Les progrès vers l’égalité femmes-hommes sont beaucoup trop lents

Dans un nouveau rapport, l’OCDE indique que les pays doivent faire beaucoup plus pour combler les inégalités entre les femmes et les hommes dans le monde.

Le rapport Égalité femmes-hommes : un combat difficile  appelle résolument à passer à l’action, soulignant que très peu de progrès ont été réalisés depuis le rapport de 2012 Inégalités hommes-femmes : Il est temps d’agir.

« L’égalité entre les femmes et les hommes doit être une priorité si l’on veut parvenir à une croissance inclusive durable, dans l’intérêt de chaque citoyen », a déclaré la Directrice du Cabinet de l’OCDE et Sherpa au G20, Gabriela Ramos, à l’occasion du lancement du rapport en amont du Women’s Forum se tenant à Paris. « Il n’y a aucune raison pour que les résultats des femmes sur les plans social, économique et politique restent inférieurs à ceux des hommes. Les pays doivent faire beaucoup plus pour atteindre les objectifs de parité ».

Il ressort d’une enquête conduite pour ce nouveau rapport que la violence à l’égard des femmes, l’écart persistant de rémunération entre hommes et femmes et le partage inégal du travail non rémunéré sont les trois problématiques liées à l’égalité des sexes les plus importantes pour les pays. Nombre d’entre eux accordent désormais une attention prioritaire à ces questions dans leur politique générale, et beaucoup déploient également des efforts pour renforcer la présence des femmes aux fonctions de direction dans les secteurs public et privé.

Le rapport précise toutefois que des progrès ont été réalisés. La plupart des pays de l’OCDE luttent contre le harcèlement au travail en durcissant leur législation et la réglementation en vigueur. Plusieurs pays, notamment l’Allemagne, l’Australie, l’Italie, le Japon, la Turquie et le Royaume-Uni, ont pris des mesures pour encourager davantage les filles à choisir les sciences, les technologies, l’ingénierie et la production industrielle et les garçons à opter pour les filières de la santé et de l’enseignement.

Pourtant les inégalités persistent dans tous les domaines de la vie sociale et économique et dans tous les pays, et la situation a souvent peu évolué ces dernières années. Si aujourd’hui les jeunes femmes des pays de l’OCDE finissent leurs études avec de meilleures qualifications que les jeunes hommes, elles sont moins susceptibles d’étudier dans les domaines plus rémunérateurs que sont les sciences, la technologie, l’ingénierie et les mathématiques.

Les taux d’activité féminine se sont rapprochés des taux d’activité masculine ces dernières décennies mais, dans tous les pays de l’OCDE, les femmes restent moins susceptibles que les hommes d’occuper un emploi rémunéré. Lorsqu’elles travaillent, elles sont plus susceptibles d’occuper un emploi  à temps partiel et d’être victimes de discrimination, leurs chances d’accéder à des postes de direction sont moindres, et elles gagnent moins que les hommes. La salariée médiane gagne près de 15 % de moins que son homologue masculin, en moyenne, dans l’OCDE – un taux qui a à peine évolué depuis 2010.

Les femmes sont moins susceptibles de créer leur propre entreprise et lorsqu’elles le font, elles gagnent généralement moins que les hommes. Les inégalités entre les sexes ont tendance à se creuser avec l’âge, ce qui témoigne du rôle crucial joué par la parentalité en matière de parité. Bien plus que la paternité, la maternité a généralement d’importants effets négatifs sur l’activité, la rémunération et la progression de carrière. La vie publique n’est pas épargnée par les inégalités entre hommes et femmes : ces dernières sont en effet sous-représentées en politique, puisqu’elles occupent moins d’un tiers des sièges dans les chambres basses parlementaires en moyenne dans l’OCDE.

Il reste encore beaucoup à faire pour réduire et à terme éliminer les écarts entre les sexes dans tous les pays. Le rapport souligne l’intérêt non seulement social mais aussi et surtout économique de la lutte contre les inégalités entre les sexes : en effet, la réduction de 25 % d’ici 2025 de l’écart entre le taux d’activité des femmes et celui des hommes, comme convenu par les dirigeants du G20, pourrait ajouter 1 point de pourcentage à la croissance prévue du PIB de référence dans les pays de l’OCDE sur la période 2013-25, et près de 2.5 points de pourcentage si cet écart était réduit de moitié sur la même période.

Depuis 2013, les deux tiers environ des pays de l’OCDE ont mis en place de nouvelles mesures axées sur l’égalité de rémunération, lesquelles exigent une plus grande transparence salariale, les entreprises étant de plus en plus tenues d’analyser et de divulguer l’écart salarial au sein de leurs effectifs. De nombreux pays ont également pris des mesures pour améliorer l’accès à des services d’éducation et d’accueil des jeunes enfants de qualité, et ont aussi encouragé les pères à prendre un congé parental : plusieurs pays, notamment le Canada, la Corée, le Japon et la Pologne, ont augmenté les subventions ou prestations versées au titre de la garde d’enfants, et d’autres, comme la Norvège et le Royaume-Uni, ont mis en place un programme d’accueil gratuit ou étendu le dispositif existant.

 

Source OCDE 04/10/2017

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Amnesty International demande la suspension des expulsions d’Afghans

Des migrants afghans à Calais, le 27 mai 2016. PHILIPPE HUGUEN / AFP

Des migrants afghans à Calais, le 27 mai 2016. PHILIPPE HUGUEN / AFP

L’association demande à la France et à l’Europe de stopper leur politique de renvois vers ce pays où les civils ne sont plus protégés.

L’organisation Amnesty International demande, jeudi 5 octobre, un « moratoire immédiat » sur tous les renvois de migrants vers l’Afghanistan, où leur sécurité ne peut être garantie. Dans un rapport intitulé « Retour forcé vers l’insécurité » et basé sur une enquête de terrain, l’ONG rappelle que si 2016 a été une année record en matière de personnes tuées, 2017 suit la même pente.

« Jamais autant de civils n’ont été blessés, comme le soulignent les Nations unies, et parallèlement, jamais autant de renvois n’ont été effectués au départ de l’Europe », déplore Cécile Coudriou, vice-présidente d’Amnesty International France. « Désireux d’augmenter leur nombre d’expulsions, les gouvernements européens appliquent en effet une politique irresponsable et contraire au droit international. Ils exposent des hommes, des femmes et des enfants à des dangers tels que l’enlèvement, la torture ou la mort », a-t-elle ajouté mardi 3 octobre.

« Nous demandons au ministre de l’intérieur, Gérard Collomb, un moratoire immédiat sur tous les renvois vers l’Afghanistan. Nous demandons à l’Europe la suspension de tous les vols conjoints organisés par Frontex pour reconduire des Afghans depuis plusieurs pays d’Europe », a relayé Jean-François Dubost, responsable du programme de protection des populations au sein de l’organisation de défense des droits de l’homme.

Au sein de l’Union européenne, le taux de protection des Afghans est tombé de 68 % en septembre 2015 à 33 % en décembre 2016. En parallèle, le nombre de renvois a presque triplé, passant sur la même période de 3 290 à 9 460. La France, elle, a remis 640 personnes à l’avion en 2016, contre 435 en 2015.

« J’ai su que le combat serait dur »

A 24 ans, Farhad a échappé de justesse à ce voyage retour. Sa chance ? Il parle un très bon anglais et a pu interpeller les passagers du vol dans lequel il était tenu menotté entre deux policiers escorteurs. C’était en juillet et le jeune homme, aujourd’hui en procédure d’asile en France, n’a pas oublié un instant de cette journée de cauchemar. « L’épreuve a duré une demi-heure. Les policiers m’avaient expliqué que je ne pouvais pas refuser d’embarquer. Ils me maintenaient assis, mais j’ai pu hurler qu’on m’expulsait de France, que je mourrais dès mon retour à Kaboul. Au départ, une femme s’est adressée aux policiers ; puis d’autres passagers se sont manifestés avant que le pilote ne vienne à son tour. » Farhad, qui promet alors qu’il ne lâchera pas son combat, est finalement descendu de l’avion avant d’être présenté au médecin du centre de rétention : il affirme ne plus pouvoir déglutir car les policiers lui ont serré le cou pour l’empêcher d’alerter les autres passagers.

Car, si la France affiche un taux de protection de 88 % pour cette nationalité, elle enferme de plus en plus souvent en centre de rétention administrative (CRA) des déboutés de l’asile, mais aussi des Afghans qui n’ont pas encore déposé de demande. « En 2011, 382 Afghans ont été enfermés en centres de rétention, en France. Quatre ans après, en 2015, ils ont été un millier, comme en 2016. Cette année, le cap des 1 600 a déjà été franchi. On sera à 2 000 à la fin de l’année si la privation de liberté des ressortissants de cette nationalité continue sur le même rythme », regrette David Rohi, de la Cimade.

Zubair, 23 ans, passé par le CRA du Mesnil-Amelot (Seine-et-Marne), a été contraint de demander l’asile en rétention. « Mon frère a été assassiné par les talibans, alors toute la famille est partie. En Grèce, j’ai perdu tout le monde et je me suis retrouvé seul. Pendant une semaine, j’ai cherché mon père, ma mère, ma sœur, en vain, avant de reprendre la route vers Londres puisque c’était le terminus qu’on s’était fixé », raconte le jeune homme. Arrêté à Calais alors qu’il tentait de passer, il se dit aujourd’hui heureux d’être reconnu comme réfugié, mais s’interroge sur le lieu où se trouve sa famille et sur la façon dont il pourra la rejoindre puisqu’il est désormais lié à la France…

Avant ses tentatives de renvoi, Farhad avait lui aussi connu l’enfermement au CRA de Coquelles (Pas-de-Calais), puis au Mesnil-Amelot, juste derrière l’aéroport de Roissy. « Quand je suis arrivé au Mesnil-Amelot, j’ai su que le combat serait dur car deux Afghans avaient été remis à l’avion les jours précédents », rapporte le jeune homme.

« Des pressions exercées » sur Kaboul

Fin 2016, un accord a été signé entre l’Union européenne et l’Afghanistan pour faciliter ces retours. Amnesty, qui s’était déjà exprimée à l’époque, relativise une nouvelle fois la notion d’« accord » et cite des sources afghanes qui le qualifient de « coupe de poison ». L’ONG rappelle dans son rapport que, « selon des informations jugées fiables, des pressions auraient été exercées sur le gouvernement afghan pour qu’il accepte cette nécessité des renvois ». L’organisation relate des propos du ministre afghan des finances, Eklil Hakimi, qui a déclaré devant le Parlement que, « si l’Afghanistan ne coopère pas avec les pays de l’Union européenne dans le cadre de la crise des réfugiés, cela aura des conséquences négatives pour le montant de l’aide allouée à notre pays ».

Selon la Cimade et Amnesty, la France s’appuie, elle aussi, sur cet accord. Ainsi, sur les 1 700 ressortissants afghans déjà passés en rétention entre janvier et septembre, la moitié étaient visés par une mesure d’éloignement vers l’Afghanistan, puisque des laissez-passer européens peuvent désormais remplacer les laissez-passer consulaires nécessaires aux renvois, que les autorités afghanes ne s’empressaient pas de délivrer.

L’autre moitié des Afghans enfermés font l’objet d’un transfert vers un pays d’Europe qui, le plus souvent, les renvoie ensuite vers Kaboul. « Au final, 70 % de ces personnes enfermées ont été libérées par un juge », observe David Rohi, pour qui « cette donnée illustre la violation des droits ». Reste que les moins chanceux, eux, ont repris un vol. Et, si Farhad ne s’était pas opposé fermement à son transfert, il aurait été envoyé en Norvège, un pays qui réexpédie très largement vers l’Afghanistan.

Un caractère volontaire « très relatif »

« En Afghanistan, toute ma famille était menacée car mon père et mon oncle refusent de payer leur tribut aux talibans. Moi, j’étais plus particulièrement visé car j’ai été traducteur pour l’ONU », rapporte Farhad qui, au lendemain d’une tentative d’enlèvement à Kaboul, a pris un billet pour Moscou, puis un autre pour Mourmansk, dans l’extrême nord-ouest de la Russie.

Arrivé là-bas, il s’est débrouillé pour passer en Norvège. « Je n’avais pas envie d’y demander l’asile, mais j’ai été obligé de le faire car ils ont relevé mes empreintes », raconte le jeune homme. Une fois débouté, il est arrivé en France, où, arrêté le 16 février dans un parc à Calais, il s’est retrouvé sous le coup d’un renvoi vers la Norvège au nom des accords de Dublin qui permettent aux pays de l’Union de renvoyer un demandeur d’asile vers le premier pays d’Europe où il a laissé trace de son passage. Dans le cas de Farhad, la France a décidé de se charger de sa demande, à l’issue de sa rébellion dans l’avion, puis de sa libération du centre de rétention par un juge.

La Cimade observe que 640 personnes ont été renvoyées en 2016 depuis la France. Si seules 115 d’entre elles l’ont été de façon forcée, l’association reste dubitative sur le caractère volontaire des autres renvois, qu’elle estime « très relatif dans un contexte où l’accueil a été notoirement déficient et compte tenu des multiples formes de répression qu’ont subies ces personnes ».

A Calais, les demandes de retour ont été nombreuses, mais la France avait augmenté les avantages financiers pour un retour volontaire au moment de l’évacuation de la jungle. Amnesty demande la suspension de ces retours volontaires puisque la sécurité n’est pas assurée pour les civils dans ce pays. Les chercheurs de l’organisation, qui se sont entretenus avec plusieurs familles, relatent le « calvaire » que ces dernières ont « vécu après avoir été contraintes de quitter l’Europe. Certaines ont perdu des êtres chers ; d’autres ont échappé de peu à des attaques lancées contre la population civile ; d’autres encore vivent dans la peur des persécutions ».

Maryline Baumard

Source Le Monde 05/10/2017

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La Catalogne ensanglantée

Carte-espagne-catalunyaLe référendum de ce 1er octobre soulève alors de nombreuses questions. Il a été déclaré « illégal » par le tribunal constitutionnel espagnol. Mais, cela signifie simplement que le gouvernement de Madrid n’avait pas d’obligation de reconnaître ses résultats. Cela ne justifiait nullement l’ampleur et la brutalité de la répression

De l’autonomisme à l’indépendance

On peut se demander d’où vient cette revendication à l’indépendance. Car, au début des années 2000, les partisans de l’indépendance étaient clairement minoritaires. Il ne semble plus qu’il en soit ainsi. J’avais d’ailleurs organisé, le 19 septembre dernier, un débat dans l’émission que j’anime sur Radio-Sputnik entre Gracia Dorel-Ferré, historienne spécialiste de la Catalogne et Jean-Jacques Kourliandsky, chercheur à l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS) sur les questions ibériques (Amérique latine et Espagne)[1]. Ce dernier insistait sur le fait que les refus répétés du gouvernement central espagnol d’accorder à la Catalogne ce que le Pays Basque, voire la région de Valence, avaient obtenus avait conduit à une radicalisation du sentiment autonomiste en un véritable sentiment indépendantiste. Les manifestations monstres de ces dernières semaines, qui ont rassemblé plus d’un million de personne sur une population totale de 7,5 millions (l’équivalent serait donc une manifestation de plus de 9 millions de personnes en France), en témoignent.

La responsabilité du gouvernement de Madrid est donc très largement engagée. Elle l’est, bien entendu, dans les violences policières de ce dimanche 1er octobre. Mais elle l’est aussi, et sinon plus, par les différentes fin de non recevoir qui ont répondu aux demandes des autorités légalement élues de Barcelone. L’indépendance de la Catalogne, si elle survient, sera largement le produit des relents de franquisme du gouvernement Rajoy, comme l’a dit Mme Gracia Dorel-Ferré. Il aura été, par sa bêtise bornée et par sa brutalité, le véritable déclencheur de ce mouvement indépendantiste.

Le poids de l’histoire

La question du régionalisme, et en particulier du régionalisme Catalan, hante l’histoire de l’Espagne moderne. La Catalogne a représenté, avec la partie industrielle du Pays Basque, le point d’entrée de la modernité industrielle en Espagne depuis le XIXème siècle. La Catalogne est, aujourd’hui encore, certainement une des régions les plus dynamiques, et les plus riches de l’Espagne. Elle représente environ 20% du PIB de l’Espagne et elle connaît, que ce soit par ses exportations ou par le développement de son industrie touristique, un véritable dynamisme qui tranche avec celui des autres régions d’Espagne. Mais, surtout, les catalans considèrent qu’ils ont été maltraités par les gouvernements espagnols, et en particuliers par les gouvernements franquistes.

Il convient ici de rappeler que la question de l’indépendance de la Catalogne s’était déjà posée à la veille de la Guerre Civile[2]. Le président de la Généralité de Catalogne, Lluis Companys, décida en 1936 de rester dans le cadre de l’Espagne, alors républicaine, car cette dernière avait reconnu les droits des catalans. Durant la Guerre Civile, la Catalogne fut à la pointe de la résistance contre le franquisme et ses alliés, l’Allemagne Hitlérienne (que l’on se souvienne de la Légion Condor) et l’Italie Mussolinienne. Exilé en France après la défaite, il fut livré au régime franquiste par la Gestapo, torturé et exécuté le 15 octobre 1940 à la forteresse de Montjuic[3]. La Catalogne a payé d’un prix terrible son opposition au franquisme et a été dévastée par une répression sanguinaire.

La reconnaissance de la spécificité catalane a été tardive et date du retour à la démocratie. Mais, cette reconnaissance est fragile. Le « Parti Populaire », qui est censé représenter la droite dite « modérée » et qui abrite, en son sein, de nombreux nostalgiques du franquisme, n’a jamais réellement accepté de reconnaître cette spécificité. D’une manière générale, l’Espagne n’a pas exactement la même histoire de pays unitaire que la France. Des provinces, la Catalogne et le Pays Basque, ont des traditions indépendantistes bien ancrées.

La constitutionnalité, la légitimité et la souveraineté

Le référendum de ce 1er octobre soulève alors de nombreuses questions. Il a été déclaré « illégal » par le tribunal constitutionnel espagnol. Mais, cela signifie simplement que le gouvernement de Madrid n’avait pas d’obligation de reconnaître ses résultats. Cela ne justifiait nullement l’ampleur et la brutalité de la répression.

Au-delà, se pose la question de sa légitimité et de ses relations avec la souveraineté populaire en Espagne. La souveraineté de l’Etat espagnol découle du compromis qui a été passé lors du processus de démocratisation, après la mort de Franco. Les Catalans sont fondés à penser que l’annulation de leur statut en 2010, une mesure qui a mis littéralement le feu aux poudres, remettait en cause ce compromis. Dès lors qu’il y a ce type de débat dans l’espace politique, la seule réponse est l’élection d’une assemblée constituante. Ce n’est certainement pas la répression, qui ne peut qu’aggraver les choses. Le refus d’une assemblée constituante, ou à tout le moins d’une commission constituante, fragilise la légitimité du pouvoir espagnol. Les violences de ce dimanche 1er octobre finissent de la détruire. Les images de ces manifestants pacifiques agressés et blessés feront, et ont d’ailleurs déjà fait, le tour de la planète.

La question de l’indépendance de la Catalogne a ainsi peu de choses à voir avec le droit constitutionnel, au point où nous en sommes. Elle est devenue une question essentiellement politique, car la souveraineté c’est aussi cela : le primat du politique sur la règle de droit. Nous sommes à l’évidence dans une situation d’extremum necessitatis. Seule une action politique peut aujourd’hui dénouer cette situation. Très clairement, on ne pourra longtemps encore refuser aux Catalans la tenue de ce référendum qu’ils exigent, et que Madrid a tout fait pour perturber. Seul un vote peut trancher la question de savoir si les catalans pensent encore avoir un avenir commun avec le reste de l’Espagne ou non. Mais, ce qui est clair, c’est que le comportement de Madrid rend aujourd’hui toujours plus difficile la constitution d’un compromis acceptable.

La question n’est donc plus, aujourd’hui, de savoir si l’on soutient ou pas l’idée d’une Catalogne indépendante. La question est aujourd’hui de défendre la base même de la démocratie. Et pour cela, il faut un véritable référendum en Catalogne, dont toutes les parties s’engagent à reconnaître les résultats. C’est le seul antidote à une montée vers une nouvelle guerre civile. Que le gouvernement français ne l’ait pas compris montre la dégénérescence de l’esprit public chez le Premier ministre et le Président.

Jacques Sapir

Notes

[1] https://fr.sputniknews.com/radio_sapir/201709191033122190-espagne-catalogne-independance/

[2] Alquézar, R., Esquerra Republicana de Catalunya: 70 anys d’història (1931-2001). Barcelona, Columna, 2002.

[3] Benet, J., Lluís Companys, presidente de Catalunya fusilado. Barcelona, Península, 2005

Source Les crises 01/10/2017

 Voir aussi : Actualité Internationale Rubrique UE, Espagne, Un régionalisme si européen, rubrique Politique,

 » What Were You Wearing ?  » : l’expo qui brise les préjugés sur le viol

Stop aux préjugés ! © GettyImages

Stop aux préjugés ! © GettyImages

L’université du Kansas aux Etats-Unis a organisé une exposition pour prouver que la tenue vestimentaire qu’on porte n’a rien à voir avec les agressions sexuelles…

Tu étais habillée comment ? ». Voilà une question bien trop souvent posée aux victimes d’agressions sexuelles. Et pour mettre fin aux préjugés sur le viol, l’université du Kansas a créé l’exposition What Were You Wearing ? (en Français, « Que portais-tu ? »). L’expo présente 18 histoires de violences sexuelles, accompagnées des vêtements que portait chaque victime au moment de l’agression. Parmi les tenues, on retrouve un t-shirt XXL, une robe rouge, un t-shirt avec un jean ou encore un polo d’homme.

Sous chaque vêtement on peut lire les commentaires poignants des personnes agressées.Jen Brockman, directrice du centre de prévention et de sensibilisation aux violences sexuelles de l’université américaine, est à l’origine de ce projet. « Les visiteurs peuvent se mettre à la place de l’autre, aussi bien devant les tenues que devant les récits.

Le but est d’arriver à ce qu’ils se disent : « Eh ! J’ai la même tenue dans mon placard » ou « J’étais habillée comme ça cette semaine ». Nous tentons ainsi de supprimer la croyance selon laquelle il suffit d’éviter de porter certaines tenues pour être sûre de n’avoir aucun problème, ou que l’on peut faire disparaître les violences sexuelles en changeant la manière de s’habiller », a-t-elle expliqué au Huffpost.

L’exposition a déjà été présentée dans d’autres universités, comme celle de l’Arkansas et de l’Iowa.

Source Glamour 20/09/2017

« Dossier Tabou » M6 :

En France, pour beaucoup, le lien entre tenue vestimentaire et viol est bien réel

_dossier_tabou____pour_beaucoup__le_lien_entre_tenue_vestimentaire_et_viol_est_bien_r__el_8175_north_647x_whiteVoir un extrait

Dimanche 1er octobre, M6 a diffusé « Dossier Tabou », un documentaire qui s’intéresse à la culture du viol et aux agressions sexuelles faites aux femmes. Et certains témoignages sont édifiants.

 

Très souvent, l’une des premières questions qui viennent à l’esprit lorsqu’une femme se fait agresser est de savoir comme cette dernière était habillée. Dans Dossier Tabou, un reportage diffusé ce soir sur M6 à 21 heures, quatre jeunes femmes ont réalisé une expérience prouvant à quel point ce soi-disant lien existe pour de (trop) nombreuse personnes. Pour ce faire, chacune des quatre fille s’est habillée d’une manière particulière et tient une pancarte sur laquelle on peut lire « Ma tenue justifie-t-elle que je me fasse agresser ?« 

Et le moins qu’on puisse dire, c’est que les réactions de certains passant sont sidérantes : « Y’a que des femmes comme vous qui se font violer« , « Je l’agresserais bien« , « C’est à cause de femmes comme ça qu’il y a des viols, regardez comment elle est habillée« … Certains hommes témoins de la scène pensent, en effet, que l’une d’entre elles, qui porte un crop top, cherche les problèmes en s’habillant ainsi. Choquées par ces propos, certaines femmes présentes également, insistent sur le fait que ce sont les hommes qui doivent se contrôler, tandis que d’autres pensent qu’ils n’ont pas tout à fait tord.

Un documentaire alarmant qui fait écho à l’exposition « Tu étais habillée comment ? » lancée par l’université du Kansas et visant à mettre fin aux préjugés sur le viol. Au travers de 18 témoignages poignants, l’école à tenté de démonter cette idée selon laquelle il existe un lien entre tenue vestimentaire et agression sexuelle.

GV

Source Glamour 01/10/2017

DLE7aLSWAAAI6h5Voir aussi : Actualité France, Actualité Internationale, Rubrique SociétéDroit des femmesViolences obstétricales et gynécologiques, Citoyenneté, Religion, Politique, Société civile, Politique de l’éducation, rubrique  Education,

Édito. Un régionalisme si européen

editobis

Les Catalans ont-ils un problème de riches ? Rompre avec l’État central espagnol, comme ils pourraient le faire lors du référendum prévu ce 1er octobre, c’est aussi se débarrasser de cette Espagne qui peine toujours à se relever de la crise. “Madrid nous vole”, assurent les indépendantistes, même si la réalité économique est bien plus complexe. Les Écossais aussi étaient convaincus de leur capacité à s’en sortir par eux-mêmes. De même, en Flandre ou en Italie du Nord, séparatisme et richesse économique font bon ménage. La même accusation, celle que “le centralisme nous vole”, a fait naître l’idée que le Royaume-Uni serait mieux sans l’Europe.

Paradoxalement, ces régions séparatistes revendiquent leur ancrage européen. Leurs représentants se sont d’ailleurs organisés dès 1981 en une Alliance libre européenne, composée de ces partis qui souhaitent plus de régionalisme mais pas forcément moins d’Europe. C’est une des leçons de la construction européenne : elle a affaibli l’État-nation en multipliant les structures au niveau régional et au niveau européen. L’effacement progressif de la logique nationale s’est traduit par l’émergence des séparatismes. Or seule une interdépendance européenne assurerait la survie de ces régions isolées. L’État catalan indépendant serait très certainement viable sur le plan économique, à la condition d’être accepté dans le club européen.

Hélas, ce débat paraît aujourd’hui impossible : face à la volonté indépendantiste des Catalans, l’Espagne a choisi de montrer les muscles. Mais pourquoi donc envoyer la Garde civile et mettre l’économie catalane sous tutelle dans une démonstration de force à quelques jours du référendum ? Sans doute parce qu’à Madrid on craint que le résultat ne fasse voler en éclats une certaine idée de l’Espagne. Mais la fin de la solidarité a sonné depuis belle lurette, en Europe tout comme au sein des États. Et Madrid comme Bruxelles ont beau jouer la carte de la fermeté, si la Catalogne veut faire sécession, et puisqu’elle semble certaine d’en avoir les moyens, au nom de quoi peut-on dans l’Europe démocratique l’en empêcher ?

Hamdam Mostafavi
Source Le Courrier International
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