la guerre et durant l’embargo. Nos parents ont vécu avant nous dans une société de l’opulence, alors que les gens de mon âge ont connu les rations alimentaires.
La question de l’identité s’inscrit de manière sous-jacente dans vos poèmes. La poésie s’offre-t-elle pour vous, comme un moyen de l’affirmer ?
Quand j’écris, je me libère. Je pense être rebelle dans mes poèmes. Je suis comme un prisme qui réfracte les lumières, tout passe à travers moi, rien n’est direct. Toutes les polarisations intègrent ma personnalité. Il y a plusieurs couches. Mon identité est une affirmation qui révèle les problèmes. Lorsque j’écris sur moi-même, le moi qui écrit ne vit pas dans le vide. Je suis parcourue par ce qui m’entoure. Mon moi est plus ou moins transpercé.
A cette question de l’être tout court s’ajoute celle de l’identité féminine, comment l’approchez-vous ?
J’ai abordé, plus jeune, les problèmes des femmes dans mon livre, Les pierres de neuf mois. Maintenant je pense que c’est une question qui doit être partagée avec les hommes. Ce qui ne veut pas dire que les problèmes des femmes ne sont pas importants pour moi. Mon regard sur le monde est celui d’une poète, pas d’une femme politique ou militante.
Comment percevez-vous, le rapport entre les hommes et les femmes en Iran ?
Les hommes de ma génération sont très différents que leurs aînés. Nous vivons dans un monde de communication qui a favorisé une autre conception de l’égalité éducative.
L’Iran demeure cependant une société marquée par le patriarcat…
Ce paradoxe a permis aux femmes de toutes les couches de la société d’accéder à l’éducation. Plus de la moitié des étudiants à l’Université sont des femmes. Elle ont accès au travail, à l’espace public et refusent la soumission.
Du silence à la retenue, vos poèmes passent à l’attente puis à la souffrance et au tourment de l’amour, de l’être aimé ou de l’autre, comme une porte qui s’ouvre…
Tout le monde me parle de politique mais pour moi l’amour est le pouls qui bat dans mes poèmes. J’ai écrit sur l’amour à différentes périodes, sur l’amour terrestre et sur l’amour charnel. L’amour est la problématique qui sous tend ma poésie. La poésie contient et célèbre l’amour comme un questionnement, et comme une inquiétude. Quand commence l’amour et quand se termine-t-il ? L’amour est la plus grande blessure, la plus grande douleur de la vie et il est en même temps la plus belle partie de la vie.
Vous êtes aussi réalisatrice. La poésie offre-t-elle plus de liberté d’expression que le cinéma ?
J’ai fait des études de cinéma. On ne peut pas nier qu’il existe des problèmes en matière de liberté d’expression mais le travail de l’artiste est de transgresser les interdits par son expression. L’Iran dispose d’un cinéma très riche… Je ne pratique pas l’autocensure, parfois il arrive que mes livres soient relus. Si on me demande de changer un mot, je préfère retirer tout le poème.
Un de vos poèmes s’intitule Créer un dieu autre, un autre, Enfer, sans que cela n’éveille de force défensive…
Mes poèmes n’ont rien à voir avec la religion. Ces mentions sont purement esthétiques. C’est tout à fait courant et cela s’inscrit naturellement dans la tradition de la poésie persane, le dieu évoqué est spirituel.
Comment se porte la poésie contemporaine en Iran ?
Il y a beaucoup d’événements heureux dans la vie poétique en Iran. Beaucoup de poétesses font des propositions nouvelles, des découvertes dans la forme et le contenu. Il existe un grand nombre d’éditeurs spécialisés. Nous sommes des amoureux de la poésie.
L’accord de Vienne qui vient d’être conclu sur le nucléaire entre l’Iran et les grandes puissances offre-t-il de nouvelles perspectives pour la culture iranienne ?
En Iran, tout le monde est content. J’espère que cela aboutira à des événements plus heureux. Le peuple iranien n’est pas belliqueux, l’histoire le démontre. Cet accord devrait avoir des incidences favorables sur la vie culturelle et économique grâce à une intensification des échanges.
Quelle idée vous évoque le titre de votre livre « Je ressemble à une chambre noire ? »
C’est une phrase d’un de mes poèmes. Dans la chambre noire du photographe, il y a une petite lumière rouge et avec elle on peut développer le monde entier.
hTh CDN. Les particules élémentaires du roman au théâtre en passant par le cinéma, la recette est bonne !
Revenir à Houellebecq avec Les particules élémentaires c’est un peu oublier le discours à forte connotation politique et idéologique de l’auteur autour de son dernier livre Soumission.
La pièce tirée du roman fleuve paru en 1998 est habilement mise en scène par Julien Gosselin qui joue sur le registre opéra rock. Le spectacle est prétexte à un délire musical bien rock and roll, sexuellement débridé et plein d’humour. On connaît le talent de Houellebecq pour occuper le centre de la scène littéraire française, s’attirant tous les projecteurs et pas mal de pognon…
Voilà donc une bonne occasion de s’instruire sur les recettes retenues par l’auteur à la sulfureuse réputation. Dans ce texte, plein de facilités, il s’attaque aux forces de l’univers. Et pour tout dire mieux vaut le voir au théâtre que de se taper son bouquin.
Un coup d’éclat donc pour le jeune metteur en scène dont la pièce n’a cessé de tourner depuis Avignon il y a deux ans. Les quatre heures de divertissement trompent l’ennui et ce spectacle « dédié à l’homme », qui fait songer à une forme de « littérature réalité » devrait constituer une référence,voire un nouveau modèle économique. Il suffit de changer les scénarios, les lieux, les personnages et travailler le bouche à oreille…
JMDH
Source La Marseillaise 23/06/2015
Go down Moses. Choc esthétique et décollage onirique
Go down Moses. Castellucci au Printemps des comédiens, un théâtre bien au-delà du réel qui nous perd et nous retrouve.
L’italien Roméo Castellucci compte avec le compositeur Dominique Pauwels, mis en scène par Denis Marleau, parmi les invités attendus et prestigieux de cette édition 2015. Ces artistes n’ont rien de commun hormis leur formidable capacité à nous vasculariser hors des grandes artères pour nous plonger dans le monde puissant de leur univers qui relève du monde du rêve.
Dans Go down Moses Roméo Castellucci fait, à sa façon, référence à Moïse. Le seul homme qui ait rencontré Dieu. On est aux antipodes de la démarche quasi patrimoniale du travail de Benjamin Lazar qui gère les ressources culturelles dans Le Dibbouk. Go down Moses parle d’une très vieille histoire débarrassée, des fausses vérités religieuses, des idées reçues et quelque part, de sa fonction nécessaire permettant l’établissement du lien social. Comme si Castellucci souhaitait nous perdre pour nous retrouver. Comme s’il souhaitait renouveler la façon dont on conçoit le rapport du langage à la réalité et au mythe.
Il résulte que le signifié sur le plateau n’est pas la réalité elle-même, mais une construction signifiante de la réalité. Il en va ainsi de la première scène où les humains se mesurent sans s’aimer, ou de la scène de la poubelle où l’enfant n’est déjà plus dans le sac en plastique. De cette machine qui turbine pour « nous exiler de notre être », du scanner, fierté de l’imagerie médicale, qui propulse bien plus loin que les pales performances scientifiques. C’est de cette construction de sens qu’on appellera le réel signifiant du monde dont l’artiste tire sa matière et sa spiritualité.
La fascination de Roméo Castellucci pour Moïse, libérateur de l’humanité, porte en germe l’ambition que cette libération pourrait aussi bien provenir de l’art.
Jean-Marie Dinh
Source La Marseillaise 23/06/2015
Jean Varela : « qu’entend-on nous par culture ? »
Après l’annulation de l’édition 2014 liée au combat des intermittents et précaires, le directeur du Printemps des Comédiens de Montpellier défend une politique culturelle émancipatrice ouverte et généreuse. A l’occasion du Festival Le Printemps des Comédiens qui se tient jusqu’au 28 juin au Domaine d’O à Montpellier son directeur artistique Jean Varela évoque les orientations théâtrales et politiques de sa mission.
Vous proposez cette année votre cinquième programmation. Vos choix artistiques et votre engagement en faveur du service public de la culture sont reconnus. Etes-vous serein ?
Cinq ans, on appelle cela un lustre. Serein n’est pas le mot. Je dirais que j’espère. Et en même temps je doute davantage. J’ai été nommé de façon provisoire, les enjeux n’étaient pas les mêmes qu’aujourd’hui. Depuis, nous avons essayé de construire une politique culturelle qui soit exigeante et pas élitiste tout en gardant le cap, malgré les difficultés. Le Conseil départemental protège la culture par son engagement. C’est une longue histoire commune.
Le festival et son équipe sortent-ils renforcés ou affaiblis de la mobilisation ayant conduit à l’annulation en 2014 ?
Le noyaux de l’équipe se compose de cinq personnes, pour beaucoup présentes depuis l’origine. Il y a eu des questionnements durant la traversée de l’été 2014. Notamment sur la ligne que j’ai choisi d’adopter en me portant, non solidaire du combat mais dans le combat, en tentant d’expliquer qu’il fallait que les représentations se tiennent, puisque c’était mon rôle. Nous étions tous dans l’incertitude du lendemain. Il a fallu faire œuvre de pédagogie. Reconnaître les choses, comme savoir d’où on vient et pourquoi on se trouve là ? A la fin la grève m’a inquiété et en même temps, la non tenue d’un mouvement m’aurait aussi inquiété. Je suis reconnaissant envers André Vezinhet et sa majorité, envers le public, les artistes et les techniciens… Ce qui ne tue pas renforce. J’ai vu chez les gens une prise de conscience plus forte de l’endroit où s’inscrivent nos métiers, et ce ne sont pas que des mots…
Comment gérez-vous les contraintes d’ordre budgétaire cette année ?
Pour résoudre l’équation budgétaire qui représente -6% sur le budget 2014 et -10% cette année nous avons été contraints de réduire la voilure qui se traduit par une réduction de la durée du festival et du nombre de lieux de représentation. Il n’y a pas de lieux éphémère cette année.
Quels choix avez-vous opérés pour cette programmation ?
J’ai d’abord fait le choix, de ne rien programmer de l’édition de 2014. Ce n’est pas intéressant de refaire la même chose, nous sommes passés à un autre moment, et puis j’aurais trouvé injuste de ne programmer que certains artistes. Même si des ponts surgissent parfois entre les spectacles d’une même édition, le festival ne s’articule pas autour d’une thématique. L’accompagnement des artistes en coproduction, le soutien à la création apparaissent en revanche comme un axe de travail. Dans cette programmation nous coproduisons Nobody de Cyril Teste, Le Dibbouk de Benjamin Lazar, Go down Moses, de Roméo Castellucci, ou encore En avant, marche ! d’Alain Platel. Il est important de partager avec le public la notion essentielle du risque qui permet aussi de montrer ce qu’est le théâtre.
Qu’en est-il de l’enjeu politique : le gel du soutien de la Métropole, la place de la culture sous la présidence du nouveau président Kléber Mesquida ?
Le président de la Métropole a annoncé avant les élections qu’il voterait la participation de la Métropole, pour l’instant le versement est suspendu. J’espère et reste confiant sur les possibilités de trouver une solution. Je connais la conviction dans l’intérêt général du président Kleber Mesquida qui est le député de mon lieu de résidence. Il considère le service public de la culture comme un enjeu fort des politiques publiques. Il a souhaité souligner l’importance du Domaine de Bayssan à l’ouest du département, violemment attaqué par le FN durant la campagne.
Quelle place attribuez-vous au théâtre dans cette période de crise politique, identitaire, démocratique..?
Depuis mon enfance je vis dans la crise. Et je constate chez les jeunes générations d’artistes, qu’ils n’espèrent même plus que la crise se termine. C’est comme un état de crise permanent et non permanent car ce n’est pas la crise pour tout le monde. La place du théâtre d’art est essentielle. Le clivage qui existait jusque dans les années 80 entre la droite et la gauche s’est quasiment estompé. La culture, dit on, est une priorité, mais qu’entend-on nous par culture ? Une culture qui éveille, permet l’émancipation, le rêve partagé ou une culture du plus grand nombre ? Les forces de progrès devraient se questionner fortement sur cette problématique et affirmer leur vocation, ce que fait le Conseil départemental en soutenant le Printemps des Comédiens.
Les choix artistiques de cette nouvelle programmation oscillent sans parti pris entre l’hybridation des formes portées au plateau et l’attachement au texte…
Oui, cette année nous pouvons entendre ce que dit Falk Richter dans Nobody et ce que disait Beaumarchais. avec Le mariage de Figaro. Cyril Teste travaille sur un texte en usant des technologies actuelles de l’image. A côté de cela, on trouve le travail très digne de Benjamin Lazard qui fait revivre la langue et la musique d’un peuple dans Le Dibbouk, ou l’hommage que rend Laurent Pelly au théâtre avec L’oiseau Vert. Nous tentons d’accompagner le public en restant proche de son désir de curiosité, de verbe et de sens. On peut avoir l’image d’un théâtre figé, mais souvenons nous que le théâtre s’est toujours adapté très vite aux nouvelles technologies les Grecs ont introduit la machinerie, les Italiens les techniques de navigation. Le gaz et l’électricité sont entrés très tôt dans les théâtres qui ont toujours été et devraient demeurer des endroits très ouverts.
Propos recueillis par Jean-Marie Dinh
Source La Marseillaise lundi 15 juin 2015
Cirque Balthazar 25 piges éternelles
Printemps des comédiens. BiZARaZar cabaret bal Loufoque jusqu’au 13 juin.
Le centre des arts du cirque de Montpellier tient sa place au Printemps qui ouvre chaque année la possibilité aux jeunes circaciens en 1ère et seconde année de classe pro de se confronter au public. Un moment attendu de la programmation où se conjugue la culture sensiblement décalée du cirque Balthazar, et les traits de personnalité saillants des jeunes artistes.
Comme toujours, chez Balthazar c’est l’énergie du groupe qui permet la mise en valeur des individus. Les origines se mêlent et s’enrichissent sur une bande son de choix qui fait le tour du monde et des époques en explorant tous les styles de musique : salsa, jazz, techno, transe, rock, valse, reggae, chanson…
La mise en piste de Bi- ZARaZar, débute dans l’anonymat stressé des transports urbains.
Mais très vite les voyageurs du quotidien rejoignent un intérieur de type bar cabaret où vont se nouer une série d’interactions qui révéleront les caractères, talents, et, coups de nerf des personnages.
On touche du doigt la dimension poétique des sensations quand les stagiaires de la formation professionnelle exercent leur art et leur recherche en jouant à contre-sens
de l’attendu, comme si leurs performances se mettaient en oeuvre malgré eux. On savoure le côté bastringue et provocateur des artistes. On se laisse emporter dans
la magie révélatrice de l’art du cirque qui brise bien des codes et représentations.
JMDH
Source La Marseillaise 12/06/2015
Montpellier : quand le théâtre vole au secours de l’imaginaire
Le rideau de tissu et de pins se lèvent aujourd’hui sur la 28e édition du Printemps des Comédiens. Un moment fort et novateur pour un public avide de rencontres et découvertes théâtrales.
Sous les feux de l’actualité l’année dernière, le Printemps des Comédiens s’est illustré à travers la parole révoltée des artistes et des techniciens du spectacle. Il a été le cœur national de la mobilisation des intermittents et précaires ne craignant pas d’engager son avenir, dans ce conflit éprouvant.
Faute de budget, la manifestation sera un peu écourtée cette année mais cette lutte brille pour souligner que la création ne se met pas toujours au service du pouvoir et rappelle que le théâtre est sans doute la forme d’expression artistique qui présente le plus souvent des sujets politiques et sociaux. Enfin le combat de 2014 n’est pas étranger à la délibération de l’Assemblée nationale, qui vient de graver dans le projet de loi sur le dialogue social et l’emploi le régime d’assurance chômage des intermittents du spectacle.
«Le Printemps a eu à vivre une édition 2014 singulière dans un moment complexe. J’ai soutenu sa démarche, indique Michaël Delafosse qui vient de prendre les rênes de L’Epic du Domaine D’O. Je me réjouis que l’Epic ait été un lieu de débats sur le rôle de la culture. Les artistes ont des choses à exprimer. Ce qui s’est passé a généré de la souffrance et en même temps, les gens se sont solidarisés, il y a eu un vrai dialogue avec le public. La culture ne se résume pas à des actes de gestion.»
Le choix de la qualité
C’est donc avec joie que ce beau festival reprend sa vocation aujourd’hui jusqu’au 28 juin. Le théâtre est entendu au Printemps des comédiens comme un médium qui développe l’imaginaire. Il est question de mettre en relation notre quotidien avec le fantastique, comme le spectacle Nobody qui débute ce soir. Cyril Teste met en scène de manière novatrice la vie compliquée d’une entreprise de bureaux d’après un texte de Falk Richter.
Avec une quinzaine de spectacles sur 18 jours le Printemps joue la carte de la qualité. Le directeur artistique Jean Varéla a concocté une affiche qui compte des grands noms de la scène contemporaine tels que l’Italien Romeo Castelluci qui poursuit sa quête spirituelle. Après le Christ il évoque la vie de Moïse dans Go down, Moses, pour la projeter dans notre époque. Benjamin Lazar usera des cordes baroques pour un Roméo et Juliette yiddish avec Dibbouk de Lazar.
Le jeune metteur en scène Julien Gosselin s’attaque aux Particules élémentaires de Michel Houellebecq en partenariat avec le h.T.h CDN de Montpellier. Décollage lyrique et poétique assuré, proche des rivages de Verlaine et Rimbaud avec L’autre hiver mis en scène par Denis Marleau et Stéphanie Jasmin sur un opéra innovant de Dominique Pauwels. Autre sortilège à suivre la fable philosophique de Carlo Gozzi, L’oiseau Vert dans une très belle mise en scène de Laurent Pelly.
Le festival croise depuis 28 ans les expériences artistiques de tous les continents avec une connaissances singulière des univers du théâtre, du cirque et du spectacle de rue. Dans ce registre on retrouvera le Nouveau cirque du Vietnam pour A Ô Làng Phô. Les artistes nous entraînent dans leurs pulsations poétiques à travers des tableaux vivants. Avec le spectacle En avant marche, le Flamand Alain Platel s’intéresse aux artistes de fanfare, réjouissances populaires et notes en folies. Le festival est passé maître dans le mélange des techniques scéniques pour les mettre au service des personnages et de la mise en scène. Une idée du théâtre pour tous avec le souci du détail et une haute exigence artistique.
Jean-Marie Dinh
Source La Marseillaise 10/06/2015
Voir aussi ; Rubrique Théâtre, rubrique Festival, Montpellier,
En charge de la préparation de la Comédie du livre, Régis Penalva, passionné de littérature évoque les choix ayant présidé à cette 30e édition consacrée aux œuvres de la péninsule ibérique.
Chargé de mission responsable de la Comédie du livre à la Ville de Montpellier, l’ex-libraire Régis Pénalva tient le pari de l’intelligence. Vendredi 29 mai débute la trentième édition de cette grande fête du livre et de la lecture qui se poursuivra tout le week-end. Le maître d’oeuvre discret de cet événement évoque l’alchimie concourant à la réalisation de cette grande cuisine littéraire qui rassemble près de 100?000 visiteurs.
Quels sont les grands axes et les nouveautés de cette trentième édition ?
Il y a d’abord les littératures invitées. Cette année, en s’intéressant à la péninsule ibérique nous proposons d’aller à la rencontre de deux grandes littératures mondiales. Les littératures espagnole et portugaise seront abordées à travers une approche qui concerne cinq langues le castillan, le portugais, le galicien, le basque et le catalan.
Côté éditeur, après les 35 ans des éditions Métailié l’an passé nous fêterons cette année les 25 ans des éditions Viviane Hamy. L’ouverture au très jeune public compte parmi les nouveautés avec la création d’un espace dédié à la petite enfance encadré par des professionnels qui proposent différents ateliers pour les moins de 4 ans avec leurs parents. L’autre nouveauté, c’est la métropolisation de la manifestation rendue effective en amont et pendant la manifestation avec une sensibilisation des publics aux littératures invitées et des rencontres avec des auteurs dans le réseau très actif des médiathèques. La carte blanche offerte à Lydie Salvayre constitue également un temps fort de la manifestation.
Avec une sélection d’auteurs plutôt alléchante…
Lydie invite effectivement des écrivains appartenant à la grande tradition littéraire dont la venue tient sur le facteur confiance comme Jêrôme Ferrari, le rejeton des éditions de Minuit Eric Chevillard ou encore Antoine Volodine et ses hétéronymes qui ne se déplacent nulle part.
La qualité de la proposition littéraire est un facteur de succès important, comment travaillez-vous pour équilibrer les enjeux politique, économique tout en maintenant l’attractivité ?
Tout commence par le choix du pays. A partir de là nous avons entre 30 et 40 écrivains à inviter avec l’appui des éditeurs qui nous font connaître les auteurs de qualité et l’expertise des libraires qui s’opère sur deux critères, à la fois le choix littéraire et les ventes. Nous prenons également en compte la dimension collective, celle de porter au mieux le livre et ses acteurs dans l’espace public.
On aboutit ainsi à une liste diversifiée où se retrouvent des écrivains qui concernent un large lectorat des auteurs reconnus, et des auteurs au potentiel prometteur à découvrir. La Comédie du livre a aussi une vocation de défrichage. Le goût du public s’affirme en rapport avec les propositions qui sont faites.
L’année dernière sur la thématique des littératures nordiques, Katja Kettu, quasiment inconnue, a réalisé de très belles ventes. Pour aller dans ce sens, les participants aux rencontres pourront aussi acheter les ouvrages sur les lieux même des débats et dans les médiathèques.
L’Espagne et le Portugal partagent une histoire marquée par des régimes totalitaires. Ces deux pays doivent aujourd’hui faire face à une crise économique et sociale aiguë. Cela transparait-il dans la littérature ?
Nous ne voulions pas d’un programme convenu pour éviter de retrouver les écrivains que l’on voit partout et ne pas répéter l’édition hispanique de 2009. Les 35 auteurs invités permettront cette année de découvrir les nouvelles générations. Leurs aînés étaient en contact direct avec les événements tragiques tout au long du XXème siècle. Ils avaient pour habitude d’affronter le sujet frontalement comme l’a fait à sa manière Manuel Rivas. Avec les générations suivantes et particulièrement les plus jeunes, si l’on retrouve bien des traces vivaces des dictatures et de la répression politique, les stratégie littéraires et narratives ne sont plus les mêmes.
Dans Plus jamais ça Andrés Trapiello fait appel à la résurgence de la mémoire. Il est question de la souffrance des descendants. Avec Encore un fichu roman sur la guerre d’Espagne Issac Rosa, interroge la façon dont un écrivain se saisit de l’Histoire… Dans Quatre par quatre Sara Mesa questionne à la fois le passé le présent et l’avenir de son pays et de l’Europe en utilisant la stratégie de la fable. Des thèmes transversaux se dégagent, l’enferment comme dans le conte d’Ivan Repila Le puits, mais aussi le voyage comme dans La mort du père, de José Luis Peixoto qui signe un grand roman de l’immigration portugaise en France. Voyage encore, avec l’ouverture sur des fictions exotiques comme celles de Pedro Rosa dans Pension des mondes perdus.
Comment se porte le marché du livre espagnol et portugais. En quoi se distingue-t-il du marché français ?
Le marché du livre portugais est aux mains de l’Espagne qui dispose de très grands groupes d’édition bien implantés en France. Planeta a d’ailleurs pris le contrôle du groupe français Editis (Plon, Presses de la Cité, la découverte, Robert Lafont, Bordas…). C’est le second groupe d’édition en France derrière Hachette et le 7e au niveau mondial. Si la diversité des publications reste assez grande, elle est différente du paysage français qui se distingue par le nombre de ses éditeurs et son réseau de librairies indépendantes. La puissance des gros éditeurs espagnols également bien implantés en Amérique Latine a pour incidence de privilégier l’exportation des livres espagnols en France où l’on trouve assez peu de traduction d’auteurs portugais qui passent souvent par le filtre de la langue castillane.
Quel avenir pour la Comédie du livre après 30 ans ?
La Comédie du livre n’est pas rentable mais reste absolument indispensable. Elle permet de rendre visible dans l’espace public, les livres, les librairies, les auteurs, les maisons d’édition. La crise que traverse le secteur est liée à la conjugaison de la baisse du pouvoir d’achat à celle des pratiques de lecture, à la baisse des achats de livre et à l’émergence de groupes comme Amazon. La Comédie du livre se maintient au plus près des acteurs de la chaîne du livre. Elle doit porter ses efforts sur l’accès à la lecture et l’éveil à la lecture dès le plus jeune âge.