Libérées dans l’indifférence générale de l’esclavage sexuel, les Yézidies rêvent de partir loin du Moyen-Orient, dans un monde moins cruel à l’égard des femmes et des minorités, souligne Al-Hayat.
Au mont Sinjar [chaîne de montagnes au nord de l’Irak peuplée de Yézidis, on sent que l’irréparable a été commis quand on croise les femmes yézidies qui ont survécu, et surtout le visage de celles qui ont été libérées de la captivité à laquelle elles avaient été réduites.< La plupart d’entre elles avaient vu leurs époux assassinés par Daech lors de l’invasion de cette contrée martyrisée [août 2014]. “Ils se sont mis à tuer nos hommes et à nous faire prisonnières”, résume une des Yézidies libérées.
C’étaient des hommes appartenant à des tribus arabes qui vivaient pourtant dans les alentours. Par ailleurs, lors de cette invasion, les peshmergas [kurdes] se sont retirés et nous ont abandonnés, donnant la priorité à la protection de leurs propres villages. Quant au gouvernement irakien, qui est dominé par les chiites, lui non plus n’a pas senti le besoin d’envoyer des troupes pour nous aider
Ces propos résument bien l’état d’esprit en Irak : la minorité est abandonnée par tous, aussi bien par les communautés majoritaires que par les minorités principales. Beaucoup d’autres groupes humains qui sont considérés comme faibles ont subi le même destin. Les Yézidis ont été abandonnés à leur sort par les tribus arabes sunnites, dont ils sont géographiquement proches, mais aussi par les Kurdes, dont ils sont culturellement proches.
Sous les latitudes du Moyen-Orient, personne ne veut plus protéger les sans-défense. Pas d’autres cultures à l’horizon que celle des razzias, pas d’autres traditions que celle de la capture. Au fond, c’est un peu la même chose qui s’est produite dans le cas des Syriens réfugiés au Liban et morts sous la torture entre les mains de l’armée libanaise. Les Libanais se sont solidarisés avec l’armée plutôt qu’avec les victimes.
Mais la destruction du pays yézidi dépasse tout. Les hommes ont été assassinés devant leurs enfants ; les femmes faites prisonnières avec leurs filles, dans un but bien précis [celui de les réduire au statut d’esclaves sexuelles].
Sept mille femmes yézidies réduites à l’esclavage, des milliers d’hommes yézidis tués. Alors que Daech a été défait au mont Sinjar et est aujourd’hui repoussé à des centaines de kilo mètres de là, les survivantes ne peuvent toujours pas rentrer chez elles.
En Irak, les gens ont en général perdu confiance dans leur avenir. Ils n’ont plus l’impression d’être en sécurité dans leur propre maison, dans leur village, entourés par leurs compatriotes.
Pour les enfants, le pays a désormais le visage de la potence où l’on a pendu leurs pères. Et les femmes ne se sentent plus à l’abri des seigneurs du rapt et du viol.
Un pays lointain
Environ 3 000 prisonnières ont été libérées. Elles reviennent de captivité chargées de récits trop lourds pour que l’Irak puisse en supporter l’écoute. Leurs traditions ne permettent pas que les drames obscurs soient sortis au grand jour.
Ces femmes vont enfouir leurs histoires dans leurs cœurs en attendant le jour où elles pourront partir pour un pays lointain, selon la promesse d’exil faite par les “grandes puissances”.
Ainsi, quoi qu’il en soit de la défaite de Daech, les Yézidis vont tous quitter le mont Sinjar. Tout comme les chrétiens vont tous partir de la plaine de Ninive.
Désormais, on n’aura plus à s’occuper des minorités ; les prochaines guerres opposeront des groupes majoritaires. Sauf que ceux-ci trouveront d’autres minoritaires pour leur tomber dessus. À la place des Yézidis et des chrétiens, on s’en prendra aux minorités à l’intérieur de chaque majorité : les faibles, ceux qui sont de trop, à qui on peut s’attaquer sans risque. Tous ceux-là seront à leur tour victimes de nouveaux Daech qui viendront.
L’histoire des Yézidis éclaire le rapport du Moyen-Orient actuel à ses minorités et à ses communautés sans défense. Cette relation se résume à l’insensibilité à la situation de l’autre nourrie d’un égocentrisme sans nuances.
Ce quant-à-soi, cette focalisation sur ses propres souffrances, cette hypertrophie du moi, tout cela est bien la marque d’une énorme régression sociale et culturelle.
Comme les Yézidis, les chrétiens vont tous partir de la plaine de Ninive. Les femmes Yézidies reviennent de captivité chargées de récits trop lourds. Les 500 000 Yézidis ont été le bouc émissaire de nos guerres civiles. Peu importe le nombre de leurs victimes, tant que leur mort n’est pas un obstacle à nos obsessions communautaristes.
Que les Yézidies se fassent violer, peu importe, tant que cela ne concerne pas nos femmes. Les Yézidis du Sinjar nous disent beaucoup d’autres choses encore sur nous-mêmes. Mais, à la fin, le plus grave est qu’ils ne retourneront plus dans leurs villages.
Ce qu’ils peuvent espérer de mieux est que se réalisent les promesses d’organisations et d’associations internationales de les transférer dans des pays d’immigration. Ceux qui ont une mère ou une sœur à Raqqa [encore capitale de Daech] attendent encore de les prendre avec eux pour partir, emportant au loin ces histoires que notre culture et nos traditions sont incapables d’entendre.
Les Yézidies libérées partiront vers des pays qui supporteront l’écoute de leurs récits. Elles y trouveront des personnes qui sécheront leurs larmes et écriront leurs histoires.
Quant à nous, nous resterons ici, privés de leur présence. Entre nous, encore et toujours plus semblables les uns aux autres. Viendra le temps où nous n’aurons d’autre altérité que nous-mêmes.
Source : Al-Hayat (extraits) Londres,—Hazem Al-Amin 10 juillet 2017
En France aussi, ces derniers jours, la question de l’engagement militaire à l’extérieur et sur le territoire national est à nouveau posée : participation des Rafale, des forces spéciales et artilleurs français aux opérations de reconquête de Mossoul, en Irak ; hommage national, à Nice, aux victimes de l’attentat du 14 juillet ; naissance officielle d’une « Garde nationale » dans l’Hexagone, pour soutenir les forces armées ; surenchères à droite pour conjurer le risque terroriste ; retour d’un débat, à gauche, sur la légitimité d’une opération qui mettrait en danger les populations « ici et là-bas »…
La bataille lancée pour la reprise de Mossoul, deuxième ville d’Irak, présentée comme « décisive », est le fait de l’armée irakienne, appuyée par des milices kurdes, chiites, sunnites, et leurs protecteurs iraniens ou turcs. Elle a été précédée — côté coalition internationale — d’une opération au sol qui ne disait pas son nom, comprenant des milliers de soldats occidentaux.
Ainsi, par exemple, outre ses 150 instructeurs en poste à Bagdad, l’armée française déployait depuis plusieurs mois dans le secteur de Mossoul 140 éléments de ses forces spéciales, notamment auprès des combattants kurdes peshmergas, ainsi que 160 artilleurs chargés de mettre en œuvre les batteries de canons lourds Caesar.
Une telle intervention, décidée dans le secret des conseils de défense quasi hebdomadaires à l’Élysée, aurait mérité au minimum une information du Parlement, comme l’a rappelé par exemple l’ancien ministre Pierre Lellouche (du parti Les Républicains). La première déclaration officielle n’est intervenue que mercredi dernier, au Sénat, devant un hémicycle clairsemé, suivie d’un débat sans vote… et sans passion. (1).
La France avait également anticipé cette offensive sur Mossoul, en envoyant fin septembre en Méditerranée orientale — en concertation avec l’allié américain — son unique porte-avions, le Charles de Gaulle, avec son escadrille embarquée d’une vingtaine de Rafale qui ont multiplié les missions depuis le début octobre. Tout en restant très minoritaire dans la coalition, Paris a ainsi triplé les moyens de frappe de son opération Chammal au Proche-Orient, ce qui lui permettra — selon le général Vincent Desportes (francetvinfo.fr, 30 septembre) — « d’avoir un peu plus la parole au moment du règlement du conflit ».
Guerre sans images
À l’exception de ce qui reste du PCF et des organisations gauchistes, quelques rares voix s’élèvent contre l’interventionnisme militaire français. Le philosophe et essayiste Michel Onfray a relevé le défi ces dernières semaines, appelant à « faire la guerre à la guerre », pour une série de raisons exposées dans une de ses chroniques récentes sur sa nouvelle WebTV :
• Les bombardements génèrent le terrorisme, par l’enchaînement classique de répliques, vengeances, etc.
• Ils font le miel de la presse et des marchands de canon (qui possèdent, on le sait, plusieurs des médias les plus importants (2) ;
• en s’attaquant à Mossoul, puis Raqqa, en Syrie, on ne fait que déplacer le problème ;
• on fabrique des réfugiés qui débarquent sur le territoire français ou ailleurs en Europe ;
• on fait l’impasse sur les droits humains (par exemple, en coopérant et en commerçant avec l’Arabie saoudite, qui mène sa propre guerre sans principes au Yémen) ;
• on nous cache les images, les « dégâts collatéraux » (mort ou blessures de civils).
Ennemi-système
Sur ce dernier point, l’état-major fait valoir que :
• la France n’agit pas isolément, mais dans le cadre d’une coalition sous direction américaine (NDLR : dans une proportion de 5 % environ en temps normal, et de près de 20 % depuis que le porte-avions Charles de Gaulle croise en Méditerranée orientale) ;
• les sorties d’appareils français sont plus nombreuses depuis deux semaines (reconnaissance, appui aux troupes au sol, traitement de cibles programmées [assassinats ciblés], contrôle aérien, ravitaillement), mais menées selon une règle d’attribution en « time block », par jour et par secteur aérien, selon une programmation qui a peu de relation directe avec la situation du moment (3) ;
• le type de mission et d’armement varie selon les caractéristiques de la cible traitée ;
• le bilan concret d’un bombardement reste de toute façon difficile à établir, même si l’on procède toujours à des réunions d’évaluation post-frappes, et si des contacts, notamment avec des militants de certaines ONG sur le terrain (comme l’Observatoire syrien des droits de l’homme), combinés avec d’autres sources, permettent de s’en faire une idée, au moins quelques jours ou semaines plus tard ;
• l’issue d’un raid pris isolément « n’a pas de sens tactique », puisqu’il s’agit d’agir contre un ennemi-système (centres de commandement, garages, camps d’entraînement, ateliers, etc), l’objectif étant, selon le chef de la cellule de communication à l’état-major, de « déstructurer ce système ».
Règles d’engagement
Un haut-gradé de l’armée de l’air nous a par ailleurs rappelé, lors d’un point de presse récent au ministère de la défense, que les « règles d’engagement » françaises restaient très strictes, avec croisement et recroisement des sources : elles seraient « un poil plus restrictives que celles des Américains », et beaucoup plus que celles des Russes (qui ne s’interdisent pas de bombarder en zone urbaine). Cet officier assure qu’il n’a jamais eu d’écho de « bavures » d’origine française (qui auraient été signalées par une ONG ou d’autres sources) (4).
On relèvera, sur ce thème, le propos ironique récent du président russe Vladimir Poutine, accusé de « crimes contre l’humanité » pour les bombardements de ses chasseurs sur des quartiers d’Alep, en Syrie : au cours d’un conférence de presse à Goa, en Inde, le 16 octobre dernier, en marge d’un sommet sur les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud), M. Poutine a dit « espérer que nos partenaires américains, et nos partenaires français aussi, agiront avec précision [dans leurs frappes sur Mossoul] et feront tout pour minimiser, ou mieux, exclure toute victime civile parmi la population civile ».
Guerre juste
Reste une vaste autre question : quelle utilité, quelle efficacité, quelle légitimité ont ces bombardements de la coalition ? Certes ils vont désormais s’amplifier, en appui aux troupes au sol, mais quid de ceux menés depuis plus de deux ans sans résultats déterminants ? Les frappes aériennes contribuent-elles à l’antiterrorisme, ou alimentent-elles au contraire le terrorisme, en raison des « dommages collatéraux » qu’elles engendrent inévitablement, du ressentiment qu’elles créent, etc. ?
Une question à laquelle s’est intéressé également Michel Onfray, décidément très porté sur le sujet, qui fait grand cas d’un livre de Howard Zinn, La Bombe, sous-titré « De l’inutilité des bombardements aériens » (réédition, récemment traduite en français, d’un ouvrage paru en 1955). L’auteur, jeune militaire, était à bord d’un des appareils de l’US Air force qui ont bombardé et détruit Royan en 1945, aux motifs d’une « guerre juste », mais sans raison militaire valable, selon lui (5). Professeur en science politique, membre de la gauche critique, auteur d’une somme sur le mouvements populaires aux États-Unis, Zinn (mort en 2010 (6)) avait également contesté dans ce livre le lancement par l’aviation américaine de bombes atomiques sur Hiroshima et Nagasaki, ou la destruction de la ville de Dresde. (7)
Se référant à Jean Jaurès, regrettant l’alignement en 1990 de François Mitterrand sur George Bush père lors de la deuxième guerre d’Irak, Michel Onfray soutient que « le reniement de la tradition de la gauche pacifiste a mis les terroristes dans la rue » : la multiplication des interventions occidentales plus ou moins calamiteuses au Proche-Orient et en Afrique, sans légitimité ou utilité sinon celle de satisfaire les lobbies de l’armement ou assurer l’accès aux ressources pétrolières, a contribué, selon le philosophe, à créer un climat de ressentiment et de vengeance dans ces pays, terreau pour toutes sortes d’aventures.
Continuum défense-sécurité
Au gouvernement, on estime à l’inverse qu’il n’y a pas de connexion directe entre les frappes en Irak-Syrie et les attentats dans l’Hexagone : ce n’est pas parce qu’elle ne serait pas attaquée là-bas, entre autres par des soldats français, que l’Organisation de l’État islamique (OEI) renoncerait à frapper en France. Au contraire, le meilleur moyen de protéger la population est d’attaquer le mal à sa source, en Irak et en Syrie, comme en Libye et au Sahel.
Cependant, explique-t-on, il s’agit du « même ennemi » ici et là-bas. D’où la convergence entre la police — qui a tendance à se militariser, pour faire face à des menaces de type nouveau — et l’ armée, qui intervient de plus en plus sur le territoire national (opération Sentinelle) : une illustration du « continuum » défense-sécurité déjà pris en compte dans les deux derniers Livres blancs sur la défense.
La prochaine étape de ce processus sera vraisemblablement son extension en direction de la société civile (polices municipales, sapeurs pompiers, sécurité civile, sociétés privées de sécurité). Laquelle est déjà sur les rails, mais que ne manquera pas de mettre en œuvre, si elle arrive au pouvoir, une droite avide depuis des décennies de muscler et étendre les dispositifs de sécurité. D’ores et déjà, cette question de l’intervention des militaires dans la sécurité du territoire national aura suscité ces derniers mois un débat stratégique comme il y en a rarement eu en France, ainsi que le souligne Florent de Saint-Victor, sur le site spécialisé Mars attaque.
Vrais professionnels
C’est dans ce cadre aussi qu’il faut placer la création d’une Garde nationale, décidée le 12 octobre dernier en Conseil des ministres, « pour répondre au besoin de protection et au désir d’engagement des Français », souligne l’Élysée. Loin de constituer une armée-bis (comme elle l’est aux États-Unis, avec, dans chaque État, une garde nationale relevant du gouverneur), cette Garde nationale à la française relance et modernise les réserves des armées, de la gendarmerie et de la police, qui existent depuis toujours. Elles sont actuellement de 63 000 hommes et femmes, et devraient passer à 85 000 d’ici 2018 (40 000 pour la défense, 40 000 pour la gendarmerie, 5 000 pour la police).
Cette accélération du recrutement est donc la seule nouveauté du dispositif. Pour ce faire, des « mesures d’attractivité » ont été décidées, comme une aide de 1 000 euros à l’obtention du permis de conduire, des primes de fidélisation, un soutien aux entreprises qui « prêtent » leurs salariés pour des périodes de quelques jours à quelques semaines chaque année, etc. Le budget des réserves (qui se monte actuellement à 210 millions d’euros) a été porté à 311 millions. Un portail internet (garde-nationale.fr) a été créé.
Un secrétaire général (général d’armée ou de gendarmerie) coordonnera l’ensemble des réserves, sous ce nouveau label « Garde nationale » ; mais leur emploi sera de la compétence des chaînes de commandement des différentes forces, le ministère de la défense insistant sur le fait que les réservistes sont des vrais militaires, même s’ils sont de fait des « professionnels à temps partiel ».
L’objectif est de pouvoir déployer dans deux ans jusqu’à 9 250 réservistes chaque jour (contre 5 500 aujourd’hui), sans que soit définie, pour le moment, une éventuelle spécificité de cette Garde nationale, en terme de missions (de sécurité surtout, pour décharger Sentinelle ?), de champ d’action (le territoire national en piorité ?), de chaîne de commandement (plus autonome, avec commandement unifié ?). Pour l’heure, les plus réservés paraissent être… les réservistes actuels.
Philippe Leymarie
(1) La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat a publié le 13 juillet dernier un rapport très complet sur les interventions extérieures de la France.
(3) Sauf, bien sûr, en cas de demande d’appui feu, lorsqu’une unité au sol alliée est en difficulté.
(4) Ce qui paraît plutôt étonnant, puisque d’autres pays de la coalition, notamment les États-unis, n’y échappent pas, en dépit de l’extrême précision des tirs.
(5) Les unités de la Wehrmacht encore opérationnelles dans la région stationnaient hors de la ville ; et la capitulation paraissait inévitable. Le bombardement de Royan, en trois vagues, avait fait plus de mille morts. Le napalm y avait été utilisé pour la première fois.
(7) On trouvera, dans « Bombarder pour vaincre », de l’universitaire américain Robert Page ( Centre d’Etudes stratégiques aérospatiales-La Documentation française, 2011) une étude approfondie de l’exercice géopolitique de la puissance aérienne, et de la réaction des bombardés au Japon, bien sûr ; mais aussi en Corée, au Vietnam, en Allemagne ou en Irak.
La rupture par l’Arabie saoudite de ses relations diplomatiques avec l’Iran, dimanche 3 janvier, a creusé la cassure confessionnelle entre chiites et sunnites au Moyen-Orient. Cette montée des tensions entre les deux puissances rivales de la région est trop rapidement réduite à un conflit confessionnel entre sunnites et chiites. Pour y voir plus clair, voici un résumé de ce qui lie, différencie et oppose ces deux grandes familles de l’islam.
Une division historique
La division entre sunnisme et chiisme est historiquement le fruit d’un conflit de succession, après la mort du prophète, en 632 à Médine, dans l’actuelle Arabie saoudite. Les compagnons du prophète choisissent l’un d’entre eux, Abou Bakr, en conclave selon la tradition tribale. Selon les chiites, le pouvoir légitime revenait en droit aux descendants directs du prophète, par sa fille Fatima et son gendre Ali. Ecarté du pouvoir, ce dernier deviendra, vingt-cinq ans plus tard, le quatrième calife. Son règne, contesté par Mouawiya, un proche du troisième calife, Osman, assassiné, se termine dans la confusion et il meurt tué par d’anciens partisans devenus dissidents, les kharidjites.
Hussein, le fils d’Ali, qui se soulève contre l’autorité du calife Mouawiya, installé à Damas, sera tué lors de la bataille de Kerbala, en 680. Les chiites révèrent Ali, ses descendants et successeurs comme les « douze imams », persécutés, qui servent d’intermédiaires entre les croyants et Dieu. L’islam sunnite, lui, se voit comme la continuité des premiers califes de l’islam, qui ont conservé intacts et fait observer les commandements de Mahomet.
Une différence de doctrine
Le sunnisme, qui rassemble environ 85 % des musulmans, tend à se définir par opposition aux sectes qui ont parcouru l’histoire de l’islam, en premier lieu le chiisme, et revendique un idéal de consensus. Il se veut fidèle aux origines et pur d’influences étrangères, bien qu’il comprenne une grande variété d’interprétations et de traditions.
Il se définit par l’acceptation du Coran, parole de Dieu, et des enseignements et exemples donnés par le prophète, transmis sous forme de récits et d’informations (« ?adith » et « khabar »). Il opère un constant retour à ces textes.
Le chiisme partage ces sources fondamentales. Il est, lui aussi, très diversifié. Sa branche principale (« duodécimaine ») est caractérisée par le culte des douze imams et l’attente du retour du dernier d’entre eux, Al-Mahdi, « occulté » en 874 aux yeux des hommes mais toujours vivant, qui doit réapparaître à la fin des temps. En son absence, le clergé est investi d’une autorité particulière : il permet une médiation de l’autorité divine. Les religieux chiites sont structurés en une véritable hiérarchie cléricale, à la différence des oulémas (théologiens) sunnites.
Quelle répartition géographique ?
Le sunnisme est majoritaire au Maghreb et en Afrique noire, en Libye et en Egypte, en Turquie, en Arabie saoudite et dans le Golfe, en Syrie, en Afghanistan et au Pakistan, en Inde et en Indonésie. Les chiites sont majoritaires en Iran, en Irak, à Bahreïn et en Azerbaïdjan, et significativement présents au Liban, au Yémen et en Syrie, en Afghanistan, au Pakistan et en Inde.
Des rivalités exacerbées par les luttes politiques
Les divisions entre sunnites et chiites fluctuent à travers l’Histoire, selon les luttes politiques. Au XVIe siècle, la dynastie safavide, qui impose le chiisme en Iran, combat ainsi la Turquie ottomane, sunnite, même si la religion n’explique qu’en partie leur différend.
A l’époque moderne, en 1979, la révolution islamique iranienne polarise le Moyen-Orient. La volonté iranienne d’exporter sa révolution et sa politique de soutien à des groupes armés chiites, en premier lieu le Hezbollah, au Liban, mais aussi au Koweït, cristallisent les rivalités avec les pays arabes sunnites de la région, qui soutiennent Saddam Hussein dans sa guerre contre l’Iran (1980-1988). Au même moment l’Arabie saoudite, où le wahhabisme, un courant du sunnisme ultrarigoriste et antichiite, est religion d’Etat, soutient le djihad antisoviétique en Afghanistan. Al-Qaida s’y forgera.En 2003, l’invasion américaine de l’Irak déclenche une guerre civile entre chiites et sunnites irakiens. La branche irakienne d’Al-Qaida y développe un djihad spécifiquement antichiite, et forme, avec le renfort d’anciens cadres du régime de Saddam Hussein, la matrice de l’actuelle organisation Etat islamique (EI). Celle-ci profite aujourd’hui du ressentiment des populations sunnites d’Irak contre le gouvernement dominé par les partis chiites, et sous influence iranienne. L’EI a par ailleurs mené des attentats terroristes contre des communautés chiites loin de ses lignes de front d’Irak et de Syrie, jusqu’en Arabie saoudite, au Koweït, au Yémen et au Liban.
En 2011, dans la foulée des « printemps arabes », la Syrie bascule dans la guerre civile. La répression du régime, tenu par la minorité alaouite (une branche du chiisme) à laquelle appartient la famille Assad, a favorisé la montée en puissance d’un extrémisme sunnite, communauté dont est issue la quasi-totalité de la rébellion anti-Assad. Par la suite, le régime a libéré des prisonniers djihadistes sunnites, dont certains ont rejoint l’EI, le Front Al-Nosra (la branche syrienne d’Al-Qaida) et des groupes radicaux, afin de diviser et discréditer l’opposition comme la rébellion.
Une rivalité mise en scène par l’Iran et l’Arabie saoudite
Le conflit syrien est devenu un terrain d’affrontement, par alliés interposés, entre l’Iran, dont les forces et les milices chiites internationales (Liban, Irak, Afghanistan) combattent aux côtés des troupes régulières et de la Russie, et les puissances sunnites que sont l’Arabie saoudite, la Turquie et les monarchies du Golfe, qui appuient des groupes rebelles.
Arrivé au pouvoir en janvier 2015 en Arabie saoudite, le roi Salmane a adopté une stratégie agressive pour contrer l’influence iranienne au Moyen-Orient. Ce raidissement s’est matérialisé par l’entrée en guerre de l’Arabie saoudite au Yémen, en mars 2015. Le royaume saoudien, qui a formé une coalition de neuf pays arabes sunnites, cherchait à empêcher la rébellion des houthistes, de confession zaïdite (une branche du chiisme), alliés à l’Iran, de s’emparer de son voisin du Sud.
Des militaires patrouillent la gare de Lyon à Paris. AFP
La France continue à privilégier la dimension militaire dans sa lutte contre les djihadistes.
D’où vient le groupe djihadiste Daech ?
Né en 2006, d’une scission d’Al-Qaida en Mésopotamie, l’irruption de Daech (acronyme arabe de l’organisation armée État islamique) sur la scène du djihadisme international résulte d’une conjonction de facteurs.
En mai 2003, la décision américaine de dissoudre le parti Baas et de démanteler l’armée de Saddam Hussein a eu pour effet de faire basculer une grande partie des soldats et officiers sunnites du côté de différents groupes insurgés, notamment Al-Qaida puis Daech. La politique sectaire du gouvernement central irakien, notamment celui de Nouri Al-Maliki, a joué dans le même sens, poussant une partie de la communauté sunnite dans les rangs des insurgés.
Ces opposants au gouvernement de Bagdad, à dominante chiite, ont été soutenus par l’Arabie saoudite et d’autres pays du Golfe, sous forme d’envois de volontaires, d’armes et d’aide financière. Daech a ensuite profité du vide politique né de l’échec du soulèvement contre Bachar Al Assad et de la guerre civile pour se développer en Syrie.
La Turquie a laissé les combattants étrangers rejoindre Daech, fermé les yeux sur son approvisionnement en armes et accueilli ses blessés dans ses hôpitaux.
Quels sont ses objectifs ? et ses moyens ?
Daech veut mettre en place un État fondé sur la loi islamique et dirigé par le « calife » autoproclamé Abou Bakr Al-Baghdadi.
Le groupe djihadiste contrôle aujourd’hui un territoire de près de 200 000 km2 entre l’Irak et la Syrie et dispose d’une armée de plusieurs dizaines de milliers de combattants, dont un tiers d’origine étrangère, et d’un équipement militaire (chars, humvees et artillerie) laissé sur place par l’armée irakienne lors de la prise de Mossoul en juin 2014.
Ses ressources financières sont également importantes?: avoirs récupérés dans les banques sur son territoire, contrebande de pétrole, trafic des antiquités, racket et financement extérieur. Plusieurs groupes lui ont fait allégeance?en Lybie, en Égypte et au Nigeria.
La France est-elle l’une des cibles privilégiée ?
Revendiqués par l’organisation, les attentats de Paris contre des civils suggèrent une inflexion de la stratégie du groupe terroriste, centrée jusque-là sur la création de ce « califat » sur les ruines de l’ordre établi au Proche-Orient à la fin de la première guerre mondiale avec les accords Sykes-Picot.
Sur la défensive en Syrie et en Irak, Daech se tourne vers l’action terroriste à l’extérieur, particulièrement en Europe, une zone facile d’accès pour ses combattants et lui assurant un maximum de résonance.
La France, avec son passé colonial, sa « laïcité » affichée, son interdiction du voile et son importante communauté musulmane, constitue une cible toute désignée pour l’organisation djihadiste, soucieuse d’affirmer sa capacité de nuisance et son pouvoir d’attraction.
Après l’attentat de Beyrouth et le crash de l’avion russe dans le Sinaï, les attaques de Paris relancent le spectre d’une campagne planifiée et coordonnée par la direction de Daech, qui jusque-là se contentait d’inspirer des actes de violence commis par des « loups solitaires ».
Quelle est la place de la France dans la « guerre contre le terrorisme » ?
Depuis quinze ans, les États-Unis, suivis par leurs alliés européens, mènent une « guerre contre le terrorisme ». De l’Afghanistan, au lendemain du 11 septembre 2001, cette guerre s’est étendue à l’Irak, au Yémen, à la Somalie, aux pays du Sahel, à la Libye et à la Syrie. Sous la présidence de François Hollande, Paris est devenu le premier partenaire militaire de Washington sur de multiples fronts.
L’intervention française au Mali (opération Serval) s’est élargie depuis le 1er août 2014 à tout le Sahel (opération Barkhane). En Syrie, Paris a milité pour des frappes aériennes contre le régime en 2013, intervention refusée par les États-Unis et le Royaume-Uni.
L’engagement dans la coalition conduite par les États-Unis des forces aériennes françaises (opération Chammal) en Irak (septembre 2014), puis en Syrie (septembre 2015) s’est ajouté aux théâtres d’opérations au Sahel et en Centrafrique. L’engagement français comprend également une centaine de conseillers et forces spéciales déployées en Irak, à Erbil, et à Bagdad.
La contribution française aux vols de reconnaissance et aux bombardements (4 % des frappes en Irak, trois raids réalisés en Syrie) reste modeste mais François Hollande, chef des armées, a délibérément adopté un discours guerrier, multipliant les déclarations publiques à chaque étape de l’engagement français.
Cette communication de guerre, comme la traque assumée des recrues françaises de Daech en Syrie, a fortement contribué à installer la posture d’une France en première ligne.
L’action militaire va-t-elle s’amplifier ?
Le nombre de soldats mobilisés en France dans le cadre de l’opération Sentinelle va passer de 7 000 à 10 000 hommes. Le ministre de la défense, Jean-Yves le Drian, a annoncé la définition prochaine d’une nouvelle doctrine d’emploi des armées sur le territoire national. Les frappes françaises vont s’intensifier en Syrie et en Irak avec la participation des moyens aériens supplémentaires apportés par l’envoi du porte-avions Charles de Gaulle dans le golfe Persique.
Les forces spéciales et l’armée de l’air française ont participé, en soutien, à la reprise de Sinjar, la semaine dernière, par les forces kurdes. Les autorités françaises continuent à exclure l’envoi de troupes au sol en Syrie.
L’éradication militaire des « barbares » est-elle possible?? Certains en doutent. Dans une tribune libre publiée dans L’Opinion, le député européen Arnaud Danjean (Les Républicains) évoque « une grave illusion nous condamnant à être les Sisyphe de l’interventionnisme ».
Le Figaro (Pierre Rousselin) La sanction de l’échec des islamistes.
« Mohammed Morsi s’est révélé encore plus incapable de gérer son pays que ne l’avait été Hosni Moubarak. À la différence de son prédécesseur, qui s’était maintenu à la tête de l’Égypte pendant trente longues années, le président islamiste, élu dans la plus stricte légitimité ilyaunan, aura très vite soulevé la vague de contestation qui est en passe de l’emporter. Les événements auxquels nous venons d’assister place Tahrir ressemblent beaucoup à ceux qui s’y sont déroulés en 2011 et qui avaient conduit à la chute du dictateur. Maintenant comme à l’époque, les contestataires sont le fer de lance du mouvement révolutionnaire. Mais, en coulisse, c’est toujours l’armée qui a le dernier mot. Face au soulèvement de la jeunesse urbaine, les généraux avaient, il y a deux ans, lâché le patriarche en bout de course et son clan d’affairistes. Ainsi ont-ils préservé leurs prébendes et leurs intérêts économiques et industriels considérables, qui font de l’institution militaire un État dans l’État égyptien…Une fois installé au pouvoir, avec 51,7% des voix, Morsi a présidé une parodie de démocratie. Sans rien régler des problèmes économiques, sans tenir compte des intérêts du pays, il a imposé la loi de son propre mouvement, le droit de vote n’étant pour ses partisans, qu’un moyen de faire régner la dictature du plus grand nombre. En un an, l’opposition s’est mieux organisée. L’armée, qui s’était accommodée de Morsi, l’a finalement lâché, à son tour. La partie est délicate : il faut éviter l’apparence d’un putsch qui compromettrait l’aide américaine, éviter aussi que les islamistes se présenter en victimes d’un coup d’État contre une démocratie qu’ils n’ont jamais su, ni voulu, faire fonctionner. »
Libération (Fabrice Rousselot)
« Le spectre d’un retour vers le passé. La peur d’une guerre civile et d’un coup d’Etatmilitaire dans la violence comme l’Egypte en a malheureusement déjà connu. En un an de pouvoir, Mohamed Morsi n’a pas su faire la preuve qu’un islam modéré peut évidemment s’inscrire dans un cadre démocratique. Il a, au contraire, suivi sa propre dérive autoritaire, focalisant toutes les frustrations autour de sa réforme controversée de la Constitution, qui porte clairement atteinte aux libertés publiques et aux libertés religieuses. Et ravive les pires inquiétudes. Dans un pays exsangue,Mohamed Morsi n’a pas su répondre non plus aux aspirations économiques d’une population lassée de voir, depuis des décennies, les richesses se concentrer entre les mains de l’élite politique. Aujourd’hui donc, l’armée a repris la main, avec tous les dangers que cela comporte. Les militaires, qui se sont engagés à organiser une nouvelle élection présidentielle, ont la responsabilité de prendre la voie du dialogue et non celle des armes, afin que pouvoir et opposition trouvent une porte de sortie. »
AFP archives/Fred Dufour
Ouest France (Laurent Marchand)
« C’était devenu depuis quelques jours la seule issue prévisible. Sous la pression de la rue. Sous le poids de ses échecs économiques et politiques. Mohamed Morsi, le premier président civil élu démocratiquement de l’Égypte moderne, a été renversé. L’armée est à la manoeuvre, par le biais du général al-Sissi, le chef des armées et ministre de la Défense. La foule scandait son nom sur la place Tahrir depuis dimanche. Devant le risque croissant de guerre civile, l’intervention de l’armée était souhaitée par une large part de l’opinion. Officiellement, les militaires n’entendent pas gouverner, autrement dit revenir à la situation qui prévalait sous Moubarak, mais guider une transition. Tenter de la remettre sur les rails où les Frères musulmans n’ont pas su la tenir. Rédiger une nouvelle constitution…Ce qui est encore totalement imprévisible, c’est l’impact que ce retour du pouvoir de l’armée aura sur toutes les composantes de l’islam politique…Au Caire, c’est l’armée qui écoute la rue à présent. Tout en conservant sa position ultradominante sur l’économie, la sécurité et la politique égyptienne. C’est la révolution qui est permanente, ou la contre-révolution ? »
Le Journal de la Haute Marne (Patrice Chabanet)
« Un coup d’Etat militaire n’est jamais l’expression d’un bon bilan de santé démocratique. Mais entre deux maux il faut choisir le moindre. C’est du moins l’objectif que s’est assigné l’armée égyptienne en suspendant la Constitution du pays et en destituant le président Morsi. Ce dernier, démocratiquement élu c’est vrai, n’a pas su fédérer les énergies d’un pays exsangue. Il n’a pas été capable non plus d’endiguer la montée de groupes plus radicaux que les Frères musulmans, comme en témoignent les agressions contre les chrétiens coptes. L’armée a promis de retourner dans les casernes après une période de transition. Encore faut-il que la classe politique parvienne à réduire ses divisions et à mieux délimiter les prérogatives de la religion. L’Egypte entre donc dans une période d’incertitude où les extrémistes, les salafistes en particulier, vont pousser leurs pions…C’est le président de la Cour constitutionnelle qui assurera l’intérim à la tête de l’Etat. Et ce sont des experts civils qui formeront le gouvernement provisoire. Reste à savoir ce que fera l’Egypte des campagnes, fortement imprégnée de la propagande islamiste. Jusqu’à présent, c’est l’Egypte des villes qui s’est fait entendre. Un univers sépare les deux. Les nouveaux maîtres du Caire sauront-ils les rapprocher ? Rien n’est moins sûr. »
L’Est Républicain (Alain Dusart)
« Comme la société égyptienne, la place Tahrir au Caire, ressemble à un kaléidoscope, inquiétant car en fusion. On y voit des jeunes branchés sur le XXIe siècle, des quadras las d’une dictature chassant l’autre, de troubles larrons en quête de mauvais coups, d’ex-miliciens et autres nervis nostalgiques en quête d’un régime autoritaire. Sur cette place bigarrée, théâtre de tous les espoirs, on y rêve d’un avenir meilleur, on y viole de jeunes femmes en fleur. Ici réside tout le paradoxe de l’Égypte, entre quête de modernité et de démocratie, et bestialité d’une génération de frustrés élevés au biberon des tabous et des interdits. L’ultimatum de la toute puissante armée a expiré hier. L’impopulaire président islamiste Mohamed Morsi a finalement été renversé. Mais les militaires le savent bien: s’ils mènent un coup d’État à leur seul profit, ils perdront le soutien américain. Dans ce tourbillon, les Frères musulmans ont beaucoup à perdre. Certes, ils ont une légitimité démocratique, mais elle a fondu. Les islamistes ont agrégé toutes les colères en un an. Si les généraux déposent Morsi, les Frères musulmans garderont une capacité de nuire. Leurs partisans endoctrinés pourront saboter cette révolution bis, avec le risque jamais loin d’une guerre civile. »
Les Dernières Nouvelles d’Alsace (Dominique Jung)
« Parvenue aux commandes de l’Egypte après des décennies de brimades, de répressions et d’incarcérations, la confrérie des Frères musulmans n’a pas su tenir le choc du pouvoir. Cet échec pèsera dans son histoire. C’est parce qu’il a multiplié les promesses sans les appuyer sur une méthode solide que Mohamed Morsi a perdu sa présidence. Son bilan est calamiteux. Élu démocratiquement, il a présidé arbitrairement. Son erreur a été de penser que parce qu’il avait gagné un scrutin, il pouvait ignorer les attentes de la société civile. Or gouverner un pays, c’est comprendre qu’on devient le président de tous les citoyens, et pas juste de la frange qui vous a hissé au pouvoir. Morsi s’est comporté en otage d’un parti plus qu’en chef d’État, il a piétiné le pouvoir législatif, cela lui a été fatal. Pour autant, le déploiement de blindés constaté hier relève du coup d’État militaire. Morsi restera comme le premier civil égyptien porté à la présidence de la République après une succession de soldats, de Nasser à Moubarak. Il était aussi le premier Égyptien élu à travers une élection au suffrage universel direct. Son mandat avait tout juste un an. Quelle que soit la pression de la rue, aucun pays d’Europe n’admettrait que l’on pose un cercle de barbelés autour du chef de l’État pour l’assigner à résidence. Le respect des procédures et des calendriers est aussi une façon de mesurer le niveau démocratique d’un pays. L’armée est maintenant face à ses responsabilités. »
La République des Pyrénées (Jean-Marcel Bouguereau)
« C’est un paradoxe comme l’histoire les aime : en Egypte un mouvement démocratique qui a vu ces derniers jours des foules immenses descendre dans la rue en a appelé aux forces armées pour évincer un président démocratiquement élu, au nom de la défense de la révolution qui s’était faite contre l’armée ! C’est cette même armée, à l’origine de plusieurs décennies de régimes autoritaires, qui vient de mettre fin à une présidence jugée trop autoritaire ! Car c’est un coup d’état très en douceur qui a eu lieu hier en Egypte, même si les partisans du Président Morsi ont évidemment dénoncé une +rébellion militaire+ qu’ils sont prêts à combattre en versant leur sang. De quoi préparer un futur très incertain à une Egypte qui souffre économiquement, dont les institutions sont faibles et où aucun leader crédible n’émerge. Dans ce pays où l’armée a conservé un énorme crédit, on trouvait ces derniers jours des pancartes portant l’inscription +l’armée et le peuple, une seule main+, cette transition a été mûrement préparée. L’armée a multiplié les ultimatums. Mais en vain, Morsi ne se décidant à aucune concession. Jusqu’à celui intimant au président de +satisfaire les revendications du peuple+. Morsi a tenté, mais trop tard, une ultime ouverture en proposant la formation d’un gouvernement de consensus. Car ce dont les Frères Musulmans ne se sont pas rendus compte, c’est l’énorme coupure entre eux et le peuple qui voyait de plus en plus dans le régime des Frères la restauration d’un régime autoritaire. »
La Nouvelle République du Centre Ouest (Bruno Bécard)
« La charia ne saurait constituer un programme de gouvernement capable de sortir un pays de sa misère sociale et économique. Des dizaines de millions d’Égyptiens ont fait cette douloureuse expérience depuis un an. Et l’armée, forte d’un million d’hommes et dotée d’un matériel moderne imperméable à la crise, a tenu parole hier : fin de l’ultimatum pour obtenir le départ du président Morsi, prise de contrôle de la télévision, les Frères musulmans vissés dans leurs quartiers et les blindés de sortie pour faire bonne mesure. Cet épisode s’appelle un coup d’État militaire. Et maintenant, l’aventure commence ou plutôt continue. L’armée, en appui aux millions d’opposants à Mohamed Morsi, a-t-elle simplement voulu éviter une guerre civile ? Déjà 47 morts depuis trois jours. Son chef Abdel Fattah al-Sissi n’a tenu aucun compte de la proposition présidentielle, celle d’un gouvernement de coalition. Le président élu démocratiquement voici un an est blackboulé par la feuille de route du militaire. L’armée, échaudée par l’année de transition qu’elle a assumée entre 2011 et 2012, annonce déjà des élections anticipées et des avancées démocratiques. Mais montre aussi ses muscles pour que l’ordre règne. +Légitimité+ crie chacun des deux camps opposés. Mais aujourd’hui la place Tahrir manifeste plus de légitimité populaire que finalement celle hier du scrutin présidentiel. Espérons que ne surviendra pas demain l’heure des martyrs de tous bords ».
A l’étranger
L’avertissement égyptien qui fait le tour du Web américain
Le moins que l’on puisse dire, c’est que les États-Unis ont laissé de mauvais souvenirs dans cette région du monde. Face à coup d’Etat « en douceur », le président Obama avait mercredi du mal à se positionner, hésitant entre le soutien au peuple égyptien et l’inquiétude de voir l’armée prendre le pouvoir et destituer un président élu malgré tout démocratiquement..
En fin de soirée mercredi, les Etats-Unis ont d’ailleurs ordonné l’évacuation de leur ambassade au Caire en Egypte quelques heures après le renversement du président Morsi par l’armée, a indiqué un responsable américain sous couvert d’anonymat. Il y a quelques jours, le département d’Etat avait autorisé le personnel diplomatique non essentiel à quitter le pays. Côté officiel, le président Obama ne s’était toujours pas exprimé mercredi à minuit.
Mais les Egyptiens, eux, n’ont pas manqué de faire passer leur message.Une banderole a été déployée écrite en anglais et en arabe. En quelques heures elle est devenue l’un des sujets les plus discutés sur le réseau social Reddit, très utilisé outre-Atlantique:
De la part du peuple égyptien Aux politiciens américains: sortez vos sales pattes de l’Egypte A l’ensemble du peuple américain: la seule chose que nous ayons pour vous, c’est de l’amour
Un message qui a beaucoup fait parler sur le réseau social. Certains déplorant l’anti-américanisme du scandale, mais la majorité se réjouissant que le peuple égyptien soit capable de faire la part des choses entre le gouvernement américain d’une part, et les Américains d’autre part.
Il faut dire que l’affaire Prism, révélée par Edward Snowden, est en train de créer une rupture entre les Américains et leurs représentants, coupables de les avoir mis sur écoute en toute discrétion.
Source : Le HuffPost 04/07/13
L’armée, colonne vertébrale de la nation égyptienne
Des soldats egyptiens prennent position. 3/07/13 Reuters /Amr Abdallah
Décidément, Nasser n’est pas mort. Soixante et un ans presque jour pour jour après la révolution de juilet 1952, lorsque les « officiers libres » ont mis fin au règne du roi Farouk, un militaire – le chef d’état-major Abdel Fattah Al-Sissi – écarte le premier président démocratiquement élu de l’histoire de l’Egypte – Mohamed Morsi – sous les applaudissements d’une majorité de la population.
De 1952 à 2013, l’armée égyptienne est restée la colonne vertébrale de la nation égyptienne. Peu importe la paix signée avec Israël dans les années 1970, peu importe l’enrichissement des hauts gradés dans les années 1980-1990 et 2000 ou la répression menée après la révolution de février 2011, une fois Hosni Moubarak tombé et durant la transition sous l’égide du maréchal Tantaoui, à la tête du SCAF, l’acronyme du Conseil suprême des forces armées.
Peu importent les tests de virginité pratiqués de force sur les manifestantes, les 12 000 procès militaires, la complaisance révélée tardivement lors de la mémorable bataille des chameaux place Tahrir, l’armée reste, dans l’imaginaire de la majorité des Egyptiens, la « fille du peuple » et le seul vecteur du changement politique. Le chemin vers la démocratie est encore long en Egypte…
Christophe Ayad
Source : Le Monde 3 juillet 2013
L’aide US à l’Egypte va être réexaminée
L’aide annuelle d’un montant d’un milliard et demi de dollars que les Etats-Unis allouent à l’Egypte va être réexaminée en tenant compte de l’éviction du président Mohamed Morsi, a indiqué mercredi le sénateur Patrick Leahy qui préside la sous-commission chargée du contrôle de l’aide américaine à l’étranger.
« Les chefs militaires égyptiens affirment ne pas avoir l’intention, ni le désir de gouverner, et j’espère qu’ils tiendront leurs promesses », a commenté Leahy dans un communiqué.
« En attendant, notre droit est clair: l’aide américaine est suspendue lorsqu’un gouvernement démocratiquement élu est déposé par un coup d’Etat ou un décret militaire », a-t-il rappelé.
Des étoiles plein la tête
L’orient du Jour ( Christian Merville)
Mardi soir, les téléspectateurs avaient eu droit, quarante-cinq minutes durant, au spectacle pathétique d’un homme seul, lâché par ses alliés salafistes et par l’armée, désavoué par une importante fraction de son peuple et, le dos au mur, agrippé à une légitimité désormais vidée de toute substance. Une semaine durant, l’Égypte a donné l’impression de vivre un remake des heures de janvier-février 2011 qui avaient débouché sur l’éviction de Hosni Moubarak : le même rejet au niveau de la rue, le même refus obstiné de voir l’évidence, peut-être aussi les mêmes baltaguiyah stérilement acharnés à contre-manifester et au bout du compte la même institution/arbitre, même si son chef – ironie du sort – doit sa promotion à ce président qu’il s’est employé avec succès à renvoyer à ses équerres d’ingénieur. Exit donc l’homme qui avait endossé l’espace d’une courte année un habit trop grand pour lui.
Peut-être pas, après tout, un remake fidèle car, tout comme l’histoire ne repasse jamais les mêmes plats, cette fois les cartes étaient différentes et différente la conjoncture. L’ancien raïs avait mis 30 ans à dilapider le capital qui lui était offert sur le plateau de la présidence. Mohammad Morsi, lui, sera parvenu à se constituer un impressionnant passif fait de décisions improvisées, de faux pas, de mesures impopulaires et d’un blitzkrieg administratif mené tambour battant pour prendre le contrôle de l’appareil étatique. Les messages se multipliaient pourtant, venant de la rue qui lui a rappelé à plus d’une reprise son rejet de toute forme de dictature remplaçant celle de son prédécesseur. Sans résultat, à preuve les dernières nominations de gouverneurs (11 Ikhwane pour un total de 17, dont un responsable venu des rangs de la Gamaa islamiya mais lâché par celle-ci, une trahison qui a achevé de dissiper le peu de crédibilité qui restait au titulaire de la fonction suprême, devenue si dérisoire.
Par le biais du Parti de la construction et du développement, sa branche politique, la Gamaa est entrée sur le tard dans la danse du scalp : son porte-parole, Tarek el-Zommor, a fini par se prononcer pour une élection présidentielle anticipée, précédée toutefois d’un référendum sur son opportunité. Il était clair que les extrémistes islamiques n’avaient pas été saisis d’un soudain prurit démocratique, motivés plutôt par la conviction que les Frères musulmans, devenus décidément infréquentables, pourraient fort bien, lors d’inévitables législatives à venir, leur céder la place, bien sûr en toute fraternité. L’absence d’un ciment unificateur est tout aussi évident dans les rangs de Tamarrod, assemblage hétéroclite de laïcs, de déçus par l’expérience religieuse, d’activistes du mouvement Kefaya et du Front du salut national, d’opportunistes aussi comme il y en a dans tous les courants dits révolutionnaires. Le chef de l’État sortant (ou plutôt sorti) a tenté de jouer sur cette disparité pour proposer à maintes reprises un dialogue, sachant pertinemment que la coalition ne pouvait lui opposer qu’un néo-« front du refus » sans réelle consistance.
Finalement, le camp du « non » a revêtu l’armure du chevalier jusqu’au-boutiste, le régime s’est barricadé dans sa détermination à exciper du verdict des urnes et l’armée s’est posée en gardienne du temple. La conséquence ? Désastreuse à long terme pour tout le monde, puisque aucun des acteurs du psychodrame n’est en mesure de reprendre à son compte le flambeau. Fort heureusement, le ton, très digne, du communiqué de l’armée a permis d’éviter ce qui tournait à la pantalonnade. On a entendu, par exemple, Morsi adopter des accents dignes de Danton pour clamer haut et fort qu’il préférait la mort violente à une condamnation par l’histoire. Salvador Allende, réveille-toi…
Et puisque l’on donne dans la grandiloquence, que faut-il penser du serment prêté par les chefs de l’armée, le général Abdel Fattah Sissi en tête : « Nous jurons devant Dieu que nous sacrifierons notre sang pour l’Égypte et son peuple contre tous les groupes terroristes, extrémistes et ignorants » ? Vaste programme aurait dit le général de Gaulle. Il importe de rappeler pour l’occasion que pas plus que le jugement des urnes, les sacrifices ne sauraient tenir lieu de programme d’action. D’ailleurs, ils ont dû déchanter ceux qui, au soir de dimanche dernier, avaient cru déceler un acte de candidature dans le lâcher de drapeaux au-dessus de la foule agglutinée place Tahrir par des hélicoptères. Non, décidément, l’armée n’a pas des envies de revenez-y. Chiche !
La recette pour une démocratie réussie est fort simple : prendre des démocrates ; adopter une ligne de conduite (et non pas une « feuille de route ») ; donner, mais pas trop, du temps au temps avant de servir, tiède de préférence. Et surtout éviter d’agiter. Scénario à la Nasser : samedi 26 juillet 1952, le roi Farouk, qui vient de signer son acte d’abdication, quitte le palais de Ras el-Tine pour le yacht Mahroussa à bord duquel il doit s’embarquer. Au pied de la passerelle, le général Naguib fait le salut militaire pendant que la fanfare exécute l’hymne national et qu’une salve de 21 coups de canon est tirée. C’est qu’ils savaient, quand il le fallait, y mettre les formes, les hommes en uniforme. Et demain ? On verra bien…
Christian Merville
Source L’Orient du Jour 04/07/13
Silence prudent d’Israël après la chute du président égyptien
AFP | 04/07/2013
Le gouvernement israélien gardait un silence prudent jeudi après la mise à l’écart par l’armée égyptienne du président islamiste Mohamed Morsi.
Selon les médias, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a donné la consigne à ses ministres de ne pas faire le moindre commentaire officiel pour le moment sur la crise en Egypte, pays avec lequel Israël signé un traité de paix en 1979.
« Le gouvernement suit de très près la situation en Egypte mais ne fait pas de prévisions car les choses sont en train d’être décidées », a déclaré à l’AFP un responsable israélien sous couvert de l’anonymat.
« Il est important que le peuple égyptien puisse accéder à un niveau de liberté et d’auto-gestion (…) mais la situation actuelle envoie des ondes de choc dans tout le monde arabe d’où une certaine inquiétude en Israël », a-t-il ajouté.
« Israël fait attention d’éviter même l’apparence d’une interférence avec les événements en Egypte », soulignait le spécialiste militaire du quotidien Haaretz Amos Harel.
Israël et l’Egypte entretenaient des liens réguliers sous la présidence de l’ancien président Hosni Moubarak, chassé du pouvoir par une révolte populaire en février 2011, notamment dans le domaine sécuritaire.
Alors que certains prédisaient une remise en question du traité de paix avec la chute du régime Moubarak, des sources militaires, citées par les médias israéliens, ont affirmé que le bon fonctionnement de la coopération sécuritaire avait continué sous la présidence Morsi.
Selon ces sources, la proximité du mouvement islamiste palestinien Hamas, au pouvoir à Gaza, avec les Frères musulmans avait notamment permis à M. Morsi de lutter plus efficacement que ne l’avait fait son prédécesseur contre les islamistes radicaux dans la péninsule du Sinaï et contre les tunnels de contrebande entre Israël et la bande de Gaza.
Les commentateurs relevaient que les principales inquiétudes israéliennes portent sur les risques d’instabilité accrue dans le Sinaï.
« L’incertitude sur l’avenir de l’Egypte est très important et il est plus difficile pour l’Egypte, occupé par des problèmes intérieurs, de s’occuper des problèmes sécuritaires, et notamment des groupes terroristes dans le Sinaï », a déclaré un responsable israélien non identifié, cité par la radio militaire.
La sécurité dans le Sinaï s’est fortement dégradée et la péninsule a connu une recrudescence d’activités de la part des mouvement islamistes radicaux, jihadistes et salafistes.
Égypte : l’Allemagne parle d’un « échec majeur pour la démocratie »
Le ministre des Affaires étrangères voit dans ce renversement un « réel danger que le processus de transition démocratique soit sérieusement altéré ».
Le renversement du président islamiste égyptien Mohamed Morsi par l’armée égyptienne mercredi constitue un « échec majeur pour la démocratie », a déclaré jeudi le ministre allemand des Affaires étrangères, Guido Westerwelle. « Il est urgent que l’Égypte retourne aussi vite que possible à un ordre constitutionnel (…), il y a un réel danger que le processus de transition démocratique en Égypte soit sérieusement altéré », a-t-il dit, alors que le président du Conseil constitutionnel égyptien, Adly Mansour, a prêté serment dans la matinée comme président du Conseil par intérim.
« Nous appelons toutes les parties à renoncer à la violence. Nous allons suivre de très près les évolutions en Égypte. Et nous allons prendre nos décisions politiques en tirant nos conclusions », a ajouté M. Westerwelle, qui a rencontré dans la matinée le Premier ministre grec pour le soutenir dans sa politique de réformes. « Les arrestations politiques et une vague de répression doivent être évitées à tout prix. Tout doit être mis en oeuvre pour retourner sur le chemin de l’ordre démocratique » a ajouté le ministre. À Londres, le ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague, a indiqué de son côté jeudi matin que le Royaume-Uni allait « travailler » avec le nouveau pouvoir en place en Égypte, tout en réaffirmant que Londres ne soutenait pas « les interventions militaires ».
AFP 14/07/13
Assad: la crise en Egypte incarne « la chute » de « l’islam politique »
« Quiconque utilise la religion dans un but politique ou pour favoriser certains par rapport à d’autres, est condamné à l’échec »
Le président syrien Bachar al-Assad a assuré que les manifestations monstres contre son homologue égyptien déchu Mohamed Morsi marquent la fin de l’islam politique, selon des extraits d’une interview à un journal syrien à paraître jeudi
« Ce qui se passe en Egypte est la chute de ce que l’on connaît comme étant l’islam politique », a déclaré le chef de l’Etat syrien au journal officiel As-Saoura.
« Où que ce soit dans le monde, quiconque utilise la religion dans un but politique ou pour favoriser certains par rapport à d’autres, est condamné à l’échec », a ajouté M. Assad, dont les extraits ont été diffusés sur sa page Facebook.
L’armée égyptienne a annoncé dans un message télévisé mercredi soir avoir écarté M. Morsi, suspendu la Constitution et annoncé la tenue d’une élection présidentielle anticipée en Egypte.
Les propos de Bachar al-Assad ont été publiés quelques heures après une déclaration de son ministre de l’Information, Omrane al-Zohbi, dans laquelle il avait assuré que le départ de Mohamed Morsi était nécessaire à la résolution de la crise égyptienne.
L’animosité entre le régime de Damas et les Frères musulmans dure depuis de longues années et l’appartenance à la confrérie est condamnée de la peine de mort en Syrie depuis les années 1980.
La branche syrienne des Frères musulmans joue aujourd’hui un rôle crucial dans le coalition nationale de l’opposition syrienne en exil, qui est reconnue comme représentante légitime du peuple syrien par plus d’une centaine d’Etats et organisations.
L’Egypte est un pays sunnite, de même que la plupart des rebelles syriens hostiles au régime de Bachar al-Assad tenue par la communauté alaouite, une branche de l’islam chiite, dont est issue le président syrien.
Mohamed Morsi de son côté a, comme de nombreux dirigeant arabes, appelé Bachar al-Assad à démissionner.
Depuis le début en mars 2011 du conflit en Syrie, qui a débuté par un soulèvement populaire pacifique et s’est militarisé face à la répression menée par le régime, plus de 100.000 personnes ont péri selon une ONG syrienne.
AFP 04/07/13
Neutralité chinoise
L’agence de presse officielle chinoise Xinhua se contente d’un communiqué annonçant l’entrée en fonction d’Adli Mansour, le nouveau président égyptien par intérim.
Le juge égyptien Adli Mansour a prêté serment jeudi en tant que président par intérim de l’Egypte après l’évincement de Mohamed Morsi. Il avait prêté serment plus tôt dans la journée en tant que chef de la Cour constitutionnelle suprême (CCS).
« Je prête serment devant Dieu tout-puissant de protéger sincèrement l’ordre républicain et de respecter pleinement la Constitution et l’état de droit, de prendre soin des intérêts du peuple, de préserver l’indépendance du pays et la sécurité de ses territoires », a proclamé M. Adli lors de la cérémonie.
Il a également promis de diriger « un pays moderne, constitutionnel, national et civil ».
Au moins 11 personnes ont été tuées et plus de 500 autres blessées mercredi soir dans des affrontements entre partisans et opposants du président évincé Mohamed Morsi.