Amnesty International demande la suspension des expulsions d’Afghans

Des migrants afghans à Calais, le 27 mai 2016. PHILIPPE HUGUEN / AFP

Des migrants afghans à Calais, le 27 mai 2016. PHILIPPE HUGUEN / AFP

L’association demande à la France et à l’Europe de stopper leur politique de renvois vers ce pays où les civils ne sont plus protégés.

L’organisation Amnesty International demande, jeudi 5 octobre, un « moratoire immédiat » sur tous les renvois de migrants vers l’Afghanistan, où leur sécurité ne peut être garantie. Dans un rapport intitulé « Retour forcé vers l’insécurité » et basé sur une enquête de terrain, l’ONG rappelle que si 2016 a été une année record en matière de personnes tuées, 2017 suit la même pente.

« Jamais autant de civils n’ont été blessés, comme le soulignent les Nations unies, et parallèlement, jamais autant de renvois n’ont été effectués au départ de l’Europe », déplore Cécile Coudriou, vice-présidente d’Amnesty International France. « Désireux d’augmenter leur nombre d’expulsions, les gouvernements européens appliquent en effet une politique irresponsable et contraire au droit international. Ils exposent des hommes, des femmes et des enfants à des dangers tels que l’enlèvement, la torture ou la mort », a-t-elle ajouté mardi 3 octobre.

« Nous demandons au ministre de l’intérieur, Gérard Collomb, un moratoire immédiat sur tous les renvois vers l’Afghanistan. Nous demandons à l’Europe la suspension de tous les vols conjoints organisés par Frontex pour reconduire des Afghans depuis plusieurs pays d’Europe », a relayé Jean-François Dubost, responsable du programme de protection des populations au sein de l’organisation de défense des droits de l’homme.

Au sein de l’Union européenne, le taux de protection des Afghans est tombé de 68 % en septembre 2015 à 33 % en décembre 2016. En parallèle, le nombre de renvois a presque triplé, passant sur la même période de 3 290 à 9 460. La France, elle, a remis 640 personnes à l’avion en 2016, contre 435 en 2015.

« J’ai su que le combat serait dur »

A 24 ans, Farhad a échappé de justesse à ce voyage retour. Sa chance ? Il parle un très bon anglais et a pu interpeller les passagers du vol dans lequel il était tenu menotté entre deux policiers escorteurs. C’était en juillet et le jeune homme, aujourd’hui en procédure d’asile en France, n’a pas oublié un instant de cette journée de cauchemar. « L’épreuve a duré une demi-heure. Les policiers m’avaient expliqué que je ne pouvais pas refuser d’embarquer. Ils me maintenaient assis, mais j’ai pu hurler qu’on m’expulsait de France, que je mourrais dès mon retour à Kaboul. Au départ, une femme s’est adressée aux policiers ; puis d’autres passagers se sont manifestés avant que le pilote ne vienne à son tour. » Farhad, qui promet alors qu’il ne lâchera pas son combat, est finalement descendu de l’avion avant d’être présenté au médecin du centre de rétention : il affirme ne plus pouvoir déglutir car les policiers lui ont serré le cou pour l’empêcher d’alerter les autres passagers.

Car, si la France affiche un taux de protection de 88 % pour cette nationalité, elle enferme de plus en plus souvent en centre de rétention administrative (CRA) des déboutés de l’asile, mais aussi des Afghans qui n’ont pas encore déposé de demande. « En 2011, 382 Afghans ont été enfermés en centres de rétention, en France. Quatre ans après, en 2015, ils ont été un millier, comme en 2016. Cette année, le cap des 1 600 a déjà été franchi. On sera à 2 000 à la fin de l’année si la privation de liberté des ressortissants de cette nationalité continue sur le même rythme », regrette David Rohi, de la Cimade.

Zubair, 23 ans, passé par le CRA du Mesnil-Amelot (Seine-et-Marne), a été contraint de demander l’asile en rétention. « Mon frère a été assassiné par les talibans, alors toute la famille est partie. En Grèce, j’ai perdu tout le monde et je me suis retrouvé seul. Pendant une semaine, j’ai cherché mon père, ma mère, ma sœur, en vain, avant de reprendre la route vers Londres puisque c’était le terminus qu’on s’était fixé », raconte le jeune homme. Arrêté à Calais alors qu’il tentait de passer, il se dit aujourd’hui heureux d’être reconnu comme réfugié, mais s’interroge sur le lieu où se trouve sa famille et sur la façon dont il pourra la rejoindre puisqu’il est désormais lié à la France…

Avant ses tentatives de renvoi, Farhad avait lui aussi connu l’enfermement au CRA de Coquelles (Pas-de-Calais), puis au Mesnil-Amelot, juste derrière l’aéroport de Roissy. « Quand je suis arrivé au Mesnil-Amelot, j’ai su que le combat serait dur car deux Afghans avaient été remis à l’avion les jours précédents », rapporte le jeune homme.

« Des pressions exercées » sur Kaboul

Fin 2016, un accord a été signé entre l’Union européenne et l’Afghanistan pour faciliter ces retours. Amnesty, qui s’était déjà exprimée à l’époque, relativise une nouvelle fois la notion d’« accord » et cite des sources afghanes qui le qualifient de « coupe de poison ». L’ONG rappelle dans son rapport que, « selon des informations jugées fiables, des pressions auraient été exercées sur le gouvernement afghan pour qu’il accepte cette nécessité des renvois ». L’organisation relate des propos du ministre afghan des finances, Eklil Hakimi, qui a déclaré devant le Parlement que, « si l’Afghanistan ne coopère pas avec les pays de l’Union européenne dans le cadre de la crise des réfugiés, cela aura des conséquences négatives pour le montant de l’aide allouée à notre pays ».

Selon la Cimade et Amnesty, la France s’appuie, elle aussi, sur cet accord. Ainsi, sur les 1 700 ressortissants afghans déjà passés en rétention entre janvier et septembre, la moitié étaient visés par une mesure d’éloignement vers l’Afghanistan, puisque des laissez-passer européens peuvent désormais remplacer les laissez-passer consulaires nécessaires aux renvois, que les autorités afghanes ne s’empressaient pas de délivrer.

L’autre moitié des Afghans enfermés font l’objet d’un transfert vers un pays d’Europe qui, le plus souvent, les renvoie ensuite vers Kaboul. « Au final, 70 % de ces personnes enfermées ont été libérées par un juge », observe David Rohi, pour qui « cette donnée illustre la violation des droits ». Reste que les moins chanceux, eux, ont repris un vol. Et, si Farhad ne s’était pas opposé fermement à son transfert, il aurait été envoyé en Norvège, un pays qui réexpédie très largement vers l’Afghanistan.

Un caractère volontaire « très relatif »

« En Afghanistan, toute ma famille était menacée car mon père et mon oncle refusent de payer leur tribut aux talibans. Moi, j’étais plus particulièrement visé car j’ai été traducteur pour l’ONU », rapporte Farhad qui, au lendemain d’une tentative d’enlèvement à Kaboul, a pris un billet pour Moscou, puis un autre pour Mourmansk, dans l’extrême nord-ouest de la Russie.

Arrivé là-bas, il s’est débrouillé pour passer en Norvège. « Je n’avais pas envie d’y demander l’asile, mais j’ai été obligé de le faire car ils ont relevé mes empreintes », raconte le jeune homme. Une fois débouté, il est arrivé en France, où, arrêté le 16 février dans un parc à Calais, il s’est retrouvé sous le coup d’un renvoi vers la Norvège au nom des accords de Dublin qui permettent aux pays de l’Union de renvoyer un demandeur d’asile vers le premier pays d’Europe où il a laissé trace de son passage. Dans le cas de Farhad, la France a décidé de se charger de sa demande, à l’issue de sa rébellion dans l’avion, puis de sa libération du centre de rétention par un juge.

La Cimade observe que 640 personnes ont été renvoyées en 2016 depuis la France. Si seules 115 d’entre elles l’ont été de façon forcée, l’association reste dubitative sur le caractère volontaire des autres renvois, qu’elle estime « très relatif dans un contexte où l’accueil a été notoirement déficient et compte tenu des multiples formes de répression qu’ont subies ces personnes ».

A Calais, les demandes de retour ont été nombreuses, mais la France avait augmenté les avantages financiers pour un retour volontaire au moment de l’évacuation de la jungle. Amnesty demande la suspension de ces retours volontaires puisque la sécurité n’est pas assurée pour les civils dans ce pays. Les chercheurs de l’organisation, qui se sont entretenus avec plusieurs familles, relatent le « calvaire » que ces dernières ont « vécu après avoir été contraintes de quitter l’Europe. Certaines ont perdu des êtres chers ; d’autres ont échappé de peu à des attaques lancées contre la population civile ; d’autres encore vivent dans la peur des persécutions ».

Maryline Baumard

Source Le Monde 05/10/2017

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Cesare Battisti interpellé à la frontière brésilo-bolivienne

Cesare Battisti lors de sa sortie de prison le 8/06/11. Photo Reuter

Cesare Battisti lors de sa sortie de prison le 8/06/11. Photo Reuter

L’ancien militant d’extrême gauche Cesare Battisti interpellé à la frontière brésilo-bolivienne

Condamné par contumace en 1993 en Italie à la perpétuité pour quatre homicides, Cesare Battisti a été placé en détention. Ses avocats exigent sa libération immédiate.

Il a d’abord prétendu qu’il partait pêcher. Mais lorsque les forces de l’ordre brésiliennes, qui le suivaient discrètement, l’ont interpellé dans la ville de Corumba (sud-ouest du Brésil), mercredi 4 octobre, alors qu’il tentait de franchir la frontière bolivienne, lesté de quelques milliers de dollars et d’euros, Cesare Battisti n’a pu nier longtemps sa fuite.

Aujourd’hui âgé de 62 ans, l’ancien membre des Prolétaires armés pour le communisme (PAC, extrême gauche), condamné par contumace en 1993 en Italie à la perpétuité pour quatre homicides commis durant les « années de plomb », a été aussitôt placé en détention.

Ses avocats ont exigé sa libération immédiate, redoutant que le gouvernement brésilien ne profite de cette détention pour donner droit à une nouvelle demande d’extradition de l’Italie. Une inquiétude qui n’avait cessé, ces derniers jours, de prendre de l’importance parmi les défenseurs de l’ancien militant d’extrême gauche.

Réfugié au Brésil depuis 2004

Le 28 septembre, pour parer à toute éventualité, les avocats de M. Battisti avaient ainsi déposé une demande d’habeas corpus (procédure qui énonce la liberté fondamentale de ne pas être emprisonné sans jugement), auprès de la Cour suprême brésilienne.

L’épisode signe un nouveau rebondissement du feuilleton Battisti, devenu le symbole parfait des plaies des années de plomb italiennes.

Réfugié au Brésil depuis 2004, l’ancien membre des PAC, en cavale depuis 1981 et son évasion de la prison de Frosinone (Latium), avait d’abord élu domicile au Mexique avant d’arriver à Paris au début des années 1990, se croyant protégé par la « doctrine Mitterrand », par laquelle la France avait assuré, en 1985, qu’elle renonçait à extrader vers l’Italie d’anciens militants d’extrême gauche ayant renoncé à la violence, pour peu qu’ils n’aient pas commis de crime de sang.

A Paris, il avait obtenu une carte de séjour et un emploi de gardien d’immeuble, en même temps qu’il écrivait plusieurs romans policiers, sur lesquels plane l’ombre des années de plomb. Il ne cessait par ailleurs de clamer son innocence, mais il avait refusé de se présenter devant la justice italienne ; cette dernière l’avait condamné définitivement en 1993 pour « assassinats et complicité d’assassinats ».

Mais la protection de la France s’avère plus fragile que prévu. Début 2004, il est arrêté par la division nationale antiterroriste (DNAT), en réponse à une nouvelle demande d’extradition italienne. Il est bientôt remis en liberté, sans que la menace s’éloigne.

La présidence Temer signe le retour des tourments de l’Italien

Ayant épuisé tous les recours, en dépit d’une mobilisation de nombreuses figures de la gauche (Bertrand Delanoë, François Hollande) ou des milieux culturels (Fred Vargas, Bernard-Henri Lévy), il rejoint la clandestinité et ne doit son salut qu’à une fuite vers le Brésil, que le gouvernement français est accusé de n’avoir pas cherché à empêcher.

Ses années brésiliennes ne seront pas non plus de tout repos. Débarqué clandestinement dans le pays, il est arrêté en mars 2007, à la demande de l’Italie, et libéré quatre mois plus tard, suite à l’intervention in extremis du président Luiz Inacio Lula da Silva.

Au dernier jour de son mandat, le 31 décembre 2010, Lula avait rejeté la demande d’extradition formulée en 2009 par Rome. Les juges brésiliens avaient in fine estimé, en juin 2011, que Rome ne pouvait contester cette décision « souveraine » de l’ancien chef de l’Etat. Cesare Battisti disposait depuis d’un visa de résident permanent.

Selon le quotidien O Globo, celui que son entourage surnommait « le petit fou » en raison de ses longues promenades solitaires, vivait dans la ville de Rio Preto, dans l’Etat de Sao Paulo, où il aurait récemment suivi un traitement contre l’hépatite C.

La prise de pouvoir de Michel Temer, en 2016, suite à la destitution polémique de l’héritière de Lula, Dilma Rousseff, signera le retour des tourments de l’Italien. La demande d’extradition qu’aurait réitérée récemment Rome aurait déjà reçu le feu vert de deux ministres : ceux de la justice et des relations extérieures, rapporte la presse brésilienne. Le gouvernement Temer, impopulaire, verrait dans cette acceptation un « geste diplomatique important » envers l’Italie, qui n’a de cesse d’exiger que Cesare Battisti lui soit remis, afin qu’il purge sa peine.

Rattrapé par son passé

A en croire les avocats de Cesare Battisti, une telle démarche serait juridiquement irrecevable, un éventuel recours à la décision prise par Lula en 2010 étant, selon eux, prescrit.

« Cela ne fait aucun sens, à moins de déformer le système juridique brésilien. Ce qui semble être actuellement le sport favori à Brasilia », se lamente Igor Tamasauskas, l’un des avocats de M. Battisti, cité par O Globo. Une référence aux batailles entre le Sénat et la Cour suprême qui semblent avoir une interprétation différente des textes et variable selon le profil des intéressés.

S’érigeant en simple « rouage de l’une des innombrables organisations d’extrême gauche alors en guerre contre l’Etat », Cesare Battisti est donc à nouveau rattrapé par son passé.

« Ce que je veux ? Une réconciliation avec le peuple italien. Il faut une amnistie, d’autres pays ont bien réussi », plaidait-il en décembre 2011 lors d’un entretien accordé au Monde. « M. Battisti doit seulement se présenter dans notre pays pour expier, selon les normes pénitentiaires italiennes, les peines auxquelles il a été condamné en conclusion de procès déroulé selon les normes du droit », lui avait répondu sèchement le président italien, Giorgio Napolitano, peu de temps après.

Par Jérôme Gautheret  et Claire Gatinois

Source Le Monde 05/10.2017

Voir aussi : Rubrique Politique, rubrique Livre,  Essai, Cesare Battisti  Les Coulisses obscures de Carlos A. Lungarzo, rubrique Justice, Le Brésil accorde un permis de résidence à Cesare Battisti, rubrique Rencontre, Fred Vargas : combat amour et dépendance,

La Catalogne ensanglantée

Carte-espagne-catalunyaLe référendum de ce 1er octobre soulève alors de nombreuses questions. Il a été déclaré « illégal » par le tribunal constitutionnel espagnol. Mais, cela signifie simplement que le gouvernement de Madrid n’avait pas d’obligation de reconnaître ses résultats. Cela ne justifiait nullement l’ampleur et la brutalité de la répression

De l’autonomisme à l’indépendance

On peut se demander d’où vient cette revendication à l’indépendance. Car, au début des années 2000, les partisans de l’indépendance étaient clairement minoritaires. Il ne semble plus qu’il en soit ainsi. J’avais d’ailleurs organisé, le 19 septembre dernier, un débat dans l’émission que j’anime sur Radio-Sputnik entre Gracia Dorel-Ferré, historienne spécialiste de la Catalogne et Jean-Jacques Kourliandsky, chercheur à l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS) sur les questions ibériques (Amérique latine et Espagne)[1]. Ce dernier insistait sur le fait que les refus répétés du gouvernement central espagnol d’accorder à la Catalogne ce que le Pays Basque, voire la région de Valence, avaient obtenus avait conduit à une radicalisation du sentiment autonomiste en un véritable sentiment indépendantiste. Les manifestations monstres de ces dernières semaines, qui ont rassemblé plus d’un million de personne sur une population totale de 7,5 millions (l’équivalent serait donc une manifestation de plus de 9 millions de personnes en France), en témoignent.

La responsabilité du gouvernement de Madrid est donc très largement engagée. Elle l’est, bien entendu, dans les violences policières de ce dimanche 1er octobre. Mais elle l’est aussi, et sinon plus, par les différentes fin de non recevoir qui ont répondu aux demandes des autorités légalement élues de Barcelone. L’indépendance de la Catalogne, si elle survient, sera largement le produit des relents de franquisme du gouvernement Rajoy, comme l’a dit Mme Gracia Dorel-Ferré. Il aura été, par sa bêtise bornée et par sa brutalité, le véritable déclencheur de ce mouvement indépendantiste.

Le poids de l’histoire

La question du régionalisme, et en particulier du régionalisme Catalan, hante l’histoire de l’Espagne moderne. La Catalogne a représenté, avec la partie industrielle du Pays Basque, le point d’entrée de la modernité industrielle en Espagne depuis le XIXème siècle. La Catalogne est, aujourd’hui encore, certainement une des régions les plus dynamiques, et les plus riches de l’Espagne. Elle représente environ 20% du PIB de l’Espagne et elle connaît, que ce soit par ses exportations ou par le développement de son industrie touristique, un véritable dynamisme qui tranche avec celui des autres régions d’Espagne. Mais, surtout, les catalans considèrent qu’ils ont été maltraités par les gouvernements espagnols, et en particuliers par les gouvernements franquistes.

Il convient ici de rappeler que la question de l’indépendance de la Catalogne s’était déjà posée à la veille de la Guerre Civile[2]. Le président de la Généralité de Catalogne, Lluis Companys, décida en 1936 de rester dans le cadre de l’Espagne, alors républicaine, car cette dernière avait reconnu les droits des catalans. Durant la Guerre Civile, la Catalogne fut à la pointe de la résistance contre le franquisme et ses alliés, l’Allemagne Hitlérienne (que l’on se souvienne de la Légion Condor) et l’Italie Mussolinienne. Exilé en France après la défaite, il fut livré au régime franquiste par la Gestapo, torturé et exécuté le 15 octobre 1940 à la forteresse de Montjuic[3]. La Catalogne a payé d’un prix terrible son opposition au franquisme et a été dévastée par une répression sanguinaire.

La reconnaissance de la spécificité catalane a été tardive et date du retour à la démocratie. Mais, cette reconnaissance est fragile. Le « Parti Populaire », qui est censé représenter la droite dite « modérée » et qui abrite, en son sein, de nombreux nostalgiques du franquisme, n’a jamais réellement accepté de reconnaître cette spécificité. D’une manière générale, l’Espagne n’a pas exactement la même histoire de pays unitaire que la France. Des provinces, la Catalogne et le Pays Basque, ont des traditions indépendantistes bien ancrées.

La constitutionnalité, la légitimité et la souveraineté

Le référendum de ce 1er octobre soulève alors de nombreuses questions. Il a été déclaré « illégal » par le tribunal constitutionnel espagnol. Mais, cela signifie simplement que le gouvernement de Madrid n’avait pas d’obligation de reconnaître ses résultats. Cela ne justifiait nullement l’ampleur et la brutalité de la répression.

Au-delà, se pose la question de sa légitimité et de ses relations avec la souveraineté populaire en Espagne. La souveraineté de l’Etat espagnol découle du compromis qui a été passé lors du processus de démocratisation, après la mort de Franco. Les Catalans sont fondés à penser que l’annulation de leur statut en 2010, une mesure qui a mis littéralement le feu aux poudres, remettait en cause ce compromis. Dès lors qu’il y a ce type de débat dans l’espace politique, la seule réponse est l’élection d’une assemblée constituante. Ce n’est certainement pas la répression, qui ne peut qu’aggraver les choses. Le refus d’une assemblée constituante, ou à tout le moins d’une commission constituante, fragilise la légitimité du pouvoir espagnol. Les violences de ce dimanche 1er octobre finissent de la détruire. Les images de ces manifestants pacifiques agressés et blessés feront, et ont d’ailleurs déjà fait, le tour de la planète.

La question de l’indépendance de la Catalogne a ainsi peu de choses à voir avec le droit constitutionnel, au point où nous en sommes. Elle est devenue une question essentiellement politique, car la souveraineté c’est aussi cela : le primat du politique sur la règle de droit. Nous sommes à l’évidence dans une situation d’extremum necessitatis. Seule une action politique peut aujourd’hui dénouer cette situation. Très clairement, on ne pourra longtemps encore refuser aux Catalans la tenue de ce référendum qu’ils exigent, et que Madrid a tout fait pour perturber. Seul un vote peut trancher la question de savoir si les catalans pensent encore avoir un avenir commun avec le reste de l’Espagne ou non. Mais, ce qui est clair, c’est que le comportement de Madrid rend aujourd’hui toujours plus difficile la constitution d’un compromis acceptable.

La question n’est donc plus, aujourd’hui, de savoir si l’on soutient ou pas l’idée d’une Catalogne indépendante. La question est aujourd’hui de défendre la base même de la démocratie. Et pour cela, il faut un véritable référendum en Catalogne, dont toutes les parties s’engagent à reconnaître les résultats. C’est le seul antidote à une montée vers une nouvelle guerre civile. Que le gouvernement français ne l’ait pas compris montre la dégénérescence de l’esprit public chez le Premier ministre et le Président.

Jacques Sapir

Notes

[1] https://fr.sputniknews.com/radio_sapir/201709191033122190-espagne-catalogne-independance/

[2] Alquézar, R., Esquerra Republicana de Catalunya: 70 anys d’història (1931-2001). Barcelona, Columna, 2002.

[3] Benet, J., Lluís Companys, presidente de Catalunya fusilado. Barcelona, Península, 2005

Source Les crises 01/10/2017

 Voir aussi : Actualité Internationale Rubrique UE, Espagne, Un régionalisme si européen, rubrique Politique,

Édito. Un régionalisme si européen

editobis

Les Catalans ont-ils un problème de riches ? Rompre avec l’État central espagnol, comme ils pourraient le faire lors du référendum prévu ce 1er octobre, c’est aussi se débarrasser de cette Espagne qui peine toujours à se relever de la crise. “Madrid nous vole”, assurent les indépendantistes, même si la réalité économique est bien plus complexe. Les Écossais aussi étaient convaincus de leur capacité à s’en sortir par eux-mêmes. De même, en Flandre ou en Italie du Nord, séparatisme et richesse économique font bon ménage. La même accusation, celle que “le centralisme nous vole”, a fait naître l’idée que le Royaume-Uni serait mieux sans l’Europe.

Paradoxalement, ces régions séparatistes revendiquent leur ancrage européen. Leurs représentants se sont d’ailleurs organisés dès 1981 en une Alliance libre européenne, composée de ces partis qui souhaitent plus de régionalisme mais pas forcément moins d’Europe. C’est une des leçons de la construction européenne : elle a affaibli l’État-nation en multipliant les structures au niveau régional et au niveau européen. L’effacement progressif de la logique nationale s’est traduit par l’émergence des séparatismes. Or seule une interdépendance européenne assurerait la survie de ces régions isolées. L’État catalan indépendant serait très certainement viable sur le plan économique, à la condition d’être accepté dans le club européen.

Hélas, ce débat paraît aujourd’hui impossible : face à la volonté indépendantiste des Catalans, l’Espagne a choisi de montrer les muscles. Mais pourquoi donc envoyer la Garde civile et mettre l’économie catalane sous tutelle dans une démonstration de force à quelques jours du référendum ? Sans doute parce qu’à Madrid on craint que le résultat ne fasse voler en éclats une certaine idée de l’Espagne. Mais la fin de la solidarité a sonné depuis belle lurette, en Europe tout comme au sein des États. Et Madrid comme Bruxelles ont beau jouer la carte de la fermeté, si la Catalogne veut faire sécession, et puisqu’elle semble certaine d’en avoir les moyens, au nom de quoi peut-on dans l’Europe démocratique l’en empêcher ?

Hamdam Mostafavi
Source Le Courrier International
 Voir aussi : Actualité Internationale Rubrique UE, Espagne, rubrique Politique,

Les dix annonces du discours de Juncker sur l’état de l’Union

Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, lors de son discours sur l'état de l'Union, au Parlement européen à Strasbourg, le 13 septembre 2017. / Patrick Hertzog/AFP

Le président de la commission européenne Jean-Claude Juncker a prononcé mercredi 13 septembre son discours sur l’état de l’Union européenne devant les eurodéputés, à Strasbourg. Un texte foisonnant qui trace les grandes lignes de la politique européenne pour l’année à venir.

) Institutions et citoyenneté

Ce que Jean-Claude Juncker a annoncé : « Au cours des prochains mois, nous devrions associer les parlements nationaux et la société civile au niveau national, régional et local aux travaux sur l’avenir de l’Europe », a plaidé le président de la Commission, soutenant l’initiative du président Emmanuel Macron d’organiser en 2018 des « conventions démocratiques dans toute l’Europe en 2018 ».

Il plaide par ailleurs en faveur de la création de listes transnationales, ce qui rendrait « les élections au Parlement européen plus européennes et plus démocratiques ».

Concernant l’exécutif européen, Jean-Claude Juncker a également estimé que « le paysage européen serait plus lisible et plus compréhensible si le navire européen était piloté par un seul capitaine ». En clair, il propose de fusionner sa propre fonction avec celle du président du conseil européen, Donald Tusk.

Analyse. Réticent à lâcher de ses prérogatives concernant la gouvernance de la zone euro, Jean-Claude Juncker donne d’autres gages à Emmanuel Macron en soutenant son initiative de consultation citoyenne. Il rejoint également le président français sur la composition de listes transnationales, mais la mesure déjà maintes fois évoquée ces dernières années n’emporte pas le consensus.

En plein déficit démocratique, l’UE cherche à se légitimer auprès des citoyens qui se sentent dépossédés du projet européen, et qui parfois se retranchent sur un vote nationaliste et populiste. Les changements institutionnels proposés par Jean-Claude Juncker sur le pouvoir exécutif de l’Union, rappelant l’échec du projet de Constitution porté par Valéry Giscard d’Estaing, demanderait une modification des traités. Cette fois avec l’adhésion populaire.

Devant l’Acropole, la démocratie européenne, selon Emmanuel Macron

2) Zone euro

Ce que Jean-Claude Juncker a annoncé :« Je veux une union économique et monétaire plus forte », a lancé Jean-Claude Juncker mercredi 13 septembre. Pour cela, le président de la Commission européenne propose la mise en place d’un « ministre européen de l’économie et des finances qui encourage et accompagne les réformes structurelles dans nos États membres. » Il plaide aussi pour une « ligne budgétaire conséquente dédiée à la zone euro ».

Analyse : La crise de la dette en Europe a mis au jour plusieurs fragilités dans les fondations de la monnaie unique et dans son pilotage. L’euro n’a pas permis de coordonner les orientations économiques de chaque État membre tandis que, facteur aggravant, l’absence de budget spécifiquement dédié à la zone euro n’a pas permis d’atténuer les divergences économiques croissantes entre les pays partageant cette monnaie.

Face à ce constat, Jean-Claude Juncker esquisse des pistes de réformes, comme d’autres avant lui mais avec de fortes nuances. En effet, le dirigeant propose que ce soit un commissaire européen qui joue le rôle de ministre européen de l’économie et des finances, et non pas un des ministres des finances de la zone euro. De même, Jean-Claude Juncker se prononce contre un budget et un parlement spécifiques à la zone euro (deux propositions d’Emmanuel Macron, notamment). Ces deux éléments doivent selon lui être considérés selon lui comme deux sous-ensembles de l’Union européenne et de ses institutions.

Ses propositions feront partie du débat, aux côtés notamment de celles du couple franco-allemand, attendues après les élections outre-Rhin le 24 septembre.

À lire : L’avenir de l’UE passe par le renforcement de l’euro

3) Défense et sécurité

Ce que Jean-Claude Juncker a annoncé : « Les cyberattaques sont parfois plus dangereuses pour la stabilité des démocraties et des économies que les fusils et les chars (…) La Commission propose (…) une Agence européenne de cybersécurité, pour mieux nous défendre contre les attaques ».

« Je plaide pour la création d’une cellule européenne de renseignement chargée de veiller à ce que les données relatives aux terroristes et aux combattants étrangers soient automatiquement échangées entre les services de renseignement et la police », a ajouté Jean-Claude Juncker, plaidant pour que le « nouveau parquet européen de poursuivre les auteurs d’infractions terroristes transfrontalières ».

Analyse : Il est vrai que 4 000 cyberattaques ont été enregistrées l’an dernier, et que les actes terroristes se moquent des frontières européennes, comme l’ont encore montré les récentes tueries en Catalogne. Concernant les cyberattaques, il existe déjà, depuis 2004, une agence basée à Heraklion, en Crète, mais il s’agit plutôt d’un fonds documentaire aux ressources limitées. L’essentiel de la coopération sur les attaques se fait en réalité à Tallinn en Estonie sous l’égide de l’Otan. Plus largement, les États sont peu enclins à lâcher leurs prérogatives en matière de sécurité intérieure. La plupart des échanges d’information ont lieu en bilatéral entre pays aux services de renseignement déjà bien étoffés.

À lire : Après le Brexit, cinq scénarios pour cimenter l’Europe

4) Migrations

Ce que Jean-Claude Juncker a annoncé : « Nous allons travailler à l’ouverture de voies de migration légales. La migration irrégulière ne s’arrêtera que lorsque les migrants auront une autre option que d’entreprendre un voyage périlleux ». Jean-Claude Juncker soutient le HCR pour réinstaller 40 000 autres réfugiés originaires de Libye et des pays voisins et faciliter l’accès des migrants à la carte bleue européenne sur les travailleurs qualifiés.

Analyse. À mesure que les frontières européennes se referment, avec la volonté afficher d’expulser plus facilement les étrangers en situation irrégulière, le président de la commission européenne souhaite prendre la main sur le flux migratoire, tant sur le volet asile que sur celui de l’immigration de travail. Cette politique passe nécessairement par un meilleur contact avec les pays de départ. Expulser davantage, en effet, implique d’obtenir les laissez-passer consulaires indispensables au retour. Et endiguer les flux à la source nécessite de solides accords de développement. Or, Jean-Claude Juncker, qui admet les limites des budgets européens, s’en remet à des États membres peu enclins à faire des efforts pour alimenter notamment le fonds fiduciaire pour l’Afrique. Les contributions nationales, sur une enveloppe de 2,7 milliards d’euros, n’atteignent que 150 millions d’euros.

À lire : Réfugiés, les quotas d’accueil conformes au droit européen

5) Accords commerciaux

Ce que Jean-Claude Juncker a annoncé : « Je voudrais que nous renforcions encore notre programme commercial européen (…). Nous venons de conclure avec le Canada un accord commercial (…), nous avons trouvé un accord politique avec le Japon sur un nouveau partenariat économique. Nous avons de bonnes chances de faire de même avec le Mexique et les pays d’Amérique du Sud. Et aujourd’hui, nous proposons d’ouvrir des négociations commerciales avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Je voudrais que tous ces accords soient finalisés d’ici à la fin de ce mandat. Et je tiens à ce qu’ils soient
négociés dans la plus parfaite transparence. »

L’analyse : Là encore, Jean-Claude Juncker prend à bras-le-corps un thème sensible dans l’opinion publique européenne. L’opposition montante au Tafta, le projet de traité de libre-échange transatlantique (finalement en suspens depuis l’élection de Donald Trump), puis l’adoption chaotique du traité avec le Canada, le Ceta, a révélé une méfiance des citoyens envers une Europe jugée ultralibérale. Ses propos sur la transparence accrue des processus de négociation visent à répondre à ses préoccupations. Dans le même temps, ses annonces de projets en cours de négociation indiquent qu’il ne change pas de cap et que le commerce reste une priorité de la Commission. Parce que, justifie-t-il, « le commerce, ce sont des emplois et de nouvelles opportunités pour les entreprises européennes ».

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6) Compétences de l’Union

Ce que Jean-Claude Juncker a annoncé :« Je voudrais que notre Union se concentre davantage sur ce qui compte réellement (…) Nous allons créer d’ici à la fin du mois une task force (« force d’intervention ») « Subsidiarité et proportionnalité » pour regarder de plus près toutes nos politiques, afin que l’Europe n’agisse que là où elle a une vraie valeur ajoutée », a déclaré Jean-Claude Juncker. Le vice-président de la Commission, Frans Timmermans, sera personnellement chargé de piloter ce groupe qui réunira des parlementaires nationaux et européens. Il présentera un rapport dans un an.

Analyse : Régulièrement raillée pour s’intéresser davantage au calibrage des concombres qu’aux grands défis collectifs, l’Union européenne doit en effet mieux cerner son champ d’intervention pour gagner en crédibilité. Un travail a déjà été mené dans ce sens, puisque la commission européenne se félicite d’avoir proposé 25 initiatives par an, contre plus de 100 lors des mandatures précédentes.

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7) Intérêts stratégiques européens

Ce que Jean-Claude Juncker a annoncé :« L’Europe doit toujours défendre ses intérêts stratégiques (…). Nous proposons aujourd’hui un nouveau cadre de l’UE sur l’examen des investissements. Si une entreprise publique étrangère veut faire l’acquisition d’un port européen stratégique, d’une partie de notre infrastructure énergétique ou d’une de nos sociétés dans le domaine des technologies de défense, cela ne peut se faire que dans la transparence, à travers un examen approfondi et un débat. Il est de notre responsabilité politique de savoir ce qui se passe chez nous afin d’être en mesure, si besoin, de protéger notre sécurité collective ».

Analyse : Jean-Claude Juncker met ainsi ses pas dans ceux de la France, de l’Allemagne et de l’Italie, qui ont proposé en début d’année que les États membres aient la possibilité d’intervenir sur des cas particuliers d’investissements directs étrangers sur des actifs stratégiques, en particulier lorsque ces investissements émanent d’entreprises contrôlées ou financées par des États.

Il reste maintenant à concrétiser cette volonté qui ne fait pas l’unanimité entre les États membres, partagés entre les partisans d’un libre-échange total et ceux qui veulent préserver un droit de regard.

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8) Élargissement

Ce que Jean-Claude Juncker a annoncé :« Si nous voulons plus de stabilité dans notre voisinage, nous devons offrir des perspectives d’élargissement crédibles aux Balkans occidentaux (…). Si nous voulons renforcer la protection de nos frontières extérieures, nous devons laisser la Bulgarie et la Roumanie rejoindre immédiatement l’espace Schengen », estime Jean-Claude Juncker, qui souhaite aussi de faire avancer la candidature croate.

Analyse : Ces déclarations sont surprenantes à l’heure où l’opinion publique européenne s’accorde à dire que l’intégration dans l’UE des pays de l’Est notamment a été sans doute trop rapide. Pour faire passer l’idée, il évoque la protection des « frontières extérieures », les premiers pays d’entrée dans l’Union européenne étant encore aujourd’hui responsable de l’examen de la demande d’asile. C’est aussi une manière de marquer la différence entre les pays éligibles à l’adhésion et la Turquie, qui selon lui « s’éloigne à pas de géants de l’Union européenne ».

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9) Travailleurs détachés

Ce que Jean-Claude Juncker a annoncé : Pour Jean-Claude Juncker, « il ne peut y avoir de travailleurs de deuxième classe » dans une « Union entre égaux ». « Ceux qui effectuent le même travail au même endroit doivent pouvoir obtenir le même salaire (…).Nous devons veiller à ce que les dispositions de l’Union concernant la mobilité des travailleurs soient justes, efficaces et imposées partout, avec le soutien d’une nouvelle autorité européenne de contrôle et d’exécution de ces mesures ». Une autorité que « nous créerons », a-t-il assuré.

Analyse : Le thème des travailleurs détachés a cristallisé dans la campagne électorale française 2017 le désamour envers une Europe accusée de mettre les salariés européens en concurrence d’un pays à l’autre. Aussitôt élu, le président Macron est intervenu dans le processus de révision de la directive européenne encadrant le travail détaché, qui était en cours, en proposant notamment de muscler les dispositifs de contrôle et de sanctions en cas de fraude. L’initiative française a provoqué la colère des pays d’Europe centrale, grands pourvoyeurs de travailleurs détachés à l’ouest du continent. Le sommet européen de la fin octobre visera à trouver un consensus entre les différents États, mais aussi la Commission et le parlement européens. Ce sera l’occasion pour Jean-Claude Juncker de préciser sa position, qui va dans le sens d’un contrôle accru mais qui reste floue dans ce discours sur les modalités d’action de cette agence.

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10) Climat

Ce que Jean-Claude Juncker a annoncé :« Je veux que l’Europe soit à l’avant-garde de la lutte contre le changement climatique ». En appui de son propos, Jean-Claude Juncker annonce que la Commission « présentera sous peu une proposition de réduction des émissions de carbone dans le secteur des transports ».

Analyse : Les objectifs ne manquent pas pour réduire la pollution. L’UE vise déjà une réduction de 80 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050, par rapport aux niveaux de 1990. Ce qu’il manque à présent, ce sont les moyens pour y parvenir. Car selon Eurostat, deux États membres sur trois continuent de voir leurs émissions augmenter.

Marie Dancer et Jean-Baptiste François

Source La Croix  13/09/2017

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