TRAVAILLEURS INDÉPENDANTS ÉCONOMIQUEMENT DÉPENDANTS

TRAVAILLEURS INDÉPENDANTS ÉCONOMIQUEMENT DÉPENDANTS
:
Mesures statistiques, enjeux et opportunités
Publication développée dans le cadre du Projet TRADE
Réseau Européen pour le Soutien des Travailleurs Indépendants Économiquement Dépendants.
Ref. N°. VS/2012/0434
Projet mis en place dans le cadre du Programme Relations Industrielles et Dialogue Social
de la Direction Générale Emploi, Affaires Sociales et Inclusion de la Commission
européenne. Projet développé avec le soutien financier de la Commission européenne
Auteurs :
Syndicat des Travailleurs Professionnels et Indépendants – UPTA
Association Travail, Emploi, Europe, Société – ASTREES
Association Bruno Trentin – ISF-IRES
Confédération des Syndicats Indépendants de Bulgarie – CITUB
Association Nationale des Femmes Entrepreneurs et Travailleuses Autonomes – ANMEYA
Fédération Européenne des Travailleurs
du Bâtiment et du Bois – EFBWW
3
TABLE DES MATIÈRES
1.
PRESENTATION ……………………………………………………………………………………….
5
2.
INTRODUCTION ……………………………………………………………………………………….
7
3.
LE PROJET TRADE …………………………………………………………………………………….
9
4.
CONTEXTUALISATION DU TRAVAIL INDÉPENDANT ÉCONOMIQUEMENT DÉPENDANT DANS LES DIFFÉRENTS PAYS PARTENAIRES DU PROJET …………………………………………………………
11
4.1. Le travail indépendant économiquement dépendant en Espagne …………………………………. 11
4.1.1
Reconnaissance légale ou juridique
……………………………………………………………… 11
4.1.2
Conditions de travail du groupe cible …………………………………………………………… 12
4.1.3
Représentation collective des travailleurs indépendants économiquement dépendants
… 13
4.2. Le travail indépendant économiquement dépendant en France …………………………………… 14
4.2.1
Reconnaissance légale ou juridique
……………………………………………………………… 14
4.2.2
Conditions de travail du groupe cible …………………………………………………………… 14
4.2.3
Représentation collective des travailleurs indépendants économiquement dépendants
… 15
4.3 Le travail indépendant économiquement dépendant
en Italie ……………………………………… 16
4.3.1
Reconnaissance légale ou juridique
……………………………………………………………… 16
4.3.2
Conditions de travail du groupe cible …………………………………………………………… 17
4.3.3
Représentation collective des travailleurs indépendants économiquement dépendants
… 19
4.4 Le travail indépendant économiquement dépendant
en Bulgarie ………………………………….. 20
4.4.1
Reconnaissance légale ou juridique
……………………………………………………………… 20
4.4.2
Conditions de travail du groupe cible …………………………………………………………… 20
4.4.3
Représentation collective des travailleurs indépendants économiquement dépendants
… 21
4.5 Le travail indépendant économiquement dépe ndant dans le secteur de la construction
……….. 21
4.5.1
Spécificités du secteur de la construction
………………………………………………………. 21
4.5.2
Incidence particulière du travail indépendant économiquement dépendant sur les
travailleurs immigrés
………………………………………………………………………………………… 23
4.5.3
Représentation collective des travailleurs indépendants économiquement dépendants
dans la construction
…………………………………………………………………………………………. 23
5.
ENJEUX STATISTIQUES SUR LE GROUPE CIBLE :
LA PROPOSITION MÉTHODOLOGIQUE DU PROJET
TRADE ………………………………………………………………………………………………………..
25
5.1 Description méthodologique de l’enquête ……………………………………………………………… 26
5.1.1
Critères d’identification du groupe de
s TIEDs …………………………………………………. 28
5.1.2
Définition du grou pe des TIEDs ………………………………………………………………….. 29
5.2. La notion de faux indépendants ………………………………………………………………………… 30
6.
PRINCIPAUX RÉSULTATS DE L’ENQU?TE PILOTE
………………………………………………..
…………33
6.1 Description des résultats de l’enquête en Espagne …………………………………………………… 33
6.1.1
Définition du groupe des TIEDs en Espagne …………………………………………………… 33
6.1.2
Situation socioprofessionnelle du groupe cible ………………………………………………… 33
6.1.3
Les motifs de leur adhésion au travail indépendant ………………………………………….. 35
6.1.4
Les défis que les TIEDs doivent surmonter
…………………………………………………….. 36
6.1.5
Degré d’indépendance dans le développement de leurs activités professionnelles ……… 37
4
6.1.6
Perception du niveau de représentation et de protection dont ils bénéficient ……………. 38
6.1.7
Description des femmesTIEDs en Espagne ……………………………………………………. 39
6.1.8
Le faux travail indépendant en Espagne ……………………………………………………….. 40
6.2 Description des résultatsde l’enquête en France …………………………………………………….. 41
6.2.1
Définition du groupe des TIEDs en France
……………………………………………………… 41
6.2.2
Situation socioprofessionnelle du groupe cible ………………………………………………… 41
6.2.3
Les motifs de leur adhésion au travail indépendant ………………………………………….. 42
6.2.4
Les défis que les TIEDs doivent surmonter
…………………………………………………….. 43
6.2.5
Degré d’indépendance dans le développement de leurs activités professionnelles ……… 44
6.2.6
Perception du niveau de représentation et de protection dont ils bénéficient ……………. 46
6.2.7
Description des femmes TIEDs en France ……………………………………………………… 47
6.2.8
Le faux travail indépendant en France
………………………………………………………….. 47
6.3 Description des résultats de l’enquête en Italie ………………………………………………………. 49
6.3.1
Définition du groupe des TIEDs en Italie
……………………………………………………….. 49
6.3.2
Situation socioprofessionnelle du groupe cible ………………………………………………… 49
6.3.3
Les motifs de leur adhésion au travail indépendant ………………………………………….. 50
6.3.4
Les défis que les TIEDs doivent surmonter
…………………………………………………….. 51
6.3.5
Degré d’indépendance dans le développement de leur activité …………………………….. 52
6.3.6
Perception du niveau de représentation et de protection dont ils bénéficient ……………. 54
6.3.7
Description des femmes TIEDs en Italie ……………………………………………………….. 55
6.3.8
Le faux travail indépendant en Italie ……………………………………………………………. 55
6.4 Description des résultats de l’enquête en Bulgarie …………………………………………………… 57
6.4.1
Définition du groupe des TIEDs en Bulgarie …………………………………………………… 57
6.4.2
Situation socioprofessionnelle du groupe cible ………………………………………………… 57
6.4.3
Les motifs de leur adhésion au travail indépendant ………………………………………….. 58
6.4.4
Les défis que les TIEDs doivent surmonter
…………………………………………………….. 59
6.4.5
Degré d’indépendance dans le développement de leur activité …………………………….. 60
6.4.6
Perception du niveau de représentation et
de protection dont ils bénéficient ……………. 62
6.4.7
Description des femmes TI
EDs en Bulgarie ……………………………………………………. 63
6.4.8
Le faux travail indépendant en Bulgarie
………………………………………………………… 63
7.
CONCLUSIONS ………………………………………………………………………………………..
65
7.1. Principales conclusions sur la méthodologie
de mesure statistique du groupe cible …………… 65
7.2. Principales conclusions sur la représentation
du groupe cible dans les relations industrielles
européennes et le dialogue social ……………………………………………………………………………. 67
Année de publication : 2014 : Etude complète.

La déflation dans la zone euro devient une menace de plus en plus réelle

Source Eurostat

L’inflation s’est établie à 0,4?% en octobre 2014. Elle était de 0,7?% en octobre 2013 et de 2,5?% en octobre 2012. Jusqu’ici les réponses au risque de baisse généralisée des prix sont très timides et risquent de ne pas suffire.

L’inflation dans la zone euro aurait-elle touché son point bas?? Aucun économiste n’ose en faire le pari. Après être descendus jusqu’à 0,3?% en septembre, les prix à la consommation ont enregistré une très légère remontée à 0,4?% en octobre, selon la première estimation d’Eurostat. Mais ce répit semble davantage lié au ralentissement de la baisse des prix de l’énergie qu’au rebond de l’activité. Hors énergie, l’inflation a d’ailleurs continué à se contracter à 0,7?% après 0,8?% en septembre, son niveau le plus bas depuis que cet indicateur existe. En Allemagne la hausse des prix a été très faible (0,7?%) le mois dernier et en Espagne les prix ont reculé de 0,2?%, pour le quatrième mois de suite. La déflation n’est plus un spectre lointain mais un risque réel qui menace les économies de la zone euro. Les prix sont désormais proches de zéro et la promesse de la BCE de maintenir les prix «?à un niveau proche de 2?% à moyen terme?» n’est plus qu’un lointain souvenir.

Certes, pour l’instant, «?nous n’y sommes pas et nous ne prévoyons pas de déflation, c’est-à-dire une baisse du niveau général des prix l’an prochain?», assure Christophe Blot, directeur adjoint des prévisions à l’OFCE. Pour au moins une bonne raison?: la baisse de l’euro vis-à-vis du dollar, qui devrait freiner le phénomène de baisse des prix. En effet, une monnaie faible génère de l’inflation importée. L’inflation pourrait donc ainsi reculer un peu moins vite même si, dans le même temps, l’énergie est moins chère. «?Mais au-delà, tous les ingrédients sont réunis pour que l’économie s’installe dans une spirale déflationniste?: peu ou pas de croissance, un chômage élevé, et une exacerbation des politiques de compétitivité.?» Jacques Cailloux, économiste Europe chez Nomura, surveille de près l’évolution des salaires. Ils sont pour lui l’indicateur le plus pertinent pour mesurer les risques de déflation. Le chômage élevé – il atteint 11,5?% dans la zone euro et sévit particulièrement en Grèce (26,4?%), en Espagne (24?% et au Portugal (13,6?%) – favorise la dénonciation des conventions collective et la pression à la baisse sur les salaires à l’embauche. En Allemagne, le seul pays où les salaires augmentent encore significativement, «?on note depuis la fin de l’été un ralentissement des hausses dans les accords négociés?», s’inquiète Jacques Cailloux.

«? La déflation, mieux vaut la prévenir que la guérir car, une fois ancrée dans la psychologie des agents économiques, c’est très difficile d’en sortir, comme le montre le précédent japonais?», avertit Isabelle Job-Bazille, directrice des études économiques au Crédit Agricole. Mais alors qu’ils sont au bord de cette trappe déflationniste, les gouvernements sont comme paralysés. La Banque centrale européenne est aussi embarrassée qu’elle est divisée sur la réponse à apporter à cette nouvelle menace. Son président, Mario Draghi, a alerté les Etats cet été que la Banque centrale ne pourrait à elle seule relancer la demande et que les Etats membres devaient y contribuer, y compris sur le plan budgétaire. Mais jusqu’ici, les réactions sont timides. «?Les politiques budgétaires restent relativement contraignantes, même si elles ne sont plus aussi restrictives que ces dernières années, ajoute l’économiste de Nomura. Les outils ne sont clairement pas adaptés à la situation. Ni la BCE ni les gouvernements de la zone euro ne prennent assez d’assurance pour enrayer le risque déflationniste?». Et de rappeler que la Réserve fédérale américaine a acquis par sa politique non conventionnelle d’achats de titres un montant équivalent à 23?% du PIB. A comparer à 2?% pour la BCE… A ce rythme, et même si elle ne sombre pas dans une franche déflation, la zone euro se condamne, selon Isabelle Job-Bazille, à «?une décennie de croissance faible et d’inflation basse?».

Catherine Chatignoux

Source : Les Echos 02/11/2014
Rubrique Actualité Internationale, Actualité France, rubrique Economie, rubrique UE, rubrique Politique, Politique économique,

“Les Roms ont dû intégrer la mobilité, pour s’adapter au rejet”

Download

Les débats médiatiques et les faits le prouvent : on assiste à une montée des discriminations et de la xénophobie contre les Roms. Le sociologue Jean-Pierre Liégeois décrypte les politiques de la France et de l’Europe à leur égard.

Jean-Pierre Liégeois, sociologue, a fondé en 1979 et dirigé jusqu’en 2003 le Centre de recherches tsiganes de l’Université de Paris Descartes (Paris-V). Depuis 1982, il travaille en étroite collaboration avec le Conseil de l’Europe et la Commission européenne. Il est membre élu du Conseil scientifique du Réseau universitaire européen d’études romani (Conseil de l’Europe et Union européenne) formé actuellement de près de trois cent cinquante chercheurs de trente-sept Etats.

Parmi ses derniers ouvrages : Roms et Tsiganes, dans la Collection Repères (Editions La Découverte, 2009), Roms en Europe, Editions du Conseil de l’Europe, 2007, Le Conseil de l’Europe et les Roms : 40 ans d’action, Editions du Conseil de l’Europe, 2010.

Les Roms sont à nouveau sur le devant de la scène politico-médiatique. Et pourtant on en sait toujours aussi peu sur eux, leur histoire, leurs communautés … Pourquoi ?
Dès que les discours abordent la question des Roms, on est en pleine confusion. Le résultat est qu’on dit tout et son contraire. Dans ces conditions, les propositions faites par les politiques ont peu de chances d’être adaptées, car elle portent sur des présupposés loin de la réalité. A l’analyse de ces discours, on en apprend plus sur ceux qui les prononcent que sur ceux qui en sont l’objet.

Les Roms ne sont pas inconnus, mais méconnus, et l’image qu’on s’en fait passe par des représentations sociales, préjugés et stéréotypes, très difficiles à modifier. Dès l’arrivée de familles dans l’Europe du XIVe et XVe siècles, commencent à se construire des images fondées sur des a priori, sur le fait qu’on ignore l’origine de ces familles, donc on l’invente. On est dans l’imaginaire, et au fil des siècles s’est constitué un réservoir de représentations dans lequel il suffit de puiser pour aller chercher les éléments dont on a besoin, pour justifier une attitude de rejet, un comportement discriminatoire, y compris au niveau politique le plus élevé : il suffit d’analyser les discours politiques pour voir clairement qu’ils s’alimentent à une image souvent fausse, négative ou folklorique, qui vient justifier les décisions qui sont prises. Les Roms ne sont donc pas définis tels qu’ils sont, mais tels qu’ils doivent être pour justifier des orientations politiques.

Alors, qui sont-ils ?
Les Roms, soit douze millions de personnes en Europe, viennent de l’Inde. Ils ont vécu 1 000 ans d’histoire, ils ont une culture, une langue dérivée du sanskrit, et leur présence en France est ancienne. Les Roms qui viennent aujourd’hui de Roumanie ou de Bulgarie ne sont donc pas les premiers. Si l’on évoque des moments intenses de déplacements, on peut citer celui d’avant la Révolution russe de 1917, ou encore dans les années 1970 les familles venant de l’ex-Yougoslavie. Par ailleurs l’usage en France du terme « Gens du voyage » renforce la confusion. C’est un néologisme administratif récent qui ne recouvre aucune réalité sociale ou culturelle. On voit donc que poser comme quasi synonyme Roms = « familles nomades venant de Roumanie depuis l’entrée de la Roumanie dans l’UE » est totalement faux.

Ils n’ont rien à voir avec le nomadisme?
Les familles sont souvent mobiles par obligation, pour s’adapter à des conditions d’existence changeantes, parfois menaçantes. Au cours de l’histoire, on assiste à des déportations, par exemple du Portugal vers l’Afrique et le Brésil, de l’Angleterre vers les colonies d’Amérique et vers l’Australie. Ou, quand des conflits se produisent, les Roms, souvent pris comme boucs émissaires ou bloqués entre les belligérants, doivent partir. Un des exemples récents est le Kosovo à la fin des années 90, d’où la presque totalité des Roms sont partis pour survivre et se sont réfugiés dans d’autres Etats. Ceux-ci veulent maintenant les y renvoyer sans mesurer les risques que les Roms courent.

Les Roms ont ainsi dû intégrer la mobilité dans leur existence, pour s’adapter à un rejet qui reste dominant. La montée actuelle des discriminations et de la xénophobie, dont les Roms, tous les rapports internationaux le montrent, sont les premières cibles en Europe, ne va pas entraîner une stabilisation sereine des familles ; elles seront souvent contraintes à aller voir ailleurs si leur sort peut être meilleur.

Les politiques des Etats européens vis à vis des Roms vont toutes dans le même sens, celui de l’exclusion ? 
On peut proposer une typologie de ces politiques :
• des politiques d’exclusion, par le bannissement hors du territoire d’un Royaume, ou d’un Etat. Il s’agit le plus souvent d’une disparition géographique, par le rejet hors du territoire. Il peut aussi s’agir d’une disparition physique que la plupart des familles roms d’Europe ont eu à subir douloureusement sous le régime nazi.

• des politiques de réclusion : la disparition, souhaitée géographiquement par un bannissement, devient souhaitée socialement par l’enfermement et l’éclatement du groupe et des familles, et s’accompagne d’une utilisation de la force de travail que peut représenter la communauté rom. C’est l’envoi aux galères, l’envoi dans les colonies à peupler, la déportation, l’esclavage, etc.

• des politiques d’inclusion : par l’assimilation du Rom par son environnement. La disparition est alors culturelle, et le Rom n’est considéré que comme un marginal posant des problèmes sociaux. Il n’est plus interdit mais contrôlé, il n’est plus rejeté mais assimilé.

Ces trois catégories peuvent être considérées dans une chronologie, mais elles peuvent aussi coexister car la volonté d’assimiler n’a jamais réduit le désir d’exclure, d’où le hiatus qu’on observe entre le discours politique central et l’action des collectivités locales. Mais aujourd’hui, on entre dans une chronologie à rebours : il est davantage question, dans les discours politiques, d’exclusion plutôt que d’assimilation.

Chaque Etat cherche donc à renvoyer les Roms dans l’Etat voisin ?
Comme au temps de la royauté ! La négation des Roms est une des politiques d’Europe les mieux partagées. Là aussi, on peut distinguer trois tendances :

•  une réactivation de l’exclusion au niveau national, exacerbée avec la proximité d’élections. Le « Rom » en tant que bouc-émissaire est facile d’accès, il a peu de force politique pour se défendre, et dans ces conditions chacun peut impunément et de façon irrationnelle râcler les fonds de tiroirs des stéréotypes pour y trouver ce qui lui convient. D’ailleurs, le renvoi sous des formes diverses, comme les reconduites à la frontière, est inutile et plus coûteux qu’une politique d’accueil. On sait que les personnes ainsi traitées peuvent légalement revenir, et qu’une reconduite à la frontière coûte 21 000 euros minimum aux finances publiques (un rapport officiel du Sénat qui a fourni ces données en 2008).

• une pression des institutions internationales, qui vise à la reconnaissance des Roms, à leur protection, et à leur mobilité dans l’espace européen. Des stratégies nationales ont été adoptées sous la pression de l’Union européenne, mais le fossé est grand entre les projets et leur réalisation, et le suivi de l’UE reste mou à l’égard des Etats.

• une période d’indécision : on s’est aperçu que les politiques d’exclusion, réclusion ou assimilation, n’ont pas abouti au cours des siècles, et on s’interroge, ce qui ouvre la voie à de nouvelles réponses. Peut-être y a-t-il là une raison d’espérer un changement…

Download-1

Et la France, comment se situe-t-elle?
Elle entre de façon radicale dans la réactivation de l’exclusion. Les indicateurs sont nombreux : interpellations en France de la Halde puis du Défenseur des Droits, de la Commission nationale consultative des Droits de l’Homme, interpellations européennes de la Commission européenne, notification à la France, par le Comité des ministres du Conseil de l’Europe, de sa violation de la Charte sociale européenne à l’égard des Roms et des « Gens du voyage », etc.

On peut aussi mentionner le fait qu’un texte fondamental comme la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales n’a pas été signé par la France : il s’agit d’un texte du Conseil de l’Europe, et sur les quarante-sept Etats membres seuls quatre n’ont pas signé : France, Turquie, Andorre et Monaco.

Et, pourtant vous insistez souvent sur le fait que les Roms sont au cœur de l’intégration européenne ?
Je propose même un renversement de perspective ! Deux faits majeurs marquent l’Europe : la mobilité des populations, et l’émergence de la question des minorités depuis 1990. Or les Roms illustrent les deux. Tous les Etats sont aujourd’hui obligés de gérer des situations complexes de multiculturalité, et les questions concernant les Roms sont exemplaires et peuvent servir de modèle.

Leur situation illustre ce que l’Europe a de plus négatif, en termes de discrimination, de rejet, de racisme, d’impuissance à accepter et à gérer la diversité. Mais par leur présence dans tous les Etats et leurs liens transnationaux, ils sont les pionniers d’une Europe future. Ils sont des passeurs de frontières, et dans une Europe qui se voudrait sans barrières, certains Etats veulent aujourd’hui restreindre la circulation des citoyens roms.

Ce discours peut-il être entendu, aujourd’hui ?
L’Union européenne a porté son attention sur la situation des Roms à partir de 1984, et son activité s’est intensifiée lors de la candidature d’Etats d’Europe centrale, essentiellement avec la mise en place de grands programmes d’aide financière qu’il faudrait aujourd’hui évaluer et coordonner, car on a l’impression qu’on navigue à vue, sans vision à moyen et long termes, et seulement en réaction à des événements auxquels il faut faire face à un moment donné.

Propos recueillis par Weronika Zarachowicz

Source Télérama 08/10/2013
Voir aussi : Rubrique Société, rubrique UE, rubrique Politique, Politique de l’Immigration,

Aucune date » pour une rencontre entre le pape et Nicolas Sarkozy

Aucune date n’a encore été fixée pour une éventuelle rencontre entre le pape Benoît XVI et Nicolas Sarkozy, évoquée mercredi par le président français, a indiqué vendredi le Vatican. »S’il y a une demande du président français, elle sera prise en considération, selon la procédure habituelle« , a déclaré à l’AFP le père Federico Lombardi, porte-parole du Vatican.

Mercredi, M. Sarkozy avait confié à des députés UMP qu’il devrait revoir « prochainement » Benoît XVI, dont les récents propos sur l’accueil des « légitimes diversités humaines » ont été interprétés comme une critique des expulsions de Roms par son gouvernement.

« Des contacts sont en cours pour une prochaine rencontre », a confirmé jeudi la présidence française, sans précision de date. Le secrétaire général de la présidence, Claude Guéant, a indiqué jeudi au quotidien La Croix que ce rendez-vous devrait avoir lieu « dans la première quinzaine du mois d’octobre ».

Le père Lombardi n’a pas pu préciser si une demande pour une audience privée avait déjà été présentée « de manière formelle et explicite » à la secrétairerie d’Etat du Vatican.

Le 22 août, quelques jours après le rapatriement par la France de plus de 200 Roms vers la Roumanie et la Bulgarie, Benoît XVI avait publiquement rappelé, en français, la nécessité de « savoir accueillir les légitimes diversités humaines ».

Alors que les démantèlements de camps illégaux et expulsions de Roms par Paris suscitaient de nombreuses réactions indignées en Europe et dans la classe politique française, ces propos avaient été largement considérés comme une critique de plus à l’encontre de la politique du gouvernement français.

Deux jours plus tôt, le responsable du Vatican en charge de l’immigration, Mgr Agostino Marchetto, qui a depuis quitté ses fonctions, avait affirmé que « les expulsions en masse de Roms vont à l’encontre des normes européennes ».

La dernière rencontre entre Benoît XVI et Nicolas Sarkozy remonte à septembre 2008, lors du voyage du pape en France.

AFP

Voir aussi : : Rubrique Religion, Rubrique Politique, Sarkozy le discours de Latran, Aubry s’étonne, Entretien avec Daniel Bensaïd, Rubrique Education,

Le Parlement européen demande la suspension des expulsions de Roms

Le Parlement de l'UE, 09/09/10. photo AFP

«Je veux très clairement dire qu’il n’est pas question que la France suspende les reconduites dans les pays d’origine, qu’il s’agisse d’ailleurs de Roumains, de Bulgares ou de tout autre ressortissant.» Réponse sans appel ce jeudi du ministre de l’Immigration Eric Besson, en déplacement à Bucarest précisément sur cette question des expulsions, au Parlement européen.

Ce dernier a adopté dans la matinée une résolution demandant à la France en particulier et aux autres Etats de l’Union européenne de «suspendre immédiatement toutes les expulsions de Roms». Cette résolution présentée par les socialistes, les libéraux, les verts et les communistes a obtenu 337 voix contre 245.

Le texte adopté critique également la récente réunion sur l’immigration et la libre circulation organisée à Paris à l’initiative du gouvernement français. La résolution relève notamment que ces sujets relèvent, selon elle, «de la compétence de l’UE». «Cette attitude est allée de pair avec une vague de stigmatisation des Roms et de dénigrement général des Tziganes dans le discours politique», déplore le texte.

«Caricatures»

«Le droit de tous les citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement dans toute l’Union constitue un pilier de la citoyenneté de l’Union telle qu’elle est définie par les traités», souligne la résolution.

Pour Eric Besson, «le Parlement européen est sorti de ses prérogatives et nous n’avons bien évidemment pas à nous soumettre à un diktat politique». Fidèle à la ligne adoptée depuis le début de la controverse sur le sujet, il a redit que «la France applique scrupuleusement le droit communautaire et elle respecte scrupuleusement la loi républicaine française». Et soutient par ailleurs que «la France n’a pris aucune mesure spécifique à l’encontre des Roms», qui «ne sont pas considérés en tant que tels mais comme des ressortissants du pays dont ils ont la nationalité». Le ministre dit regretter «les caricatures et tentatives d’instrumentalisation» concernant la politique française.

La Commission, quant à elle, s’est d’ailleurs dite mardi globalement satisfaite des garanties apportées par la France, même si elle entend surveiller de près la situation.

Voir aussi : Rubrique Union Européenne L’UE critique l’expulsion des Roms, Rubrique société Quand la France se renie elle-même, Rubrique Rencontre Tony Gatlif Liberté,