Le Syndicat national des attachés de presse et conseillers en relations publiques (Synap) a 50 ans. Pour fêter l’événement et le faire savoir, il organise une exposition itinérante qui fait appel aux dessinateurs de presse. Onze d’entre eux et pas des moindres, Plantu, Coco, Philippe Delestre, Xavier Delucq… ont accepté de se commettre pour la bonne cause. Après un tour de France en grande pompe, l’expo est visible au Club de la presse de Montpellier jusqu’au 30 juin. Une bonne occasion de découvrir le métier d’attaché de presse dont les exigences demeurent souvent dans l’ombre.
Dans un environnement de l’information en pleine mutation, le Synap qui compte 230 membres mais concerne 20 000 professionnels, axe ses priorités sur la conscience professionnelle. « Comme les journalistes, nous sommes là pour apporter du sens, affirme la vice-présidente du Synap, Marie Pierre Medouga Ndjikessi. L’objet de notre travail n’est pas forcément de véhiculer la meilleure image, mais l’image la plus fiable. Au sein des entreprises, il nous revient de collecter l’info mais aussi de la vérifier et de nous assurer qu’elle est conforme aux droits de l’homme. » Le syndicat mène par ailleurs un combat contre la rémunération aux résultats. Il invite les employeurs, qui sont aussi représentés au sein du Synap, à porter un regard moins quantitatif. « Il ne faut pas se cantonner seulement au nombre d’articles et développer les évaluations qualitatives portant sur la modification positive de l’image. » La profession est régie par l’arrêté Peyrefitte de 1964 qui précise notamment que les informations fournies par l’attaché de presse doivent « être d’une stricte objectivité et se limiter à l’exposé des faits, sans argumentation de propagande ou de publicité commerciale. » Ce qui donne une petite idée de la crise que traverse la profession.
Jean-Marie Dinh
L’exposition des dessins de presse est visible jusqu’au 30 juin au Club de la Presse de Montpellier.
Jean-Paul Scarpitta : "L’art musical est un art de vivre". Photo Guillaume Bonnefont.
Jean-Paul Scarpitta préside désormais à la destinée artistique de l’Opéra et de l’Orchestre national de Montpellier. C’est sous le signe de l’amour de l’art musical comme art de vivre qu’il a dévoilé hier le contenu de la saison 2011-12.
La réunion qui avait lieu dans la salle Einstein du Corum emplie d’abonnés, n’avait de la conférence de presse annoncée que le nom. Car ni le dossier, ni la proximité n’ont permis aux représentants de la presse locale d’exercer correctement leur métier. Ce qui pourrait apparaître aux lecteurs comme un détail n’en est pas un. Le fait participe d’un processus plus général en cours chez les décideurs, qui organisent dans le fond et la forme une mutation entre le statut de journaliste et celui de communicant. Un vieux débat toujours d’actualité.
Est-ce que la culture dénature l’homme ?
Faut-il rappeler que la présentation d’une saison culturelle demeure un moment privilégié, souvent unique, où il est possible d’aborder les questions de structure ? A ceux qui opposeraient que le public ne porte d’intérêt qu’à la liste de spectacles qu’on lui propose en enfilade, on objectera que les journalistes travaillent moins pour le public que pour les citoyens. Par ailleurs, les spectacles sont régulièrement couverts par la presse tout au long de l’année.
Citant le sujet de philo du bac, « Est-ce que la culture dénature l’homme », comme piste de réflexion, le président de région Christian Bourquin a rappelé hier, que la valeur ajoutée d’une politique culturelle tenait « dans sa capacité de faire la différence. » C’est également de sa bouche qu’un hommage a été rendu à René Koering qui a appris mardi par la presse la nomination de son successeur Jean-Pierre Le Pavec* à la tête du festival de Radio France.
Une saison de transition
Il paraît prématuré de discerner la teinte qu’apportera Jean-Paul Scarpitta à la programmation. La saison 2011-12 de l’Opéra et de l’Orchestre est avant tout une période de transition. Les divergences qui se sont fait jour entre les différents protagonistes artistiques ont abouti à une programmation à six mains. René Koering en signe la première partie jusqu’à la fin 2012 avec l’accueil du conte lyrique Rusalka de Dvorak en octobre, L’Arbore Di Diana en novembre ; un drame sur la liberté de mœurs créé par le compositeur espagnol Vicente Martín y Soler à la fin du XVIIIe. Le règne Koering se conclut par une Belle Hélène avec la complicité d’Hervé Niquet à la direction musicale et une mise en scène chocolatée de Shirley et Dino. La programmation symphonique revient dans une large mesure à Lawrence Foster qui assure depuis 2009 la direction musicale de l’Orchestre et de l’Opéra, et serait sur le départ. Le chef américain, dirigera en janvier, Nuit dans les jardins d’Espagne et Le Tricorne de De Falla en janvier, Poème pour violon et orch opus 25 de Chausson et la valse de Ravel en avril, Double concerto pour violon et violoncelle de Milklos Rosza et Les sept péchés capitaux de Kurt Weill en mai.
Jean-Paul Scarpitta prend glorieusement la main, en mars, avec Electra de R. Srauss dans une mise en scène angoissante de Jean-Yves Courrègelongue. Le même mois suit la première mondiale de l’opéra de Philip Glass Einstein on the Beach en présence des deux autres créateurs Robert Wilson, et Lucinda. Après Montpellier, l’œuvre qui n’a pas été donnée depuis trente ans partira pour une grande tournée mondiale. Le même souci de visibilité pointe avec une nouvelle production des Noces de Figaro mise en scène par le directeur avec des costumes de Jean-Paul Gaultier. L’incontournable baguette de Riccardo Muti devrait être aussi de passage en janvier…
Jean-Marie Dinh
*A l’origine du réputé Festival de Saint-Denis Jean-Pierre Le Pavec a été délégué général de l’Opéra Bastille avant de rejoindre Radio France. Il prendra la direction du festival de Radio-France le 1er septembre.
Si la proposition de loi «relative à la gouvernance de l’AFP» déposée au Sénat est adoptée, «l’agence est morte», affirment Dominique Ferrandini et Patrick Filleux, membres fondateurs du Syndicat autonome des journalistes (SAJ-UNSA). A onze mois de l’élection présidentielle, le pouvoir sarkozyste s’attaque, dans la précipitation, à l’indépendance de la principale entreprise de presse française et troisième agence mondiale d’information, l’Agence France-Presse (AFP). Par le biais du dépôt, au Sénat, d’une proposition de loi «relative à la gouvernance de l’AFP», signée par le sénateur UMP Jacques Legendre et qui doit être examinée dans l’urgence avant la clôture de la session parlementaire, fin juin, c’est bien le statut «constitution» de l’Agence, voté par le Parlement en 1957 et qui lui a permis d’assurer jusqu’à ce jour son indépendance, qui est menacé.
L’indépendance de l’AFP vis-à-vis de l’Etat, donc de son exécutif, fut au cœur de la réflexion du législateur en 1957. L’accouchement fut long et difficile. 15 ans de gestation. Le bébé fut conçu dans la Résistance, dans un élan démocratique et progressiste combattant, tout entier dicté par deux intangibles paradigmes: le droit à informer et le droit à être informé.
Couper le cordon ombilical avec l’Etat, donc garantir la diffusion à l’ensemble de la presse française et internationale, d’une information mondiale honnête, vérifiée, recoupée, exempte de toute pression politique, économique ou idéologique, fut le gage de la crédibilité de l’AFP, donc de son existence et de son développement.
Quelque 3.000 journalistes et personnels techniques travaillent aujourd’hui pour l’Agence dans 165 pays. Leur mission, selon l’article 1er du statut de 1957, est «de rechercher, tant en France (…) qu’à l’étranger, les éléments d’une information complète et objective».
Mais c’est l’article 2 qui définit et fixe le cadre éthique dans lequel l’Agence œuvre en toute indépendance: «L’Agence France-Presse ne peut en aucune circonstance tenir compte d’influences ou de considérations de nature à compromettre l’éxactitude ou l’objectivité de l’information; elle ne doit, en aucune circonstance, passer sous le contrôle de droit ou de fait d’un groupement idéologique, politique ou économique». Tout est là !
Qu’en est-il dans la proposition de loi sénatoriale, appuyée et endossée sans réserve par l’actuel PDG Emmanuel Hoog, parachuté en 2010 avec la bénédiction -sinon l’intervention- de l’actuel pouvoir, dont il serait lassant de rappeler les attaques auquel il s’est livré contre la liberté et l’indépendance de la presse en général et de l’AFP en particulier depuis 2007
L’article 2 est conservé en l’état, mais vidé de sa substance
La nouvelle «gouvernance» envisagée -tant dans la composition du conseil d’administration, qu’en ce qui concerne les ressources et moyens financiers de fonctionnement et développement- sous prétexte d’harmoniser le statut de 1957 avec les lois et directives européennes, place de facto et officiellement l’AFP sous la sujétion de l’Etat.
De plus, l’AFP, qui a été dotée en 1957 d’un statut «d’organisme autonome bénéficiant de la personnalité civile», sans capital ni propriétaire, et dont les ressources proviennent des abonnements de ses usagers, serait assimilée à un organisme «privé». Mais, lourde contradiction hypothèquant son développement, tout en étant soumise aux règles commerciales classiques, elle se verrait interdire d’entrer en concurrence avec ses clients (la presse de détail écrite et audiovisuelle), pour rester cantonnée au rôle de grossiste de l’information.
L’AFP serait donc à l’avenir, et dans le cadre de la révolution du Net, dans l’impossibilité de commercialiser sur la Toile et à l’usage des potentiels clients privés que nous sommes, vous et moi, la masse de ses informations françaises et internationales. Cette formule commerciale à l’étude, a pour nom anglo-saxon B2C (Business to Consummer), mais est fermement combattue depuis l’éclosion de l’Internet par les patrons de presse français, pour la plupart amis ou idéologiquement proches de l’actuel pouvoir politique.
Ils y voient, en ce qui concerne l’Agence, une «intolérable concurrence déloyale», mais avant tout une grave menace pour leurs intérêts vitaux, incapables qu’ils sont de diversifier leurs productions, tant sur le fond que sur la forme, pour aller à la rencontre de «nouveaux gisements de clientèle», ou pour faire tout simplement leur métier de diffuseurs d’informations sous toutes ses formes.
Voici donc l’AFP de demain, imaginée par le couple Hoog-Legendre: une agence «d’informations» assujétie au pouvoir de l’Etat et bridée dans son développement par le pouvoir de l’argent des grands groupes de presse.
Autant dire que l’AFP, agence mondiale de presse indépendante, vecteur essentiel de diffusion de la culture française dans le monde, est morte. Sa singularité, son regard, sa lecture des évènements du monde, face à ses deux concurrentes anglo-saxonnes uni-tonales, l’étatsunienne Associated Press et la britannique Reuter’s, sont réduits à néant.
Avant l’actuel statut de 1957, ces deux là ne manquaient jamais en citant l’AFP, de préciser à leurs lecteurs «agence gouvernementale française». Nul doute qu’elles entonneront le même refrain décrédibilisant, si le bouleversement de statut proposé était adopté par la représentation nationale.
Reste que l’Agence France-Presse est un bien commun des citoyens français d’où ils puisent l’immense majorité des informations honnêtes et vérifiées lues dans leurs journaux, écoutées sur leurs radios et diffusées sur leurs écrans.
Cette tentative aussi grossière que malhabile d’encadrement politique, idéologique et économique de la principale source d’information française (dont Sarkozy s’est plaint à maintes reprises pour ne pas être suffisamment à sa bottine), entreprise dans la précipitation avant une échéance qui se présente pour le moins en la défaveur du Président sortant (et presque sorti), illustre -s’il en était besoin- sa lecture des mots Démocratie et République.
Les journalistes et personnel technique et ouvrier de l’AFP ont fait une première grève de 24 heures, jeudi et vendredi, pour y faire échec. Mais leur combat ne doit pas, ne peut pas rester solitaire. Tous les citoyens français, démocrates et républicains sont concernés.
L’été européen sera chaud, mais orageux, Le Monde 24 mai 2011
Le printemps arabe sera-t-il suivi d’un été européen ? La question revient à nous demander si l’ingrédient qui a mis le feu aux poudres en Tunisie pourrait exploser à la Puerta del Sol à Madrid et dans d’autres villes ibériques. « Nous ne sommes pas des marchandises dans les mains des politiciens et des banquiers » clame la banderole de cette photo.
Le problème de l’emploi des jeunes était l’un des premiers slogans tunisiens, et est au cœur de la réalité européenne. Depuis des années, les jeunes, même éduqués et diplômés, ne trouvent plus de travail dans la plupart des pays européens. Ils expriment un ras le bol face a l’egoisme de leurs aînés.
Des systèmes provisoires ont été mis en place pour organiser des formules contractuelles à court terme qui leur permettent de travailler. Les entreprises en ont fait un usage abondant, sans nécessairement se sentir la moindre obligation d’engager à la suite de ces « stages ». Il semblerait que les statistiques soient désastreuses et que les entreprises se soient contentées de « consommer » une main d’oeuvre à court terme. La demande classique « Venez nous revoir lorsque vous aurez eu un premier emploi » est un déni : quelles sont les entreprises qui offrent ces premiers emplois d’une manière qui permette d’envisager une carrière ?
Après l’Espagne, le mouvement des Indignés fera-t-il tâche d’huile en région ?
Jeunesse indignée à Madid
Le midi Libre le 24/05/2011 à 00h00 C. GREUET (avec AFP) 25/05/2011
D’inspiration espagnole, le mouvement « Réelle démocratie, maintenant ! » organise plusieurs rassemblements dans plusieurs régions de France, dont le Languedoc-Roussillon. (AFP) Le mouvement des « indignés » continue à faire rage en Espagne, alors que des sympathisants français commencent à se réunir, via internet, dans de nombreuses grandes villes françaises. Dans la région, des campements sont d’ores et déjà organisés à Perpignan, Nîmes et à Montpellier. Une foule de jeunes et de sympathisants a de nouveau envahi mardi soir le village alternatif de la Puerta del Sol, dans le centre de Madrid, où se poursuit le mouvement de protestation des jeunes « indignés » contre le chômage, la crise et la classe politique « corrompue ». Des centaines de personnes participaient aux interminables assemblées qui émaillent les journées du campement, pendant que d’autres travaillaient à l’organisation du village, qui ne cesse de s’étendre et de se structurer depuis une semaine. « Il y a toujours une importante participation citoyenne », assurait Nerea, une des porte-parole. Les grands rassemblements de la semaine dernière, qui ont réuni plusieurs dizaines de milliers de personnes à la Puerta del Sol et tout autour, ont laissé place à une mobilisation moindre, une fois passées les élections locales qui avaient constitué le premier objectif du mouvement.
En France, le collectif « Belle démocratie maintenant ! », calqué sur le « Democracia real, ya ! » des jeunes espagnols, appelle (sur le web et les réseaux) les citoyens à se réunir sur les places des grandes villes, pour la « régénération démocratique du système politique et défense d’une politique sociale ». Après la Place de la Bastille à Paris, des rassemblements sont organisés ce mercredi dans une vingtaine de villes françaises. Après que les forces de l’ordre aient prié lundi à une cinquantaine d' »indignés » de libérer la place de la République de Perpignan, de nouveaux rassemblements sont annoncés. Aujourd’hui, le mouvement appelle à rejoindre ce « campement permanent ». Des rassemblement similaire est également organisé aujourd’hui et demain à Montpellier, à l’Esplanade (18 h) et demain à Nîmes à la Maison carrée (19 h).
Les « indignés » se mobilisent , Le progrès de Lyon, le 26/05/2011 à 00:00
Ils sont une bonne centaine désormais à se regrouper sous la statue de Louis XIV au soleil couchant. Espagnols et Français qui veulent prendre part et relayer le printemps démocratique né sur la place Puerta del Sol à Madrid et qui progresse via les réseaux sociaux internet. Hier c’est à Athènes que des milliers de protestataires se sont retrouvés place Syntagma au cœur de la capitale grecque. Comme en Espagne, ils protestent contre les mesures d’austérité qui frappent le pays, englué dans la récession.
En France aussi des rassemblements fleurissent à Paris, à Lyon ou encore à Bayonne où a eu lieu hier un premier meeting. Ces personnes « courantes et ordinaires » réclament des « droits basiques » concernant le logement, le travail, la santé, l’éducation, l’égalité… Le droit au bonheur aussi. Parmi eux, Ophélie, petite brunette de 22 ans. « Je suis danseuse et je galère. Il n’y a pas de place pour les jeunes, pas de place pour la culture. On est à la veille d’élections et on se rend compte qu’aucun parti ne nous satisfait », déplore celle qui se dit « oppressée dans cette société qui manque d’humanité ».
Désenchantement et désir de changer les choses résument cette mobilisation citoyenne qui parle de révolution. « Je me retrouve dans ce qui se passe ici car l’état des lieux n’est pas acceptable. S’il y a un ailleurs pour sortir du désert dans lequel nous sommes, il faut y aller », développe de son côté un jeune qui après avoir enseigné deux ans à Marseille, a choisi de prendre une année sabbatique. Même constat de la part d’un étudiant en anthropologie. « Je suis en dernière année. On peut dire que ça va bien pour moi mais j’attends autre chose. » « Expliquer simplement la gravité de la situation actuelle », c’est ce que propose un peu plus tard dans la soirée, un plus âgé revendiquant des connaissances en économie. « Car il faut s’entendre et défendre les mêmes idées, les mêmes valeurs pour avancer et être toujours plus nombreux », défend à son tour au micro une jeune femme.
« Pour l’instant c’est le bordel, mais on va trouver une organisation », reconnaissait mardi soir un modérateur des débats. Chaque soir, des règles de fonctionnement sont prises ou rappelées. Et un nouvel ordre du jour est débattu. L’expulsion du site par la police risque de faire partie du rituel, même si le « yes we camp » exprimé ailleurs n’a pas encore gagné Lyon. Place Bellecour, des membres du campement libertaire monté en avril à la Croix-Rousse, poussent pour qu’un nouveau voit le jour. Leurs tipis et yourtes sont prêts à être acheminés. Pas forcément le genre des étudiants espagnols Erasmus du collectif lyonnais Democracia Real Ya ! (Démocratie réelle maintenant) à l’origine du mouvement lyonnais. Alors qu’en Espagne la jeunesse précaire, ceux que l’on appelle « los Indignados » (« Les indignés »), défie toujours les politiques après plus d’une semaine, à Lyon les citoyens indignés s’organisent pour durer. Un degré supplémentaire dans la mobilisation est attendue en fin de semaine.
« YES WE CAMP »: en France aussi les jeunes en ont ras-le-bol !
Le 24/05/2011 à 14h19 sur (Boursier.com) —
A l’image de ce qui se passe actuellement à Madrid, Génération Précaire relaie l’appel lancé par le mouvement « reelledemocratie.com » pour un rassemblement devant les marches de l’opéra Bastille à Paris tous les soirs à 19 heures « afin de faire entendre sa voix et rassembler de plus en plus d’ici dimanche 14H30 ». L’organisation commente : « Nous sommes des millions. Le mouvement est suivi dans toute l’Europe avec des manifestations en Grande-Bretagne ou encore en Grèce sous le slogan « People of Europe Rise Up » (Peuples d’Europe, soulevez-vous !). Solidaires de ces jeunes Espagnols qui ont eu le courage de se lever pour dire « stop », nous sommes à leurs côtés, et nous refusons le bizutage social actuel, tout en revendiquant une société ouverte à son avenir ». « Premiers touchés par la crise, les jeunes se révèlent une véritable variable d’ajustement et revendiquent un droit au travail qu’on leur refuse sous prétexte de crise économique mondiale » poursuit Génération Précaire qui « soutient les mouvements de protestations spontanés de cette jeunesse européenne et appelle à la mobilisation pour que l’on cesse de brader la jeunesse tout en consolidant un système qui a été sauvé sans contrepartie sociale ».
Rassemblements de solidarité avec les jeunes espagnols
(AFP) – le 24/O5/2011
Jeunesse indignée à Paris
PARIS — Inspirés par les manifestations espagnoles et les révolutions arabes, des centaines de jeunes se réunissent depuis quelques jours en France contre l’austérité et pour une « démocratie réelle », et prévoient un grand rassemblement dimanche place de la Bastille à Paris.
Si les protagonistes du printemps arabe luttaient chacun contre un ennemi physique explicitement féroce à déloger – leurs dictateurs respectifs -, les indignados européens luttent contre un ennemi autrement plus caché : un système que contrôle le pouvoir politico-financier, pouvoir sans tête, latent et invisible par principe. Seulement armés de leur indignation inspirée de Stéphane Hessel, leur problème est complexe : critiquant la main mise des marchés financiers sur les décisions économiques des états, ils contestent des institutions échappant en large partie (FMI, Commission Européenne) ou totalement (les marchés financiers, les banques) à la souveraineté des peuples. C’est sans doute ce qui explique leur programme de revendications inégales mais pourtant pas inintéressantes. Passage en revue de ce que veulent les contestataires.
1. Une « réforme de la Loi Electorale pour que toutes les voix aient la même valeur »
Ce qu’ils dénoncent : en apparence mystérieuse (les voix n’ont-elles pas déjà toute la même valeur qu’on soit un homme ou une femme, puissant ou misérable ?), cette revendication tend en fait à faire disparaître le bipartisme, en allant vers des élections aux résultats proportionnels, qui garantiraient ainsi l’expression de toutes les opinions. Les manifestent exigent aussi en toile de fond que les partis retirent de leurs listes les candidats les plus compromis dans des scandales de corruption.
Ce qui existe : en France, le scrutin est uninominal à deux tours. Les citoyens votent pour un candidat qui doit être un des deux « meilleurs » pour accéder au second tour où il doit alors obtenir la majorité absolue pour être élu. Ce mode de scrutin conduit a des alliances entre les deux tours qui lissent les dissensions politiques. Ceux qui n’en font pas sont privés de représentation. Le vote proportionnel permettrait à chaque parti (même les micro-partis) d’être représentés ; c’est un système où il s’agit moins de voter pour un homme que pour un parti ou un programme. Seulement sa mise en place reste extrêmement compliquée pour des raisons de calcul de la proportionnalité justement. Qui le propose ? Certainement pas le think tank Terra Nova qui cherche à renforcer le bipartisme en supprimant toutes les candidatures « hors système », pas plus qu’un micro parti comme Debout la République de Nicolas Dupont-Aignan, qui pourrait pourtant trouver son compte dans la proportionnelle. En revanche, Marine Le Pen rappelle que le gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple exige le respect et la juste représentation dans les institutions politiques de tous les Français et des formations politiques qui les représentent et considère que cette exigence de démocratie passe par l’instauration de la proportionnelle intégrale.
2. « L’établissement de mécanismes de démocratie directe, tant à l’échelle nationale qu’européenne »
Ce qu’ils dénoncent : la perte de la souveraineté du peuple citoyen. Ils constatent en effet que ni les dirigeants du FMI, de la Banque mondiale, ni ceux de l’OCDE, de l’OMC ou encore des banques centrales, dont les décisions ont pourtant un fort impact sur la vie des populations, ne sont élus par elles. Ainsi les citoyens ne voteraient plus que pour des représentants sans pouvoir.
Ce qui existe : à l’échelle nationale, ça, c’est-à-dire un système en grande partie représentatif. A l’échelle européenne, les citoyens votent seulement pour le Parlement, qui partage ses pouvoirs législatifs avec le Conseil de l’Union Européenne.
Qui le propose ? Ceux qui pensent que la démocratie représentative dépolitise le citoyen, c’est-à-dire essentiellement des intellectuels. Le site d’Alain Soral Egalité et Réconciliation et l’association Attac arrivent aux mêmes conclusions sans proposer de moyens pour récupérer la souveraineté. Quelques socialistes arrivent aussi au même constat, mais se contentent d’en accuser la politique de Nicolas Sarkozy, tout en prévenant du danger d' »une démocratie directe ou d’une captation aristocratique des décisions. » Cette prise de position est symptomatique du paysage politique qui dénonce l’abstention, sans toutefois oser tenter de nouveaux modes électoraux. Le Front National se démarque de la classe politique en proposant « un grand référendum par an pourrait être organisé sur les orientations essentielles pour l’avenir de notre pays et de notre peuple » (réponse à Helder, dans l’article en lien).
3. La « création d’une Loi de Responsabilité Politique »
Ce qu’ils dénoncent : la corruption des politiques, particulièrement mise en valeur par les conflits d’intérêt de l’Affaire Woerth-Bettencourt. Ce qui existe : La loi (n°2007-1598) du 13 novembre 2007 relative à la lutte contre la corruption. Cette mise à jour de 2007 permet de réprimer « le trafic d’influence », c’est-à-dire le fait de monnayer l’influence d’un intermédiaire, pour obtenir un avantage d’un agent public exerçant dans une organisation internationale. La loi sanctionne aussi bien la tentative de corruption ou de trafic d’influence que sa réussite, et prévoit des peines spécifiques envers les commanditaires comme les bénéficiaires. Elle prévoit des peines spécifiques pour les actes de corruption commis dans le monde du travail. Seulement rien n’est prévu particulièrement contre la corruption politique et l’action de lobbying n’est toujours pas reconnu législativement. Qui le propose ? Les partis de la « droite des valeurs », c’est-à-dire Debout la République et le Fn qui oeuvrent pour une politique des mains propres et proposeraient l’inéligibilité en cas d’affaire de corruption.
4. Une « augmentation de la transparence au sein de l’Administration, publicité de toute information sur les dépenses publiques »
Ce qui existe : les rapports de la Cour des Comptes, une juridiction financière qui avertit le gouvernement, le Parlement et l’opinion publique sur l’état des comptes de l’Etat. Pour 2010, la Cour estime que le compte général de l’Etat en 2010 « est régulier et sincère et donne une image fidèle de la situation financière et du patrimoine de l’Etat « , même si elle enregistre un déficit historique. Le problème de ces rapports c’est qu’ils sont peu accessibles et nécessitent des médiateurs neutres qui décryptent et dégagent les points essentiels. Qui le propose ? Les Maquizards, un groupe émergent de hauts fonctionnaires anonymes, qui veulent « mettre sur la place publique ce que les gens du Siècle se disent entre eux, mais qu’ils n’oseront jamais écrire dans leurs papiers, ou dire dans leurs communications. »
5. La « défense de services publics et de qualité »
Ce qu’ils dénoncent : le sabotage des services publics pour justifier leur privatisation. Le Pr André Grimaldi l’expliquait déjà, indépendamment de la french revolution, au niveau du milieu hospitalier : l’Etat a fait entrer le service public dans « une logique gestionnaire », ce’st-à-dire de rentabilité. Il diminue son soutien financier aux services publics, sans que la demande baisse, ce qui entraîne une chute progressive de la qualité qui conduit, à terme, à se tourner vers le privé. Cet extrait du « Cahier de politique économique » n°13 de l’OCDE explicite bien cette logique : « Si l’on diminue les dépenses de fonctionnement, il faut veiller à ne pas diminuer la quantité de service, quitte à ce que la qualité baisse. On peut réduire, par exemple, les crédits de fonctionnement aux écoles et aux universités, mais il serait dangereux de restreindre le nombre d’élèves ou d’étudiants. Les familles réagiront violemment à un refus d’inscription de leurs enfants, mais non à une baisse graduelle de la qualité de l’enseignement. » Ce qui existe : un démantèlement progressif des services publics en déficit. Voilà ce que ça donne si on fait un petit état des lieux. Justice : un tribunal sur trois en instance de fermeture, suppression programmée des juges d’instruction ; santé : baisse du remboursement des médicaments à vignette bleue, fermeture d’hopitaux et de services pas assez rentables décidée par la loi « Hôpital, Patients, Santé et Territoires » ; éducation : 16 000 postes d’enseignants supprimés, tandis que le nombre d’élèves augmente. Qui le propose ? La défense du service public est un combat de gauche (du PS au Front de Gauche) mais aussi désormais d’extrême droite.
6. L' »introduction d’une taxe sur les transactions financières internationales »
Ce qu’ils dénoncent : la spéculation et l’hypocrisie de la fiscalisation censée maintenir les grandes entreprises en France. Ce régime fiscal privilégié déjà dénoncé avec l’Affaire Bettencourt s’explique de la manière suivante : en démantelant les frontières, la mondialisation permet aux entreprises de jouer sur deux tableaux. En effet, elles peuvent réclamer un allègement des impôts auxquels elles sont assujetties dans leur pays d’origine, en mettant en avant les faveurs fiscales que des pays moins développés leur offrent. La France a donc créé des niches fiscales qui permettent aux entreprises du CAC 40 d’être taxées aux alentours des 8%. Seulement, selon l’économiste Frédéric Lordon, ces entreprises ne joueraient pas le jeu et engageraient économistes et juristes pour profiter des deux systèmes. Elles échapperaient ainsi au fisc, tout en bénéficiant d’un environnement (infrastructures, formation, etc.) financé par les impôts des autres contribuables. Qui le propose ? Le PCF et le Front de Gauche qui propose la « suppression des exonérations et aides aux entreprises » et l’association Attac qui propose « trois taxes pour maîtriser la spéculation ».
Tout comme en Espagne, la french revolution ne propose aucune plate-forme revendicative claire (même si des débats se déroulent sur le site Réelle Démocratie) et pourrait bien prôner pour les élections de 2012, soit l’alternance politique soit l’abstentionnisme, alors qu’elle les disqualifie dans ses revendications. Les manifestants iront-ils au bout de leurs idées, tandis que leurs revendications entrent en résonnance avec des idées politiques issues des deux extrêmes -gauche et droite-, qui ont tous les deux en commun de réclamer un retour à une nation souveraine, y compris dans le domaine économique ?
Les jeunes Espagnols commencent à essaimer en France
PARIS (Reuters)
Plusieurs dizaines de jeunes français regroupés tous les soirs depuis quelques jours place de la Bastille par solidarité avec les « indignés » espagnols appellent à un vaste rassemblement à Paris dimanche prochain. Des rassemblements sont prévus d’ici à là un peu partout en France mardi et mercredi, notamment à Lyon, Toulouse, Lille, Nantes, Strasbourg, Nantes ou Bordeaux. Le mouvement « Démocratie réelle, maintenant ! » estime que la mobilisation citoyenne des jeunes Espagnols, qui occupent depuis le 15 mai des places jour et nuit, concerne tous les Européens, qui doivent devenir « acteurs de cette dynamique de changement. ». « La révolte des pays arabes a traversé la Méditerranée. Le réveil du peuple espagnol envoie un message clair à tous les Européens, à nous de saisir cette opportunité », écrit-il sur son site internet. « Nous sommes pris à la gorge par les plans d’austérité qui se multiplient partout en Europe », ajoute-t-il, estimant que la crise économique et financière « touche tout le monde ».
« Démocratie réelle, maintenant ! » estime qu’en France, où les profits du CAC 40 ont doublé, le chômage des jeunes atteint 25 %. « En Espagne, c’est 40 % des moins de 35 ans qui sont sans emploi. »
Le mouvement a reçu le soutien de Génération précaire, qui souligne qu’en France aussi, « les jeunes en ont ras-le-bol ». « Nous sommes des millions. Le mouvement est suivi dans toute l’Europe avec des manifestations en Grande-Bretagne ou encore en Grèce sous le slogan » People of Europe Rise Up » (Peuples d’Europe, soulevez-vous !), écrit le mouvement dans un communiqué. Pour l’association, les jeunes, premiers touchés par la crise, « se révèlent une véritable variable d’ajustement et revendiquent un droit au travail qu’on leur refuse sous prétexte de crise économique mondiale. »
Gérard Bon, édité par Patrick Vignal
La « révolution » virtuelle deviendra-t-elle réelle ?,
Place de la Bastille, à Paris, mardi 24 mai. Copyright : Benjamin SEZE, témoignage chrétien
Le mouvement de protestation qui secoue l’Espagne depuis le 15 mai gagne la toile française. Néanmoins la mobilisation dans les principales villes de France reste réduite. Depuis vendredi, le souffle démocratique qui agite l’Espagne ces dernières semaines essaie de gagner la France via Internet. « Democratia Real Ya », disent-ils là-bas. « Une démocratie réelle maintenant », l’idée a séduit des internautes français. Sur Twitter, les messages pullulent. A travers le mot clé #frenchrevolution, des appels aux rassemblements dans les principales villes de France sont lancés quotidiennement. Des pages facebook sont nées et un site dédié au mouvement a été créé : Reelledemocratie.com. Plusieurs dizaines de personnes à Nantes, Marseille et Perpignan, entre 100 et 200 à Grenoble, Lyon, Montpellier et Toulouse, une centaine de plus à Paris… Peu relayé par les médias, l’engouement peine à se concrétiser sur le terrain. Et pour cause : se définissant comme « une mobilisation citoyenne totalement indépendante et autogérée », le mouvement ne bénéficie pas des relais et du soutien logistique des organismes politiques, syndicaux et associatifs. « Il y a une méfiance, voire une certaine défiance, de la part de ces jeunes vis-à-vis de tout type d’organisation politique, et même syndicale », constate Françoise, 55 ans, qui participe aux rassemblements place du Capitole, à Toulouse. « On sent bien que certains viennent de courants de gauche. Mais personne ne le revendique. Pour eux, si une tendance gagnait, ce serait perdu. »
Apolitique
Rester apolitique est un moyen de toucher un maximum de monde. « Il y a évidemment des jeunes militants d’extrême gauche, pourtant, nous voulons avant tout porter un discours citoyen », insiste Pablo, 26 ans, présent place de la Bastille, à Paris, mardi soir. Ce jeune Espagnol, qui travaille depuis quatre mois en France, était Plaza Catalunya à Barcelone ce week-end. « Cela n’a rien à voir, nous étions 15 000. Mais ici, c’est une bonne manière de commencer. » À quelques pas, assis sur le trottoir ou sur les marches de l’Opéra, les 200 participants français et espagnols sont regroupés en commissions. Quelques pancartes appellent les passants à se joindre à eux : « Venez donner vos idées, on a besoin de vous, de tous ». « Le mot révolution n’est qu’une métaphore de ce qui est en train de se passer », explique Pablo. « Nous savons que ce n’est pas une révolution classique, mais une mobilisation pacifique et modérée. » Le but : échanger des idées, et faire émerger des propositions qui seront ensuite adoptées en Assemblée générale. Pour l’instant, le discours n’est pas encore structuré et les revendications peu concrètes, néanmoins cela devrait venir. « Le monde ne se refait pas en cinq jours », justifie Françoise. Un premier manifeste, voté dimanche 22 mai par les 150 participants de Bastille, explique : « Depuis le début de la crise financière en 2008, nos gouvernants ont décidé de mettre à genoux les peuples au lieu de faire payer les banques. » Il annonce donc deux axes de revendications : « Régénération démocratique du système politique et défense d’une politique sociale ».
Test
La mobilisation a-t-elle des chances de décoller ? « Je ne sais pas, répond Françoise. Je sais toutefois que ce mouvement fait suite à de nombreuses mobilisations de la jeunesse (CPE, réforme Fillon, réforme Darcos, loi LRU…) et qu’il est une pierre de plus apportée à la prise de conscience de la réalité du monde injuste dans lequel nous vivons. » Pablo explique le succès espagnol : « En Espagne, il y a effectivement un très fort taux de chômage, mais nous avions surtout un discours connecté au citoyen. Nous avons repris des sujets qui reviennent dans les conversations – le chômage, la précarité, les inégalités, la corruption – et nous avons dit « il y a un problème, nous devons réfléchir à des solutions ». » Concernant la France, « tout dépend de l’organisation à venir du mouvement et de notre capacité à avoir un discours qui peut concerner le citoyen classique », conclut-il. Premier test, dimanche 29 mai, dans plusieurs grandes villes où sont programmés des « grands rassemblements populaires en solidarité avec la révolte en Espagne ».
A Marseille aussi, une poignée d’ « indignados » essaient de se faire connaître et ont organisé plusieurs manifestations ces derniers jours.
Depuis le début de la crise financière en 2008, nos gouvernants ont décidé de mettre à genoux les peuples au lieu de faire payer les banques. Les démocraties européennes ont été séquestrées par les marchés financiers internationaux. Nous sommes pris à la gorge par les plans d’austérité qui se multiplient partout en Europe. Le chômage a explosé et plonge dans la précarité et la misère des millions de personnes. La crise touche tout le monde. En France, alors que les profits du CAC 40 ont doublé, le chômage des jeunes atteint 25 %. En Espagne, c’est 40 % des moins de 35 ans qui sont sans travail. Solidarité avec les indignés Barcelonais violemment réprimés vendredi 27 avril 2011 matin (121 blessés)
Démocratie réelle… Maintenant ! La Spanish Revolution débarque à Marseille
25 Mai 2011 par Philippe Leger
Samedi 21 mai à Marseille, vers 20 h 30, cours Julien, les terrasses des restaurants sont bondées, on tchatche, on galéje, on flirte, on regarde le foot sur les écrans en plein air et, tout à coup, irruption de plus d’une centaine de manifestants, scandant des slogans en espagnol, brandissant des pancartes polyglottes: «Democratia real Ya!»… «Marsella – Frenchrevolution»… «Spanishrevolution»… «People of Europe Rise up!» Je me maudis d’avoir laissé à la maison mon appareil photo. Je pars aux renseignements. Une Espagnole, la trentaine (comme beaucoup de manifestants) m’apprend que « dans toutes les grandes villes du monde, Berlin, New York… des membres de sa communauté se rassemblent et défilent pour clamer leur indignation contre un système démocratique dévoyé, aux ordres des banquiers et de la puissance financière, d’une oligarchie qui ne défend que ses intérêts et oublie le peuple. » Nous échangeons nos adresses mail. Elle m’informe « qu’un rassemblement aura lieu demain, devant la préfecture ». Le soir-même, Raquel me précise dans un courriel* l’heure du rendez-vous et me fournit des informations, des adresses de sites pour approfondir ma connaissance du mouvement en cours. Dimanche, à l’heure dite, petit attroupement très pacifique d’une quinzaine de personnes, 20-30 ans devant la préfecture… et sans autorisation administrative ! Ces jeunes ont été informés de cette réunion d’information grâce aux réseaux sociaux, Facebook est le plus cité. Il y a des Marseillais pur sucre, une Allemande, des Espagnols…
A Marseille aussi, on manifeste (très timidement) pour une « Democracia real ya »
Par Esther Griffe le 24 mai 2011
A Marseille aussi, une poignée d’ « indignados » essaient de se faire connaître et ont organisé plusieurs manifestations ces derniers jours. L’évènement a été très peu relayé par les médias et pourtant, depuis plusieurs jours maintenant, un mouvement de protestation s’élève auprès des jeunes espagnols qui réclament de profonds changements sociétaux, comme l’explique le site Réelle Démocratie, version française du site espagnol Democracia Real Ya. Depuis le 15 mai, ils occupent la Puerta del Sol à Madrid. Et dans plusieurs villes de France aussi, le mouvement essaie de décoller comme à Nantes, Toulouse, Lyon ou encore Paris, où ils étaient près de 400 samedi dernier. Ce mouvement de protestation reste encore très discret dans les médias nationaux, ce qui peut expliquer la très faible mobilisation en France. Pourtant, à l’image des dernières révolution arabes, des jeunes français voudraient eux aussi mener leur French Revolution. A grand renfort de réseaux sociaux, on tente par tous les moyens de faire passer l’information. Pas sûr que ça prenne. La France n’est pas l’Espagne, et encore moins la Tunisie. Malgré plusieurs manifestations prévues sur l’ensemble du pays pour les prochains jours. Dimanche, ils n’étaient qu’une vingtaine en début de soirée mais gardent pourtant bon espoir. Alors feu de paille où début d’un grand mouvement ?
Les jeunes Européens sont solidaires. Ils veulent être écoutés. Respectés. Et représentés !
Si les élections régionales espagnoles des 15 et 22 mai constituent le détonateur, il est évident que le mouvement ne s’arrêtera pas avec la proclamation des résultats électoraux, la déculottée du parti de Zapatero et le triomphe des partis de droite. Il est clair que Sheila, comme toutes les hirondelles hispaniques, souhaite un printemps des peuples pour chasser, comme en Islande, les « partis majoritaires et leurs politiciens corrompus, pour juguler banquiers et financiers internationaux, réorganiser les priorités économiques et sociales, la vie démocratique… » Mais peut-on faire de la politique en dehors des réalités institutionnelles ? Probablement pas. À tout le moins, pas plus plus que les « institutionnels » ne peuvent continuer à faire de la politique en dehors des réalités véritables, celles que les personnes vivent dans leur chair et dans leur sang, faites de chômage, de difficultés financières, de difficultés à trouver un logement décent etc. L’année 2011, une année conviviale, sympathique, avant la grosse tempête… en 2012 ?
Vers un printemps européen ?
Il faudra davantage, croyons-nous, que des « mots d’ordre » relayés par une « presse vénale » et des médias trop souvent déconsidérés, pour démobiliser une jeunesse européenne diplômée et au chômage, à la puissance décuplée par les outils technologiques et l’internet (sa force et son talon d’Achille). Une jeunesse qui fédère d’autres catégories de la population, dans toutes les tranches d’âge. Et qui n’a plus rien à perdre ! Mais il y a plus important : grâce à la jeunesse d’Espagne, les jeunes d’Islande, de France, d’Allemagne et probablement de toute l’Union européenne commencent à croire qu’ils peuvent changer le monde. Ça, c’est nouveau ! Et réjouissant !
Nous sommes des personnes courantes et ordinaires. Nous sommes comme toi : des gens qui se lèvent tous les matins pour étudier, pour travailler ou pour chercher un boulot, des gens qui ont famille et amis. Des gens qui travaillent dur tous les jours pour vivre et donner un futur meilleur à celles et ceux qui les entourent.
Parmi nous, certain-e-s se considèrent plus progressistes, d’autres plus conservateurs. Quelques un-e-s croyants, d’autres pas du tout. Quelques un-e-s ont des idéologies très définies, d’autres se considèrent apolitiques. Mais nous sommes tous très préoccupé-e-s et indigné-es par la situation politique, économique et sociale autour de nous. Par la corruption des politiciens, entrepreneurs, banquiers, … . Par le manque de défense des hommes et femmes de la rue. Cette situation nous fait du mal quotidiennement ; mais, tous ensemble, nous pouvons la renverser. Le moment est venu de nous mettre au travail, le moment de bâtir entre tous une société meilleure. Dans ce but, nous soutenons fermement les affirmations suivantes :
* L’égalité, le progrès, la solidarité, le libre accès à la culture, le développement écologique durable, le bien-être et le bonheur des personnes doivent être les priorités de chaque société avancée.
* des droits basiques doivent être garantis au sein de ces sociétés : le droit au logement, au travail, à la culture, à la santé, à l’éducation, à la participation, au libre développement personnel et le droit à la consommation des biens nécessaires pour une vie saine et heureuse.
* Le fonctionnement actuel de notre système politique et gouvernemental ne répond pas à ces priorités et il devient un obstacle pour le progrès de l’humanité.
* La démocratie part du peuple, par conséquent le gouvernement doit appartenir au peuple. Cependant, dans ce pays, la plupart de la classe politique ne nous écoute même pas. Ses fonctions devraient être de porter nos voix aux institutions, en facilitant la participation politique des citoyens grâce à des voies directes de démocratie et aussi, procurant le plus de bienfait possible à la majorité de la société, et pas celle de s’enrichir et de prospérer à nos dépens, en suivant les ordres des pouvoirs économiques et en s’accrochant au pouvoir grâce à une dictature partitocratique.
* La soif de pouvoir et son accumulation entre les mains de quelques-uns crée inégalités, crispations et injustices, ce qui mène à la violence, que nous refusons. Le modèle économique en vigueur, obsolète et antinaturel, coince le système social dans une spirale, qui se consomme par elle-même, enrichissant une minorité et le reste tombant dans la pauvreté. Jusqu’au malaise.
* La volonté et le but du système est l’accumulation d’argent, tout en la plaçant au-dessus de l’efficience et le bien-être de la société ; gaspillant nos ressources, détruisant la planète, générant du chômage et des consommateurs malheureux.
Nous, citoyens, faisons parti de l’engrenage d’une machine destinée à enrichir cette minorité qui ne connait même pas nos besoins. Nous sommes anonymes, mais, sans nous, rien de cela n’existerait, car nous faisons bouger le monde.
* Si, en tant que société nous apprenons à ne pas confier notre avenir à une abstraite rentabilité économique qui ne tourne jamais à notre avantage, nous pourrons effacer les abus et les manques que nous endurons tous. Nous avons besoin d’une révolution éthique. On a placé l’argent au-dessus de l’Etre Humain, alors qu’il faut le mettre à notre service. Nous sommes des personnes, pas des produits du marché. Je ne suis pas que ce que j’achète, pourquoi je l’achète ou à qui je l’achète.
A la vue de cela, je suis indigné/e. Je crois que je peux le changer. Je crois que je peux aider. Je sais que, tous ensemble, on le peut. Sors avec nous. C’est ton droit.
MARSEILLE – Lieu : Cours Estienne d’Orves
14 h – Dimanche 29 mai 2011 – Appel national aux citoyens
Nous sommes des personnes venues de manière libre et volontairement, et qui avons décidé après la manifestation de continuer à nous réunir pour revendiquer la dignité et la conscience politique et sociale. Nous ne représentons aucun parti ni association.
Ce qui nous unit, c’est une vocation de changement. Nous sommes ici par dignité et solidarité avec ceux qui ne peuvent pas être présents. Pourquoi sommes-nous ici ? Nous sommes ici car nous voulons une société nouvelle qui donne la priorité à la vie au-delà des intérêts économiques et politiques. Nous plaidons pour un changement de la société et de la conscience sociale. Démontrer que la société ne s’est pas endormie et que nous continuerons à lutter de manière pacifique pour ce que nous méritons. Nous soutenons nos compagnons arrêtés après la manifestation et nous demandons leur mise en liberté sans charge. Nous voulons tout, nous le voulons maintenant, si tu es d’accord avec nous: REJOINS-NOUS! “C’est mieux prendre des risques et perdre que perdre sans avoir rien risqué”
Voici quelques unes des mesures que, en tant que citoyens, nous considérons essentielles pour régénérer notre système politique et économique. Tu peux donner ton avis et proposer tes propres mesures dans le forum.
1.- SUPPRESSION DES PRIVILÈGES DE LA CLASSE POLITIQUE:
Contrôle rigoureux de l’absentéisme des élus dans leurs fonctions. Sanctions spécifiques à l’abandon de fonctions. · Suppression des privilèges par rapport aux charges fiscales, aux années cotisées et au montant des pensions. Égalité du salaire des élus au salaire espagnol moyen plus les frais nécessaires indispensables pour l’exercise de leurs fonctions. · Suppression de l’immunité accordée aux responsables politiques. Imprescriptibilité des délits de corruption. · Publication obligatoire du patrimoine de tous les titulaires de fonctions publiques. · Réduction des postes à nomination discrétionnaire.
2.- CONTRE LE CHÔMAGE: · Une répartition du travail qui favorise la réduction du temps de travail quotidien et la conciliation de la vie professionnelle et la vie privée jusqu’à la disparition du chômage structurel (c’est à dire, jusqu’à ce que le chômage atteigne moins de 5%). · Retraite à 65 ans et aucune augmentation de l’âge de retraite tant que le chômage des jeunes n’ait pas disparu. · Prîmes pour les entreprises qui emploient moins de 10% de leur personnel en intérim. · Sécurité de l’emploi: interdiction de licenciements collectifs o pour des causes objectives dans les grandes entreprises tant qu’il y a de bénéfices, contrôle des grands entreprises afin de garantir qu’elles n’ont pas recours à l’intérim pour occuper des postes permanents. · Rétablissement de l’aide de 426 € pour tous les chômeurs de longue durée.
3.- DROIT AU LOGEMENT: · Expropriation par l’État des logements bâtis et non vendus afin de les placer dans le marché en tant qu’habitations à loyer modéré (HLM). · Aides au logement pour les jeunes est pour les personnes aux revenus modestes. · Possibilité d’hypothéquer sa maison pour rembourser son prêt immobilier.
4.- SERVICES PUBLICS DE QUALITÉ: · Suppression des dépenses inutiles dans les Administrations Publiques et mise en place d’un contrôle indépendant des budgets et des dépenses. · Embauche de personnel médical tant qu’il y a des listes d’attente de patients. · Embauche de personnel enseignant afin de garantir le ratio d’éleves para cours, les groupes de soutien scolaire et de rattrapage. · Réduction des frais d’inscription dans tous les établissements d’enseignement universitaire et mise à égalité du prix des licences et des masters. · Financement public de la recherche afin de garantir son indépendance. · Transport public à bas prix, de qualité et durable: rétablissement des trains qui sont en train d’être remplacés para les lignes de grand vitesse (AVE) à leurs prix initiaux, réduction du coût des abonnements de transport en commun, restriction de la circulation automobile privée dans les centres villes, aménagement de pistes cyclables. · Ressources sociales locales: application effective de la Loi de Dépendance, réseaux d’aides- soignant municipaux, services locaux de médiation et de garde.
5.- CONTRÔLE DES BANQUES: · Interdiction de toute sorte de sauvetage ou injection de capital aux banques: les banques en difficulté doivent faire faillite ou être nationalisés afin de créer une banque publique sous contrôle social. · Augmentation d’impôts pour les banques au prorata du coût social généré par la crise occasionnée par leur mauvaise gestion. · Remboursement à la caisse de l’état par les banques de tout le capital publique qui leur a été apporté. · Interdiction aux banques d’investir dans des paradis fiscaux. · Réglementation des sanctions aux opérations spéculatives et à la mauvaise pratique bancaire.
6.- FISCALITÉ: · Augmentation du taux d’impôt su la fortune et de l’imposition pour les banques. · Suppression des SICAV. · Rétablissement de l’impôt sur le patrimoine. · Contrôle réel et efficace de la fraude fiscale et de la fuite de capitaux vers les paradis fiscaux. · Promotion international de la adoption d’une taxe aux opérations internationales (taxe Tobin).
7.- LIBERTÉS CITOYENNES ET DÉMOCRATIE PARTICIPATIVE: · Non au contrôle d’Internet. Abolition de la Loi Sinde. · Protection de la liberté d’information et du journalisme de recherche. · Référendums obligatoires et contraignants pour les sujets d’ampleur qui modifient profondément les conditions de vie de tous les citoyens. · Référendums obligatoires pour toute mise en place des mesures dictées para l’Union Européenne. · Modification de la Loi Électoral afin de garantir un système représentatif et proportionnel réel, qui ne discrimine aucune force politique ou volonté social, où le vote blanc et le vote nul soient aussi représentés au sein du législatif. · Indépendance du Pouvoir Judiciaire: reforme du Ministère Public afin de garantir son indépendance; non à la nomination de membres du Conseil Constitutionnel et du Conseil Supérieur de la Magistrature par le Pouvoir Exécutif. · Mise en place des mécanismes effectifs afin de garantir la démocratie interne au sein des partis politiques.
Ignacio Ramonet : « les personnes qui accèdent au contenu veulent être lus et écoutés » Photo David Maugendre
L’ancien patron du Monde Diplomatique dresse un état des lieux de la profession dans son livre « L’explosion du journalisme. Des médias de masse à la masse de médias ».
Théoricien de la communication et du journalisme, Ignacio Ramonet a dirigé Le Monde Diplomatique pendant vingt-cinq ans. Son dernier livre « L’explosion du journalisme » fait le point sur une profession en pleine mutation tout en dessinant les nouvelles tendances qui sont autant d’enjeux pour la démocratie.
Dans l’état des lieux que vous dressez du journalisme, on a le sentiment que la presse traditionnelle peine à s’adapter à la nouvelle logique de l’information ?
Avec ce livre, je me suis demandé où en est le journalisme. Quinze ans après le choc Internet, il n’y avait pas de synthèse critique de ce qui est en train de se passer. J’ai voulu mesurer la teneur du bouleversement. Pour cela, je me suis appuyé sur ce qui se passe aux Etats-Unis où le choc est très brutal. Dans la presse écrite, beaucoup de titres ont disparu, des dizaines de journaux sont en faillite. Les radios et les télévisions sont également concernées, et particulièrement les chaînes d’info en continu. La profession peine à s’adapter. Elle est en pleine transition.
A vous lire, on comprend que les médias se trouvent soudainement devant une remise en cause profonde de leur vocation. Pourquoi ne l’ont-ils pas anticipée ?
Les médias traditionnels font face à une double crise. Une crise économique qui fait suite à la crise financière et se répercute directement sur les recettes publicitaires devenues très importantes dans leurs ressources, et une crise identitaire qui remet en cause le modèle où ils se trouvaient en position de monopole de l’information dans la société. Les quotidiens généralistes continuent de pratiquer un modèle qui ne fonctionne plus face à la prolifération de nouveaux modes de diffusion de l’information, ce qui se traduit par une baisse des ventes.
Tous les médias disposent pourtant aujourd’hui d’une façade en ligne ?
Oui, et paradoxalement les internautes continuent majoritairement de se rendre sur les sites des médias considérés comme les plus sérieux. Le fait nouveau, c’est que les personnes qui accèdent au contenu veulent être lus et écoutés. Pour le Web, beaucoup de journaux ont développé des rédactions séparées avec des journalistes plus jeunes qui ont compris que l’information ne circule plus à sens unique. Actuellement au sein des rédactions, on assiste à un mouvement de fusion des services pour créer un écosystème où la culture des uns puisse imprégner la culture des autres.
L’émergence des experts que l’on retrouve sur les sites des journaux participe-t-il au pouvoir des technocrates ?
Les personnes qui ont une expertise interviennent de plus en plus sur l’actualité avec l’autorité de celui qui sait. Cela permet de disposer d’approches différentes. À cet égard, l’exemple de Fukushima est éclairant. En France ; les grands médias dominants nous on d’abord dit que ce n’était pas très grave et que cela ne nous concernait pas. Mais via le web, d’autres experts ont fourni une série d’éléments qui donnent une version bien différente.
Sur ce dossier, on constate à quel point l’information est occultée, minimisée et censurée y compris par le gouvernement japonais…
Tout est en effet réuni pour qu’on occulte les enjeux et qu’on retarde l’approfondissement du contenu par le blocage de l’information. Et en même temps, n’importe quel citoyen peut se rendre compte qu’un accident dans une centrale nucléaire n’est jamais local mais planétaire. Au moment où a eu lieu la catastrophe, il y avait 34 centrales en construction et 32 autres projets dans le monde. Pour un petit nombre de grandes entreprises, des centaines de milliards sont en jeu. Ce qui pousse à s’interroger sur la structure d’intérêt des médias de masse.
Chez les citoyens, la complicité médiatico-économique est à l’origine d’une perte de confiance. Les médias ne participent-il pas finalement à leur propre fin ?
Notre rapport aux médias se caractérise par le sentiment d’insécurité informationnel. Aujourd’hui les gens ont le sentiment que l’information n’est pas garantie. Cette perte de confiance est liée au fait que les médias renforcent les disfonctionnements du système libéral. Les grands groupes médiatiques ne proposent plus comme objectif civique d’être un quatrième pouvoir. Ce sont désormais les réseaux sociaux qui coordonnent une protection collective. Les médias se sont affaiblis, c’est pour cela qu’ils sont rachetés. Paradoxalement ce que démontre la puissance des médias n’est en réalité qu’une preuve de la faiblesse du pouvoir politique réduit par le pouvoir financier.
Vous vous prononcez pour une écologie de l’information ?
Dans les états démocratiques, nous débordons d’information. Mais cette information se trouve contaminée, empoisonnée par toutes sortes de mensonges, polluée par les rumeurs et la désinformation. Notre sensibilité à la rumeur n’est d’ailleurs pas normale. En théorie de l’information, on apprend que la rumeur se développe avec l’opacité…
Face à ce phénomène Julian Assange considère que la révélation d’infos brutes est devenue le seul recours. Partagez-vous ce constat ?
Assange dénonce la mort de la société civile défaite par la puissance du système financier. Pour lui les démocraties ne devraient pas craindre la libre diffusion des informations. Les grands journalistes en vue l’ont descendu parce qu’il révèle leur propre paresse. Pourquoi un journaliste devrait-il se taire quand un homme politique affirme une chose en public et son contraire en comité restreint ? Le problème d’une info brute est qu’elle doit être interprétée. C’est justement le travail des journalistes. Assange l’a reconnu en associant des grands journaux de référence à la diffusion des câbles diplomatiques.
Vous évoquez toute une série d’innovations qui ont réussi comme le journalisme non lucratif…
Plus les médias deviennent commerciaux plus le travail d’investigation disparaît. Dans les niches du web apparaissent de nouveaux sites d’information financés par des mécènes et beaucoup de citoyens qui font des micro dons pour répondre au besoin démocratique d’une presse libre. Je ne suis pas pessimiste sur le sort des journalistes. L’explosion de la profession offre aussi beaucoup d’opportunités.
Recueilli par Jean-Marie Dinh (L’Hérault du Jour)
L’explosion du journalisme, éditions Galilée, 18 euros