Cinemed. Pour la 8ème année, le Studio du scénario organise la journée du scénario, avec Jean-Pol Fargeau.
Atelier scénario avec Jean-Pol Fargeau aujourd’hui au Cinemed
Jean-Luc Saumade enseigne à l’Université Paul-Valéry aux étudiants en Art du spectacle ayant choisi la motion cinéma. Il assure également des formations professionnelles avec Le studio du scénario qui invite cette année le scénariste de Claire Denis, Jean-Pol Fargeau, pour la journée du scénario sous l’égide du Cinemed. Entretien.
A qui s’adresse la journée du scénario ?
L’idée initiale était d’apporter un soutien aux réalisateurs. Notamment aux jeunes qui veulent tourner et ont parfois des difficultés à comprendre qu’une idée doit se développer avant de devenir un film. Cette journée a désormais un public fidèle composé de professionnels, de cinéphiles, d’étudiants et de passionnés de cinéma. Il n’y a pas de recette particulière pour écrire un scénario. D’ailleurs, nous ne proposons pas une approche figée mais des visions que chacun peut s’approprier à sa manière.
Toute idée peut aboutir à un scénario, non ?
C’est vrai, mais il se trouve que l’écriture du scénario et le montage sont des moments difficiles dans l’histoire d’un film parce qu’ils confrontent à la réalité. Le scénario pose la question de la faisabilité, technique, matérielle, il permet l’estimation budgétaire. C’est à partir du scénario que se bâtit la rencontre avec le producteur qui devra conduire les négociations pour financer le film et réunir l’équipe technique et artistique. Le scénario assure le passage entre le rêve et la réalité en prenant en compte le médium du cinéma, il présente la vraie idée cinématographique.
A ce propos, on peut dire que Jean-Pol Fargeau est un maître en la matière. Quelle sera la nature de son intervention ?
Bien qu’il soit aussi un auteur de théâtre, l’écriture de Fargeau est très peu littéraire. Elle est peu dramatique au sens théâtral du terme. On aime ou on n’aime pas, mais c’est vraiment quelqu’un qui fait du cinéma de cinéma. Les films de Claire Denis sont un peu choquants, ils donnent le sentiment d’être mal finis, ce qui les rapproche du cinéma expérimental mais on est toujours dans des situations narratives cinématographiques d’une grande intelligence de langage. Jean-Pol Fargeau a choisi de bâtir son intervention à partir des scènes qui n’apparaissent pas dans les films, soit parce qu’elles n’ont pas été tournées, soit parce qu’elles ont été coupées au montage. C’est une approche intéressante. L’étude du scénario permet l’accès à une autre grille d’analyse.
Recueilli par Jean-Marie Dinh
Jean-Luc Saumade est aussi réalisateur. Son film « Mère méditerranéenne » est projeté dans le cadre du festival le 30 octobre et le 2 novembre.
Soirée d’ouverture. Un court métrage palestinien suivi de la projection en avant-première du film « Suzanne » de Katell Quillévéré.
Coup d’envoi du 35e Cinemed ce soir au Corum avec Marisa Paredes en maîtresse de cérémonie. Un marathon de neuf jours très suivi par le public montpelliérain. Vous retrouverez nos coups de coeur ainsi que toute l’actualité du festival dans nos colonnes.
Deux films sont programmés ce soir. Le court métrage Condom Lead (préservatif de plomb) des frères jumeaux palestiniens vivant à Gaza, Arab et Tarzan Nasser, fait écho à l’opération militaire « Plomb durci ». Il nous plonge dans le quotidien d’une famille palestinienne en prenant non sans humour à contre- pied le slogan anti-guerre « Faites l’amour pas la guerre » pour évoquer les difficultés à s’aimer sous les bombes. Ce court métrage a été sélectionné en compétition au Festival de Cannes. Leur projet de long métrage, Casting, concourt cette année pour la Bourse d’aide au développement. En seconde partie de soirée, on découvrira en avant-première le deuxième long métrage de Katell Quillévéré Suzanne en présence de l’équipe. Le film retrace le récit de vie sensible d’une femme enfant (Sarah Forestier) cherchant à s’arracher à son modeste destin.
Marisa Paredes, la muse de Pedro Almodovar
Cinemed rend hommage cette année à la grande actrice et comédienne madrilène Marisa Paredes qui occupe une place emblématique dans la culture espagnole depuis les années 60. A son propos, le président du festival Henri Talvat évoque à juste titre un caractère rebelle qui s’est forgé dans la résistance affirmée au franquisme et s’est libéré en plein coeur de la Movida. Personnalité sensible et forte tout à la fois, il émane de cette grande comédienne une grâce naturelle qui fait l’étoffe des stars mais la part d’ombre qui a jalonné son parcours en fait aussi une femme engagée.
Le public français la découvre dans Talons aiguilles (Tacones lejanos), dans un rôle de mère indigne, capricieuse, et finalement sincèrement repentante. Pedro Almodovar lui offre ses plus beaux rôles, comme dans le peu connu La Fleur de mon secret (La Flor de mi secreto) et Tout sur ma mère (Todo sobre mi madre).
La Fleur de mon secret sera projeté demain à 19h au Corum. Un film charnière dans la carrière d’Almodovar où Marisa Parades joue le rôle de Leo. Un auteur qui écrit des romans à l’eau de rose sous le pseudonyme d’Amanda Gris mais n’arrive plus à décrire les bons sentiments et ses ouvrages sont de plus en plus noirs. « C’est une histoire qui touchait intimement Pedro. Il devait le faire à ce moment-là. Pourtant, à cette époque, les spectateurs habituels du réalisateur auraient aimé qu’il fasse autre chose (…). Quand est sorti La Fleur de mon secret, le film leur a paru trop dur et désespéré. Pour moi, c’était une responsabilité énorme et aussi un plaisir immense, justement parce que je savais ce qu’il y avait derrière. Je le pressentais, même s’il ne m’en parlait pas explicitement », confiait l’actrice au Festival du cinéma espagnol de Nantes. Montpellier l’attend avec impatience.
Violence et passion. de Luchino Visconti
Considéré comme l’œuvre testamentaire de Luchino Visconti, Violence et Passion (1974) est un huis clos sombre et raffiné dans lequel Burt Lancaster endosse le rôle d’un professeur vieillissant, évoluant dans l’ambiance feutrée d’un appartement cossu de Rome. Rien ne semble pouvoir changer jusqu’à son dernier souffle, jusqu’au jour où s’incruste dans son salon la marquise Brumonti (interprétée par Silvana Mangano), l’épouse d’un riche industriel (que l’on suppose fasciste), qui cherche à tout prix à lui louer l’appartement de l’étage supérieur. Très réticent, le professeur finit par capituler et laisse le désordre prendre le dessus sur sa vie qui semblait vouée au silence, à la discrétion et aux regrets du temps passé. Impuissant, il voit se reconstituer autour de lui une famille dont l’arrogance et l’impertinence le dépassent.
Hommage Agusti Villaronga
L’hommage rendu au réalisateur espagnol Agusti Villaronga s’articule logiquement avec celui que le Cinemed rend à Marisa Paredes. Né à Majorque, le réalisateur partage des convictions profondes avec la comédienne madrilène, liées à l’après-guerre franquiste. C’est en outre dans le premier long métrage d’Agusti, le film culte et abrupte Prison de Cristal (1987) que Marisa trouve le grand rôle qu’elle attendait pour révéler la puissance de son interprétation dramatique. Villaronga mène de front une carrière d’acteur et de réalisateur. Ces films emprunts de réalisme et de poésie installent une atmosphère particulière dont il ressort une beauté sombre. En 2011, il a remporté le Prix Goya du meilleur réalisateur et du meilleur scénario adapté pour son film Pa negre. Le 27, à 19h, il présentera son film El Mar, un témoignage poignant sur la guerre civile. On retrouvera la force du propos de Villaronga lundi 28 oct à l’occasion d’une table ronde à 17h au Corum.
Le film du Dimanche Médée à 21h30 Opéra Berlioz
Sincère Pasolini
Le Cinemed tire un excellent parti des chefs d’oeuvres du cinéma trouvant une nouvelle vie après restauration. Il dévoile dimanche La Médée de Pasolini. En 1970, Pasolini s’empare de la trame d’Euripide pour restituer une adaptation toute personnelle. Pasolini donne à Médée le visage de Maria Callas, celui d’un souvenir, et motive son choix par : « les archétypes qui hantent l’âme de Maria Callas.» A sa sortie, le film (son 13e) n’a pas déçu les amateurs de tragédie. La sincérité de l’interprétation, la vérité de l’expression, sa force, sont renversants d’authenticité. En toile de fond se dessine le conflit culturel opposant Médée à Jason. Le réalisateur poète opère une transposition de lieux; de la Grèce antique il déplace le drame en Syrie et en Turquie où sa caméra capte les peuples et traditions ancestrales, au-delà de l’apparence onirique, la démarche est celle d’un documentariste.
Jean-Marie Dinh
Source : L’Hérault du Jour La Marseillaise 25/10/2013
Réfléchir sur les pannes qui se sont produites dans le processus d’intégration ou analyser la montée de l’extrême droite à l’échelle locale ne consiste pas à réduire ces problématiques qui se déploient à l’échelle nationale et européenne. Ce peut être au contraire une facon d’ouvrir le débat au plus près du quotidien. Les thèmes de l’exclusion et des discriminations émergent toujours difficilement dans le débat public hexagonal. « Localement, la moitié de la population est raciste, certains maires refusent d’aborder la question pour ne pas fâcher les gens », confie M. Mazauric.
A l’aune de ce témoignage, on mesure la nécessité de voir émerger des mouvements organisés et massifs. Avec le soutien de partis en manque de symbole, le monde associatif s’est depuis longtemps engagé dans ce combat mais de Fadela Amara à Harlem Désir, les premiers concernés ont plus pensé à servir leurs ambitions qu’à s’investir dans une action collective. La marche pour l’égalité de 1983 et « Convergence 84 » avaient ébauché une avancée qui fut minée par la récupération politique et les déceptions consécutives.
Par l’effet d’une méfiance compréhensible, les intéressés on finit par s’isoler dans des revendications communautaires. Il est plus que temps de dépasser le lourd contentieux colonial pour s’inscrire dans la réalité de la diversité. L’effet de loupe porté sur la situation du Gard permet de voir que le racisme s’exerce aussi en direction de l’étranger qui vient s’installer dans la région quelles que soit ses origines. « La peur du FN reste un des principaux ressorts du vote utile », souligne l’historien Alexis Corbière, une raison citoyenne de plus d’évaluer et d’agir en connaissance de cause…
JMDH
Société. Le Gard est le seul département à avoir placé le FN (25,51%) en tête au premier tour de la présidentielle en 2012. La société civile s’engage pour un retour à la fraternité soutenu par le CG 30.
Marion Mazauric créatrice des Editions Au diable Vauvert
Premier festival du livre contre la discrimination
La semaine nationale contre le racisme et les discriminations prend du sens ce week-end à Vauvert avec la première édition du Festival in/différences initiée par les éditions Au Diable Vauvert et la librairie La Fontaine aux livres. « Nous inaugurons le premier salon du livre en France contre la discrimination, indique Marion Mazauric fondatrice des éditions du Diable. Nous le reconduirons chaque année à l’occasion de la semaine contre le racisme en mettant à l’honneur une pratique, une culture ou une population ostracisée. Le thème de cette année c’est le racisme, ce pourrait être les homosexuels ou la tauromachie...» Au cœur de la 2e circonscription du Gard représentée à l’Assemblée par Gilbert Collard, cette initiative s’accompagne de la parution d’un petit livre* qui fait le point sur les raisons locales de la montée du FN. L’ouvrage réunit historiens, sociologues, géographes ou spécialistes de l’extrême droite pour se pencher sur le cas du Gard.
L’historien Raymond Huard rappelle que les mouvements d’extrême droite prospèrent toujours sur un terreau particulier. Des débordements xénophobes d’Aigues-Mortes à l’encontre des ouvriers italiens à la fin du XIXe aux différents succès électoraux du FN dans le Gard à partir des Européennes de 1984 en passant par le mouvement poujadiste qui perce dans les années 50 auprès des rapatriés d’Algérie, le FN a trouvé les moyens de s’ancrer dans le département. Il a en outre bénéficié de l’attitude de deux présidents de région successifs. Jacques Blanc s’alliera directement avec le FN tandis que Frêche s’en est accommodé par calcul politicien.
La géographe Catherine Bernié- Boissard fait le lien entre le rapport des habitants à la ville et leur comportement électoral. Rattachant la récente progression du FN à un ensemble de facteurs : crise économique, délitement des services publics, ruptures des liens sociaux, crise culturelle. Ici comme ailleurs, la ruralité a reculé au profit du péri-urbain. « On ne gère plus le collectif, confirme Marion Mazauric qui vit sur place. On construit des villes entières sans place pour se rencontrer. Le défi du développement démographique suppose un effort mutuel. Les gens qui arrivent doivent respecter la culture et les autres doivent pendre conscience qu’ici les sangs se sont mêlés depuis les Wisigoths ». Au-delà du festival, plus de 75 associations sont mobilisées pour remettre l’intelligence au service de l’humain. Ils ont trouvé une réponse institutionnelle avec le Préfet du Gard Hugues Bousiges qui lance la semaine de la fraternité du 21 au 28 mars. Un réveil ?
« L’année qui vient doit être celle de la reconstruction pour le Mali »
Festival. Fiest’A Sète s’est achevé par une soirée malienne intense où la sagesse de Yacoub Afuni a croisé la détermination sensible de Rokia Traoré.
Nile Rogers avait démarré le 2 août la série de concerts de Fiest’A Sète au Théâtre de la mer sur les chapeaux de roue, Rokia Traoré l’a conclu jeudi 8 août dans le velours. La nouvelle icône de la world musique malienne était précédée sur la scène de son compatriote Yacoub Afuni dont la riche carrière en Afrique de l’Ouest l’a mené au côté de Salif Keita à Bamako notamment, ou à la tête de l’orchestre national du Burkina Faso, les Colombes de la révolution, à la demande de Thomas Sankara en personne. C’est dire si la lutte pour la liberté fait partie de son parcours, mais sa musique puise à la source de l’histoire. Celle qui l’a fait avec le temps, le dépositaire des Griots. Le concert de jeudi à Fiest’A Sète confirme Yacoub Afuni comme un artiste du peuple qui transmet à travers sa musique la poésie et l’histoire qui font l’honneur et la beauté du continent noir.
Liberté et détachement
Sensibilité, finesse, intelligence et beauté de la voix, Rokia Traoré n’appartient pas à leur caste, mais la chanteuse dispose bien des qualités d’un griot naguère au centre de la société. Aujourd’hui en Afrique beaucoup d’entre eux ne remplissent plus leurs fonctions originelles de diffuseur de la culture. On les appelle des artistes. Ce qui peut avoir une connotation négative dans la bouche des détenteurs du pouvoir. Rokia Traoré se place sur scène au centre d’un triangle musical dont les angles vont de l’influence occidentale rock pour la guitare, la basse et la batterie, à l’histoire traditionnelle africaine pour le n’goni, les choeurs et la danse. Ajoutez à cela l’influence profonde des grandes dames du jazz et du blues noir américain que sont Ella Fitzgerald et Billie Holiday – dont elle reprend un émouvant « Gloomy sunday »- vous avez la puissance d’une artiste pour qui la modernité ne signifie aucunement renier ses racines, tout au contraire.
« Je ne savais pas que j’aurais l’opportunité de faire de la musique un jour » vient-elle de confier à un journaliste de RFI. Cette opportunité, elle se l’est désormais appropriée pour léguer aux générations futures la verve et l’énergie de l’espoir. « L’année qui vient doit être celle de la reconstruction pour le Mali », lâche-t-elle sur scène avec une liberté et un détachement à l’égard des luttes sanglantes pour la conquête du pouvoir. Cette distanciation ramène à la conscience historique et à la lutte contre toutes oppressions. Quel que soit le résultat des élections maliennes qui devrait nous parvenir dans les prochaines semaines, la chanteuse s’affirme avec force et conscience pour un Mali culturellement riche et indivisible.
Disco revival au Théâtre de la Mer avec Nile Rogers
Festival. Fiest’à Sète maintient le cap sur le meilleur des musiques du monde. Le festival rejoint ce soir le Théâtre de la Mer de Sète pour 7 soirées d’exception.
Après la semaine nomade et gratuite, le festival des musiques du monde poursuit sa 17ème saison en s’installant ce soir dans le légendaire Théâtre de la Mer. Jusqu’au 8 août on y verra des pointures mondiales venues des quatre coins de la planète. Les soirées offrent deux concerts programmés avec un savoir faire qui pousse à la rencontre inédite, voire à la confrontation.
Demain Orlando Maraca Valle et son rutilant équipage cubain seront mêlés à la sauce piquante du francocubain Sergent Garcia. Dimanche le grand maître malien de la guitare n’goni, Bassekou Kouyate partagera la scène avec la légende vivante du blues caraïbe Taj Mahal.
Lundi, le festival nous transportera au brésil avec la samba João Bosco, qui fêtera à Sète ses 40 ans de carrière et la Bossa muffin de Flavia Coelho. Mardi 6 août, ce sera le contraste entre le rock épicé de Rachid Taha et les fines lames du ‘oud du trio palestinien
Joubran. Mercredi 7 août, l’Europe centrale débarque avec les cinq musiciennes de Rodinka et l’incontournable Goran Bregovic pour un concert volcanique.
La fiesta touchera à son terme le 8 août avec une soirée malienne plus enthousiasmante que le résultat des élections, réunissant la formation de l’excellent chanteur et guitariste Yacoub Afuni et la lady Rokia Traoré.
Ce soir, c’est chic
L’ouverture de Fiest’à Sète au Théâtre de la mer promet d’être tonitruante ce soir avec le groupe culte des années disco funk, Chic et son créateur Nile Rodgers. De Bowie à Madonna, en passant par la reine Diana Ross, le bonhomme est à l’origine des plus gros tubes planétaires des années 70 et 80. Avec son propre groupe, il cartonne avec le hit Le fric c’est chic qui fait un tabac et des émules.
Parmi eux, les membres de Daft Punk, avec lesquels il a collaboré sur leur dernier album.
Le disco s’est éteint officiellement à la fin des années 70 mais tel le phénix, il ne cesse de renaître de ses cendres. Imprégné de l’esprit soul funk, Nile Rogers qui a fait ses classes musicale à Harlem, le sait mieux que quiconque.
JMDH
Source : L’Hérault du jour 02/08/2013
Le Show plaisir
Le Théâtre de la mer archi comble, le public très éclectique en liesse, debout de la première note à la dernière. vendredi, le concert de Nile Rodger s’est inscrit dans les annales de Fiest’A Sète comme une soirée légendaire.
Au lendemain de cette prestation, on se dit que le disco est bien parti pour reprendre d’assaut les scènes mondiales avec ses chanson entraînante et irrésistiblement dansante. Un signe des temps sans doute qui s’interprète par le désir de légèreté et de partage. A ne pas confondre avec un énième retour du disco recyclé, type orchestre de baloche ou nostalgie délavée sur TF1, avec Nile Rogers on touche à l’original. Le disco du
guitariste culte est enraciné dans le soul et le funk Il lui suffit de quelques riffs de guitare et la machine à faire danser la planète se lance.
Sur scène, le band aligne les pointures : deux claviers, batterie, basse, sax, trompette, sans parler des envoûtantes chanteuses qui s’approprient les tubes de Diana, Ross , Madonna ou Sheila comme on savoure les glaces pendant la canicule. Toutes les qualités du show à l’américaine sont mobilisées, contact, précision, sens de l’enchaînement et de la relation.
En 1h40 chrono. ce diable de Rogers vous balances un parcours discographique à en danser sur les mains. 40 ans de tubes, et toujours, l’esprit de libération par la fête et le goût de vivre. Comme dirait Franklin «Respect».
JMDH
Source : La Marseillaise 06/08/2013
Roi du blues et griot mandingue
Fiest’A Sète. Intense rencontre entre Bassekou Kouayate et Taj Mahal.
Taj Mahal aux sources
On pourrait comparer le festival Fiest’A Sète à un grand clavier de couleurs. A chaque soirée sa couleur projetée en phase avec la musique. Dans cette perspective, le concert de dimanche réunissant Bassekou Kouayate & N’Goni Ba et Taj Mahal aura été lumineux.
L’idée de mêler des couleurs de base comme celle de la musique ancestrale mandingue avec le blues enrichi de Taj Mahal a pris tout son sens au sein du festival et de l’histoire de la musique. Sur la scène du théâtre de la mer, le griot malien Bassekou Kouayate a magnifié la culture mandingue avec son orchestre qui fait la part belle aux n’goni. Un instrument traditionnel et sacré dont il a poussé l’exploration hors des gammes classiques en l’utilisant comme une guitare pour s’accorder au blues de Taj Mahal.
Un grand moment de partage entre les deux musiciens qui restera gravé dans la tête des spectateurs. Originaire du Bronx, le blues man Taj Mahal est connu pour avoir remonté les
sources de la black music du delta du Mississipi jusqu’à la boucle du Niger, source sahalienne du blues.
Il n’en a pas fallu beaucoup pour que les intonations onduleuses et nasales de ses frères maliens le poussent à faire le lien entre la musique mandingue et sa pratique ultra roots du blues.
Messiaen dont la musique se veut un vitrail sonore, a approfondi le rapport son couleur. Il pensait la musique comme un perpétuel dialogue entre l’espace et le temps, entre le son et la couleur, ce dialogue a abouti dimanche à une unification, qui restera un moment d’exception de l’édition 2013.
Pour trouver un pendant au proverbe peul qui dit « Un monde sans griot serait fade comme du riz sans sauce », on pourrait avancer qu’une édition de Fiest’A Sète sans rencontre magique serait comme un arc en ciel en noir et blanc.
A chaque touche du clavier une couleur, elles promettent encore d’être chaudes ce soir avec le dernier concert qui réunit Yacoub Afuni et Rokia Traore.
JMDH
Source : La Marseillaise 08/08/2013
Rodinka : Petite famille et grands horizons
Fiest’A Sète. Un groupe de cinq femmes, deux mères et leurs filles originaires de Prague suivi de Goran Bregovic.
Elles se nomment Drahomira Hejna, Stania, Dita, Kristyna, Mariana et se connaissent par coeur. Elles forment le groupe Rodinka qui sera demain sur la scène du Théâtre de la Mer. Originaires de la région de Prague, ces cinq femmes et filles de la même famille, vont rythmer la soirée Europe centrale du festival de leurs chants magnifiques et contrariés par les incertitudes de la vie et du voyage.
Mélodie de l’errance
La propre histoire des membres du groupe se nourrit à la source d’un élan poétique propre à l’exil. Départ de Pragues en 1983, pour Drahomira qui obtient avec son mari l’asile politique. Sa soeur Hedja la rejoint dans l’Aude en 1997, après l’ouverture des frontières. Elles s’installent ensemble entre Limoux et Carcassonne et forment avec leur mari le groupe Si Zivot qui signifie « La vie des chiens ». L’aventure musicale se poursuit pendant huit ans avant d’être interrompue par un décès et un accident de la vie qui mettra fin au groupe et à la présence masculine au sein des foyers.
» On avait arrêté Si Zivot mais pas la musique, se souvient Stania, ma soeur et moi on continuait à jouer avec nos enfants et les invités de passage à la maison. Dès leur plus jeune âge les trois filles d’Hejna et Stania sont initiées aux chants slaves, tziganes et klezmer des Juifs ashkénazes, à la musique de cet ailleurs indéfinissable au parfum empoisonné de la nostalgie. Des amis qui partageaient parfois nos soirées nous ont encouragé à reformer un groupe. C’est ainsi que l’on a créé Rodinka avec ma soeur et nos filles. »
Rodinka veut dire petite famille », explique Stania. Le fait d’être un groupe féminin s’avère plutôt un atout pour le groupe qui constitue le coeur de son répertoire autour du folklore traditionnel tchèque.
Chants traditionnels
La musique tchèque a des liens particuliers avec la musique traditionnelle de Bohême, de Moravie (anciennes régions austrohongroises) et de Slovaquie. Malgré des frontières changeantes, son caractère central européen s’est toujours affirmé. « Nos chansons parlent du quotidien, des principaux événements de la vie : l’amour, le travail, la jalousie, la tristesse et la joie… Nous nous inspirons aussi des chants traditionnels russes, et tsiganes qui sont très profonds. Le public qui ne comprend pas les paroles ressent le caractère émotif et le coeur qu’il y a dans tout ça. Ce sont souvent des histoires tristes, mais il y a toujours la beauté de la vie. »
Dans ces chansons dont beaucoup font référence aux traditions rurales, le rôle des femmes demeure très codifié. « Nous sommes un groupe de femmes, mais nous ne sommes pas féministes. Moi qui suis née en 1957, j’appartiens à la génération des femmes au foyer. C’est difficile de se débarrasser de ça. On a été élevé dans une société où les filles étaient à marier puis destinées à servir leur mari. Ne pas se marier signifiait rester dans l’insécurité ou d’être à la charge de son frère. Les choses sont bien-sûr différentes pour nos filles qui vivent ici. Au pays aussi, cela a évolué.»
Stania confie quelques inquiétudes sur le destin de son peuple dans l’Europe d’aujourd’hui, mais elle se refuse à parler de politique. « Petite on m’a obligé à parler le russe. J’avais la caserne juste derrière mon jardin. Cela ne m’empêche pas aujourd’hui de chanter les chansons traditionnelles russes que je trouve très belles.»
Jean-Marie Dinh
Source La Marseillaise 06/08/2013
La musique reflète l’état du monde
Flavia Coelho partage la scène avec Joao Bosco
Festival. Depuis 17 ans Fiest’A Sète dresse l’espace de la «géomusique» en provocant des rencontres inatendues au Théâtre de la mer. A vos calendriers…
C’est sous les auspices d’un vers rimbaldien que le directeur de Fiest’A Sète, José Bel, présente l’édition 2013 du festival. « On n’est pas sérieux, quand on a dix sept ans ». Il est vrai que goût du risque et du voyage, sont des composantes, pour ne pas dire des artères de cette grande fête des musiques du monde.
Pour José Bel, la logique de la programmation est une forme de cuisine expérimentale qui
suppose une bonne connaissance des aliments de base que l’on mêle pour en tirer les meilleurs saveurs. La démarche requiert une dose certaine d’intuition et le résultat n’est jamais assuré. Parfois il est au rendez-vous en terme artistique mais l’affiche n’a pas réussi à convaincre suffisamment de spectateurs.
C’est un paramètre de poids pour un festival qui assure 75% de son budget sur fonds propres mais l’esprit d’ouverture et la nature authentique de la fête qu’il s’agit d’offrir aux spectateurs, ne font pas partie des variables d’ajustement. L’équipe de passionnés ne donne pas dans la mode facile, elle tente d’être en avance, en gardant le sens d’une vraie programmation artistique.
Ce choix suppose de jouer sur des équilibres subtils entre des artistes disposant d’une grande notoriété, d’autres ayant confirmé leur valeurs et une ouverture sur les étoiles émergentes. Parmi les historiques, on attend cette année trois météores avec le monument de la musique afro américaine Nile Rodgers, le Brésilien Joao Bosco et le blues man précurseur de la world music Tal Mahal.
Dans le menu des artistes confirmés on assistera au retour de Goran Bregovic, aux premiers pas de Yacoub Afuni en solo au côté de la lumineuse Rokia Traore pour une soirée malienne sans Trierweiler. Raul Castro ayant décliné, Sergent Garcia sera de la partie cubaine. A noter également un cocktail oriental sucré salé composé du trio palestinien Joubran et de Rachid Taha.
Comme chaque année durant la première semaine, du 20 juillet au 1 er août, le festival distillera les couleurs du monde dans le Bassin de Thau avec des concerts gratuits à Poussan, Balaruc, Marseillan et Sète. Pour toutes ces raisons, les 400 adhérents de l’association Métisète le savent, Fiest’A Sète n’est pas un festival comme les autres. Il est attendu parce qu’il convoque toujours l’inattendu.