Jo Sol évoque son film en compétition « Vivre et autres fictions ». Photo dr
Vivre et autres fictions, le dernier film du réalisateur espagnol Jo Sol, interpelle le regard que nous portons sur la vie. Il a été sélectionné dans la compétition long métrage et concourt pour l’Antigone d’Or 2016
Sur les neufs films en compétition, Vivre et autres fictions, affublé du sous-titre « Celui qui a envie de vivre finit toujours par avoir des problèmes avec la vie » – parce qu’il affronte la complexité -, figure assurément parmi les plus petits budgets. Il n’a bénéficié d’aucun soutien institutionnel, d’aucune coproduction venue des télévisions. C’est un peu comme si personne ne souhaitait que ce film voit le jour. Pourtant il existe. C’est un très bon film, engagé et émouvant, repéré et sélectionné par le Cinemed.
La volonté « de représenter ce qui n’existe pas dans l’imaginaire collectif » explique en grande partie cette situation. Le film livre par exemple un très beau plan sur l’orgasme d’un tétraplégique, bien loin des clichés porno et ultra classiques du cinéma.
A la frontière entre le documentaire et la fiction, le film s’appuie sur la relation entre Pepe un sexagénaire condamné après avoir emprunté des taxis pour gagner sa vie qui tente de se réinsérer à la sortie d’un séjour en hôpital psychiatrique, et Antonio, un activiste espagnol connu qui milite pour le droit à la sexualité des personnes en situation de handicap. Une rencontre riche où se confronte les générations face à un monde « normal » qui n’a aucun sens.
« Le film évoque une nécessité qui n’a rien d’étrange et que tout le monde devrait comprendre », indique le réalisateur barcelonais Jo Sol, qui appuie son propos sur la revendication d’Antonio d’un corps non subjectif proche du corps deleuzien où les organes sont désorganisés par les forces qui le traversent. En Espagne, le combat d’Antonio à l’égard de l’institution, porte ses fruits. L’Etat concède progressivement le financement de l’aide personnelle à domicile.
Mais ce que révèle surtout le film de Jo Sol, c’est la résistance de la population à accepter la différence. A partir d’un corps révolutionnaire, le réalisateur met le doigt sur les tabous couvés par la morale judéo-chrétienne. « L’Espagne traverse une crise culturelle sans précédent. Les institutions attendent qu’on leur propose des films convenus. C’est comme si je me retrouvais dans la situation d’un type qui aime une fille circulant nue dans la rue. »
Quand au rapport à la politique : « Les socialistes se rallient à la droite et Podémos a essayé de nettoyer le pouvoir pour intégrer l’institution mais tout le monde préfère les gens dans la rue, avec cette fragilité qui est le contraire de la faiblesse... »
JMDH
Prochaine projection au Cinemed vendredi 28 octobre à 10h.
Le collectif des spectateurs du domaine d’O en débat jeudi dernier Crédit Photo dr
Mobilisation
A la recherche d’actions pour le maintien d’un projet artistique de qualité, le collectif des spectateurs du Domaine d’O envisage de converger avec d’autres collectifs dans l’Hérault
Le maintien de la saison culturelle d’hiver du Domaine d’O annoncé tardivement par le Conseil Départemental de l’Hérault n’a pas levé les inquiétudes du public sur l’avenir de la politique culturelle départementale.
Au court de plusieurs décennies, celle-ci s’est enracinée dans l’Hérault avec le soutien sans faille du président Saumade, puis Vezinhet. Elle a forgé un réseau d’acteurs culturels d’associations et de collectivités efficaces dans les zones les plus reculées.
Le maillage culturel du territoire, s’est organisé autour de deux pôles : Le Domaine d’O à Montpellier, et sortieOuest à Béziers, ainsi que plusieurs festivals singuliers : Saperlipopette, Arabesques, Le Printemps des Comédiens… L’ensemble de ces structures s’inscrit dans un projet global – soutenir la création, défendre l’art, la réflexion et l’ouverture des esprits sur le territoire – aujourd’hui menacés.
Si le conflit sur la compétence culturelle qui oppose le Conseil départemental de l’Hérault à la Métropole de Montpellier est à l’origine de la problématique, c’est aujourd’hui la volonté politique du président Kleber Mesquida, de poursuivre cette action, unanimement reconnue pour sa qualité, qui semble clairement mis en cause.
Jeudi soir une nouvelle réunion organisée par le collectif des spectateurs du Domaine d’O s’est tenue au Théâtre d’O. Spectateurs, personnels, directeurs de festivals, programmateurs, syndicalistes, acteurs culturels appartenant à d’autres structures, membres de différents collectifs… La palette des forces en présence s’accorde sur la nécessité démocratique d’une vraie politique culturelle.
Elle ne se contentera pas de déclarations d’intention. Elle attend un calendrier et des actes concrets et significatifs.
SORTIEOUEST. TOUJOURS EN ALERTE ROUGE !
Le 15 octobre devait se tenir un Conseil d’Administration de l’association sortieOuest qui aurait pu être le dernier puisque le Conseil départemental de l’Hérault avait annoncé sa volonté de dissoudre l’association. Le collectif les Amis de SortieOuest s’était mobilisé à cette occasion mais la réunion a finalement été annulée pour cause d’alerte rouge.
Depuis, le collectif maintient les feux au rouge, malgré le courrier, adressé au public, du Président Kléber Mesquida dans lequel il réaffirme son engagement en faveur de la culture. Et en dépit du communiqué du président de l’association Phillipe Vidal qui assure lui aussi, son engagement pour la culture, en listant les travaux d’aménagement entrepris, tout en pointant les déficits successifs de l’association.
Dans la même missive, le maire de Cazouls-lès-Béziers, annonce la création de l’EPIC Hérault qui remplacerait l’EPIC du Domaine d’O en y associant le Domaine de Bayssan. Cette nouvelle entité, dont la validation juridique n’a pas encore été démontrée assurerait la programmation de SortieOuest.
Un nouveau CA suivi d’une AG est convoqué durant les vacances le 24 octobre. Le collectif a décidé de ne pas appeler à un rassemblement ce jour-là. Il envisage les suites à donner au mouvement citoyen à l’issue de ces rencontres.
Théâtre Time’s Journey through a room de Toshiki Okada
Au CDN hTh la pièce scénarisée et mise en scène par Toshiki Okada s’insère dans la programmation entre le bruit et la fureur. Reconnu aujourd’hui comme une figure majeure des arts de la scène dans le monde, Toshiki Okada met en scène les complexités et les doutes d’un Japon hyper contemporain post-Fukushima.
C’est à la suite du séisme qui frappa la côte pacifique du Japon en 2011 que la vision théâtrale du dramaturge s’est orientée vers l’exploration de la validité de la fiction. Mettant à profit la capacité japonaise d’une interrogation profonde post traumatique à l’instar du Butô qui s’inscrivait en rupture avec les arts vivants traditionnels du nô et du kabuki, impuissants à exprimer des problématiques nouvelles. Né en réaction aux traumatismes laissés par la Seconde Guerre mondiale.
Un demi siècle plus tard, la catastrophe de Fukushima semble demander un nouveau dépassement. «?Les émotions qui ont surgi dans le coeur des Japonais durant les jours qui ont suivi la catastrophe n’étaient pas seulement limitées à la douleur et au mal-être?; il y avait également une lueur d’espoir, l’idée que les choses allaient s’améliorer par la suite. Aujourd’hui, alors qu’il n’est plus possible d’espérer ceux qui continuent de vivre sont tourmentés par les fantômes de ceux qui, avant de disparaître, croyaient en l’avenir.?»
Avec Time’s journey through a room Toshiki Okada construit un espace temps commun au passé et au présent qui semble imperméable à l’avenir. Dans cette forme d’expression post Fukushima, plus aucun appui n’est possible, les corps parlent en suspension, l’existence se cherche entre l’ombre et la lumière.
« »Les choses paraissent fragiles mais, en fait, c’est toute la vie qui est fragile » Patrick Neu
Déjà sous pression budgétaire, la vie théâtrale héraultaise et montpelliéraine subit les affres du redécoupage territorial et de la méconnaissance des politiques. Attention fragile !
Beziers : sortieOuest dissolution imminente de l’association
Le lieu culturel populaire et parfaitement compatible avec les questionnements contemporains est menacé. Le Conseil départemental programme la fin de l’association, les spectateurs se mobilisent jeudi à 16h, jour du Conseil d’Administration.
Montpellier. Départ de Rodrigo Garcia
Le président de la Métropole Philippe Saurel botte en touche.
« Il a porté à ma connaissance par courrier qu’il ne souhaitait pas renouveler son mandat. J’entretiens d’excellentes relations avec le directeur du CDN de Montpellier, Rodrigo Garcia. J’ai négocié avec beaucoup de doigté. Nous avons déjeuné ensemble. Il propose une programmation de qualité. C’est vrai que c’est un théâtre peut-être pas à la portée de tous les publics. Je l’ai soutenu. Dans les moments de crise, j’ai pris le parti de dire que le homard n’est pas un animal de compagnie. »
Nomination. Aurelie Filippetti s’adapte. L’ancienne ministre de la culture qui avait nommé Rodrigo Garcia à la tête du CDN assure aujourd’hui la présidence du festival montpelliérain CINEMED. « Pour les artistes c’est toujours délicat. On a souvent le cas de personnes qui ne veulent jamais lâcher leur mandat , cette fois c’est le contraire. C’est lui qui annonce son départ.»
VIE ARTISTIQUE
Déjà sous pression budgétaire, la vie théâtrale héraultaise et montpelliéraine subit les affres du redécoupage territorial et de la méconnaissance des politiques. Attention fragile !
Depuis toujours, le théâtre se passionne pour le quotidien ordinaire des hommes et des femmes. Face à la crise planétaire que traverse l’humanité, il doit faire face aujourd’hui à la barbarie d’une radicalisation religieuse, politique, sociale et économique qui se présente sous les traits d’une violence aux multiples facettes. A Montpellier, dans la Région et au-delà, cette violence quotidienne questionne les artistes et les acteurs culturels de façon aiguë. Comment l’éducation à la consommation qui va de concert avec la paupérisation des connaissances et la montée de la violence pourrait-elle ne pas peser de tout son poids sur les politiques culturelles et plus particulièrement le théâtre ?
Le théâtre est un art politique, non par son contenu idéologique, mais à travers la progression régulière de l’action qui fonde l’intensité dramatique, politique aussi, à travers la contestation des valeurs données comme intangibles. Certains artistes, c’est le cas de Rodrigo Garcia, annonçant vendredi qu’il ne briguera pas un second contrat à la direction du CDN de Montpellier, ont fait du consumérisme le tremplin d’une mutation des formes dramatiques et scéniques. Ils proposent un travail artistique affirmé plein d’ambivalence. Et le désordre s’empare du plateau, parce que le quotidien qui se présente résiste à toute forme de sens. La scène devient le lieu où se renouvelle l’espace.
Le public jeune perçoit l’expression d’une rupture
« Mes choix artistiques peuvent paraître radicaux si on les compare aux autres. Moi, je n’ai pas ce sentiment. La majorité de ce qui est programmé dans les CDN est radicalement conservateur, dans ce contexte, ma propre radicalité ouvre une fenêtre pour l’expression plurielle », formulait ily a peu, le directeur d’hTh.
Le public cultivé traditionnel ne voit pas dans «l’insignifiance» enchanteresse un moyen de relever le défi. Il peut éprouver dans cette transgression le sentiment d’un espace qu’on lui retire. A l’inverse, le public nouveau, plus jeune, perçoit dans cette inquiétante étrangeté l’expression d’une rupture liée à la violence de l’histoire contemporaine. Une alternative aussi à la culture high-tech que lui propose la société de consommation.
Le CDN hTh occupé en avril 2016
Le projet hTh se caractérise par un esprit d’ouverture sans frou-frou. Le hall du théâtre est devenu lieu de création et d’échanges tous azimuts. Rodrigo Garcia n’a jamais revendiqué le statut d’artiste engagé politiquement. Il a eu maille à partir avec le conflit des intermittents du spectacle. En 2014, il annule les représentations de Golgota Picnic au Printemps des Comédiens. S’il affirme à l’époque son soutien aux intermittents et précaires en lutte, il se fend d’une lettre où il fait référence aux artistes étrangers victimes de la grève. «Les intermittents français défendent leurs droits avec un égoïsme prononcé et ne se préoccupent pas de ce qui se passe autour d’eux.» En avril dernier, alors que le CDN est occupé il déclare «Je partage le point de vue des travailleurs. Perdre des droits correspond à un retour en arrière.» Cette fois, les spectacles se poursuivent et le combat trouvera une issue favorable.
Au-delà de la représentation esthétique, force est de constater que le communiqué de Rodrigo Garcia ne focalise pas sur le contenu de ses propositions mais sur l’étroitesse financière de son budget artistique, 350 000 euros, que l’on peut mettre en regard avec le budget d’une ZAT (Zone artistique temporaire), 500 000 euros pour deux jours. Le directeur du CDN hTh pointe notamment le refus de la Métropole de mettre à disposition un bus pour accéder au Domaine de Grammont qui n’est pas desservi par les transports en commun.
Enfin le projet de transfert du CDN au Domaine d’O proposé par le maire de Montpellier et président de la Métropole, Philippe Saurel, apparaît comme un élément majeur dans la décision de Rodrigo Garcia de ne pas prolonger son mandat. «Pour ce qui nous concerne, nous ne refuserons jamais de grandir. Toute initiative qui viserait à faire du CDN un projet plus important, j’y serai favorable », indiquait-il en avril dernier.
Il ne s’est rien passé depuis, qu’une stérile lutte de pouvoir sans l’ombre d’un projet artistique. Jean Varela directeur de sortieOuest et grand défenseur de l’action publique l’a dit d’un autre endroit : « La seule question est de savoir comment les politiques conçoivent un service public de qualité. »
Jean-Marie Dinh
PRODUCTION hTh 2016 Markus Ohrn s’attaque à l’ancien testament
Rodrigo Garcia l’a souligné, il remplira son contrat. Et qu’on se le dise, la saison hTh 2016/2017 mérite le détour. Elle se compose d’une succession de propositions internationales, mais pas seulement, parfaitement décoiffantes. Le coup d’envoi a été donné avec To Walk the Infernal Field, une création post bourgeoise, de l’artiste visuel suédois Markus Ohrn en collaboration avec le dramaturge Pär Thörn, qui s’inspire librement de l’Ancien Testament relu au gré d’un univers Hard metal.
Un retour à la genèse reposant sous la forme d’une série de 70 épisodes en 10 chapitres. L’aventure, pour le moins risquée, a débuté à Montpellier où les trois premières soirées ont été données du 5 au 7 octobre. L’inventivité débridée et le principe performatif adapté à celui de la série produisent pour beaucoup un effet addictif. Qu’ils se rassurent, le chapitre 2 se tiendra à hTh du 1er au 3 décembre. Pour les suivants, il faudra surveiller les programmations des théâtres et festivals des grandes villes européennes.
To walk the infernal fields donne une interprétation des Livres de Moïse en tant que doctrine d’économie politique, construction d’une identité nationale et des lois terrestres autant que religieuses. « Je trouve pertinent de procéder à un examen de la Bible dans une époque au cours de laquelle tout le monde est obsédé par l’interprétation du Coran », indique Markus Ohrn.
Autre parti pris radical exprimé par l’auteur face au public après l’une de ses représentations « Je ne veux pas créer une performance qui puisse être envisagée comme un produit à vendre ou à acheter. Je veux que l’expérience soit réellement ressentie comme l’ici et maintenant. C’est pourquoi, il n’y aura pas d’autre opportunité de la voir ensuite, car elle disparaîtra.»
Dans le public, auquel on a fourni à l’entrée des boules-Quies afin qu’il préserve son audition, une dame interroge le metteur en scène « Moi j’ai 80 ans, et je me demande si vous pensez au public quand vous faites vos spectacles ? – Oui bien-sûr, répond l’artiste, je considère que c’est un don que je vous fais.»
Cette dame reviendra le jour suivant et répondra à l’invitation faite à l’ensemble de la salle d’investir le plateau…
La Baignoire : Elément indispensable au paysage artistique
Béla Czuppon capitaine de La Baignoire , 7 rue Brueys à Montpellier
La Baignoire débute sa saison. Le petit laboratoire montpelliérain consacré aux écritures contemporaines résiste modestement au tsunami qui ravage la création en Région.
Elle n’est pas insubmersible mais tient son cap, comme une petite bête d’eau qui se propulse sans raison apparente à la surface des eaux pas très claires, dans la bassine du mondillo culturel. Chaque saison, la Baignoire accueille des artistes, des auteurs et des compagnies.
« Chaque année la situation s’empire et les demandes s’accroissent, constate le capitaine Béla Czuppon qui sait de quoi il parle puisqu’il est aussi comédien et metteur en scène. Nous participons au glissement général. L’adaptabilité qui encode les solutions aux problèmes nous fait devenir coproducteurs en proposant des résidences dotées de 2 000 ou 3 000 euros » évoque-t-il avec dépit.
Ce lieu, il le tient, avec un budget de fortune, par passion, par goût, et aussi nécessité, celle d’offrir un lieu de travail et de découverte. A la Baignoire, les propositions et les formes sont diverses mais toujours qualitatives.
Lydie Parisse ouvre la saison avec L’Opposante (voir ci-dessous). La Comédienne et metteur en scène Marion Coutarel prendra le relais avec Si ce n’est toi, une sortie de chantier du 17 au 19 nov avant une création programmée au Périscope à Nîmes. Une virée poétique d’Andréa d’Urso sera conduite par le collectif marseillais Muerto Coco accueilli le 24 nov en partenariat avec la Cave Poésie à Toulouse. A découvrir aussi l’installation sonore immersive La Claustra de Marc Cals qui fait causer les meubles, et les micro-concerts de l’Oreille Electrique qui rythmeront la saison, ainsi que les lectures-déjeuners proposées par Hélène de Bissy qui feront la part belle aux nouvelles.
La Baignoire reste un lieu essentiel à l’écosystème du travail artistique local, les artistes et le public le savent déjà, il y aurait-il d’autres personnes à convaincre ?
Rens 06 01 71 56 27
Baignoire. L’opposante mise en scène par Lydie Parisse et Yves Goumelon
C’est à partir d’une histoire réelle que l’auteure a élaboré le récit de cette femme – morte à 97 ans – qui a enfoui dans le secret de son âme un amour interdit. Elle a aimé un Allemand durant la seconde guerre mondiale avant d’en être séparée, sans jamais l’avoir oublié. Depuis le jour de sa mort elle se met à parler pour un compte à rebours avant de s’enfoncer à jamais dans la brume. Lydie Parisse signe un texte saisissant de liberté, celle d’une femme morte un dimanche, jour où la France entre en guerre au Mali. Rapport de la petite histoire à la grande, rapport à une guerre du silence qui forge le destin de l’opposante. La pièce met en lumière une vie sous forme de confidences emportées. La simplicité intense et sincère d’Yves Gourmelon porte l’interprétation à un niveau de sensibilité rare. Le texte est touchant, drôle et jubilatoire quand il bouscule les tabous et les simagrées commémoratives. Pour ceux qui restent, la mort est un grand théâtre. La mise en scène présentée à Avignon, accueille le public dans une quasi-obscurité permettant aux spectateurs d’entrer dans un espace d’entre deux mondes où l’acuité s’aiguise. « C’est comme ça et pas autrement. »
L’opposante à La Baignoire les 14 et 15 oct
LIEU MENACÉ
sortieOuest dans la tourmente
Le poumon culturel du Biterrois en proie aux intrigues politiciennes dr
Créée il y a dix ans par le Conseil départemental et cultivée par son directeur Jean Varela et son équipe, sortieOuest est devenue un espace de diffusion pluridisciplinaire, un lieu privilégié d’élaboration de projets culturels pensés en collaboration avec les acteurs locaux. Une réussite totale remise aujourd’hui en question...
Après le quasi-avis de décès du festival la Terrasse et del Catet, c’est au tour des spectateurs-amis de sortieOuest, qui viennent de se monter en association, de manifester une vive inquiétude quant à l’avenir de leur théâtre « attaqué sur ses missions de service public de la culture par sa propre tutelle : le conseil départemental de l’Hérault.»
Victime des dégâts collatéraux liés au bras de fer qui oppose le Conseil départemental de l’Hérault à la Métropole de Montpellier à propos de la compétence culturelle métropolitaine, le lieu a vu sa présentation de saison repoussée, puis annulée. Aucun programme n’a été édité, ce qui renforce l’inquiétude du public fidélisé autour d’une programmation accessible de grande qualité.
Le directeur artistique Jean Varela, par ailleurs directeur du Printemps des Comédiens garde le silence. Il avait évoqué lors de la présentation à la presse de la saison d’hiver du Domaine D’o « l’impatience du public biterrois» et les répercutions néfastes de la loi NOTRe sur les territoires ruraux : « cette loi pose la question des politiques en milieu rural. Le populisme est partout…»
Depuis la situation n’a pas évolué, des spectacles programmés ont été annulés et rien ne s’éclaircit si ce n’est que l’équipe qui compte dix salariés ne peut plus faire son travail. SortieOuest est en théorie à l’abri du conflit impliquant la Métropole Montpelliéraine mais se retrouve concernée dans un projet alambiqué notamment défendu par le président de la structure Philippe Vidal, qui consisterait à élargir l’Epic du Domaine d’O à d’autre structures dont sortieOuest.
Dans cette perspective, le Conseil départemental a annoncé la dissolution de l’association. Un Conseil d’administration de l’association se tiendra demain à Béziers, précédé d’un rassemblement du public qui s’est approprié la démarche artistique et la convivialité de ce lieu incontournable. Le flou n’est cette fois pas artistique mais bien politique.
THÉATRE UNIVERSITÉ Au coeur de la fac La Vignette consolide sa mission
Les problèmes du théâtre seraient-ils inhérents au marasme politique ? La question mérite d’être posée si l’on se réfère à la bonne santé du Théâtre universitaire montpelliérain La Vignette, qui évolue partiellement hors de cette arène.
L’université Paul Valéry a bien compris l’intérêt d’assumer pleinement sa mission culturelle figurant au cahier des charges de toutes les universités françaises. Elle dispose d’un Centre culturel très actif et d’un théâtre qui développe les échanges intra-universitaires et inter-universitaires tout en restant ouvert au public extérieur.
Douze ans après sa création La Vignette est devenue une scène conventionnée pour l’émergence et la diversité. «Cette année, Patrick Gilli, le nouveau président est venu approuver la place du théâtre en tant que lieu d’échanges et de recherches, se félicite le Directeur Nicolas Dubourg, le théâtre s’est affirmé comme un outil de rayonnement sur le territoire, nous poursuivons maintenant sur la voie de la professionnalisation en tissant des liens qui favorisent l’insertion des étudiants dans le monde actif.»
Le Théâtre s’inscrit par ailleurs comme partenaire du nouveau Master Création Spectacle Vivant du département Cinéma&Théâtre en participant à la formation des étudiants en études théâtrales. En tant que représentant régional du Syndeac, Nicolas Dubourg n’est pas insensible à la crise actuelle.
«Les attaques contre la liberté de programmation par les maires ou par le public via des débats participatifs tronqués se multiplient, il faut que la profession se mobilise. Ici nous ne sommes pas concernés car notre théâtre n’est pas un simple lieu de diffusion. Il y a une différence entre programmer un spectacle et voir ce qui se passe avant et après, pour nous le spectacle n’est pas un événement mais un parcours où interviennent professionnels, chercheurs, étudiants et public.»
La programmation de cette saison réserve de très bonnes surprises ; elle se décline cette année autour de l’engagement et de l’intention de réaffirmer un théâtre de texte contemporain.
Théâtre. Sélection de trois spectacles qui ouvrent les esprits sur le monde
L’offre théâtrale montpelliéraine de cette saison demeure globalement qualitative à l’instar de ces trois spectacles à découvrir prochainement. Les spectateurs citoyens doivent se manifester s’ils ne veulent pas mesurer les répercutions du désastre qui s’annonce dans les années à venir.
Hearing texte et mise en scène de l’artiste iranien Amir Reza Koohestani qui conçoit ses récits comme des jeux de miroirs pour évoquer le rapport aux autres et la distance entre les individus. Proposé par le Théâtre La Vignette les 15 et 16 novembre prochain.
Pleine Texte et mise en scène de Marion Pellissier par la cie montpelliéraine La Raffinerie. Une femme qui n’accouche pas, une sage-femme et un médecin inquiétants, un foetus qui observe la vie de l’intérieur…Spectacle proposé par le Domaine d’O du 13 au 15 oct.
Time’s Journey Through a Room scénario et mise en scène de la japonaise Toshiki Okada reconnue comme une figure majeure des arts de la scène. Les 18 et 19 oct à hTh.
L’équipe du Cinemed évoque ses intentions et dévoile les grands axes programmatiques de la 38ème édition qui se tiendra du 21 au 29 octobre.
La nouvelle gouvernance du Festival international du cinéma méditerranéen de Montpellier (Cinemed) entend affirmer le lien solide que la manifestation a su tisser dans le temps avec les acteurs du cinéma en Méditerranée. Elle souhaite dresser, conformément au voeu du maire de Montpellier Philippe Saurel, l’étendard du 7e art au sein de la politique culturelle de la ville et de la Métropole qui contribuent à 67% de son budget. Une logique pas seulement budgétaire mais aussi culturelle, puisque la Ville a délibérément inscrit les axes de son développement au sein de l’espace méditerranéen.
Le nouveau directeur du festival Christophe Leparc qui assurait l’intérim depuis le départ de Jean-François Bourgeot a été confirmé dans cette fonction au début de l’année. Professionnel reconnu, il est aussi secrétaire général de la Quinzaine des réalisateurs et occupait au Cinemed le poste de délégué artistique.
« C’est une édition éclectique avec 22 pays méditerranéens représentés. Nous conservons les pierres angulaires avec un fort désir de rencontres pour associer tous les acteurs du cinéma en région , dans la ville et au sein de la Métropole. Le choix éditorial est de présenter la crème de la crème. Depuis l’édition précédente nous avons réduit le nombre de films afin de mieux les exposer. Le fil rouge de cette édition est sans doute à chercher du côté des jeunes réalisateurs de l’autre rive où l’on constate un renouveau, notamment en Tunisie et en Algérie. »
La nouvelle présidente Aurélie Filippetti souligne pour sa part l’effort de la collectivité en faveur de la culture et met l’accent sur la condition des femmes dans le bassin méditerranéen?: « Le talent féminin, symbolisé par la présidente du jury Laetita Casta, une actrice qui est passée de l’autre côté de la caméra et nous parlera de son premier film En moi présenté à Cannes. Mais aussi le combat et le courage des femmes, comme celui de l’actrice marocaine Loubna Abidar, qui sera aussi à Montpellier. »
Cette 38e édition rendra hommage à la grande actrice, scénariste et réalisatrice Ronit Elkabetz disparue en avril dernier. Un grand visage du cinéma israélien accueillie à plusieurs reprises au Cinemed. Henri Talvat président d’honneur et cofondateur du festival voit ce nouveau départ « comme une seconde vie du festival », que nous souhaitons longue !
JMDH
Source La Marseillaise 06/10/2016
Découvrir les autres rives avec le Cinemed
Festival
Tour de France de Rachid Djaïdani «?destin commun pour deux personnes que tout semblait opposer?». Photo dr
Le meilleur du cinéma méditerranéen à Montpellier du 21 au 29 octobre.
La tenue de soirée n’est pas de rigueur mais les étoiles montantes et inconnues du cinéma sont au rendez-vous pour la 38ème édition du Cinemed qui débute aujourd’hui à Montpellier. Pas de thématique pour le Festival International du cinéma méditerranéen qui donne à voir chaque année le meilleur de la production du moment en provenance de toutes les rives de la Méditerranée. Long, court, documentaire, film d’animation… Tous les genres y trouvent une place, parfois la seule sur les écrans d’Europe. Ce pourquoi, le public cinéphile et amateur, marque ce rendez-vous d’automne d’une pierre blanche, couleur symbolique de la paix, pour une région du monde qui en a bien besoin. Le nouveau directeur du festival Christophe Leparc, évoque une édition où la nouvelle génération des réalisateurs tente de dessiner des perspectives d’avenir dans un espace en mutation. Avec vingt-deux pays méditerranéens représentés, la palette est large. Un coup de projecteur sera porté sur le cinéma tunisien. Comme de coutume, le Cinemed permet de réviser les classiques, à travers les rétrospective comme celle rendue à Mauro Bolognini, les hommages, (Ettore Scola et Ronit Elkabetz) et les Trésors de la Cinémathèque française. On attend aussi beaucoup d’avant-premières, à commencer par le dernier film de Rachid Djaïdani , Tour de France, qu’il présentera avec son équipe, lors de la soirée d’ouverture. Le film met en présence Far’Hook, un jeune rappeur de 20 ans obligé de quitter Paris et Serge, un peintre s’engageant dans le tour des ports de France, sur les traces du peintre Joseph Vernet. Malgré le choc des générations et des cultures, une amitié improbable va se nouer entre ce rappeur plein de promesses et ce maçon du Nord de la France au cours d’un périple qui les mènera à Marseille pour un concert final, celui de la réconciliation.
JMDH
Laetitia Casta. Elle préside le jury qui décernera le 38e Antigone d’Or
La comédienne et réalisatrice Laetitia Casta a répondu avec enthousiasme à l’invitation du Cinemed de présider le jury de la compétition longs métrages. Entourée de son jury, elle décernera l’Antigone d’Or le samedi 29 octobre lors de la cérémonie de palmarès du 38e Cinemed à Montpellier. Elle poursuit une brillante carrière de comédienne. Elle joue notamment dans Une histoire d’amour, Sous les jupes des filles (Audrey Dana) et dans Des apaches de Nassim Amaouche. Laetitia Casta est passée de l’autre côté de la caméra cette année en réalisant le court métrage En moi. Son film, présenté au dernier Festival de Cannes à la Semaine de la critique, sera projeté lors de la clôture de cette 38e édition du Cinemed.
Neuf films sont en lice cette année pour l’Antigone d’Or. L’Étoile d’Alger de Rachid Benhadj (Algérie), Vivre et autres fictions de Jo Sol (Espagne), Suntan de Argiris Papadimitropoulos (Grèce), Tempête de sable de Elite Zexer (Israël), Personal Affairs de Maha Haj (Israël), Fiore de Claudio Giovannesi (Italie), Nightlife de Damjan Kozole (Slovénie/Macédoine/Bosnie Herzégovine), Demain dès l’aube de Lotfi Achour (Tunisie/France), Apprenti de Emre Konuk (Turquie).