Wolfgang Schauble, ministre des finances allemand, le 12 avril, à Berlin. STEFFI LOOS / AFP
Le soutien du ministre des finances d’Angela Merkel, réputé en Europe pour son austérité, ne présente pas que des avantages pour le candidat d’En marche !.
Après Sigmar Gabriel, Wolfgang Schäuble. En Allemagne, Emmanuel Macron pouvait déjà compter sur le soutien du ministre social-démocrate des affaires étrangères. Le voici désormais adoubé par son collègue conservateur chargé des finances. « Si j’étais français et habilité à voter, (…) je voterais probablement pour Macron », a déclaré ce dernier, mardi 11 avril, à Hambourg, à l’hebdomadaire Der Spiegel.
Invité, le lendemain, à participer à une émission consacrée à l’élection présidentielle française sur la radio publique Deutschlandfunk, M. Schäuble s’est montré plus prudent. « Mon parti, la CDU, est, comme celui de François Fillon, lié au Parti populaire européen, et nous avons naturellement des points communs. D’un autre côté, j’ai bien connu Emmanuel Macron quand il était ministre de l’économie, nous avons de très bonnes relations et partageons beaucoup d’idées », a t-il déclaré. Si les mots étaient plus mesurés que la veille, la mise en scène parlait d’elle-même. Dans le foyer plein à craquer du Deutsches Theater de Berlin, M. Schäuble partageait l’affiche avec l’eurodéputée Sylvie Goulard, membre de l’équipe de campagne de M. Macron, avec laquelle il s’est montré d’une totale complicité…
Le coût pour Fillon est indiscutable
Après l’émission, celle-ci se réjouissait d’ailleurs de ce soutien. « Un tel geste de la part du ministre des finances le plus expérimenté de la zone euro est, pour Emmanuel Macron, la reconnaissance d’une crédibilité. C’est un signe important », explique au Monde Mme Goulard.
En France, il n’est pas certain qu’un tel appui ne présente que des avantages pour M. Macron, compte tenu de la réputation qu’y a M. Schäuble, associé aux politiques d’austérité fort peu populaires auprès de toute une partie de l’électorat que compte séduire le candidat d’En marche !
Mais si le gain politique pour M. Macron est discutable, le coût pour M. Fillon est, lui, indiscutable. Au Spiegel, M. Schäuble, pour qui « le pire scénario possible » serait un second tour entre Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen, a en effet expliqué qu’il avait fort peu apprécié les « attaques contre la justice » proférées par l’ancien premier ministre. Un sentiment largement partagé outre-Rhin, où l’image du candidat de la droite s’est considérablement dégradée depuis les révélations du Canard enchaîné, publiées vingt-quatre heures après sa venue à Berlin, le 23 janvier, lors de laquelle il avait été reçu par la chancelière, Angela Merkel, ainsi que par M. Schäuble.
Nouvelle illustration de l’abus de pouvoir de la Troïka qui règne en maître sur tous les pays de l’UE. Le tort de Tsipras (qui tente de regagner de la popularité avec des mesurettes sociales) est d’avoir pris ces décisions sans consulter au préalable les créanciers.
« Il est impératif que les mesures ne soient pas décidées de façon unilatéral… » rappelle le puissant ministre des finances allemand, Wolfgang Schäuble.
Une bonne occasion pour Le commissaire européen à l’économie Pierre Moscovici de nous rappeler qu’il est à gauche et au Monde de le souligner avec insistance…
Une bonne occasion pour Le commissaire européen à l’économie Pierre Moscovici de nous rappeler qu’il est à gauche et au Monde de le souligner avec insistance…
Aurait-on trop vite tourné la page de la crise grecque ? Le Mécanisme européen de stabilité (MES, principal détenteur de la dette publique grecque) a décidé, mercredi 14 décembre, de suspendre l’application des mesures d’allégement de la dette hellène, pourtant validées lors d’une réunion des ministres des finances de la zone euro, le 5 décembre.
La raison, selon plusieurs sources bruxelloises ? Le puissant ministre des finances allemand, Wolfgang Schäuble, aurait mis son veto à cette décision du MES devant se prendre à l’unanimité. Il réagirait à l’annonce faite par le premier ministre grec, Alexis Tsipras, le 8 décembre, de rétablir pour les plus petites pensions de retraite un 13e versement annuel et de reporter la hausse de la TVA sur les îles de l’est égéen, où s’entassent plus de 16 000 migrants et réfugiés, « tant que dure la crise des réfugiés ».
Son tort est d’avoir pris ces décisions sans consulter au préalable les créanciers. « Il est impératif que les mesures ne soient pas décidées de façon unilatérale ou annulées sans préavis », a déclaré M. Schäuble, mercredi. « Les institutions [les représentants des créanciers] ont conclu que les actions du gouvernement grec semblent ne pas être en ligne avec nos accords », a réagi Michel Reijns, le porte-parole du président de l’Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem. « Quelques Etats membres le voient aussi de cette façon et [il n’y a] donc pas d’unanimité désormais pour mettre en place les mesures » d’allégement de la dette, ajoute-t-il.
Pierre Moscovici contre cette suspension
Ce contretemps n’est pas du tout du goût du commissaire européen à l’économie, Pierre Moscovici, qui refuse que la Commission endosse la responsabilité du veto. « On ne peut pas dire que cette décision [de suspension] a été prise sur le fondement d’une évaluation de la Commission [sur les mesures décidées par Tsipras], puisque cette évaluation n’est pas achevée, affirme l’ex-ministre des finances du gouvernement Ayrault au Monde. Ceux qui souhaitent la suspension des mesures de court terme doivent endosser leurs responsabilités. »
Pour M. Moscovici, les mesures sur la dette ne doivent pas être remises en cause. Leur principe avait été agréé par les dix-neuf ministres des finances de l’eurozone, fin mai. « Cet accord sur la dette grecque reste robuste, puisque les engagements sur les mesures de court terme reposaient sur la clôture de la première revue du plan d’aide [cette clôture a eu lieu cet automne] », explique le commissaire.
Même si elles n’avaient rien de radical, les mesures sur la dette visent pourtant à alléger de manière substantielle l’énorme fardeau grec (180 % du produit intérieur brut). Il est vrai qu’elles avaient été acceptées du bout des lèvres par M. Schäuble, qui a souvent répété qu’elles n’étaient pas nécessaires.
« Une application des règles sans indulgence »
Depuis que le troisième plan d’assistance financière à la Grèce a été validé (86 milliards d’euros, à l’été 2015), Alexis Tsipras a pourtant fait passer la plupart des nouvelles mesures d’austérité exigées par les créanciers, dont une énième révision à la baisse des retraites grecques, au printemps. Et de nombreuses hausses de TVA.
« De façon pas toujours spontanée mais constante, les Grecs ont respecté le programme d’aide, et les efforts qu’ils ont fournis sont considérables. Alors quand ils remplissent leur part du contrat, les autres doivent aussi remplir la leur », martèle M. Moscovici. « La Commission plaide pour une application des règles sans indulgence, mais qui permette un progrès partagé. On ne peut pas opposer l’allégement de la dette grecque à la justice et la cohésion sociale, que le peuple grec attend », ajoute le socialiste.
La délégation socialiste française au Parlement européen a très vivement réagi à la suspension des mesures sur la dette, mercredi. « Trop c’est trop, nous disons “basta à M. Schäuble”. Faites preuve d’un minimum de sens politique, et d’humanité, tout simplement, ont-ils fait savoir dans un communiqué. La Grèce renoue avec la croissance depuis deux trimestres, il est légitime qu’un chef de gouvernement redistribue là où il y a urgence sociale. L’Union européenne doit envoyer un signal social positif. Ne laissons pas la Grèce s’épuiser et le peuple grec sans espoir. »
Cette suspension semble avoir renforcé la détermination de M. Tsipras. Mercredi, il a dit qu’il allait proposer ses mesures sociales dès jeudi devant son Parlement. « Nous allons respecter intégralement notre accord avec les créanciers, mais nous allons aussi défendre de toutes nos forces la cohésion sociale », avait-il affirmé le 8 décembre. Les tensions, qui, entre Grecs et créanciers, s’étaient si fortement apaisées ces derniers temps, sont-elles reparties pour durer ?
L’injection par la Réserve fédérale de 600 milliards de dollars supplémentaires dans l’économie américaine risque d’exacerber les tensions internationales liées aux changes.
Pour Wolfgang Schaüble, le ministre allemand des Finances, faire marcher la planche à billets pour soutenir la conjoncture "ne vaut plus rien".
Le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble est très critique des mesures de relance de la Réserve fédérale américaine. L’injection par la Fed de 600 milliards de dollars supplémentaires dans l’économie américaine, décidée mercredi, va « poser des problèmes supplémentaires » au monde, a dit M. Schäuble dans un entretien à la chaîne ARD diffusé dans la nuit de jeudi à vendredi.
Risque d’inflation
Il a affirmé vouloir aborder le sujet lors du prochain sommet du G20, qui regroupe pays riches et puissances émergentes, en Corée du Sud. Les Etats-Unis ont déjà « injecté un montant infini de liquidités dans l’économie », a-t-il par ailleurs critiqué dans un entretien avec la chaîne ZDF, pour des résultats « désespérants ». Selon M. Schäuble, faire marcher la planche à billets pour soutenir la conjoncture « ne vaut plus rien ».
Jeudi le ministre allemand de l’Economie Rainer Brüderle avait fait part de son « inquiétude » face aux décisions de la Fed et appelé les Etats-Unis à faire plutôt des réformes structurelles. En injectant de l’argent dans l’économie, la Fed prend le risque d’alimenter l’inflation et de faire baisser la valeur du dollar par rapport à l’euro, une mauvaise nouvelle pour l’Allemagne, championne européenne des exportations.
L’initiative des banquiers centraux américains est de manière générale totalement contraire aux convictions allemandes en matière de politique monétaire. Traumatisée par une inflation folle dans les années 1930, qui a encouragé la montée du nazisme, l’Allemagne s’est toujours posée depuis 1945 en garante de la rigueur monétaire et de la stabilité des prix. Cette orthodoxie a inspiré les statuts de l’actuelle Banque centrale européenne.
Lagarde : l’euro « porte le poids » de la décision
Le geste de la Fed n’a toutefois pas irrité que l’Allemagne: la ministre française de l’Economie Christine Lagarde a ainsi regretté que l’euro « porte le poids » de cette décision. « Je ne suis pas en train de porter un jugement sur l’assouplissement quantitatif américain. Mais cela montre le besoin impératif de repenser le système monétaire international et les mécanismes de coopération », a-t-elle ajouté.
Le cours de l’euro a grimpé face au dollar avant comme après cette annonce, stimulé par la création monétaire qu’elle implique pour les Etats-Unis.
Les pays en développement pénalisés
La décision de la Fed mécontente également les économies en développement, pénalisées à l’exportation par l’appréciation de leurs monnaies. Elle risque donc d’exacerber les tensions liées aux changes, qui ont conduit certains dirigeants à évoquer récemment le risque d’une « guerre des monnaies », et donc compromettre un accord mondial sur les déséquilibres commerciaux et monétaires lors du sommet du G20.
« Tant que le monde ne s’efforcera pas de limiter les émissions de devises internationales telles que le dollar – ce qui n’est pas facile – il est inévitable qu’une nouvelle crise ait lieu, comme le déplorent quelques Occidentaux éclairés », a commenté un conseiller de la banque centrale chinoise, Xia Bin, dans une publication de la Banque populaire de Chine.
Le ministre sud-coréen des Finances a quant à lui prévenu qu’il envisagerait « de façon résolue » un contrôle des flux de capitaux.
A Brasilia, son homologue brésilien, Guido Mantega, a estimé que la décision de la Fed ne favoriserait sans doute pas la croissance mondiale et qu’elle risquait d’aggraver les déséquilibres internationaux. « Tout le monde souhaite que l’économie américaine se reprenne mais le fait de jeter des dollars depuis un hélicoptère ne fait pas du bien à tout le monde », a-t-il dit.
Quant à la Thaïlande, elle a évoqué la possibilité d’une action concertée destinée à lutter contre l’afflux de dollars attendu sur les marchés émergents.
Le ministre turc de l’Economie a estimé que la décision de la Fed risquait de se retourner contre les Etats-Unis et un haut responsable indien a souligné que, si Washington avait le droit de relancer son économie, les autres pays avaient celui de défendre leurs intérêts.
Les Européens et la communauté internationale espèrent avoir enfin trouvé la parade pour stabiliser la zone euro. Les ministres des finances des Vingt-Sept ont annoncé, lundi 10 mai, au petit matin, la mise en place d’un plan de sauvetage de l’ordre de 750 milliards d’euros afin d’éviter que la crise grecque ne s’étende à l’Espagne, au Portugal, voire à l’Italie.
Le dispositif est la pierre angulaire d’une série de mesures annoncées dans la foulée par la Banque centrale européenne (BCE), le Fonds monétaire international (FMI), et les principales banques centrales de la planète. « Ce sont des mesures fortes qui contribueront à la stabilité économique et financière globale », a dit le directeur général du FMI, Dominique Strauss-Kahn. Le plan va « renforcer et protéger l’euro », a indiqué Angela Merkel lundi matin.
D’un montant sans précédent, le dispositif a été négocié au forceps, juste avant l’ouverture des marchés asiatiques. La réunion avait débuté sur un coup de théâtre: en raison d’un malaise, le ministre des finances allemand, Wolfgang Schäuble, a dû être hospitalisé d’urgence à sa descente d’avion.
Après son forfait, les grands argentiers ont attendu pendant deux heures son remplaçant, l’ancien bras droit d’Angela Merkel à la chancellerie, Thomas de Maizière. Réunis à Bruxelles, les ministres des finances se sont surtout déchirés au sujet des modalités du fonds d’assistance esquissé l’avant-veille par les chefs d’Etat et de gouvernement de la zone euro.
Prêts Bilatéraux
L’Allemagne a insisté pour imposer ses conditions : pas de garantie d’Etat à un emprunt communautaire géré par la Commission, intervention du FMI en cas de besoin, et plafonnement de l’enveloppe « européenne ». Les grands argentiers se sont donc entendus sur un dispositif hybride, c’est-à-dire de nature à la fois communautaire et intergouvernementale. Dans un premier temps, la Commission européenne a été autorisée à emprunter 60 milliards d’euros pour abonder la facilité qui lui permet, avec la garantie du budget communautaire, de prêter de l’argent aux Etats non membres de la zone euro en difficulté: il a été convenu d’ouvrir ce fonds aux pays de l’Union monétaire menacés par des « événements exceptionnels échappant à [leur] contrôle » (article 122 du traité).
L’Allemagne aurait aimé en rester là. Mais selon la plupart des capitales européennes, ainsi que pour la BCE, cette seule enveloppe n’était pas de nature à enrayer les risques de contagion de la crise grecque. La Commission avait demandé un peu plus tôt dans la journée de disposer de la garantie des Etats de l’Union monétaire afin de muscler le dispositif.
Inacceptable pour l’Allemagne et les Pays-Bas. Avant un coup de fil entre Nicolas Sarkozy et Angela Merkel en fin d’après-midi, Berlin espérait encore dupliquer le schéma mis en place en faveur de la Grèce, en privilégiant les prêts bilatéraux, couplé à l’assistance du FMI. Comme lors du sommet de la zone euro, vendredi, ses partenaires ont exigé la création d’un dispositif « ambitieux », moins compliqué à actionner en cas de besoin.
Fonds de stabilisation
En complément, les Etats de la zone euro ont donc décidé de mettre en place une sorte de fonds de stabilisation intergouvernemental, dont ils garantiront l’activité à hauteur de 440 milliards d’euros. L’idée a été proposée par les Français et les Italiens afin de débloquer les négociations. L’instrument sera susceptible de lever des dizaines de milliards d’euros sur les marchés de capitaux pour financer des prêts, en échange d’une conditionnalité très stricte, calquée sur celle du FMI.
Deux Etats non membres de la zone euro, la Pologne et la Suède, ont promis d’offrir leurs garanties au dispositif. D’autres, comme le Royaume-Uni, ont catégoriquement exclu de le faire. La contribution de la France à ce fonds censé expirer dans trois ans devrait avoisiner les 85 milliards d’euros.
Enfin, il a été convenu avec le FMI que ce dernier abonderait les prêts européens, « au moins » à hauteur de 50 % – soit quelque 250 milliards d’euro. En échange de la création de cet instrument inédit, Espagne et Portugal se sont engagés à amplifier leurs efforts de réduction des déficits d’ici au 18 mai. Ce mécanisme va être complété par une décision spectaculaire de la BCE. Après avoir traîné les pieds, celle-ci a annoncé son intention d’acheter aux banques les obligations qu’elles détiennent d’Etats fragilisés. Pour enrayer la chute de l’euro, plusieurs banques centrales, dont la Fed américaine et la BCE, ont, enfin, engagé une action concertée en mettant en place des accords d’échanges de devises.
Philippe Ricard (Le Monde)
Repères
Le plan de secours
Création d’un «mécanisme de stabilisation européen», se composant de deux éléments
– Des prêts de la Commission européenne pouvant aller jusqu’à 60 milliards d’euros pour les pays de la zone euro en difficulté, en échange de conditions sévères. Pour cela, la Commission empruntera sur les marchés, avec une garantie apportée par le budget communautaire. Cet instrument se basera sur un article du traité européen qui prévoit que l’UE peut accorder une aide financière à un Etat en raison «d’événements exceptionnels». Un tel mécanisme existait jusqu’ici pour les pays de l’UE hors zone euro mais pas pour ceux de la zone euro.
– Un système de prêts et de garanties pouvant aller jusqu’à 440 milliards d’euros. Les Etats membres de la zone euro créeront une société spéciale pour emprunter sur les marchés (« Special Purpose Mechanism », Mécanisme dédié), avec une garantie apportée par les Etats de la zone euro proportionnellement à leur participation das le capital de la BCE.
«Nous avons décidé de créer une société qui pourra emprunter pour un total de 440 milliards d’euros», et qui «sera garantie par les Etats zone euro», a expliqué le ministre luxembourgeois des Finances Luc Frieden. La ministre des Finances française Christine Lagarde a indiqué que des garanties pourraient aussi être offertes par «des Etats volontaires hors zone euro», dont la Suède et la Pologne.
– Le FMI pourrait apporter une participation supplémentaire de 250 milliards d’euros «Le FMI devrait fournir au moins la moitié de la contribution de l’UE», soit 250 milliards d’euros, et ce «à travers ses lignes de crédit habituelles», selon le communiqué final des ministres
Mesures exceptionnelles de la BCE
L’institut monétaire a annoncé «des interventions sur le marché obligataire privé et public de la zone euro», sans préciser immédiatement leur forme. Une action concertée de la BCE et des banques centrales des Etats-Unis, du Canada, d’Angleterre et de Suisse, a été mise sur pied pour faciliter l’approvisionnement en dollars des banques de la zone euro.
Accélération de la réduction des déficits, nouvelles mesures d’économies en Espagne et au Portugal
Les ministres des Finances «sont d’accord pour dire que les projets de consolidation budgétaire et de réforme fiscale seront accélérés là où cela est justifié», indique le communiqué. Lisbonne et Madrid ont promis des mesures d’économies supplémentaires pour réduire leurs déficits en 2010 et en 2011 et présenteront le détail de ces mesures lors de la prochaine réunion des ministres européens des Finances, le 18 mai.
(Source AFP)
Plan d’austérité général
Sous la pression des marchés, la majorité des pays membres de la zone euro ont taillé leurs dépenses publiques pour contrôler leurs déficits et éviter le scénario de la crise grecque.
Grèce. A la demande de l’Union européenne et du Fonds monétaire international, le gouvernement grec, confronté à une crise de dette sans précédent, a adopté un plan de rigueur, qui prévoit 30 milliards d’euros d’économies sur quatre ans (11% du PIB), afin de ramener le déficit de 14% à 3% en 2014. Ce plan prévoit une réduction des dépenses de 11,1 milliards d’ici en 2012 (baisse des investissements, suppression de salaires des fonctionnaires et des pensions), et un relèvement des taxes. Athènes envisage aussi de repousser l’âge légal à 65 ans, et la durée des cotisations de 37 à 40 ans d’ici 2015.
Espagne. Le Premier ministre espagnol José Luis Zapatero s’est engagé à économiser 50 milliards d’euros entre 2010 et 2013 (5,7% du PIB). Un fonctionaire sur dix sera remplacé, ce qui signifie en moyenne 13.000 départs par an. Madrid mise sur la hausse d’impôts directs et indirects pour récolter 11 milliards d’euros supplémentaires. Et l’âge légal de la retraite devrait passer de 65 à 67 ans.
Portugal. Le Premier ministre portugal José Socrates a déjà déclaré que son pays serait l’un des pays qui devrait le plus réduire son déficit en 2010. Son plan présenté début mars au Parlement vise à ramener le déficit de 9,3% du PIB en 2009 à 2,8% en 2013. Il prévoit un vaste programme de privatisations, qui doivent ramener 6 milliards d’euros dans les caisses de l’Etat, dont 1,2 milliard sur 2010, et une hausse de la pression fiscale. Le gouvernement de José Socrates a annoncé des coupes drastiques dans les investissements (de 4,9% du PIB en 2009 à 2,9% en 2013), le gel des salaires des fonctionnaires jusqu’en 2013 et le remplacement d’un retraité sur deux.
France. Le gouvernement français vise à ramener son déficit de 8% du PIB en 2010, à 6% en 2011, 4,6% en 2012, et 3% en 2013, soit 95 milliards d’euros d’économies en trois ans. Le Premier ministre français François Fillon a annoncé un gel en valeur des dépenses de l’Etat sur trois ans, une baisse de 10% des dépenses de fonctionnement (entre 800 et 900 millions d’euros) et 5 milliards d’économies sur les niches fiscales.
Irlande. Le gouvernement irlandais a été l’un des premiers à réagir dès février 2009 par une hausse des impôts et un prélèvement supplémentaire de 7,5% sur les salaires des fonctionnaires. Dans le cadre du budget 2010, Dublin a procédé à une baisse des salaires des fonctionnaires de 5% à 20%, et des prestations sociales, sans compter des coupes dans les dépenses courantes et les investissements.
L’Italie se prépare à faire 26 milliards d’euros d’économies budgétaires en deux ans. Le ministre de l’Economie, Giulio Tremonti, a confirmé le maintien des objectifs de réduction du déficit public, qui devra passer de 5% cette année à moins de 3% en 2012. L’effort réalisé en 2011 sera de l’ordre de 0,8% du PIB, soit 12,8 milliards d’euros. Une manoeuvre d’égale ampleur est prévue pour 2012. Les coupes budgétaires concerneront en priorité les ministères dépensiers, notamment la santé. En revanche, la baisse des impôts reste à l’ordre du jour. « La pression fiscale sera ramenée cette année à 42,8% du PIB, son niveau en 2008 », a affirmé le ministre italien.
Le Danemark, les Pays-Bas, le Luxembourg ont aussi pensé à serrer leur budget et à contrôler les dépenses publiques, tandis que l’Allemagne n’a pas annoncé de mesures d’austérité, mais tend à revenir sur la décision de réduire les impôts.
Xinhua (Chine)
Analyses
Agissons ensemble pour une initiative politique européenne
par Patrick Le Hyaric
Chaque heure qui passe montre que les promoteurs de cette Europe ultralibérale ont enfanté avec leurs traités et leurs directives, d’un monstre dont ils n’ont même plus la maîtrise. Il n’y a pas d’Europe politique. Les tenants de la haute finance internationale narguent les responsables européens parce que ceux-ci leur ont lâché la bride dès lors qu’ils ont décidé la liberté totale de circulation des capitaux. Voilà la cause essentielle de la spéculation internationale contre les budgets de plusieurs Etats européens. Les lettres communes de Mme Merkel et de M Sarkozy n’y changent rien ! Les réunions du Conseil européen non plus ! Ce ne sont que des opérations de façade couvrant les pieuvres de la finance. Il faut maintenant cesser ces comédies dont les seules victimes sont les peuples.
Ajoutons qu’au mépris de tout principe démocratique, de toute démocratie sociale, le gouvernement grec a décrété aujourd’hui par oukase les mesures antisociales dictées par le FMI et quelques politiciens européens (mesures que nous avons révélées hier dans nos colonnes). Cela constitue un véritable coup de force contre le peuple et la démocratie grecs, on impose contre la souveraineté populaire des mesures dramatiques qui font peser de graves menaces sur la démocratie et l’avenir même de la société grecque.
Et cette tragédie risque de se retourner contre l’idée européenne elle-même. Voilà pourquoi il est indispensable que les populations, les salariés, les organisations sociales et syndicales, les forces progressistes agissent pour obtenir une initiative politique européenne, de grande ampleur. Il est absolument nécessaire d’engager désormais des réformes structurelles progressistes de l’Union européenne.
1/ Un moratoire sur toutes les dettes des pays en difficulté est nécessaire. Durant ce moratoire, il convient de sortir des budgets toutes les dettes toxiques qu’il s’agisse de celles des Etats ou des collectivités territoriales.
2/ Il faut prendre la décision politique de dépasser les règles absurdes des traités pour activer la Banque centrale européenne comme un outil de refinancement des dettes en lien avec les banques nationales à un taux d’intérêt inférieur à 1%.
3/ Il est nécessaire de créer un fonds européen de solidarité et d’entraide entre pays et pour des programmes de relance.
4/ Il est nécessaire d’urgence d’inventer un mécanisme de taxation des transactions financières pour alimenter un tel fonds.
5/ Les plans d’austérité en cours ne sont qu’une fuite en avant qui aggrave encore la crise. Il faut au contraire, à l’échelle de l’Union européenne et pays par pays, élaborer avec les organisations syndicales, avec les collectivités territoriales des plans de relance interne seuls capables de commencer à juguler la crise.
(L’Humanité)
Fragile
par François Sergent
Les Bourses exubérantes ont salué le plan européen, rebondissant après des jours de chute libre. On peut s’en féliciter, on peut aussi douter de la pérennité de ces réactions euphoriques. Bien sûr, le plan accouché difficilement dimanche soir à Bruxelles par les Vingt-Sept est massif, élégamment comparé par l’agence Reuters aux tactiques de l’armée américaine en Irak, shock and awe («choc et effroi»). On espère qu’il réussira mieux que les GI. Pour la première fois, l’Europe a rejeté ses carcans monétaristes et mis en cause la sacro-sainte indépendance de la BCE. Pour la première fois aussi, une coordination économique et un semblant de solidarité s’esquissent entre Bruxelles, Athènes et Berlin. Mais le prix à payer de cette nouvelle politique est élevé. Rigueur et austérité pour tous, y compris pour la France et son gouvernement qui jouent avec les mots. La «discipline budgétaire et fiscale» à l’allemande va de pair avec la solidarité. Au risque bien réel de contracter des économies mal remises de la crise de 2008 et partant d’aggraver leurs fragiles finances. Ce plan monté dans l’urgence d’une crise contagieuse ne s’attaque pas aux réalités fondamentales de la zone euro. La disparité structurelle entre des économies aussi disparates que celles de l’Allemagne et de la Grèce est-elle tenable ? Les Vingt-Sept sont-ils prêts à abdiquer de leur souveraineté pour réguler marchés et banques et pour coordonner leurs politiques budgétaires et fiscales ? Sinon, ce plan sera juste de la morphine, comme l’avoue le FMI.