Cédric Gerbehaye a choisi la photographie comme forme d’écriture. Photo Agence Vue
Photo. Cédric Gerbehaye raconte l’indépendance du Soudan en inscrivant son reportage dans la durée, loin des emballements médiatiques épisodiques.
En janvier 2005, un accord de paix qui mettait fin à la plus longue guerre civile africaine fut signé entre le Nord et le Sud-Soudan. Selon ce qui a été convenu, les Sud-Soudanais ont donc pu voter lors d’un référendum historique en janvier de cette année, et se sont prononcés à 98 % en faveur de la séparation… mais les défis persistent. La malnutrition est chronique et 75 % de la population n’a pas accès aux soins de santé primaires. À cela s’ajoutent les conflits internes pour le pouvoir, le partage de la manne pétrolière, ainsi que la démarcation de la frontière Nord-Sud.
Né en 1977 en Belgique, journaliste de formation, Cédric Gerbehaye a choisi la photographie comme forme d’écriture. Il raconte l’indépendance du Soudan en inscrivant son reportage dans la durée, loin des emballements médiatiques épisodiques. Son exposition nous fait découvrir son point de vue, grâce à des photographies dont l’engagement journalistique et artistique livre un réel parti pris.
Le photographe Cédric Gerbehaye figure parmi les trois lauréats de la première Bourse Fnac d’aide à la création photographique, d’un montant de 8 000 euros chacune. Son travail sera exposé dans le cadre de Visa sur l’Image à Perpignan ainsi que dans plusieurs Fnac.
Visa pour l’image Cédric Gerbehaye Du 27 août au 11 septembre Tous les jours de 10h à 20h Entrée libre
« Il s’agit, à l’évidence, d’un travail de journaliste, au meilleur sens du terme, exigeant et difficile parce qu’il se confronte à une situation complexe et refuse de la caricaturer. Pour Cédric Gerbehaye, il ne s’agit ni de décrire ni de témoigner, mais d’enquêter, en opérant par strates, par moments, par catégories. Il y a chez lui une « volonté de savoir » qui est un besoin de comprendre. Comprendre l’inacceptable autant que l’incompréhensible, les gens comme les paysages, la dévastation et les émotions. Les siennes et celles de ceux qu’il rencontre, avec pudeur, avec empathie, avec une curiosité qui au-delà de la situation spécifique, interroge les individus et leur relation aux groupes qui les ont fondés ou formés, auxquels ils appartiennent et desquels parfois ils se détachent. »
Après les attentats d’Oslo et d’Utøya, le gouvernement norvégien a annoncé plus d’ouverture et de démocratie et préserve ainsi ses valeurs démocratiques, contrairement aux Etats-Unis, à la France et d’autres Etats européens, salue le quotidien de centre-gauche Le Monde : « Il n’y aura pas de législation spéciale. On ne cherchera pas à apaiser la douleur du pays en restreignant la démocratie au nom de la sécurité. En musclant le code pénal à des fins politiques conjoncturelles. La Norvège restera un pays de libertés publiques. Cette attitude fait l’unanimité de la classe dirigeante à Oslo. Elle est le contraire de celle adoptée par l’Amérique au lendemain du 11 septembre 2001 ; le contraire de celle, trop fréquente, sous nos cieux où chaque fait divers sanglant est prétexte à un vain durcissement du code pénal aux dépens des libertés. Dans son malheur, la Norvège reste fidèle à elle-même. Elle s’interroge, mais ne se renie pas. Une leçon pour nos démocraties. »
OPA : "Il faut rester dans la famille et faire des enfants"
Né en 1958, auteur édité par Jean-Edern Hallier, titulaire d’un DEA de philosophie, Olivier Poivre d’Arvor, a entrepris une carrière dans la diplomatie culturelle (Alexandrie, Prague, Londres) après avoir été nommé directeur de l’AFFA par Hubert Védrine. Il est le directeur de France Culture depuis août 2010.
Près d’un an après votre nomination à la direction de France Culture, vous avez fait connaissance avec la maison. Avez-vous eu des surprises ?
Plutôt des confirmations que des surprises. C’est un lieu sacré avec ses rites. Il faut les éprouver si l’on veut les épouser. C’est une véritable exception culturelle. Il y a dans notre maison, une population que l’on ne trouve pas dans les autres radios composées de producteurs et de journalistes. Nous sommes une radio de flux qui traite des grands événements de la société et dans le même temps nous faisons appel à de grands savants qui analysent la situation. C’est un exercice très singulier. En un an, nous avons gagné 100 000 auditeurs en restant fidèles à ces principes. Une enquête lancée au sein de Radio France sur le traitement de l’affaire DSK vient de démontrer que c’est notre démarche qui a été le plus apprécié au sein des radios publiques. Sur ce dossier complexe, nous avons abordé tous les aspects en trouvant la bonne distance.
Les auditeurs vont bientôt découvrir la nouvelle grille de rentrée qui porte votre marque. Quels en sont les axes fondateurs ?
Un certain renouvellement, une féminisation et aussi plus de lisibilité avec des tranches horaires plus claires. Certains producteurs partent d’autres arrivent, ce qui conduit à un rajeunissement. Ce n’est pas facile de trouver des producteurs. Souvent la notoriété pose problème. Il faut rester dans la famille et faire des enfants. Il y a aussi une place plus importante accordée à la culture, plus de théâtre, de musique, de cinéma… Nous renforçons aussi les tranches du week-end qui étaient un peu notre point faible.
A Montpellier après 25 ans de Rencontres Pétrarque, la présence de France Culture se décline cette année sous le sigle La Semaine des Idées…
Nous souhaitons développer les Rencontres Pétrarque dans un cadre plus large. Il y aura deux fois plus d’émissions avec des rendez-vous en direct. Et puis de nouvelles rencontres comme L’esprit d’escalier qui permettront au public d’échanger avec un intervenant des Rencontres de la veille, des soirées avec des artistes et des intellectuels sont également prévues. Cette édition préfigure l’édition 2012 où nous lancerons le Marathon des idées, une sorte de petit festival autour de la pensée.
La thématique « Le peuple a-t-il un avenir ? » adjoint-elle à la culture une dimension sociale ?
Probablement, la question est en tout cas posée malgré nous par certains partis politiques qui ont recours à un discours populiste. Celui-ci sera au cœur du questionnement lors du débat de mardi.
On vous dit proche de Martine Aubry ?
C’est une de mes plus proches amies. C’est la marraine de ma fille. Au-delà de cela je pense que c’est quelqu’un qui a une vraie conscience de l’importance de la culture. Je m’occupe du service public, il ne m’appartient pas de me prononcer. Tous les discours politiques m’intéressent. Mais à titre privé, je ne vais pas me mettre en refus d’amitié pendant un an pour cause de primaires. Je pense que la question de la culture doit revenir au centre d’un projet politique.
Ce scandale d’ampleur nationale embarrasse les médias, le magnat de la presse Rupert Murdoch et le Premier ministre, David Cameron.
Le parlement britannique s’est saisi mercredi de l’affaire des écoutes téléphoniques du tabloïde News of the World, devenue un scandale national aux multiples ramifications qui éclabousse les médias, le magnat de la presse Rupert Murdoch et embarrasse le Premier ministre.
Le chef du gouvernement David Cameron s’est déclaré « absolument dégoûté » par les dernières révélations sur les écoutes menées ces dernières années par le journal « qui ne visent plus simplement des politiques et des célébrités, mais aussi des victimes de crimes, voire d’attentats terroristes ». Il s’est prononcé « en faveur d’enquêtes » sur « l’éthique journalistique », tout en souhaitant que la priorité absolue soit donnée à « l’enquête de police de grande ampleur en cours ». Des assurances jugées totalement insuffisantes par le chef de l’opposition Ed Miliband, à l’aune « du plus grand scandale de presse des temps modernes ».
M. Miliband réclame des têtes au News of the World (NOTW) et la création d’une commission d’enquête. Il accuse les conservateurs de complaisance vis-à-vis de news Corp., le groupe de Rupert Murdoch notamment propriétaire du NOTW. Ce vif échange entre les deux hommes au Parlement a été suivi d’un débat de trois heures en urgence. A tour de rôle, les députés ont dénoncé qui « les dérives » de la presse et qui « l’indécence » de News Corp. Sortant de son silence, Rupert Murdoch a qualifié de « déplorables » et d' »inacceptables » les accusations contre le tabloïde et renouvelé dans un communiqué son soutien à l’actuelle direction du journal.
L’affaire des écoutes, qui remonte au début des années 2000, a déjà été marquée par l’interpellation de cinq journalistes, dont trois du NOTW, l’envoi en prison d’un correspondant royal et d’un détective privé et par plusieurs démissions. Dont celle en janvier, d’Andy Coulson, directeur de la communication de David Cameron après avoir été rédacteur en chef du NOTW. On savait que des centaines, voire des milliers de personnalités – membres de la famille royale, politiciens, vedettes de cinéma ou sportifs – avaient été écoutées.
Ecoutes sur des victimes
Il apparaît désormais que les écoutes ont aussi concerné les victimes d’affaires criminelles retentissantes et des proches de l’attentat qui avait fait 52 morts à Londres en 2005. Le détective Glenn Mulcaire, qui a déjà purgé 4 mois de prison, aurait aussi piraté le portable de Milly Drowler, écolière assassinée par un videur de boîte de nuit en 2002. Il serait allé jusqu’à effacer des messages pour faire de la place dans la boîte vocale, donnant le faux-espoir aux parents et enquêteurs que la fillette était encore en vie.
Mardi soir, il a dit avoir agi « sous la pression constante » de NOTW, le dominical qui tire à 2,8 millions d’exemplaires, champion des scoops obtenus notamment à l’aide de caméras cachées ou de journalistes déguisés. Le NOTW a aussi remis récemment à Scotland Yard des mails prouvant qu’il avait payé quelques policiers-informateurs entre 2003 et et 2007, date à laquelle Andy Coulson dirigeait la rédaction.
Et mercredi The Times, fleuron du groupe Murdoch, a demandé « que toute la lumière soit faite » sur des pratiques journalistiques longtemps justifiées par le sacro-saint droit du public à être informé. En attendant, le groupe commence à subir les premiers contrecoups commerciaux de l’affaire: plusieurs annonceurs –dont Ford et la banque Halifax– ont annoncé le retrait de leur budget publicitaire au NOTW, également cible d’appels au boycott sur twitter. Mais surtout, le scandale risque de retarder le feu vert gouvernemental au projet de rachat par Rupert Murdoch du bouquet satellitaire BSkyB, très contesté au nom du pluralisme.
Le retournement complet de situation dans l’affaire DSK prouve surtout une chose : l’actualité est l’ennemi de l’information.
Combien de temps les grands médias ont-ils passés sur l’affaire DSK ? Des centaines, des milliers d’heures très vraisemblablement, et bien plus de pages de magazines et de quotidiens. Pourtant, tout ce temps aurait pu servir à médiatiser bien d’autres choses, à commencer par les personnalités et les thèses jamais médiatisées, et elles sont nombreuses. Mais au lieu de cela, les médiacrates se sont acharnés sur un homme, sans attendre le verdict de la justice américaine, et traînant dans la boue son honneur et sa réputation. Ces médias sont criminels, anti-démocratiques, et lavent le cerveau de la population en répétant à l’infini des banalités et des informations qui sont souvent contredites peu de temps après. C’est un des combats que doivent mener les médias alternatifs, remettre à l’honneur la réflexion, le fond, et le respect des principes élémentaires de vérité, de présomption d’innocence, de pluralité, etc.
Cette évolution des médias est récente, et correspond à l’accélération des moyens de communication de ces 40 dernières années. Elle correspond à la baisse considérable du niveau scolaire, de la qualité de l’élite du pays, et de la santé du pays en général. Il devient urgent de déclarer son indépendance médiatique de ce système délétère, et de tout faire pour le contrer d’une part, et le contrôler d’autre part. C’est une question de vie ou de mort pour notre civilisation, ni plus, ni moins.
Pourquoi les médias sont-ils ainsi drogués à l’actualité, et pourquoi cela est-il malsain pour la population ?
Ils sont drogués à l’actualité car ils sont persuadés que l’être humain, pour être informé, doit avoir en permanence connaissance des événements qui viennent d’arriver. Or les gens les mieux informés sont ceux qui ont pris le recul nécessaire sur les événements, car ils savent que ces événements ne veulent rien dire en eux-mêmes. Voir 100 fois les avions s’écraser sur le World Trade Center n’apporte rien en terme d’information. C’est une injection d’adrénaline, qui satisfait à des pulsions de voyeur et à une recherche d’émotions et de sensationnel que nous avons tous en nous. Bref, l’actualité c’est la garantie de placer l’émotion avant la raison.
La télévision est également un outil extrêmement perfectionné pour donner aux gens ce qu’ils réclament, mais en les tirant vers le bas plutôt que vers le haut. Les pulsions primaires et les tentations arrivent en premier, du fait de nos émotions, puis il s’agit de les contenir, de les éduquer. Tous les systèmes qui visent à moraliser les sociétés humaines le disent, à leur manière. La télévision détruit cette éducation, en donnant directement et sans filtre l’accès à des pulsions souvent violentes, avec la force de l’image. Des manipulations mentales de grande ampleur ont lieu grâce à cet outil sans pour autant faire l’objet de hurlements au fascisme, bien au contraire. La société de consommation et les sommes gigantesques d’argent en jeu permettent d’affiner toujours plus ces manipulations, en faisant appel aux découvertes les plus récentes dans la psychologie, la sociologie et d’autres sciences humaines. Cela permet à un dirigeant de grande chaîne de déclarer : “Or pour qu’un message publicitaire soit perçu, il faut que le cerveau du téléspectateur soit disponible. Nos émissions ont pour vocation de le rendre disponible : c’est-à-dire de le divertir, de le détendre pour le préparer entre deux messages. Ce que nous vendons à Coca-Cola, c’est du temps de cerveau humain disponible.”
Interdire la télévision ?
A quand une loi pour décréter que la télévision est une drogue dure ? Elle l’est en effet, aussi bien pour ceux qui y passent que pour ceux qui la regardent. Ce système malsain rend donc tout le monde esclave, au lieu de rendre les gens libres. Mais la liberté ne se donne pas, elle se prend. D’où l’intérêt des livres, qui nécessitent un effort, et qui laissent une trace, tout en permettant de revenir à une phrase, un paragraphe ou un chapitre pour être sûr qu’on l’a compris, ou pour l’interpréter différemment, avec du recul. D’où l’intérêt de la radio, qui fait travailler l’imagination, et ne rend pas dépendant de l’image. D’où l’intérêt d’Internet, qui permet de produire aussi de l’information, d’approfondir via les liens hypertextes, et qui permet aussi et surtout de figer l’image et le temps, de les maîtriser bien mieux qu’avec la télévision, qui donne des rendez-vous fixes, et qui vous fixe sur votre canapé, la bouche ouverte et les neurones fermés.
L’actualité n’est pas la réalité
L’actualité est un déferlement de “faits divers qui font diversion” (Bourdieu), dont le traitement permanent reste toujours a la surface des choses, qui encourage la dictature de l’instant et empêche toute réflexion, toute mise en contexte, et tout recul. L’information nécessite du temps pour trier le bon grain de l’ivraie, elle nécessite plusieurs interprétations possibles. Les informations importantes sont peu nombreuses mais noyées dans le flot d’infos secondaires voire inutiles, d’ailleurs les sujets souvent les plus importants ne sont jamais dans l’actualité. L’imposture médiatique actuelle consiste à faire croire que l’actualité est la réalité, alors qu’elle n’en est qu’une infime partie, souvent déformée d’ailleurs. Il convient évidemment de parler d’actualité, mais sans jamais qu’elle domine l’information, à savoir le recul sur l’actualité, et sa mise en contexte avec le passé, qui est documenté et qui représente les bases d’un raisonnement humain. A se complaire dans l’actualité, on en revient au stade bestial, avec toutes les conséquences possibles.
Faites le test si vous en avez l’occasion : ne regardez plus la télévision pendant quelques semaines, ou quelques mois, et informez-vous uniquement par Internet, à condition de ne pas consulter France Info, et autres chaînes d’informations continues. Vous découvrirez l’immense plaisir d’être à nouveau informé, car vous pourrez penser par vous-mêmes, découvrir des informations dont les médias ne parlent pas, ou peu, ou mal, et vous redeviendrez un citoyen digne de ce nom.
Conclusion
Une démocratie moderne est une démocratie dans laquelle les médias ne sont pas focalisés sur l’actualité, qu’elle soit sportive, économique ou sociale. Les citoyens doivent être en mesure de faire les bons choix, et pour cela les débats doivent être libres, les alternatives claires, et le recul doit toujours prévaloir sur l’immédiateté. Par ailleurs, et cela fera l’objet d’un autre article, les sujets doivent prévaloir sur les personnes, car la “peoplisation” à laquelle on assiste depuis plusieurs décennies, et qui est due en grande partie à la domination de la télévision, est inversement proportionnelle à la démocratie d’un pays. En Suisse, par exemple, les médias ont pour priorité de parler des sujets politiques, et non des personnalités, il faut dire que la démocratie directe impose de parler des sujets plutôt que des hommes politiques. Les personnalités les plus connues, notamment des journalistes et des animateurs, ont effectué un coup d’Etat en accédant aux manettes des grands médias qui déterminent ce qui existe, et ce qui n’existe pas. Il est temps de s’occuper d’eux.