Gambie: plainte de villageois contre une usine chinoise pour pollution à Gunjur

Bateaux-p-ches-gambiens.-1Les habitants de Gunjur, un village du littoral gambien situé au sud de la capitale, Banjul, ont assigné en justice une entreprise chinoise de traitement de poisson. Golden Lead déverse illégalement des tonnes de déchets toxiques directement dans l’Océan détruisant la faune et la flore aquatiques d’une région qui vit essentiellement de la pêche et du tourisme.

Après quelques mois d’activité à Gunjur, Golden Lead, entreprise chinoise spécialisée dans la production de farine de poisson destinée à la consommation d’animaux d’élevage, ne s’est pas fait que des amis. Au contraire. Une odeur pestilentielle et des nappes rouges à la surface de l’eau ont tout d’abord alerté les riverains. Puis ce sont des bancs de poissons entiers, retrouvés morts sur le rivage, qui ont attisé leur colère et conduit deux associations locales de défense de l’environnement à porter plainte contre l’usine. Il était temps: des baigneurs habitués du lagon avaient commencé à avoir des problèmes cutanés.

«Nous avons porté plainte au civil contre Golden Lead pour réclamer une interdiction définitive de la pollution par cette usine», a déclaré, le 1er août 2017, leur avocat Ebrima Jaiteh. Outre le retrait d’une canalisation de l’usine installée dans l’Océan, les plaignants réclament également à Golden Lead le versement de «15 millions de dalasis (277.000 euros) de dommages», a ajouté Me Jaiteh.«Nous ne reconnaissons rien. Nous allons nous défendre», a déclaré pour sa part l’avocat de Golden Lead, Lamin Camara.
Des poursuites avaient déjà été engagées, en juin 2017, contre cette usine chinoise. Mais l’Agence nationale de l’Environnement avait fini par retirer sa plainte à la suite d’un règlement à l’amiable avec les autorités gambiennes. Une tolérance de l’Etat qui s’explique par le fait qu’après le régime sans partage de Yahya Jammeh, le président gambien Adama Barrow est soucieux d’attirer les investisseurs, notamment chinois, pour relancer l’économie de ce petit pays d’Afrique de l’Ouest.La Chine a rétabli ses relations diplomatiques avec la Gambie en 2016 après que l’ancien gouvernement du président Yahya Jammeh a mis fin aux liens avec Taiwan.
Gunjur n’est pas un cas isolé
Mais le cas de Gunjur n’est pas isolé: les entreprises chinoises installées en Afrique sont souvent accusées de ne pas être assez respectueuses vis-à-vis de l’environnement. En 2014, des menaces pesaient déjà sur le littoral Gambien et une réflexion sur le lancement d’un processus d’un plan de prévention et de gestion de la pollution avait alors été menée.
La nouvelle plainte contre Golden Lead, qui a démarré son activité en septembre 2016, est suivie de près par des organisations de défense de l’environnement comme Greenpeace ou Green Wall Warriors, impliquées dans la sauvegarde des ressources marines de l’Afrique de l’Ouest. L’affaire sera examinée par la justice gambienne à partir du  25 octobre 2017. Dans cette zone du littoral du sud-ouest gambien, les populations vivent essentiellement de la pêche et du tourisme.
Charles Bonnaire

Source : Géopolis 04/08/2017

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La solitude des ex-captives de Daech

3cefeb4e-7451-4309-93bd-eb8e686b29fcLibérées dans l’indifférence générale de l’esclavage sexuel, les Yézidies rêvent de partir loin du Moyen-Orient, dans un monde moins cruel à l’égard des femmes et des minorités, souligne Al-Hayat.

Au mont Sinjar [chaîne de montagnes au nord de l’Irak peuplée de Yézidis, on sent que l’irréparable a été commis quand on croise les femmes yézidies qui ont survécu, et surtout le visage de celles qui ont été libérées de la captivité à laquelle elles avaient été réduites.< La plupart d’entre elles avaient vu leurs époux assassinés par Daech lors de l’invasion de cette contrée martyrisée [août 2014]. “Ils se sont mis à tuer nos hommes et à nous faire prisonnières”, résume une des Yézidies libérées.

C’étaient des hommes appartenant à des tribus arabes qui vivaient pourtant dans les alentours. Par ailleurs, lors de cette invasion, les peshmergas [kurdes] se sont retirés et nous ont abandonnés, donnant la priorité à la protection de leurs propres villages. Quant au gouvernement irakien, qui est dominé par les chiites, lui non plus n’a pas senti le besoin d’envoyer des troupes pour nous aider

Ces propos résument bien l’état d’esprit en Irak : la minorité est abandonnée par tous, aussi bien par les communautés majoritaires que par les minorités principales. Beaucoup d’autres groupes humains qui sont considérés comme faibles ont subi le même destin. Les Yézidis ont été abandonnés à leur sort par les tribus arabes sunnites, dont ils sont géographiquement proches, mais aussi par les Kurdes, dont ils sont culturellement proches.

Sous les latitudes du Moyen-Orient, personne ne veut plus protéger les sans-défense. Pas d’autres cultures à l’horizon que celle des razzias, pas d’autres traditions que celle de la capture. Au fond, c’est un peu la même chose qui s’est produite dans le cas des Syriens réfugiés au Liban et morts sous la torture entre les mains de l’armée libanaise. Les Libanais se sont solidarisés avec l’armée plutôt qu’avec les victimes.

Mais la destruction du pays yézidi dépasse tout. Les hommes ont été assassinés devant leurs enfants ; les femmes faites prisonnières avec leurs filles, dans un but bien précis [celui de les réduire au statut d’esclaves sexuelles].

Sept mille femmes yézidies réduites à l’esclavage, des milliers d’hommes yézidis tués. Alors que Daech a été défait au mont Sinjar et est aujourd’hui repoussé à des centaines de kilo mètres de là, les survivantes ne peuvent toujours pas rentrer chez elles.

En Irak, les gens ont en général perdu confiance dans leur avenir. Ils n’ont plus l’impression d’être en sécurité dans leur propre maison, dans leur village, entourés par leurs compatriotes.

Pour les enfants, le pays a désormais le visage de la potence où l’on a pendu leurs pères. Et les femmes ne se sentent plus à l’abri des seigneurs du rapt et du viol.

Un pays lointain

Environ 3 000 prisonnières ont été libérées. Elles reviennent de captivité chargées de récits trop lourds pour que l’Irak puisse en supporter l’écoute. Leurs traditions ne permettent pas que les drames obscurs soient sortis au grand jour.

Ces femmes vont enfouir leurs histoires dans leurs cœurs en attendant le jour où elles pourront partir pour un pays lointain, selon la promesse d’exil faite par les “grandes puissances”.

Ainsi, quoi qu’il en soit de la défaite de Daech, les Yézidis vont tous quitter le mont Sinjar. Tout comme les chrétiens vont tous partir de la plaine de Ninive.

Désormais, on n’aura plus à s’occuper des minorités ; les prochaines guerres opposeront des groupes majoritaires. Sauf que ceux-ci trouveront d’autres minoritaires pour leur tomber dessus. À la place des Yézidis et des chrétiens, on s’en prendra aux minorités à l’intérieur de chaque majorité : les faibles, ceux qui sont de trop, à qui on peut s’attaquer sans risque. Tous ceux-là seront à leur tour victimes de nouveaux Daech qui viendront.

L’histoire des Yézidis éclaire le rapport du Moyen-Orient actuel à ses minorités et à ses communautés sans défense. Cette relation se résume à l’insensibilité à la situation de l’autre nourrie d’un égocentrisme sans nuances.

Ce quant-à-soi, cette focalisation sur ses propres souffrances, cette hypertrophie du moi, tout cela est bien la marque d’une énorme régression sociale et culturelle.

Comme les Yézidis, les chrétiens vont tous partir de la plaine de Ninive. Les femmes Yézidies reviennent de captivité chargées de récits trop lourds. Les 500 000 Yézidis ont été le bouc émissaire de nos guerres civiles. Peu importe le nombre de leurs victimes, tant que leur mort n’est pas un obstacle à nos obsessions communautaristes.

Que les Yézidies se fassent violer, peu importe, tant que cela ne concerne pas nos femmes. Les Yézidis du Sinjar nous disent beaucoup d’autres choses encore sur nous-mêmes. Mais, à la fin, le plus grave est qu’ils ne retourneront plus dans leurs villages.

Ce qu’ils peuvent espérer de mieux est que se réalisent les promesses d’organisations et d’associations internationales de les transférer dans des pays d’immigration. Ceux qui ont une mère ou une sœur à Raqqa [encore capitale de Daech] attendent encore de les prendre avec eux pour partir, emportant au loin ces histoires que notre culture et nos traditions sont incapables d’entendre.

Les Yézidies libérées partiront vers des pays qui supporteront l’écoute de leurs récits. Elles y trouveront des personnes qui sécheront leurs larmes et écriront leurs histoires.

Quant à nous, nous resterons ici, privés de leur présence. Entre nous, encore et toujours plus semblables les uns aux autres. Viendra le temps où nous n’aurons d’autre altérité que nous-mêmes.

Source : Al-Hayat (extraits) Londres,—Hazem Al-Amin 10 juillet 2017

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Cambodge. Les dessous du business de la gestation pour autrui

Dans le village de de Puth Sar, dans le sud du Cambodge, où vit Chhum Long. Treize femmes, dont sa fille, ont loué leurs utérus pour porter l'enfant de parents étrangers . PHOTO AFP/ Tang Chhin Sothy TANG CHHIN Sothy / AFP

Dans le village de de Puth Sar, dans le sud du Cambodge, où vit Chhum Long. Treize femmes, dont sa fille, ont loué leurs utérus pour porter l’enfant de parents étrangers . PHOTO AFP/ Tang Chhin Sothy TANG CHHIN Sothy / AFP

L’imposition par le gouvernement d’un moratoire sur la gestation pour autrui laisse de nombreuses femmes ayant loué leur utérus dans une zone grise. Reportage.

Les mains crispées sur sa longue jupe, Chhum Samphors se tient le bas-ventre au niveau de la cicatrice laissée par sa récente césarienne. Le 9 juin dernier, cette jeune femme de 34 ans, originaire du village de Puth Sar dans la province de Takeo [sud du Cambodge], a donné naissance à des jumeaux à Phnom Penh.

Elle aurait pourtant dû accoucher à Bangkok, comme l’avaient prévu les “parents d’intention”, un couple homosexuel, et leur agence de gestation pour autrui (GPA).

Le ministère cambodgien de la Santé a soudainement interdit cette pratique florissante en octobre 2016. Un procès sans précédent sur le sujet est également en cours [trois personnes sont inculpées, notamment la fondatrice d’une agence australienne de gestation pour autrui]. Mais, des bébés continuent à naître de la GPA au Cambodge.

Suite à cette interdiction – qui n’a pas encore force de loi –, beaucoup d’agences ont migré vers le Laos voisin, ne laissant qu’incertitudes sur leur chemin : certaines Cambodgiennes ont même déclaré ne pas avoir reçu tout l’argent qui leur avait été promis.

Trois fois le revenu moyen

L’accouchement en Thaïlande se fait dans de meilleures conditions médicales qu’au Cambodge, a-t-on dit à la jeune mère porteuse, Samphors. Mais cela permet également aux “parents d’intention” de contourner la fastidieuse procédure juridique pour obtenir la garde des enfants et ainsi les faire sortir du territoire.

Immédiatement après leur accouchement à Phnom Penh, certaines mères porteuses doivent aller remettre les nouveau-nés à leurs parents biologiques à Singapour.

Courant mai, Samphors s’est rendue dans la capitale thaïlandaise. Elle devait y rester jusqu’au terme de sa grossesse, installée dans un appartement perché au septième étage d’un immeuble. Elle est partie au bout d’une semaine.

“Les soins sont de meilleure qualité en Thaïlande, mais je ne parle pas la langue alors je suis revenue ici”, explique-t-elle.

À Phnom Penh, elle a accouché de jumeaux à tout juste sept mois de grossesse. Nés prématurément, ils ont été immédiatement transférés à l’hôpital Calmette [un établissement public mais réservé à une élite], et elle n’a donc pas vu leurs visages. Avec un grand sourire, Samphors affirme que les futurs parents ont été très bons avec elle.

Ils ont toujours versé les 300 dollars [260 euros environ] de revenu mensuel en temps et en heure. Le revenu moyen mensuel moyen était selon le FMI de 95 euros en 2016. Lorsque ses trois enfants aînés sont tombés malades, ils ont participé à l’achat des médicaments.

La jeune femme dit avoir touché la somme convenue (entre 10?000 et 11?000 euros), ce qui lui a permis d’acheter une parcelle, d’y construire une maison et de se lancer dans un commerce de fruits et légumes.

Elle n’imaginait pas gagner un jour tant d’argent. Lorsqu’elle était ouvrière dans une usine de textile, elle touchait environ 110 euros par mois. Son mari, ancien ouvrier en bâtiment, transporte et vend maintenant du bois de chauffage pour 7 euros par jour.

Des intermédiaires en fuite

La GPA n’a pas été à la hauteur des espoirs de certaines.

Sean Keo, mère porteuse originaire de la province de Kratie [dans l’est du Cambodge], affirme qu’elle n’a pas reçu l’intégralité du montant prévu sept mois après son accouchement. Et comme beaucoup d’autres, son agence a quitté le pays.

Ils avaient promis de me payer 7?400 euros en tout, en comptant les 260 euros par mois pendant la grossesse”, indique-t-elle.

Trois semaines après l’accouchement, elle a perçu 2?700 euros, soit un total de 4?800 euros : “Je n’ai reçu aucun autre paiement depuis sept mois. Je n’ai plus aucune nouvelle”.

Même lorsqu’elles ont bien été payées tout au long des neuf mois de leur grossesse, certaines femmes ne parviennent pas à sortir de la pauvreté comme elles l’avaient espéré.

Chhum Long, une femme de 60 ans également originaire de Puth Sar, raconte l’histoire de sa fille Va Tey, qui a été mère porteuse. Elle a été payée en plusieurs fois (un revenu mensuel, puis 3?400 euros à la naissance et un dernier versement de 1?700 euros), mais n’a pas réussi à rembourser toutes les dettes de la famille ni à acheter de terrain.

Elle a aussi dû assumer une dépense imprévue, l’achat de lait en poudre pour son bébé (qui a maintenant 20 mois), alors qu’elle portait celui d’un autre. Cette dernière grossesse lui a ensuite permis de recommencer à allaiter son enfant.

Après son accouchement en février, Va Tey est allée remettre le nouveau-né aux futurs parents, un couple homosexuel, à Singapour. Au départ, elle s’était installée à Phnom Penh pour travailler dans le bâtiment, explique sa mère Chhum Long, qui admet avoir eu quelques regrets :

J’avais l’impression que c’était mon petit-fils. Il était très mignon, il avait les cheveux bouclés. C’était un garçon, et j’aime bien les garçons. S’ils me l’avaient confié, je l’aurais élevé”.

Chhum Long déclare cependant qu’elle soutiendrait sa fille si celle-ci souhaitait faire une nouvelle GPA (ce qui ne sera pas possible avant trois ans).

Début juin, la nièce de Chhum Long est allée à Phnom Penh pour accoucher. Et une autre de ses filles a aussi essayé, sans succès, de devenir mère porteuse.

Le chef de Puth Sar, Ouk Savouen, précise qu’il y a eu au moins 13 mères porteuses dans son seul village. Il explique que malgré l’afflux d’argent, la plupart d’entre elles sont toujours aussi pauvres car elles ne savent pas gérer leurs revenus. “Je suis inquiet de voir cette pratique persister dans mon village… Et je suis inquiet pour la santé des mères et des enfants”, confie-t-il.

Ouk Savouen a récemment appris que deux nouvelles femmes étaient devenues mères porteuses, mais elles refusent d’en parler devant lui : “Elles craignent de ne pas être payées si elles nous le disent”.

Des pratiques douteuses

Cette peur leur est transmise par les agents, qui prélèvent une commission d’environ 1?700 euros auprès des “parents d’intention” et d’environ 870 euros auprès des mères porteuses.

Au Comité national contre la traite des personnes (NCCT), Chou Bun Eng souligne que le gouvernement a accordé une amnistie temporaire [jusqu’en janvier 2018] aux “parents d’intention” et aux mères porteuses, mais qu’il ne sera pas aussi clément avec les intermédiaires. Elle ajoute :

Nous ne voulons pas de ces intermédiaires qui tentent d’exploiter les femmes et de les tromper en les poussant vers cette pratique. Ils ne pensent qu’à leurs commissions et méprisent la vie de ces femmes”.

“Je pense, dit-elle, que les agents et intermédiaires qui essayent de convaincre les mères d’accoucher en dehors du Cambodge – en Thaïlande par exemple – ne le font que pour contourner la procédure légale ou pour échapper aux enquêtes de la justice”.

Depuis le mois d’avril, les Cambodgiennes peuvent s’enregistrer auprès du gouvernement pour signaler leur statut de mère porteuse, mais elles ne seront protégées que jusqu’au 8 janvier 2018, indique encore Chou Bun Eng :

Les femmes qui accoucheront avant cette date bénéficieront de notre aide, et les parents pourront quitter le pays avec leur enfant en suivant la procédure légale. Nous pensons que les femmes sont victimes de cette pratique et qu’elles n’ont pas accès aux informations nécessaires… [Mais] si elles continuent à devenir mères porteuses après la date annoncée, nous considérerons qu’elles ont agi en connaissance de cause et elles risqueront donc d’être poursuivies en justice”.

 

La pauvreté en fait des proies

Selon Ros Sopheap de l’ONG Gender and Development for Cambodia, la GPA commerciale est “une violation des droits des femmes” et ce n’est en aucun cas une solution durable pour les aider à sortir de la pauvreté – surtout quand elles ne reçoivent pas l’intégralité du montant convenu.

“Beaucoup ont été exploitées… Tout le corps de la femme, des pieds à la tête, est utilisé par d’autres pour se faire de l’argent. Ils les trompent. Ce sont des gens qui trompent des femmes vulnérables que personne n’écoute. Elles sont tellement pauvres qu’elles ne peuvent qu’accepter”.

Ros Sopheap a fait pression auprès du gouvernement pour que les mères porteuses soient protégées et que la loi tant débattue sur la GPA soit enfin adoptée et appliquée. Elle interroge aussi la capacité des femmes à séparer l’expérience de la grossesse de la pure activité commerciale :

Lorsqu’une femme porte un enfant dans son ventre, elle communique avec lui à chaque instant”.

Pour sa part, Samphors affirme ne pas avoir de regrets. Elle admet cependant, alors qu’elle se relève avec précaution, être un peu triste d’avoir perdu tout lien avec les jumeaux qu’elle a portés.

Yon Sineat et Erin Handley

 

Source : The Phnom Penh Post – Phnom Penh Le Courrier International 14/07/2017

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Budgets « culture » : en baisse dans 59 % des collectivités territoriales

culturemasque-img-dossierL’Observatoire des politiques culturelles (OPC) a publié le 23 février 2017 une « note de conjoncture sur les dépenses culturelles territoriales » pour la période 2015-2016. Si la tendance à la baisse des crédits se confirme, elle n’est pas généralisée et tous les secteurs ne sont pas touchés de la même façon.

Pour la première fois, une étude fait le point sur les budgets « culture » des collectivités sur une période récente : 2015-2016. Habituellement, les enquêtes du ministère de la Culture portent sur des données remontant à 4 ans. Cette fois, l’Observatoire des politiques culturelles (OPC) associé au ministère de la Culture, produit une  « note de conjoncture sur les dépenses culturelles des collectivités territoriales » sur la période 2015-2016, qui permet de visualiser des évolutions dont les impacts sont en train de faire sentir sur le terrain.

Fléchissement

L’implication financière des collectivités (crédits de fonctionnement), tous échelons confondus, a fléchi sur la période 2015-2016. 59% d’entre elles ont fait le choix de baisser leur budget culturel. 30% seulement, l’ont augmenté. Selon les échelons, les comportements financiers s’avèrent différents, tant pour la tendance que pour les secteurs jugés prioritaires.

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Régions : le soutien aux associations préservé

En moyenne, la baisse des crédits culturels des régions’établit à 4%. Les arts visuels et plastiques constituent le secteur le plus sévèrement touché. Meilleure nouvelle, en revanche, pour l’éducation artistique et culturelle (EAC), dont les crédits sont stabilisés dans 4 des 9 régions étudiées et même en hausse dans 2 d’entre elles. De même, le soutien des régions aux structures et aux associations culturelles sortent, durant la période étudiée, quasi-indemnes des turbulences budgétaires.

Départements : repli sur les missions historiques

Du côté des départements, la tendance est au désengagement financier, en moyenne, à hauteur de de 5%. Mais pour un tiers d’entre eux, la coupe dépasse les 10%. « Un mouvement contenu depuis 2008 », soulignent les auteurs de la note de conjoncture. Et qui donne encore plus de relief au choix d’autres conseils départementaux qui décident d’intensifier leur engagement financier pour la culture : soit un quart des départements étudiés.

« Ces écarts sont révélateurs d’une disparité croissante des politiques culturelles départementales, souligne l’OPC. Tandis que certains continuent d’assumer un rôle moteur dans la gouvernance culturelle territoriale, en particulier en milieu rural, d’autres, plus nombreux, semblent se retirer fortement du jeu de la coopération entre collectivités. »

Parmi les premiers sacrifiés figurent les associations, touchées dans plus de 60% des départements. Egalement lourdement frappés, les événements, à commencer par les festivals, le spectacle vivant et, plus généralement, la création artistique. A contrario, les bibliothèques, les archives et le patrimoine,  trois missions historiques, et même obligatoires (à travers les bibliothèques départementales de prêt et les services d’Archives départementales pour les deux premières) restent préservés.

Grandes villes : baisse modérée, mais impact «saisissant»

Environ la moitié des villes de plus de 100 000 habitants (catégorie étudiée) a réduit son budget culturel de fonctionnement. Mais dans une amplitude plus faible que dans les départements : – 7% en moyenne, avec quelques cas seulement à – 10%.

Un constat que l’OPC explique par la nature des dépenses des villes : charges de gestion de structures et charges de personnel, ces dernières ayant d’ailleurs augmenté sur la période étudiée. « Du fait de la place majoritaire des villes dans le financement culturel, l’impact sur les politiques territoriales d’une telle tendance à la baisse est particulièrement saisissant, que ce soit du point de vue des moyens, de la vitalité culturelle ou de la spirale de désengagement que cela peut susciter », s’alarme l’OPC.

Là encore, c’est l’événementiel qui trinque. L’EAC, le spectacle vivant, la création artistique étant moins touchés.

Source OPC

Source OPC

Horizon budgétaire incertain

En 2017, la moitié des régions compte stabiliser leurs budgets culturels. Du côté des départements et des villes de plus de 100 000 habitants, les dés ne sont pas encore jetés, entre stabilité pour les uns (34% des départements et 36% des grandes villes) ou baisse pour les autres (27% des départements et 29% des grandes villes).

Au total, tous échelons confondus, ce sont près de 25% des collectivités qui envisagent une baisse des crédits pour la culture, et un peu plus de 30% qui espèrent les stabiliser. Un autre tiers n’a pas encore déterminé la tendance qui sera suivie. Seulement 3% des collectivités affirment avoir l’intention d’augmenter ces dépenses.

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Coopération renforcée contre l’« affaissement » des ambitions politiques

Globalement, l’OPC parle de baisse « dans des proportions qui restent contenues ». Sa note de conjonctuure avance  deux raisons pour expliquer ces coupes budgétaires imposées aux politiques culturelles territoriales. Pour la première – la baisse des dotations de l’Etat aux collectivités, ces dernières ne font que subir de plein fouet une décision qui leur est extérieure. Et cette explication peut malgré tout laisser espérer une réflexion des collectivités pour limiter autant que faire se peut l’impact de cette pénurie de fonds publics.

En revanche, la seconde a de quoi inquiéter : «l’affaissement de l’ambition politique dans ce domaine. Bref, la culture n’a plus la même évidence dans les politiques territoriales. » Et l’OPC de faire un rappel historique qui sonne comme une exhortation : « les politiques culturelles en France ont progressé lorsqu’elles faisaient l’objet d’une ambition partagée entre État et collectivités territoriales et entre pouvoirs locaux eux-mêmes. C’est cette perspective du renforcement des coopérations qui peut redonner un élan à la culture dans les territoires. »

La nécessité d’un suivi rapproché

Avec cette « note de conjoncture » établie sur les deux dernières années, 2015-2016, l’Observatoire des politiques culturelles (OPC) veut mettre fin à un suivi trop espacé des évolutions enregistrées par les budgets culturels des collectivités territoriales. En effet, les études, complètes et détaillées, réalisées par le Département des études, de la prospective et des statistiques (DEPS) du ministère de la Culture, ne sont publiées que tous les 4 ans. Pendant longtemps, explique l’OPC, « l’absence d’un repérage réactif des budgets culturels des collectivités territoriales n’était pas un problème majeur dans la mesure où la France a connu, dans la dynamique de l’essor de la décentralisation, une longue période de progression ou de consolidation de l’effort des pouvoirs locaux en matière culturelle. » Et de préciser que la crise budgétaire apparue à la fin des années 2000 provoquent des « fluctuations rapides » de ces dépenses, que les acteurs de terrain ont besoin de connaître pour opérer négociations et arbitrages.

Hélène Girard

Source La Gazette.fr 23/02/2017

Voir aussi : Actualité France rubrique Politique, Politique culturelle, Politique économique, Macron met les collectivités au régime sec, Politique locale, Les réformes qui ont bouleversé les collectivités territoriales en dix ans,

 

Les réformes qui ont bouleversé les collectivités territoriales en dix ans

fotolia_96467418_m371Le gouvernement a annoncé, lundi, que les collectivités locales devraient économiser 13 milliards d’euros d’ici à 2022. Ces dernières ont dû faire de nombreux efforts ces dernières années.

Les collectivités locales vont encore devoir dépenser moins durant ce quinquennat. A l’occasion de l’ouverture de la conférence des territoires, lundi 17 juillet, le ministre des comptes publics, Gérald Darmanin, a annoncé qu’elles devront réaliser 13 milliards d’euros d’économies d’ici à 2022. Soit 3 milliards de plus que prévu dans le programme présidentiel d’Emmanuel Macron.

« On ne peut pas s’essuyer une nouvelle fois les pieds sur les collectivités locales », a réagi le président de l’Association des maires de France (AMF), François Baroin, estimant que l’effort supplémentaire demandé « fait qu’on passerait sous la ligne de flottaison ».

« Sur les trois dernières années, les collectivités ont réalisé 34 % d’économie à l’échelle de toutes les dépenses nationales, alors que 80 % de la dette est de la responsabilité de l’Etat (…). Nous nous sommes donc déjà beaucoup serré la ceinture. Là je dis que trop, c’est trop », considère M. Baroin.

Retour sur les principales mesures prises au cours des deux derniers quinquennats.

  • La taxe professionnelle supprimée puis remplacée

En réformant la taxe professionnelle, en 2009, Nicolas Sarkozy voulait en finir avec cet impôt « injuste, néfaste pour nos entreprises, pour la croissance et pour l’emploi » et facteur de délocalisations. Cette taxe payée par les entreprises et calculée sur leur chiffre d’affaires constituait alors près de la moitié des revenus des collectivités territoriales et représentait en brut près de 33 milliards d’euros.

Cette suppression avait été saluée par la présidente du Medef à l’époque, Laurence Parisot : « Nous savons que la taxe professionnelle, c’est ce qui pénalise l’industrie française. Aucun pays industrialisé n’a un impôt de ce type qui pénalise l’investissement, le futur. »

Mais cette réforme amputait les collectivités locales d’une importante rentrée d’argent. Pour compenser cette perte, la taxe professionnelle avait été remplacée par une nouvelle taxe, la contribution économique territoriale versée par les entreprises aux collectivités. En 2012, un premier bilan a été fait sur cette suppression. Le président du comité des finances locales, André Laignael, affirmait alors qu’« un fonds de compensation relais » mis en place avait évité une trop grande chute des ressources fiscales pour les collectivités locales. Mais cette manne financière s’était toutefois « érodée » au fil des années, avait-il annoncé.

La dotation globale de fonctionnement en baisse constante

La dotation globale de fonctionnement (DGF), c’est-à-dire l’enveloppe allouée par l’État aux collectivités territoriales, a baissé constamment durant le dernier quinquennat. Elle est passée de 41,5 milliards en 2013 à 30,8 milliards en 2017, ce qui a provoqué la grogne des maires.

Il ne s’agit pas d’une seule dotation mais de plusieurs, notamment pour les communes :

  • une dotation « de base » ;
  • une « dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale » pour les communes urbaines avec de lourdes charges mais peu de ressources ;
  • une « dotation de solidarité rurale » pour les petites communes de milieu rural avec peu de ressources ;
  • une « dotation nationale de péréquation », mécanisme de « solidarité » entre collectivités dans lequel les plus riches vont reverser une partie de leurs ressources aux plus défavorisées après un calcul complexe.

François Hollande avait promis de réformer cette DGF, de simplifier l’architecture complexe de la dotation forfaitaire des communes, en réduisant le nombre de composantes des critères d’attribution. Mais cette réforme a été sans cesse repoussée et n’a finalement jamais été mise en place.

En ouverture de la conférence des territoires, lundi, le premier ministre, Edouard Philippe, a déclaré :

« Plutôt que de parler directement et spontanément de baisse des dotations, nous devons essayer, et c’est un exercice délicat, de trouver un mécanisme assurant la baisse de la dépense publique, la baisse de l’endettement public, plus intelligemment que par l’imposition brutale d’une baisse des dotations. »

  • Des régions qui passent de 22 à 13

C’est la réforme phare de François Hollande en matière de collectivités territoriales. La réduction de 22 à 13 régions en France métropolitaine a été adoptée en décembre 2014 et est entrée en vigueur début 2016. Par ce redécoupage, le chef de l’Etat souhaitait redessiner la France pour plusieurs décennies avec « des régions de taille européenne » et moteurs du développement économique.

Les députés de l’UMP et des sénateurs de droite notamment avaient saisi le Conseil constitutionnel, estimant que le gouvernement aurait dû recueillir « l’avis consultatif préalable des collectivités concernées ». Mais « ce grief » a été écarté par les juges constitutionnels en avril 2016.

  • De moins en moins de communes en France

C’est l’autre réforme importante engagée sous François Hollande pour les collectivités locales : la loi NOT, pour Nouvelle organisation territoriale de la République. Ce texte adopté en juillet 2015 a redéfini les compétences de chaque échelon territorial. Aux régions, l’économie et les grandes orientations stratégiques, aux départements, la solidarité, et au bloc communal, les services de proximité.

La clause de compétence générale, qui permettait à une collectivité territoriale de se saisir de tout sujet ne relevant pas de l’Etat, a été supprimée pour les départements et les régions.

Cette loi a provoqué un bouleversement pour les quelque 36 000 communes. Si, depuis 2010, elles étaient obligées d’adhérer à un groupement de communes, la loi de 2015 a fixé le seuil minimal des intercommunalités à 15 000 habitants contre 5 000 auparavant. Ce qui a provoqué une accélération des regroupements.

Selon une étude de l’AMF, rendue publique en mars, 542 « communes nouvelles » ont été créées depuis cinq ans, à partir du regroupement de 1 820 villes ou villages. En début d’année, la France ne comptait plus que 35 498 communes.

Après ces nombreuses réformes, l’actuel gouvernement souhaite laisser la liberté aux territoires de prendre des initiatives locales en ce qui concerne les créations de communes nouvelles ou les regroupements de départements.

  • La suppression de la taxe d’habitation pour 80 % des ménages

C’est l’une des promesses phares du candidat Macron. La suppression de la taxe d’habitation pour 80 % des ménages sera étalée entre 2018 et 2020. Dans une interview aux Echos le 11 juillet, Edouard Philippe a annoncé qu’une première étape aura lieu dès 2018, soit une baisse d’impôts évaluée à 3 milliards d’euros.

Au bout du compte, sur la vingtaine de milliards d’euros que cette taxe rapporte aux communes chaque année, ce sont 8,5 milliards qui n’entreront plus, à terme, dans leurs caisses, selon le chiffrage du ministère des comptes publics.

Si M. Macron a promis de compenser cette perte « à l’euro près », « on ne laissera rien passer qui ne soit pas calculé, prévu », a prévenu, dans Le Journal du dimanche du 16 juillet, le président (LR) du Sénat, Gérard Larcher.

Les collectivités devraient être soumises à d’autres économies. Le candidat Macron a évoqué la suppression d’environ 70 000 postes dans la fonction publique territoriale.

Source Le Monde AFP 17/07/2017

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