Une nouvelle déclaration d’indépendance du cyberespace

En hommage à John Perry Barlow, décédé, Olivier Ertzscheid a écrit une nouvelle version du texte de 1996, devenu emblématique des cyberutopies libertaires.

John Perry Barlow était parolier des Grateful Dead, membre fondateur de l’Electronic Frontier Foundation (EFF), militant infatigable des libertés numériques, et l’auteur de l’une des pièces majeures du puzzle de la culture web et de l’Internet des pionniers : la déclaration d’indépendance du cyberespace.

«Nous sommes en train de créer un monde où tous peuvent entrer sans privilège et sans être victimes de préjugés découlant de la race, du pouvoir économique, de la force militaire ou de la naissance. Nous sommes en train de créer un monde où n’importe qui, n’importe où, peut exprimer ses croyances, aussi singulières qu’elles soient, sans peur d’être réduit au silence ou à la conformité. Vos concepts légaux de propriété, d’expression, d’identité, de mouvement, de contexte, ne s’appliquent pas à nous. Ils sont basés sur la matière, et il n’y a pas ici de matière.»

Plus rien dans cet extrait n’est vrai. Et c’est tout le contraire qui s’est mis en place. Mais cela reste comme une petite lumière qui continue de dire où tout cela a commencé, quels rêves étaient alors permis et vers où, peut-être dès demain, recommencer à rêver.

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Le texte de la déclaration d’indépendance du cyberespace est bien sûr un texte très fort, mais le passage qui m’importe le plus, hormis celui cité plus haut, est un passage qui ne figure pas dans le texte lui-même mais dans son prologue, très peu connu. Quelques lignes dans lesquelles John Perry Barlow explique pourquoi il a eu envie de rédiger cette déclaration. La raison c’est le vote du Telecommunications Act de 1996, signé par «l’autre grand invertébré» (aka Bill Clinton) et qui a poussé John Perry Barlow à faire «acte de résistance». Voilà ensuite ce qu’il écrit dans ce prologue :

«Après tout, le Telecom « Reform » Act, qui est passé au Sénat avec seulement 4 votes contre, rend illégal, et punissable d’une amende de 250 000 dollars, de dire « shit » en ligne. Comme de dire l’un des sept mots interdits dans les médias de diffusion grand public. Ou de discuter d’avortement d’une façon ouverte. […] Cette loi a été mise en œuvre contre nous par des gens qui n’ont pas la moindre idée de qui nous sommes, ni où notre conversation est conduite. C’est, comme l’a dit mon ami et rédacteur en chef de Wired Louis Rosseto, comme si « les analphabètes pouvaient vous dire quoi lire ». Eh bien, qu’ils aillent se faire foutre.»

Aujourd’hui, c’est une autre forme d’analphabétisme algorithmique qui nous dit quoi lire. Eh bien, qu’ils aillent également se faire foutre.

John Perry Barlow est décédé le mercredi 7 février 2018. Il avait 70 ans.

J’ai pris la liberté de tenter de réécrire sa déclaration d’indépendance du cyberespace, dans un cyberespace qui n’est plus que la colonie numérique des grandes plateformes. Un hommage imparfait et maladroit, mais surtout un remerciement pour sa déclaration et son travail.


Déclaration d’indépendance du cyberespace

 

«Seule l’erreur a besoin du soutien du gouvernement. La vérité peut se débrouiller toute seule» Thomas Jefferson, Notes on Virginia

Plateformes aux tons pastel et aux logos colorés, vous géants fatigués aux CGU d’airain et aux algorithmes d’acier, je viens du temps des internets d’avant, où nous n’avions pas de «comptes» mais des pages, où chacun pouvait disposer d’une adresse et n’était pas contraint d’habiter par habitude et par lassitude sous le même grand F bleu qui orne votre jardin fermé, et de vivre dans cette fausse proximité que vous nous avez tant vanté et qui est d’abord une toxique promiscuité.

Au nom du présent que vous avez institué, je vous demande, à vous qui êtes désormais le passé, de nous laisser tranquilles. Vous n’êtes plus les bienvenus parmi nous. Vous avez trop de souveraineté pour que celle-ci ne soit pas enfin questionnée et abolie.

Comme gouvernance, vous n’avez que des actionnaires que nous n’avons pas élus mais dont les décisions ont aujourd’hui plus de poids que celles des gouvernements élus. Je déclare l’espace social global que nous construisons naturellement indépendant des tyrannies que vous cherchez à nous imposer. Vous n’avez aucun droit moral de dicter chez nous votre loi et vous possédez hélas désormais trop de moyens de nous contraindre que vous n’hésitez plus à utiliser.

Les gouvernements tiennent leur juste pouvoir du consentement de ceux qu’ils gouvernent. Vous n’avez ni sollicité ni reçu le nôtre. Nous ne vous avons pas invités. Nous avons eu le tort de croire vos promesses. Mais vous nous connaissez bien trop, vous nous calculez bien trop, et vous voulez bien trop prédire le moindre de nos actes, de nos affects, de nos comportements. Cela ne peut suffire à nous connaître vraiment. L’espace de libre circulation des idées ne se situe pas dans les frontières que vos plateformes ont reconstruites dans le cyberespace. Cet espace est un produit naturel, un commun, et il croît par notre action collective.

Vous épiez désormais l’ensemble de notre grande conversation, et la richesse que vous créez, et le modèle de régie publicitaire sur lequel vous prospérez, sont définitivement et totalement incompatibles avec l’éthique nécessaire à l’échelle des populations que vous touchez et prétendez servir et accompagner. Votre culture n’est pas la nôtre, vos règles tacites suscitent autant d’incompréhension et de désordre que chacune de vos innombrables ingérences.

Vous prétendez qu’il y a chez nous des problèmes que vous devez résoudre. Et qu’il n’existe pas de problème qu’un algorithme ou une application ne soit capable de résoudre. Vous utilisez ce prétexte pour envahir nos vies, nos smartphones, nos foyers, nos amitiés. Beaucoup de ces problèmes n’existent pas. Où il y a des conflits réels, où des dommages sont injustement causés, nous les identifierons et les traiterons avec nos propres moyens. Nous sommes en train de former notre propre contrat social. Cette manière de gouverner émergera selon les conditions de notre monde, pas du vôtre. Notre monde est différent.

Les internets sont faits de transactions, de relations, et de la pensée elle-même, formant comme une onde stationnaire dans la toile de nos communications, dont la neutralité doit être garantie, et ne peut plus l’être par vous. Notre monde est à la fois partout et nulle part, et il est aujourd’hui aussi là où vivent les corps.

Vos plateformes et vos déterminismes calculatoires recréent un monde où sont reconduits tous les privilèges et tous les préjugés découlant de la race, du pouvoir économique, de la force militaire ou de la naissance.

Vos plateformes et vos déterminismes calculatoires recréent un monde où plus personne ne peut exprimer ses croyances, aussi singulières qu’elles soient, sans peur d’être réduit au silence ou à la conformité.

Vos plateformes et vos déterminismes calculatoires redéfinissent à leur seul bénéfice et à ceux de leurs actionnaires les concepts légaux de propriété, d’expression, d’identité, de mouvement, de contexte, et les appliquent à chacun, en font la norme pour tous.

Nos identités sur les internets ont fini par retrouver la pesanteur des corps, mais vous les avez lestés de tant de kilos inutiles de recommandations, de tant de kilos superflus de suggestions, de tant et tant de tonnes de prescriptions, que tout cela finit par former une contrainte physique et limiter la part de notre libre arbitre. Nous croyons que c’est de l’éthique, de la défense éclairée de l’intérêt propre et de l’intérêt commun, que notre ordre émergera. Que cet ordre ne peut être garanti que par une négociation collective. La seule loi que toutes nos cultures constituantes pourraient reconnaître généralement est la règle d’or [«Ne fais pas aux autres ce que tu n’aimerais pas qu’ils te fassent», NdT]. Nous espérons pouvoir bâtir nos solutions particulières sur cette base. Mais nous ne pouvons pas accepter les solutions que vous tentez de nous imposer par le code. Car si le code est la loi, nous n’entendons pas qu’il soit élaboré et appliqué en dehors de tout espace de délibération réellement public et sincèrement commun.

Aux Etats-Unis, vous avez récemment remis en cause le principe de neutralité du Net qui répudie votre propre Constitution et insulte les rêves de Jefferson, Washington, Mill, Madison, Tocqueville et Brandeis. Ces rêves doivent maintenant renaître en nous.

Vous terrifiez désormais vos propres enfants, parce qu’ils ne se reconnaissent plus dans les frontières que vous placez dans le cyberespace, et parce que chacune de ces frontières arbitraires et soumises aux lois du marché nous contraint à devenir des étrangers pour ceux qui se trouvent de l’autre côté de vos murs de données, là où nos rêves étaient simplement ceux d’une plus grande fraternité. Parce que vous continuez de nous craindre et que nous continuons de tenter de vous échapper, vous confiez à vos algocraties les responsabilités de parents auxquelles vous êtes trop lâches pour faire face. Dans notre monde, tous les sentiments et expressions d’humanité, dégradants ou angéliques, font partie d’un monde unique, sans discontinuité, d’une conversation globale de bits. Nous ne pouvons pas séparer l’air qui étouffe de l’air où battent les ailes.

En Chine, en Allemagne, en France, à Singapour, en Italie et aux Etats-Unis, vous essayez de confiner le virus de la liberté en érigeant des postes de garde aux frontières de vos plateformes et de fait vous vous placez vous-même en dehors du cyberespace, même si vous êtes parvenus, par l’entremise d’un capitalisme aussi linguistique que cognitif à aliéner l’essentiel de la liberté et de l’espace dont on imaginait qu’il pourrait un jour être couvert de médias numériques libres et indépendants.

Vos industries de données, de plus en plus totalitaires, se perpétuent en proposant des lois, en Amérique et ailleurs, qui prétendent décider de la parole elle-même dans le monde entier… Ces lois déclareraient que les idées sont un produit industriel comme un autre, pas plus noble que de la fonte brute… L’art, l’histoire, la vérité des peuples et celle des révolutions, rien n’échappe à l’arbitraire de vos décisions, de vos goûts, de vos propres pudeurs, et par-dessus tout de vos propres intérêts commerciaux et financiers. Dans notre monde, quoi que l’esprit humain crée peut être reproduit et distribué à l’infini pour un coût nul. L’acheminement global de la pensée doit désormais trouver d’autres chemins que celui de vos usines, d’autres ambitions que celles de vos carcans, d’autres légitimités que celles des rentiers et des banquiers de la culture qui sont vos porte-voix autant que vos portefaix.

Ces mesures de plus en plus hostiles et votre colonialité nous placent dans la même situation que ces amoureux de la liberté et de l’autodétermination qui durent rejeter les autorités de pouvoirs éloignés et mal informés. Nous devons déclarer nos personnalités réelles comme virtuelles exemptes de votre souveraineté, même lorsque nous continuons à accepter votre loi pour ce qui est de l’organisation de nos échanges pour préparer votre déchéance. Nous nous répandrons de nouveau à travers la planète, en dehors de vos murs, de façon à ce qu’aucune plateforme ni aucun algorithme ne puissent stopper nos pensées.

Nous recréerons une civilisation de l’esprit dans le cyberespace redevenu ouvert et décentralisé. Puisse-t-elle être plus humaine et plus juste que le monde issu de vos ambitions et de vos conditions générales d’utilisation. Nous étions des citoyens endormis, vous avez fait de nous des utilisateurs passifs, nous sommes en train de nous réveiller et nous préparons notre exil.

La Roche-sur-Yon, France, le 7 février 2018.

Olivier Ertszcheid est l’auteur de l’appétit des géants (2017, C&F éditions)

Olivier Ertzscheid Enseignant-chercheur en sciences de l’information et de la communication à l’université de Nantes

Texte publié dans Libération en février 2018

Vers une sortie de crise après les rencontres des cheminots à Matignon …

An agent waits for passengers to board a TGV high-speed train at Montparnasse railway station in ParisAux syndicats qui se sont succédé  à Matignon, le Premier ministre, Edouard Philippe, a confirmé que l’Etat reprendrait 35 milliards d’euros de dette, dont 25 milliards en 2020 et 10 milliards en 2022, afin que l’entreprise atteigne « l’équilibre » financier « avant la fin du quinquennat ».Pour mémoire, les grévistes soutenus par l’opinion demandaient le retrait total du projet du gouvernement en s’opposant à l’ouverture à la concurrence,à la transformation de l’entreprise publique en société par actionsà la casse sociale.L’Etat qui a temporisé longuement sur la question de la dette (54 milliards) se propose aujourd’hui de la prendre en charge en partie (35 milliards). C’est un des éléments de la problématique mais ce n’est pas le contenu de la loi ni de la réforme. Un élément qui semble néanmoins déterminant pour remettre les affaires sur les rails. 

COMPTE-RENDU DE LA BILATERALE A MATIGNON DU 25 MAI 2018

Une délégation de la Fédération CGT des cheminots accompagnée de Philippe Martinez, a été reçue lundi à Matignon (comme les autres organisations syndicales représentatives) par le Premier ministre et la ministre des Transports.

La délégation est revenue sur l’ensemble des thèmes revendicatifs en partant du contexte de lutte dans l’entreprise à l’appui du rapport de force après 22 jours de grève (le plus long conflit depuis 1995) ainsi que du résultat de la « Vot’Action ». Le Premier ministre s’est dit très attentif à la situation affirmant, contrairement à la direction d’entreprise, ne pas contester le vote des Cheminots.

Lors de la précédente réunion, les grandes lignes des annonces avaient déjà été faites. La CGT a donc demandé le contenu précis des décisions, sans toutefois obtenir toutes les réponses : reprise de la dette, investissements (besoins, montants, priorités…), amendements au Sénat (nature et portée), étude d’impact sur la transformation des EPIC en SA et coût du capital, volonté de maintenir la suppression du Statut malgrè la fonte de son surcoût supposé (10 millions d’euros, soit 20 fois moins que le budget communication), recul de la volonté de concurrence par les Régions (Bourgogne abandonne sa demande), dumping social, CCN de branche, cadrage et engagement du gouvernement dans des négociations à venir avec l’UTP, organisation de la production (réinternalisation et arrêt de la gestion par activité).

Sur la dette, le Premier Ministre a annoncé la reprise de 25 Md€ en 2020 et 10 Md€ en 2022. Sur les investissements, 200 M d’€ supplémentaires/an seront affectés à la modernisation de l’infra.

Notre demande de table ronde tripartite (début juin) avec le Gouvernement, l’UTP et les organisations syndicales a été acceptée, même si le Premier Ministre semble vouloir la limiter aux questions sociales.

Ces annonces sont à mettre évidemment au crédit de la lutte en cours, notamment la reprise d’une partie conséquente de la dette par l’Etat et l’organisation d’une table ronde début juin. Elles sont liées à la stratégie de lutte dans la durée.

Pour autant, elles sont très loin des attentes des cheminots !

Il nous faut donc poursuivre et amplifier la mobilisation pour gagner sur les revendications. Toutes et tous en grève les 28 et 29 mai 2018 !

Source CGT

Rapport annuel sur la situation des femmes en Iran

French_annual_book_2018Les femmes sont bien la force du changement. C’est ce qu’on a pu observer en Iran tout au long de l’année écoulée et, bien sûr, de manière plus visible lors du soulèvement de décembre et de janvier. Télécharger le rapport sur la situation des femmes en Iran VF

Bien que la situation en Iran soit extrêmement répressive pour les femmes et qu’elles aient été les premières victimes de la répression des 39 dernières années, elles ne se sont pas soumises contrairement aux attentes du régime. La discrimination et la ségrégation sexuelles ainsi que les diverses restrictions ont rendu les Iraniennes non seulement rebelles, mais aussi très résistantes.

La situation des femmes est si sensible que le président des mollahs, Hassan Rohani, n’a pas osé en inclure une seule dans son cabinet. Bien que tous les observateurs croient que la présence d’encore plus de femmes ne pourrait pas résoudre les problèmes des femmes dans la société iranienne, la dictature religieuse est si vulnérable qu’elle ne peut pas se permettre un seul geste, même de pure simulation, dans ce domaine.

Et enfin, malgré une participation inexistante à la direction politique et à la prise de décision, les femmes étaient présentes partout pendant le soulèvement de janvier et dans des centaines de manifestations l’année dernière, pour décider de leur propre destin. Des prisonnières politiques ont osé envoyer des messages aux manifestants depuis leur cellule, les encourageant et les incitant à prendre des risques pour payer le prix de la liberté. Comme l’a fait remarquer une journaliste, « les vraies combattantes de la liberté » se trouvent dans les rues d’Iran .

Source NCRI women committee,

Les relevés de la photographie consignés dans l’Histoire

Heinrich Hoffmann une propagande par l’image particulièrement élaborée.

Heinrich Hoffmann une propagande par l’image particulièrement élaborée.

Expositions
Après la saison 2017 consacrée à la photographie américaine, sous la direction artistique de Gilles Mora, le Pavillon populaire consacrera sa prochaine saison au rapport entre Histoire et photographie.

En 2018, Le Pavillon populaire délaisse un temps la dimension esthétique du médium photographique pour se consacrer au rapport entre la photographie et l’Histoire. Pour ce faire, le maître des lieux Gilles Mora a dessiné les contours d’une programmation originale établie à partir de trois approches historiographiques et critiques relatives à la tradition documentaire. Les commissaires d’exposition de chacune des propositions font référence dans leur domaine. Ce qui permet au Pavillon populaire géré par la ville de Montpellier (34) de maintenir son offre qualitative et exclusive qui fonde désormais sa réputation.

Un dictateur en images
« Aborder le rapport entre la  photographie et l’histoire dans le cadre d’une saison entière, c’est aussi se préparer à des rapports délicats qui peuvent susciter des explosions idéologiques. On ne peut pas faire preuve d’amateurisme en la matière », indique Gilles Mora en soulignant le courage politique du maire Philippe Saurel qui l’a suivi dans ce projet, notamment sur l’exposition Un dictateur en images consacrée au photographe d’Adolf Hitler Heinrich Hoffmann. « Le Mémorial de la Shoah a donné son accord. » Il présentera parallèlement l’exposition Regards sur des ghettos d’Europe orientale (oct 1939- août 1944). Une série d’images qui exprime la négation du destin des hommes qui en sont eux-mêmes conscients.

Toutes les images du Troisième Reich, et singulièrement dans les manuels d’histoire, proviennent de Heinrich Hoffmann. « Elles ne sont pas signées et on les considère comme des images authentiques, souligne le commissaire de l’exposition Alain Sayag. Il est indispensable de les recontextualiser dans un système de propagande où l’image jouait un rôle majeur dans la manipulation des masses. » L’exposition se propose de participer à une mise au point de cette imagerie qui exerce un matraquage en réitérant les mêmes scènes à l’infini. Une louable entreprise, d’autant plus utile que ces images sont régulièrement exploitées dans la presse.

Mise en page 1

Germaine Tillion, une « Azaria » (femme libre) avec un groupe d’hommes, marché annuel de Tiskifine , août 1935.

Aurès 1935
A la croisée de la photographie documentaire, de l’ethnologie et du colonialisme Aurès 1935 témoigne d’un moment précis de la recherche ethnographique. Fin 1934, deux jeunes chercheuses, Thérèse Rivière (1901-1970) et Germaine Tillion  (1907-2008), se voient confier par le Musée d’ethnographie du Trocadéro une mission d’étude qui les conduit pour plusieurs années en Algérie à la lisière du Sahara. Placée sous le patronage de Christian Phéline l’exposition permet une approche des Chaouis qui conservent leur économie agropastorale. La population berbère se livre au regard des ethnographes dans une société encore préservée des grandes expropriations foncières programmées par la présence coloniale. Les photographies exposées sont tirées d’un fond découvert au début des années 2000 dans une boîte de chaussures en Allemagne.

 Manifestant en deuil au King Memorial Service,  Memphis,  1968, Bon Adelman

Manifestant en deuil au King Memorial Service, Memphis, 1968, Bon Adelman

I am a Man
L’exposition tient son nom d’un cliché représentant un manifestant noir, en deuil – il tient une pancarte affichant « I am a man » – en 1968. Elle se consacre à la photo documentation faite par les journalistes du Sud des Etats-Unis. Un travail anonyme qui retrace le contexte de lutte pour les droits civiques juste avant la loi de 1969 qui met officiellement fin à la ségrégation. Il en va, chacun le sait, tout autrement dans la pratique comme le démontre la résurrection actuelle du suprématisme blanc outre-Atlantique. Cette programmation engagée se réfère à l’Histoire sans jamais se couper des allers-retours entre le passé et le présent.

Calendrier
Aurès, 1935. Photographies de Thérèse Rivière et Germaine Tillion. Des portraits en noir et blanc s’inscrivant dans une histoire esthétique et sociale de la photographie. Du 7 février au 15 avril 2018.

Un dictateur en images. Photographies de Heinrich Hoffmann, et Regards sur les ghettos (Un accrochage double.) Première exposition vraiment consacrée à Heinrich Hoffmann, et au travail de ce photographe autour d’Adolf Hitler. L’homme a été, pendant 23 ans, le photographe personnel du Führer. Du 27 juin au 16 septembre 2018.

I am a Man. Photographies et luttes pour les droits civiques dans le Sud des Etats-Unis, 1960-1970. à découvrir du 17 octobre 2018 au 6 janvier 2019.

JMDH

Source : La Marseillaise 23/12/2017

Voir aussi : Rubrique Histoire, rubrique Photo, rubrique Montpellier,