La spécificité de Jérusalem pourrait servir de modèle politique à l’avenir, fait valoir la philosophe Donatella Di Cesare dans Corriere della Sera :
«Unique, indivisible, inappropriable, irréductible : Jérusalem est la ville qui se soustrait à l’ordre des Etats-nations. Elle échappe aux répartitions – elle les transcende et les proscrit. Toutes les tentatives visant à fractionner et segmenter Jérusalem, dans une optique d’Etat-nation centralisé, ont échoué. Le naufrage de la diplomatie, et, plus encore, celui d’une politique qui procède avec mesure et calcul. Jérusalem ne divise pas, elle unit. … C’est précisément parce qu’elle constitue ce roc théologique auquel se heurte la politique que Jérusalem peut devenir un modèle supra-étatique et l’incubatrice de relations éclairées entre les peuples.»
Ce dimanche 10 décembre, le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu est reçu à l’Elysée par le président Macron. Les deux hommes participeront à un déjeuner de travail. Une visite qui intervient en pleine crise au Proche-Orient suite à la déclaration du président américain Donald Trump sur le statut de Jérusalem.
Benyamin Netanyahu avait déjà été invité au mois de juillet pour commémorer le 75e anniversaire de la rafle du Vel d’Hiv, en France, sous le régime de Vichy. Le président Macron et le Premier ministre israélien avaient alors multiplié les gestes d’amitié. Benyamin Netanyahu a d’ailleurs déclaré samedi qu’il partait rencontrer son «ami», le président Macron, c’est le terme utilisé. Les deux hommes se sont d’ailleurs téléphoné à plusieurs reprises depuis le mois de juillet.
Cette fois, c’est d’abord de l’Iran dont il devrait être question. Benyamin Netanyahu martèle dans chaque discours à l’étranger que c’est la principale menace sécuritaire qui pèse sur Israël. Sur la table, donc, ce dimanche à Paris, le programme balistique de Téhéran et sa politique régionale au Liban et aussi en Syrie.
Mais un autre sujet est venu s’intercaler dans cet agenda déjà chargé : la reconnaissance de Jérusalem par le président américain, comme capitale officielle d’Israël. Une décision saluée par Benyamin Netanyahu et que le chef de l’Etat français n’a pas condamné mais immédiatement qualifiée de « regrettable ».
Paris souhaite que son hôte réitère l’engagement qu’il avait pris de travailler à la solution à deux Etats, entérinée par l’ONU. Solution qui prévoit la coexistence pacifique d’Israël et de la Palestine dans les frontières de 1967, avec Jérusalem comme capitale commune.
Pour Frédérique Schillo, spécialiste d’Israël et auteure de La politique française à l’égard d’Israël (1946-1959), la diplomatie française a une carte à jouer en ce moment au Proche-Orient. « Les Français ont de vraies chances à saisir. Parce que la France, finalement, est peut-être plus présente sur le terrain que ne le sont les Américains. Les Américains ont déserté le terrain moyen-oriental. Or, les Français sont présents. C’est une présence historique au Liban et ils sont présents aussi via la force de la FINUL, qui est une force d’interposition entre le Hezbollah et Tsahal. Donc, Netanyahu a tout intérêt à prendre en considération la position française ». Et ce d’autant que concernant le Hezbollah, il y a entre la France et Israël une totale convergence de vue.
« Macron peut saisir une opportunité, parce qu’en effet, la France a toujours souhaité promouvoir la solution à deux Etats, analyse l’historienne. Elle est la première à dire qu’il faut à la fois un futur Etat palestinien et un Etat d’Israël reconnu et sûr dans ses frontières », explique-t-elle.
Selon Frédérique Schillo, la prise de position américaine comporte le risque pour Washington de perdre une carte maîtresse : celle de l’apparente neutralité. Une situation dont le chef de l’Etat français peut éventuellement profiter, bien que sa marge de manœuvre soit limitée.
« Le président Macron a une carte à jouer, celle du rôle de médiateur que les Français ont toujours voulu mettre en avant. Le problème c’est : quelles sont ses possibilités ? Elles sont en réalité assez limitées. On en restera beaucoup aux symboles », conclut-elle.
Les attentes pour les Palestiniens
Le militant Issa Amro, défenseur des droits de l’homme palestinien de Hébron, où il organise une résistance pacifique à l’expansion de la colonisation, espère pour sa part que le président français prendra une position claire en faveur du processus de paix et d’un Etat palestinien.
« Nous avons besoin d’un grand pays tel que la France pour nous donner de l’espoir et nous soutenir pour poursuivre le processus de paix. Trump a détruit le processus de paix, on a besoin que d’autres pays s’engagent pour défendre les droits des Palestiniens, en respectant le droit international, et le consensus et qu’ils reconnaissent Jérusalem-Est comme la capitale de la Palestine. »
« Je suis sûr que de nombreux pays emboiteront le pas de la France pour reconnaitre la Palestine en tant qu’Etat. Cela nous aiderait et cela atténuerait les réactions violentes contre la guerre que Trump a lancées contre la paix. J’espère que Macron dira à Netanyahu qu’il ne peut pas faire ce qu’il veut, ou ce qu’il croit au nom de son idéologie fanatique et extrémiste. »
L’ex-patron du groupe LafargeHolcim, Eric Olsen, à Paris, le 7 mai 2015 Photo ERIC PIERMONT. AFP
L’ancien dirigeant du cimentier doit répondre des chefs de financement d’une entreprise terroriste et de mise en danger de la vie d’autrui.
L’ex-patron du groupe Lafarge Holcim, Eric Olsen, a été mis en examen dans la soirée du jeudi 7 décembre dans l’enquête sur le financement par le cimentier en 2013 et 2014 de plusieurs groupes djihadistes en Syrie, dont l’organisation Etat islamique (EI).
M. Olsen, 53 ans, DRH puis directeur général adjoint du groupe français Lafarge à l’époque des faits, avant de devenir directeur général après la fusion avec le Suisse Holcim, doit répondre des chefs de « financement d’une entreprise terroriste » et de « mise en danger de la vie d’autrui ». Il a été placé sous contrôle judiciaire.
Il était entendu en garde à vue mercredi avec deux autres ex-responsables du groupe : Bruno Lafont, PDG de Lafarge de 2007 à 2015, et Christian Herrault, ancien directeur général adjoint chargé de plusieurs pays dont la Syrie. Les gardes à vue de MM. Lafont et Herrault sont toujours en cours.
Violation de l’embargo décrété par l’UE
Le cimentier est mis en cause notamment pour avoir acheté du pétrole à l’EI, en violation de l’embargo décrété par l’Union européenne (UE) en 2011, et pour lui avoir remis de l’argent par le biais d’un intermédiaire, afin de continuer à faire tourner son usine de Jalabiya, située dans le nord de la Syrie.
De juillet 2012 à septembre 2014, la filiale syrienne (Lafarge Cement Syria, LCS) a versé environ 5,6 millions de dollars à diverses factions armées dont plus de 500 000 dollars à l’organisation d’Abou Bakr Al-Baghdadi, d’après un rapport du cabinet américain Baker McKenzie.
Il est aussi reproché à LCS de ne pas avoir assuré la sécurité de ses employés syriens, restés seuls sur place alors que la direction de l’usine avait quitté le pays à l’été 2012. Le 1er décembre, trois de ses anciens cadres, dont deux ex-directeurs du site de Jalabiya, ont été mis en examen.
« Economie de racket »
Les enquêteurs cherchent à savoir si la direction du groupe en France était au courant de la situation. Eric Olsen assistait aux réunions du comité de sûreté et a « participé pleinement aux discussions concernant la sécurité de l’usine LCS », soulignait le cabinet Baker McKenzie.
Christian Herrault, qui a reconnu début 2017 que le groupe avait été victime d’une « économie de racket », a assuré « avoir régulièrement informé Bruno Lafont » et que ce dernier « n’avait émis aucune objection à l’époque », d’après ce document. Le scandale a éclaté en 2016, un an après la fusion avec Holcim.
M. Olsen, nommé directeur général de LafargeHolcim en avril 2015, a démissionné deux ans plus tard, tandis que Bruno Lafont n’a pas sollicité le renouvellement de son mandat d’administrateur et a aussi quitté la société. Sollicité, le groupe LafargeHolcim n’a pas souhaité « commenter l’enquête en cours ».
La décision, mercredi 6 décembre, du président américain, Donald Trump, de reconnaître unilatéralement Jérusalem comme capitale de l’Etat d’Israël a déclenché une vague de critiques de la communauté internationale et fait craindre une nouvelle Intifada au Proche-Orient. Cette vague de réprobation et ces inquiétudes occupaient de nombreuses « unes » de la presse internationale, jeudi.
New York Times, Washington Post, Boston Globe, Financial Times… A des degrés divers, les principaux titres de la presse américaine faisaient état de leurs préoccupations ou de leur scepticisme quant à une décision risquant « d’interrompre les efforts de paix ».
Le New York Times déplore l’isolement accru de la diplomatie américaine que traduit cette décision et souligne le risque d’un embrasement supplémentaire de la région auquel elle peut conduire : « Trump affirme que son plan pour Jérusalem est un pas en avant en direction de la paix, mais en pratique, il place le Moyen-Orient au bord de l’explosion, écrit le quotidien. La décision de Trump isole les Etats-Unis sur l’un des sujets diplomatiques les plus sensibles. »
Mais le New York Times insiste aussi, dans un autre article,sur ce que cette décision traduirait des liens du président américain avec certains de ses soutiens :
« M. Trump admet que sa décision est provocatrice. Mais comme il l’a fait en se retirant de l’accord de Paris ou en refusant de certifier l’accord avec l’Iran, il se délecte en jouant son rôle favori consistant à défier l’orthodoxie en matière de politique étrangère au nom des intérêts de ceux qui l’ont élu. »
« Pour Donald Trump, le statut de Jérusalem est plus un impératif politique qu’un dilemme diplomatique. Entre ses partisans [chrétiens] évangéliques et pro-israéliens (…) et des dirigeants arabes menaçant son propre plan de paix, le président s’est rangé à l’avis de ses partisans », écrit le quotidien.
Si, de prime abord, le Washington Post, dans son éditorial, veut voir « un certain bon sens » dans la décision prise par M. Trump, c’est pour, aussitôt, relever que ce dernier minimise les risques d’« un embrasement au Moyen-Orient et au-delà » et, qu’en adoptant une stratégie « peut-être efficace auprès de sa base électorale, ainsi que de nombreux Israéliens », il prend « un gros risque dans le seul but de marquer des points politiquement ».
« En pratique, le gouvernement israélien siège à Jérusalem-Ouest depuis 1949, et aucune solution impliquant la création d’un Etat palestinien ne pourra changer cela », rappelle le quotidien. C’est d’ailleurs ce qui fait dire à M. Trump que cette reconnaissance n’est « ni plus ni moins que la reconnaissance d’un état de fait ». Le Washington Post nuance ensuite :
« Mais en même temps, les présidents Bill Clinton, George W Bush et Barack Obama avaient de bonnes raisons de se retenir de franchir ce pas, même si, comme M. Trump, ils avaient promis durant leur campagne de transférer l’ambassade américaine à Jérusalem. Ils ont estimé que cette étape somme toute symbolique pourrait saper la diplomatie américaine dans tout le Moyen-Orient, ainsi que leurs espoirs de trouver un arrangement entre Israéliens et Palestiniens — et potentiellement déclencher des violences, y compris contre des ressortissants Américains.
REVUE PRESSE Moyen Orient
Dans un article intitulé « Trump n’a pas tué le processus de paix, il a juste annoncé sa mort », le quotidien israélien Haaretz estime que « la reconnaissance de Jérusalem comme capitale israélienne par les Etats-Unis a fait voler en éclats l’illusion que, si les problèmes centraux du conflit israélo-palestinien pouvaient être résolus, le conflit prendrait fin ».
Dans un autre article intitulé « Des Palestiniens expriment leur désespoir face à la décision de Donald Trump sur Jérusalem », le journaliste Nir Hasson décrit la profonde désillusion des Palestiniens de Jérusalem-Est, se sentant abandonnés de tous depuis longtemps et pour qui la déclaration de M. Trump n’est qu’une goutte d’eau de plus : « Il semble que les attentes des Palestiniens vivant à Jérusalem soient si minces que rien ne peut les choquer. »
Dans le monde arabe, les alliés de Washington sont tiraillés entre leur puissant partenaire et une opinion publique hostile à Israël. L’Egypte, l’Arabie saoudite et la Jordanie, alliés clés des Etats-Unis dans la région, qui ont établi des liens géopolitiques ou de dépendance financière avec Washington, se retrouvent dans une position délicate.
En Jordanie, pays gardien des lieux saints musulmans à Jérusalem, où le gouvernement a dénoncé la décision de M. Trump comme « une violation du droit international et de la charte des Nations unies », le quotidien anglophone Jordan Times estime que « déplacer l’ambassade américaine à Jérusalem déclencherait un bouleversement régional ».
De son côté, le journal libanais Al-Akhbar, favorable au Hezbollah, titrait en « une » jeudi « Mort à l’Amérique », d’après la traduction de Reuters, réaction la plus vive d’une presse libanaise déjà très critique envers la décision de Trump. Al-Akhbar la qualifie de « Nouveau Balfour de l’Amérique », en référence à la déclaration Balfour, par laquelle le Royaume-Uni évoquait il y a un siècle l’établissement d’un foyer national juif au Proche-Orient. Le journal écrit :
REVUE DE PRESSE Europe
Trump enterre-t-il le processus de paix israélo-palestinien ?
La communauté internationale a réagi avec inquiétude à la décision de Trump de reconnaître Jérusalem comme la capitale de l’Etat hébreu. Tandis que la France et la Grande-Bretagne ont sollicité une réunion extraordinaire du Conseil de sécurité des Nations unies, l’Arabie Saoudite a appelé Washington à revenir sur sa décision. Seul Israël a salué l’initiative américaine. La presse européenne redoute que le président américain ne ravive le conflit israélo-palestinien.
A l’unisson des gouvernements européens, dont beaucoup ont condamné la décision de M. Trump, de nombreux titres européens dénoncent celle-ci, pointent l’isolement de Washington et affichent leurs inquiétudes quant aux conséquences possibles.
« Trump rompt l’équilibre international », pour El Pais, en Espagne ; « Trump isolé sur Jérusalem », pour le Corriere della Sera, en Italie ; « Donald Trump ébranle le Proche-Orient », pour Le Soir, en Belgique ; « Explosion de colère après que Trump a déclaré Jérusalem capitale d’Israël », pour Le Guardian, au Royaume-Uni…
Et le quotidien britannique de s’inquiéter dans une tribune : « L’erreur de Trump sur Jérusalem est un désastre pour le monde arabe… et les Etats-Unis. (…) Maintenant, il a annoncé que son administration reconnaîtrait Jérusalem comme capitale d’Israël, faisant marche arrière sur plusieurs décennies de politique américaine. Ce nouveau pas va engendrer de multiples conséquences négatives, impossibles à anticiper pour la plupart. »
Un médiateur devenu pyromane
El Mundo y voit une initiative irresponsable et stupide :
«Un an passé à la tête de la superpuissance mondiale et Trump n’a toujours pas compris que sa principale responsabilité consistait à résoudre les conflits, du moins à ne pas en créer de nouveaux. Sa décision de reconnaître Jérusalem comme la capitale d’Israël est l’une de ses pires erreurs en date ; elle pourrait raviver les conflits au Proche-Orient et renvoyer sine die la potentielle reprise des pourparlers de paix entre Israël et les Palestiniens. Au titre de puissance garante, les Etats-Unis ont toujours assuré le rôle d’arbitre et de médiateur dans le dialogue sans fin entre les deux parties. S’ils se rangent du côté de Tel-Aviv, ils perdront toute leur influence et aggraveront la situation.»
Une violation du droit international
Cette décision entérine la colonisation israélienne, estime Aftonbladet :
«La politique de colonisation réduit mètre carré par mètre carré la marge de négociation. Ceci vaut notamment pour Jérusalem, dont la partie palestinienne est étouffée par les colonies. Sans accord préalable concernant Jérusalem, une solution à deux Etats est impossible. La décision de Trump de transférer l’ambassade américaine et de reconnaître les revendications israéliennes revient à avaliser la politique de colonisation. Cela signifie que les Etats-Unis acceptent et entérinent des violations du droit international. Dans le pire des cas, l’initiative entraînera un regain de violence ; dans tous les cas, l’étiolement d’une lueur d’espoir déjà faible et la perte d’influence des Etats-Unis dans la région.»
Trump alimente le terrorisme
La décision de Trump fait le jeu des islamistes, déplore Tages-Anzeiger :
«La situation risque de s’envenimer, comme si cette région en crise ne souffrait pas déjà assez. Les Palestiniens ont annoncé ‘trois jours de colère’, le Hamas a menacé de commettre des attentats. … Si l’on assiste à un nouveau soulèvement palestinien, le processus de paix ne sera plus bloqué, il sera tout simplement mort. Au profit de Daech, d’Al-Qaida et de tous les terrorismes islamistes. Jérusalem, al-Quds pour les Arabes, est la troisième ville sainte après La Mecque et Médine, surtout pour les sunnites. De même que l’interdiction d’entrée sur le territoire américain visant les musulmans, le déménagement de l’ambassade américaine est ‘instrumentalisable’ à souhait par la propagande. Ce qui aurait aussi des conséquences pour l’Europe. Une fois de plus, Trump hypothèque la sécurité internationale. »
Une bonne décision
Die Welt est favorable à l’initiative américaine :
«Les Israéliens avaient construit leurs bâtiments gouvernementaux alors que la ville était encore divisée et alors qu’ils n’en occupaient que la partie occidentale – la partie Est étant à l’époque contrôlée par la Jordanie. Le statut de Jérusalem en tant que capitale israélienne est donc plus ancien que la guerre des Six jours de 1967, au cours de laquelle Israël avait également conquis l’Est de la ville. Un tel acte de reconnaissance ne préempte d’aucune façon le résultat des négociations de paix entre Israël et les Palestiniens. Rien n’empêche les Palestiniens de faire de Jérusalem-Est leur capitale, dans la mesure où les deux parties s’entendent sur cette solution.»
Washington galvaude son leadership
Le quotidien Yeni ?afak craint que cette décision n’attise d’autres conflits :
«Le monde islamique est très en colère contre le gouvernement américain. … L’idée d’un transfert de l’ambassade américaine à Jérusalem n’est pas nouvelle, et ce ne sera pas la dernière décision de ce type dans le cadre de la politique palestinienne du gouvernement Trump. Il ne serait pas surprenant non plus que l’on se mette bientôt à envisager des négociations sur une ‘solution à un Etat’. La crise se poursuit dans la région, elle s’institutionnalise. On veut manifestement mettre en œuvre au Proche-Orient la stratégie du ‘chaos créatif’, comme l’avaient nommée la ministre des Affaires étrangères de George W. Bush [Condoleezza] Rice et les penseurs néoconservateurs. Mais ce ‘chaos créatif’ se mue lentement en incendie qui cerne les Etats-Unis et menace de consumer leur hégémonie internationale.»
Un front uni contre l’Iran ?
Si le monde arabe tolérait la décision de Trump, alors il n’y aurait plus d’obstacle à une alliance contre Téhéran, juge Lucia Annunziata, rédactrice en chef du portail Huffington Post Italia :
«Le gouvernement israélien est convaincu qu’après ces ultimes années de guerres intestines dans le monde arabe, une bonne partie de l’opinion publique estime désormais qu’Israël est en fin de compte un bon allié, ne serait-ce que dans une perspective utilitaire, pour relever les défis du terrorisme et de l’Iran. Et donc qu’une nouvelle partition incluant Jérusalem est possible, transformant l’Etat hébreu en nouvel atout dans la région. Avec l’appui, peut-être, du prince héritier saoudien, le réformiste Ben Salmane, qui partage aujourd’hui avec Israël la volonté et la nécessité de mettre un frein à l’Iran, au nom de la revanche sunnite contre les chiites, quel que soit le prix à payer.»
Depuis le 7 Juillet 2017, la France exprime son profond désaccord avec l’adoption à l’ONU du Traité d’interdiction des armes nucléaires, le TIAN. C’est un choix de vision diplomatique. Mais refuser d’envoyer un ambassadeur de premier rang à la cérémonie du prix Nobel de la Paix, c’est une erreur sans nom !
Le 10 décembre, le Comité Nobel norvégien va attribuer le prix Nobel de la paix à la campagne internationale pour abolir les armes nucléaires (ICAN). Ce collectif d’associations recevra ce prix pour son travail de sensibilisation sur les conséquences humanitaires catastrophiques de toute utilisation d’armes nucléaires ainsi que pour son initiative inédite visant à obtenir l’interdiction de ces armes au moyen d’un traité.
Il est de coutume que la France, (comme les britanniques et les Etats-Unis) envoie un ambassadeur de haut rang, pour représenter le président de la république. Or cette année, Paris (avec Washington et Londres) a officiellement annoncé que cela ne sera pas le cas, un « simple » chargé d’affaire sera présent.
C’est une faute grave et démontre chez les acteurs de la politique étrangère de ces 3 Etats à quel point ils sont dans un aveuglement complet :
Une faute à l’égard du Comité Nobel et vis-à-vis de tous les récipiendaires de ce prix ; Ce comité qui, il ya tout juste 100 ans attribuait cette récompense au Comité Internationale de la Croix Rouge.
Une faute de rang et d’honneur. La France qui se dit promouvoir le multilatéralisme (discours du président Macron à l’ONU), protectrice des Droits de l’homme, respectueuse de la démocratie remet tous simplement en cause ses fondements.
Une faute dans le cadre de la crise nord-coréenne. Car, que signifie ce message. Il faut avoir et conserver des armes nucléaires ? Face cela, il est facile d’imaginer la réaction nord-coréenne dans une future réunion de l’ONU…
Une faute vis-à-vis de ses propres engagements réalisés à de multiples reprises en faveur du désarmement nucléaire à travers des traités internationaux et des résolutions du Conseil de sécurité. En effet, cet acte est bien une protestation contre une ONG qui travaille pour promouvoir le désarmement nucléaire.
Une faute vis-à-vis des 122 Etats à travers la planète qui ont adopté en juillet le Traité d’interdiction des armes nucléaires. Comment ces Etats vont-ils pouvoir croire les diplomates français qu’ils sont en faveur du désarmement, si ils boudent la cérémonie du prix Nobel !
La France joue depuis 2013 le jeu de la chaise vide. Après avoir été absente des trois conférences (2013 et 2014) intergouvernementales sur les conséquences humanitaires des armes nucléaires ; des Groupes de travail de l’ONU sur le désarmement nucléaires (2013 et 2016) ; de la négociation du traité d’interdiction (mars, juin, juillet 2017) ; Elle ne sera donc pas (vraiment) présente ce 10 décembre.
A ceux qui s’interrogent pourquoi la France perd de son influence dans le monde, la réponse se trouve dans ces absences, le non respect de ces engagements et ce message d’un autre âge que le Président Macron et son ministre des affaires étrangères Le Drian viennent d’envoyer ….