Accord France insoumise-Parti communiste : ce qui bloque

la-france-insoumise-annonce-qu-il-n-y-aura-pas-d-accord-avec-le-pcfCe jeudi, la France insoumise et le PCF devraient reprendre les négociations en vue des élections législatives. Après le succès de Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle, la nécessité de s’entendre fait consensus, mais les désaccords persistent.

Attachés à « construire une majorité parlementaire », Parti communiste et France insoumise (FI) ne se sont toujours pas entendus sur un accord pour les élections législatives de juin, après deux premières réunions vendredi 28 avril et mardi 2 mai. En cause, deux logiques politiques divergentes.

La FI entend rassembler « le peuple »

La France insoumise souhaite poursuivre « la dynamique qui a conduit sept millions de personnes à voter pour la candidature de Jean-Luc Mélenchon », selon Francis Parny, orateur national du mouvement, et ancien dirigeant communiste. « Une dynamique de quinze mois qui s’est conclue par une adhésion à la France insoumise et à son programme. Nous tenons à ce cadre parce qu’il faut que les citoyens s’y retrouvent. » S’affichant en mouvement et non en parti, la FI entend construire « un rassemblement large » en son sein. « On s’adresse au peuple, comme nous l’avons fait pendant quinze mois de façon détaillée ».

Conséquence logique, un accord national avec le PCF ne pourrait se construire que dans le cadre – programmatique, organique, visuel… – de la France insoumise. Concrètement, cela reviendrait, pour tous les candidats dont ceux issus des rangs communistes, à se présenter sous l’étiquette FI et à signer la charte des candidat.e.s de la France insoumise qui, en plus d’exigences éthiques, impose les conditions de financement politique et aux députés de « respecter la discipline de vote du groupe ».

Ces deux dernières contraintes posent problème au PCF. Marie-Pierre Vieu, membre de la direction du PCF, regrette notamment que « le mandat impératif » s’oppose à « l’indépendance des élus que le PCF pratique depuis cinquante ans. S’il y avait eu un mandat impératif, cela ferait bien longtemps que l’on ne formerait plus un groupe de quinze députés Front de gauche. Il est possible de ne pas affaiblir une identité en acceptant qu’elle ne soit pas unanimiste ».

« Nous avons clairement répondu, notamment en précisant que le candidat reste libre de son attachement financier », réplique Francis Parny. Quant au mandat impératif, il le relativise – « on ne tient pas non plus la main des députés » – mais insiste sur son importance. « Ne pas l’imposer, cela veut dire que ce qu’a fait le député PCF Patrice Carvalho, en votant contre le mariage pour tous, peut se reproduire à l’infini. Ce n’est pas notre conception des choses. »

Le PCF veut une « bannière commune »

Le PCF est pour sa part porteur d’une autre logique, celle d’un rassemblement de la gauche de gauche : a minima des composantes du Front de gauche, peut-être au-delà. Il estime que ces organisations et leurs militants ont joué un rôle important dans le score de Jean-Luc Mélenchon, et qu’ils doivent être représentés en conséquence à l’Assemblée. Il a rendu publique mardi sa proposition d’accord national.

Pierre Laurent souhaite que « les forces qui ont permis le résultat du 23 avril, la France insoumise, le Parti communiste, Ensemble !, les militants du Front de gauche, et toutes celles qui voudront se joindre à elles pour cet objectif, unissent leurs énergies ». Les modalités seraient celles d’une « bannière commune, qui respecte tout à la fois la place singulière tenue par notre candidat à la présidentielle et chacune de nos forces ». Un « sillon commun » comme l’illustre Marie-Pierre Vieu, par lequel « l’autonomie de la FI, mais aussi de chaque organisation alliée, pourrait être respectée ».

Un socle commun trop flou au goût de Francis Parny. « Certains candidats, en faveur desquels la FI se désisterait, imposeraient alors leur programme en s’opposant par exemple à la sortie immédiate du nucléaire, ou en appuyant le projet d’aéroport de NDDL. Comment les citoyens s’y retrouveraient ? » La France insoumise rejette de plus tout accord avec des composantes de gauche n’ayant pas appuyé la candidature présidentielle de Jean-Muc Mélenchon, car « les frondeurs du PS et les membres d’EELV qui protestent contre la politique gouvernementale, représentés par Benoît Hamon, ont été désavoués par les électeurs, même si l’étiquette PS a pesé ».

De toute façon, ces partenaires potentiels ne semblent que peu intégrés à la réflexion collective. Un responsable d’Ensemble ! souligne que son organisation a été « écartée des négociations. Pierre Laurent nous cite dans son appel de mardi, mais ne semble se préoccuper que des intérêts du PCF. Quant à la France insoumise, qui présente une trentaine de candidats d’Ensemble ! membres de FI, elle considère que nous sommes servis », alors que ces candidats ne représentent pas toute la diversité de courants d’Ensemble !. Côté FI, on affirme que sous couvert d’accord national, le PCF cherche à imposer un large accord de circonscriptions, exclusivement partagées entre communistes et « insoumis ». Laissant donc les autres composantes de côté.

Une « responsabilité historique »

À défaut d’accord national, le Parti communiste a proposé vendredi 28 avril un accord de désistement mutuel sur une trentaine de circonscriptions seulement. Francis Parny juge que « l’échange sur un nombre limité de circonscription permettrait au PCF de s’y retrouver ». Une hypothèse acceptée et donc travaillée par la délégation de la France insoumise.

Mais, là encore, des blocages apparaissent. Le PCF considère ses députés sortants comme un « bien commun » à la FI et ses partenaires, et souhaite donc ne pas les inclure dans les quotas de désistements. Françis Parny demande « simplement de la réciprocité »… qui pourrait être l’intégration dans le contingent PCF des candidats qui ne souhaitent pas signer la charte FI, comme le journaliste François Ruffin dans la Somme. Rien n’est simple !

Les négociations vont se poursuivre. Julien Zoughebi, membre de la délégation du PCF, précise qu’« après une réunion nationale de nos secrétaires fédéraux, nous avons proposé à la France insoumise de nous revoir ce jeudi. Nous continuerons, dans un premier temps, à pousser pour un rassemblement le plus large possible ». « Nous cherchons à rassembler sur les nombreux points de convergence », confirme Marie-Pierre Vieu.

L’occasion offerte par les 20% de votes en faveur de Jean-Luc Mélenchon et l’urgence d’agir pour construire une majorité parlementaire, reste l’horizon commun. Julien Zoughebi affirme qu’« au vu de la constitution d’un pôle à l’extrême droite autour de Le Pen et Dupont-Aignan, d’un autre pôle libéral-démocrate autour de Macron, il y a urgence à rassembler la gauche ». « Le résultat à la présidentielle fait peser une responsabilité historique de faire exister le camp progressiste », insiste Marie-Pierre Vieu. Des déclarations d’intention qui s’avèreraient vaines si les divisions persistaient. Date limite de dépôt des candidatures : vendredi 19 mai.

@manu_borras

Source Regard.fr 04/05/2017

Voir aussi : Actualité France, rubrique Politique, La gueule de bois de la la fachosphère,

Jean-Luc Mélenchon : « Convaincre les masses d’entrer dans le combat »

Jean-Luc Mélecnhon dans les locaux de la Marseillaise. Photos LM

Ecologie, Europe, candidature unique… Entretien avec Jean-Luc Mélenchon, le candidat de la France insoumise à la Présidentielle.

Colonne vertébrale du projet, la planification écologique est un sujet qui a progressé dans la société depuis 2012. Cependant, elle fait toujours débat à gauche ?

En préambule, je voudrais dire que si nous avons une dette à l’égard du mouvement écologique, c’est l’entrée en lice de notre famille politique qui a modifié la façon avec laquelle le sujet a pénétré le débat en France. A partir du moment notamment où les organisations de salariés ont pris conscience de cet enjeu vital pour la survie de l’humanité. Au point que, en mars 2012, nous avons pu organiser une première réunion des entreprises en lutte avec des solutions écologiques pour sortir de leur crise et renforcer l’emploi. Pas assez remarqué à l’époque, cet événement a été, pour moi, fondateur. A partir de là, toutes les luttes sociales, surtout les luttes industrielles, ont pris un axe nouveau, intégrant le paramètre de la responsabilité écologique de la production. Cela a permis de décloisonner socialement la préoccupation écologique.

Et du point de vue idéologique ?

Les choses ont été aussi spectaculaires pour tout une partie du courant progressiste qui avait, pendant de nombreuses décennies, confondu le développement des forces productives avec le progrès. Nous avons élargi le champ de la critique intellectuelle au contenu de la technique que nous avions tendance à juger spontanément bonne. Cela ne veut pas dire que nous pensons que la technique est dangereuse pour l’avenir. Au contraire, la transition écologique se présente d’abord comme un défi technique pour l’outil de production industriel. Pour mettre des parcs d’éoliennes en mer, couler des hydroliennes, en se cantonnant à la partie maritime du projet, c’est de la métallurgie, de la sidérurgie, ce sont des navires de service à construire et ce sont des milliers d’ingénieurs, de techniciens, d’ouvriers… à mettre en mouvement.

Sur le plan idéologique, c’est l’intuition fondamentale du communisme qui est vérifiée par le défi de la crise écologique : il y a des biens communs et leur destruction détruit l’humanité elle-même. De même pour l’intuition républicaine -?nous sommes bien tous semblables puisque nous dépendons tous du même écosystème?- ou encore l’intuition socialiste qui est qu’on ne s’en sortira pas autrement que tous ensemble.

Il y a donc dans la situation que nous vivons, une vérification des fondamentaux de notre regard sur le monde. Ce qui est extraordinaire et doit être pris avec enthousiasme même si, sur le fond, c’est une catastrophe qui menace la civilisation elle-même. Ce que j’ai donc à dire à mes amis, c’est « reconsidérez la situation non pas à partir de la lettre de ce qu’ont été nos idées durant plusieurs décennies, mais de partir de l’esprit qu’elles portaient. Et vous verrez alors que vous êtes écologistes ».

Et le nucléaire qui ne fait pas non plus consensus ?

Il faut continuer à chercher à convaincre, mais en même temps il faut savoir trancher. Dans le Front de gauche, nous étions partisans d’un référendum car la question traversait toutes nos familles politiques. Depuis, il y a eu Fukushima et je considère que même si pendant 40 ans, voire plus, les salariés du nucléaire ont réussi à nous garantir un haut niveau de sécurité, ce n’est plus le cas. Non seulement parce que leur situation a été précarisée de manière dangereuse, mais parce que les installations ont vieilli et que le grand carénage coûterait plus cher que le passage aux énergies alternatives. J’estime de plus que le danger est particulier en France parce que nous ne sommes pas indépendants au niveau de la fourniture, l’uranium, et parce que les installations ont été implantées dans des endroits névralgiques qui créent des situations de sur-danger. Donc, ma décision est prise. On arrêtera les réacteurs qui doivent être arrêtés, ceux qui arrivent en fin de vie à 40 ans pendant le prochain quinquennat et on sortira du nucléaire aussi vite que possible. Mon appel est un appel à la mobilisation générale des ingénieurs, des techniciens et de la population. Le problème des emplois ne se posera pas, le recyclage de la totalité des gens qui travaillent pour le nucléaire se fera dans le démontage de ce nucléaire qui prendra au moins 20 ans, et dans les nouvelles énergies.

Un mot sur Nexcis que vous aviez soutenu à Rousset durant son conflit avec EDF ?

C’est le résultat de l’hyper-concentration de la décision dans EDF. Cela aboutit à des aberrations telles que l’investissement sur Hinckley Point qui est antinational et va peut-être couler EDF à cause du poids qu’il fait peser ; mais cela développe aussi une logique technicienne amie des seuls très grands projets. C’est ce que l’on a vu avec Nexcis. Les panneaux qu’elle produisait auraient permis, en équipant la tour CMA CGM à Marseille, de la rendre autonome et d’alimenter le quartier. Mais EDF a gelé le projet et coulé une chaîne de production. Je m’engage bien sûr à ce que cette chaîne de production soit immédiatement relancée à échelle industrielle.

Vous avez mentionné l’Europe et la nécessité d’un plan B comme le point insurmontable avec Benoît Hamon. Lors de la réunion sur la finance organisée par le PCF, Pascal Cherki a dit que ce rapport de force pouvait être mis en place grâce à la capacité de blocage de la France qui refusera de signer le Ceta. Qu’en pensez-vous ?

Il est vain de croire que la seule capacité de blocage constitue une énergie positive. D’autant qu’il ne s’agit pas que de bloquer mais de sortir des traités, de tous les traités constitutifs de l’actuelle union européenne. Je ne me réfère pas à ce que dit Pascal Cherki, au demeurant fort sympathique, mais à la réalité. Et cette réalité est que c’est le président Hollande qui est le penseur de l’Europe politique pour le PS. Il a clairement fixé sa trajectoire : l’Europe peut se refonder par la défense et la création d’un gouvernement économique de la zone euro, un budget de la zone euro et un parlement de la zone euro. Vous remarquez le mot qui manque : celui de Banque centrale européenne ! Une proposition qui date de juillet 2015 et qu’a fait sienne Benoît Hamon. Cette réalité n’a strictement rien à voir avec l’idée qu’on se fait de la négociation pour refonder l’Europe. Pour nous, elle part de l’impératif de l’harmonisation sociale et fiscale. C’est le point de départ, pas celui d’arrivée. Je ne peux pas avoir pour projet européen l’Europe de la défense qui est l’Europe de la guerre, et l’Europe du fric qui est l’Europe de l’euro.

Moyennant des discussions, la divergence pourrait, peut-être, déboucher sur des clarifications, et éventuellement des visions communes. Mais quand on commence ces discussions à 60 jours du premier tour, il y a peu de chances qu’on arrive d’une part à tomber d’accord, d’autre part à convaincre. Il est d’autres sujets dont je ne disconviens pas qu’en discutant, on aurait pu surmonter les divergences. Mais en 60 jours, personne n’est capable d’écrire un programme commun. Je voudrais rappeler que le premier programme commun qui a quand même donné quelques résultats en 1981, a été négocié pendant trente ans à l’initiative des communistes, et que la phase d’écriture a duré un an et demi. Pas parce que c’était des personnes tatillonnes mais parce qu’il s’agit de sujets sérieux. Et les Français sont lassés des accords d’appareils avec des formules creuses qui laissent des chèques en blanc à ceux qui ensuite exercent le pouvoir dans le cadre de la monarchie présidentielle.

Ces deux sujets montrent les différences d’analyse à gauche, gauche à laquelle vous ne faites que rarement référence même si vous répétez souvent votre respect des partis. Est-ce que vous ne croyez plus à la pertinence du clivage gauche-droite ?

Depuis le premier jour, pour reprendre l’expression de Jean Jaurès, il n’y a qu’une seule question : celle de la souveraineté politique du peuple. Il y a ceux qui pensent que ce peuple est le seul souverain et ceux qui croient que des lois permanentes -?d’économie, de marché…?- sont en dernière instance plus fortes que la volonté du peuple. Quant aux fondamentaux, ce clivage gauche-droite n’est donc pas dépassable, il a une dignité, une légitimité… Et il traverse notre histoire depuis les premiers jours de la grande révolution de 1789.

Concernant la forme actuelle, les étiquettes de vision du monde… Dire que François Hollande a eu un gouvernement de gauche, c’est s’empêcher de penser. Le PS à l’instar de toute la social-démocratie européenne, a plié avec des mots pour empêcher de penser. On a appelé politique de gauche une politique de l’offre qui consiste à dire produisez le moins cher possible, n’importe quoi, n’importe comment du moment qu’on arrive à le vendre alors que c’était traditionnellement la politique de la droite. Et la politique de la gauche a toujours été de partir de la demande, c’est à dire des besoins populaires, des besoins du grand nombre, des 99 % comme dirait Pierre Laurent.

La confusion de l’étiquette est destructrice parce que les gens en viennent à confondre ce que nous proposons avec ce que sont en train de faire les gouvernants et parce que cela assigne à une dispute qui nous marginalise. Si on arrive en disant il y a une fausse et une vraie gauche, les gens voient que nous nous sommes nous-mêmes rangés à un bout de l’arc et nous perdons ensuite notre temps à essayer de convaincre que nous ne sommes pas les extrêmes.
Je n’ai jamais récusé l’étiquette de gauche, mais je pars de l’idée que pour me faire comprendre j’ai intérêt à ne pas commencer à marcher avec l’étiquette devant. Parce qu’elle est source de confusion plutôt que de clarification… C’est mon propos à cette étape. Mais demain, lorsque nous aurons clarifié le champ politique, je n’ai pas d’inconvénient à ce qu’on me qualifie de gauche. Mais attention, notre action n’est pas avant-gardiste, c’est d’une action populaire de masse. Il s’agit de convaincre la masse d’entrer dans le combat, pas simplement se convaincre entre nous qu’on a psalmodié les bonnes formules.

Et cela est pensé jusque dans la forme. Quand je fais la France insoumise, je m’inspire de l’idéal fondateur du Front de gauche qui n’était pas de faire un cartel de partis mais de mettre en mouvement des millions de gens s’appropriant une idée. Et à la sortie de la prochaine élection, quelle que soit l’issue, la formation d’un mouvement sera posée, avec des bases qui ne sont pas des accords de sommets, mais des bases de masse.

Vous évoquez le peu de temps d’ici le 1er tour pour conclure un accord avec Benoît Hamon. Mais n’avez-vous pas le sentiment de peut-être rater une occasion historique pour la gauche ? N’était-il pas possible d’envisager un accord certes imparfait mais permettant de l’emporter, pour l’améliorer ensuite durant le quinquennat ?

Vous voulez parler de la candidature unique ? Je suis d’accord, si c’est la mienne. Et c’est pareil pour Benoît Hamon. Donc nous pouvons passer 60 jours à essayer de nous refiler le mistigri de la division. Mais lui et moi, en responsabilité, avons estimé que ce n’est pas ce qu’il fallait faire. Que 50% des Français ne savent toujours pas pour qui ils vont voter et qu’il suffit de gagner un quart de ces 50% pour l’emporter. Alors, que chacun y aille ! La situation va s’éclaircir et elle est en train de le faire. J’ai bien fait de maintenir la clarté d’un positionnement politique. Mon appel, quand je demandais des garanties, n’a pas été entendu. Ce n’était pas des garanties exagérées, ni des mises au pied du mur. C’était de dire qu’on ne pouvait pas faire une majorité de gouvernement pour défaire ce qui a été fait avec le précédent avec les gens qui l’ont fait. Tout le monde comprend ça, sauf les états-majors.

Le PS a une caractéristique : il a deux candidats. Quand on entend M. Delanoe ou le président de l’Assemblée appeler à voter pour Macron, on assiste là à un phénomène majeur. Il y a une recomposition politique aussi grâce à l’existence du pôle fort, dynamique et populaire que nous incarnons. La partie va se jouer là. Donc je dis à mes amis que cela ne sert à rien de ressasser. Personne n’est capable de me dire qu’il faut une candidature unique. J’en ai parlé avec Pierre Laurent. Je lui ai demandé s’il était sur la position de la candidature unique. Il m’a répondu que non. Pourquoi ferait-on cela ? On m’a cassé les pieds durant des mois sur la pluralité des candidatures à gauche. On va se retrouver à trois?: Nathalie Artaud, le candidat PS et moi. C’est moins qu’en 2012. Et qui a perdu la moitié de ses voix ? Pas nous. Nous sommes à notre niveau de 2012, un petit peu plus haut même. Qui peut penser qu’il suffirait qu’on se saute au cou pour qu’aussitôt les gens suivent ? Ce n’est pas le message que je porte. Les gens me disent : « ne viens pas me voir avec un accord d’appareil ! ».

J’ai aussi entendu des choses invraisemblables sur mon ego. Vous croyez que mon ego est engagé ? Cela n’a pas de sens. Je ne suis pas en train de commencer une carrière à mon âge, je suis en train de bâtir un mouvement. J’ai eu l’honneur d’être le candidat du Front de gauche en 2012 et je le suis toujours. Toutes ses composantes soutiennent ma candidature. Donc ce n’est pas ma personne qui est en cause, c’est ce que nous construisons. Celui qui baissera pavillon, baissera en même temps le niveau de ses exigences et de ses ambitions. Et notre peuple n’est pas prêt à cela.

Propos recueillis par Angélique Schaller et Sébastien Madau

Source : La Marseillaise 11 mars 2017

Voir aussi : Actualité France : Rubrique Politique10 omissions, flous et mensonges de François Fillon, Emmanuel Macron, le candidat attrape-tout, Rubrique Economie, rubrique Société, Emploi, Pauvreté,

Amnesty International fustige la prolifération des discours haineux

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Dans son rapport annuel, l’ONG dénonce une rhétorique « toxique » « diabolisant » certains groupes et en premier lieu les réfugiés.

Des dirigeants du monde entier, comme Donald Trump aux Etats-Unis ou Rodrigo Duterte aux Philippines, propagent des discours de haine « diabolisant » certains groupes, une rhétorique « toxique » qui rend le monde plus dangereux, s’alarme Amnesty international dans son rapport annuel présenté mercredi 22 février.

« Les discours clivants de Donald Trump, Viktor Orban [Hongrie], Recep Tayyip Erdogan [Turquie], Rodrigo Duterte [Philippines] (…) s’acharnent sur des groupes entiers de population, les désignent comme boucs émissaires et propagent l’idée selon laquelle certaines personnes sont moins “humaines” que d’autres », les premiers visés étant les réfugiés, dénonce Amnesty international.

Et de citer le décret anti-immigration fermant temporairement les frontières des Etats-Unis aux réfugiés et aux ressortissants de sept pays à majorité musulmane, suspendu depuis, ou encore l’accord « illégal et irresponsable » conclu entre l’Union européenne et la Turquie, permettant de renvoyer des demandeurs d’asile dans ce pays.

Au total, l’organisation non gouvernementale (ONG) a dénombré 36 pays ayant « violé le droit international en renvoyant illégalement des réfugiés dans des pays où leurs droits étaient menacés ».

L’ONG fustige les discours « déshumanisants »

Ces discours de rejet et de haine ont des effets directs sur les droits et les libertés, dénonce Amnesty : « Des gouvernements ont fait voter des lois qui restreignent le droit d’asile, la liberté d’expression, qui légitiment la surveillance de masse ou donnent aux forces de l’ordre des pouvoirs illimités. »

Loin d’être l’apanage de leaders extrémistes, ces paroles stigmatisantes ont été adoptées « parfois de façon voilée, parfois de façon plus ouverte » par « des partis dits centristes », souligne John Dalhuisen, directeur d’Amnesty International pour l’Europe.

« Les discours déshumanisants, c’est quand le premier ministre hongrois qualifie les migrants de “poison, c’est quand Geert Wilders [député néerlandais d’extrême droite] parle de la racaille marocaine, c’est aussi quand le premier ministre néerlandais écrit une lettre ouverte invitant les migrants à se comporter de façon normale ou de rentrer chez eux. »

Les étrangers et les musulmans, « cibles principales de la démagogie européenne » sont « présentés comme une menace à la sécurité, à l’identité nationale, des voleurs d’emplois et des abuseurs du système de sécurité sociale », insiste-t-il.

Les effets pervers de l’état d’urgence en France

En France, où l’ONG sise à Londres a exceptionnellement présenté son rapport annuel, Amnesty dénonce la restriction des droits fondamentaux dans le cadre des mesures prises pour lutter contre le terrorisme, en particulier l’état d’urgence, prolongé depuis les attentats du 13 novembre 2015.

Selon son recensement, de la fin de 2015 à la fin de 2016, « seuls 0,3 % des mesures liées à l’état d’urgence ont débouché sur une enquête judiciaire pour faits de terrorisme ». En revanche, « les assignations à résidence ont entraîné des pertes d’emploi ou la marginalisation des personnes [concernées] », déplore Camille Blanc, présidente d’Amnesty International France.

L’ONG considère par ailleurs qu’en matière d’accueil des réfugiés, « la France n’a pas pris ses responsabilités au niveau international » et ne protège pas suffisamment les réfugiés et les migrants présents sur son sol.

« Dans le cadre des élections présidentielle et législatives qui vont avoir lieu en 2017, la France est à la croisée des chemins concernant les droits humains, qui font écho à une tendance mondiale, et les citoyens ne doivent pas tomber dans le piège de ces discours qui entraînent la haine, la peur ou le repli de soi. »

Face aux renoncements des grandes puissances à se battre pour le respect des droits et des libertés, et la passivité des Etats face aux atrocités et crises vécues en Syrie, au Yémen, ou encore au Soudan du Sud, Amnesty International appelle chacun à se mobiliser et agir. « 2017 sera une année de résistance, a dit à l’Agence France-Presse le président d’Amnesty, Salil Shetty. Nos espoirs reposent sur le peuple. »

Source : Le Monde.fr avec AFP 22/02/2017

Voir aussi : Actualité Internationale Rubrique Politique, Politique de l’immigration, L’Unicef dénonce l’exploitation des migrants mineurs dans les « jungles » françaises, rubrique Société, Justice,

Archives. Peillon en 2005 :  » On ne sait pas ce que pense le PS « 

25 juillet 2005Source : La Marseillaise 25 juillet 2005

Voir aussi : Voir aussi : France, Rubrique Politique, rubrique Rencontre,

Et si l’on se trompait sur le terrorisme ?

 Photo Saeed Khan © AFP)

Photo Saeed Khan © AFP)

Pour Olivier Roy, auteur du « Djihad et la mort », la filiation première du djihadisme contemporain n’est pas l’islam mais une « radicalité » qui s’apparente surtout au terrorisme européen des années 1970 et 1980.

événement est rare mais il arrive qu’une opinion minoritaire, exprimée avec compétence, probité et clarté, fasse basculer le point de vue jusque-là dominant. Les plus âgés se souviennent encore de ce mythique numéro d' »Apostrophes » du 27 mai 1983. A l’époque, une bonne partie des intellectuels français – Philippe Sollers et Roland Barthes en tête – font encore les yeux doux au maoïsme et à la Révolution culturelle. Laquelle fit plusieurs millions de morts. Ce jour-là, Bernard Pivot reçoit, entre autres, « la » figure du maoïsme à la française : la sociologue Maria Antonietta Macciocchi. En face d’elle, Pivot a placé un jeune chercheur belge, Pierre Ryckmans, qui a publié, douze ans auparavant, sous le pseudonyme de Simon Leys, « les Habits neufs du président Mao », un livre dénigré par les spécialistes de l’époque (un « ramassis de ragots »), notamment les animateurs de la revue « Tel Quel ». Or, en quelques minutes, d’une voix très douce, voilà que le jeune Belge décortique l’ignorance abyssale, et la bêtise, des conjectures pieuses alignées par « la » Macciocchi. L’effet d’anéantissement est immédiat. Non seulement on n’entendra plus jamais parler de la dame, mais plus personne n’osera mythifier la « révolcul » chinoise. Quant à la revue « Tel Quel », elle fera amende honorable.

En lisant le dernier livre d’Olivier Roy, « le Djihad et la mort » (Seuil, 2016), on peut se demander si – toutes proportions gardées – la même mise à jour n’est pas en train de se produire au sujet du terrorisme et de l’islam. C’est bien, cette fois encore, un point de vue dominant (surtout à droite) qui se voit dépiauté et contredit. A peine le livre est-il sorti qu’on a d’ailleurs vu naître des reproches analogues à ceux réservés à Simon Leys voici quelques décennies. Il est vrai que l’auteur ne manque pas d’audaces « incorrectes ». Pour Olivier Roy, il ne s’agit pourtant pas d’exonérer l’islam de sa responsabilité, loin s’en faut, mais à condition de ne pas se tromper. A ses yeux, la filiation première du djihadisme contemporain n’est pas l’islam mais une « radicalité » qui s’apparente surtout au terrorisme européen des années 1970 et 1980 : en Allemagne, la Fraction Armée rouge ; en France, Action directe ; en Italie, les Brigades rouges ; au Japon, le Nihon Sekigun (Armée rouge). Plusieurs centaines de victimes au total. Pour les terroristes d’aujourd’hui, dont la culture musulmane est proche de zéro, le recours à un islam fantasmatique est un « habillement », comme le fut jadis le recours à une vulgate marxiste. Depuis l’effondrement du communisme, du maoïsme et du socialisme arabe, écrit l’auteur, « les nouveaux rebelles en quête d’une cause n’ont plus qu’ Al-Qaida et Daech sur le marché ». Au passage, Roy pointe quelques poncifs produits par notre seule ignorance. On impute par exemple au salafisme les attentats-suicides alors même que les salafistes condamnent sans nuance cette « offense au Tout-Puissant ».

On objectera qu’il suffit malgré tout de compulser les sourates du Coran ou les hadiths du Prophète pour trouver des appels au meurtre et à la guerre. C’est ce que font méticuleusement, chez nous, des pourfendeurs de l’islam comme Michel Onfray, Jacques Julliard, Caroline Fourest ou, de manière plus rustique, Manuel Valls. A cela, l’auteur répond qu’il est toujours vain de « chercher à définir une orthodoxie musulmane dont les djihadistes représenteraient soit la quintessence, soit la perversion. […] C’est la pratique des croyants qui décide. La question n’est pas : “Que dit vraiment le Coran ?”, mais : “Que disent les musulmans sur ce que dit le Coran ?” »

A fouiller les textes saints dans leur « littéralité », on peut trouver des appels au meurtre dans le Premier Testament juif, dans les livres sacrés de l’hindouisme ou les professions de foi des catholiques intégristes. Quant à la défense d’une « laïcité française » qui serait menacée, Olivier Roy, d’origine protestante, en approuve le principe. Hélas, par le biais d’une dénonciation de l’islam, on en est venus à caricaturer ladite laïcité. Selon l’article 1 de la loi de 1905, elle est censée garantir le « libre exercice des cultes ». Or, aujourd’hui, n’importe quel signe religieux, qu’il soit juif, chrétien ou musulman, devrait être expulsé de l’espace public et cantonné à l’espace privé. Autre défaillance du langage : il est absurde de parler d’une religion « modérée ». La foi religieuse est toujours un absolu, c’est sa pratique qui doit être « modérée ». Au final, nos sociétés ne comprennent plus le religieux, voilà le vrai problème pointé par Olivier Roy.

Jean-Claude Guillebaud

Source : Téléobs 7/11/2016

Voir aussi : Rubrique Livres, Essais, rubrique Débat, rubrique Politique, rubrique Société, Religions,