Festival de Cannes : la Palme d’or pour Ken Loach

4924247_7_5c38_le-realisateur-ken-loach-et-sa-palme-d-or-au_720110bb96c2ca2c10c2a5ef75358567

 

 

 

 

 

 

 

Au terme de dix jours de projections de films en tous genres et de montées des marches sur fond de flashs et de paillettes, le jury, présidé par l’Australien George Miller, le réalisateur de la saga Mad Max, a fait son choix, récompensant le réalisateur britannique Ken Loach avec la Palme d’or pour son film Moi, Daniel Blake. Jean-Pierre Léaud, lui, a reçu une Palme d’honneur pour sa carrière, au cours de la cérémonie de clôture du 69e Festival de Cannes, présentée par l’acteur Laurent Lafitte.

 

La Palme d’or à Moi, Daniel Blake, du Britannique Ken Loach

Six fois primé à Cannes, où il avait déjà reçu la Palme d’or en 2006 pour Le vent se lève, Ken Loach, 79 ans, raconte l’histoire d’un menuisier qui se bat pour obtenir l’aide sociale. Moi, Daniel Blake n’est pas une satire d’un système absurde. Ken Loach n’est pas un humoriste, c’est un homme en colère, et le parcours de l’ouvrier privé de travail et de ressources est filmé avec une rage d’autant plus impatiente qu’elle est impuissante.

Il a profité de son temps de parole, lors de la cérémonie de clôture, pour attaquer « les pratiques néo-libérales qui ont entraîné dans la misère des millions de personnes, de la Grèce au Portugal, avec une petite minorité qui s’enrichit de manière honteuse ».

 

Director Xavier Dolan, Jury Prize award winner for his film "Mommy", poses during a photocall at the closing ceremony of the 67th Cannes Film Festival in Cannes Le Grand Prix à Juste la fin du monde, du Canadien Xavier Dolan

Le réalisateur canadien, extrêmement ému, a notamment déclaré : « Tout ce qu’on fait dans la vie, on le fait pour être aimé, pour être accepté. Je tournerai toute ma vie des films, aimé ou non ». Il a terminé en citant Anatole France : « Je préfère la folie des passions à la sagesse de l’indifférence ».

 

Le prix de la mise en scène ex aequo au Français Olivier Assayas (pour Personal Shopper) et au Roumain Cristian Mungiu (pour Baccalauréat)

 Le réalisateur Olivier Assayas au 69e Festival de Cannes, le 22 mai 2016. Le réalisateur Olivier Assayas au 69e Festival de Cannes, le 22 mai 2016. JEAN-PAUL PELISSIER / REUTERS

Le réalisateur Olivier Assayas au 69e Festival de Cannes, le 22 mai 2016. JEAN-PAUL PELISSIER / REUTERS

 

Cristian Mungiu avait déjà reçu la Palme d’or en 2007 pour 4 mois, 3 semaines, 2 jours. Dans Baccalauréat, il sonde avec acuité les compromissions et la corruption dans la société roumaine. Pour Olivier Assayas, ce prix « est le plus beau prix, que je partage avec un cinéaste que j’admire. La mise en scène, c’est quelque chose qui s’invente collectivement, mais j’ai l’impression d’avoir construit un collectif, et ce prix lui appartient collectivement ».

 

Le prix du scénario à l’Iranien Asghar Farhadi pour Le Client (Forushande)

4924232_7_992b_le-realisateur-asghar-farhadi-au-69e-festival_ffc49106e806cf948925ade11f99d241

« Mes films ne sont pas connus pour être joyeux », a dit le réalisateur en recevant son prix, espérant que son film « apporte de la joie » au peuple iranien. Il raconte l’histoire d’un couple de comédiens en train de répéter une pièce de théâtre, qui se trouve contraint de quitter son appartement à Téhéran en raison de travaux menaçant leur immeuble.

Le prix d’interprétation féminine à Jaclyn Jose, pour son rôle dans Ma’Rosa, du Philippin Brillante Mendoza

La star philippine a remercié « Brillante Mendoza, un réalisateur formidable, un vrai génie ». Dans Ma’Rosa, elle incarne Rosa Reyes, dite « Ma’Rosa » (Maman Rosa). Pour le rôle, elle est allée s’immerger incognito, de nuit, dans les quartiers que le film décrit, pour faire connaissance avec des personnes du même milieu.

 

Le prix d’interprétation masculine à Shahab Hosseini, pour son rôle dans Le Client (Forushande)

 L’acteur Shahab Hosseini au 69e Festival de Cannes, le 22 mai 2016.

L’acteur Shahab Hosseini au 69e Festival de Cannes, le 22 mai 2016.

L’acteur iranien joue Emad, professeur et comédien, au sein d’un couple qui se trouve confronté à des événements et des choix bouleversants, alors qu’ils jouent Mort d’un commis voyageur, d’Arthur Miller. « Je sais que mon père, là où il est, au paradis, est en train de partager cette soirée avec moi. Paix à son âme, et que son âme soit joyeuse, a-t-il dit en recevant son prix. Ce prix, je le dois à mon peuple, donc de tout mon cœur avec tout mon amour, c’est à lui que je le rends»

Prix d’interprétation masculine pour Shahab Hosseini dans « Le Client » d’Asghar Farhadi https://t.co/DlfcKFdJg6

 

 

Le prix du jury à American Honey, de la Britannique Andrea Arnold

 

 La réalisatrice Andrea Arnold au 69e Festival de Cannes, le 22 mai 2016. La réalisatrice Andrea Arnold au 69e Festival de Cannes, le 22 mai 2016. VALERY HACHE / AFP

La réalisatrice Andrea Arnold au 69e Festival de Cannes, le 22 mai 2016. VALERY HACHE / AFP

Elle a été saluée pour son premier film tourné aux Etats-Unis. Un prix qu’elle avait déjà reçu à Cannes pour Red Road (2006) et Fish Tank (2009). Habituée de la compétition, Andrea Arnold s’est offert, comme se doit aujourd’hui de le faire tout cinéaste sélectionné à Cannes qui se respecte, son « film américain ».

 

La Caméra d’or à Divines, premier long-métrage de la Franco-Marocaine Houda Benyamina

 

 La réalisatrice Houda Benyamina lors de la cérémonie de clôture du 69e Festival de Cannes, le 22 mai 2016. La réalisatrice Houda Benyamina lors de la cérémonie de clôture du 69e Festival de Cannes, le 22 mai 2016. VALERY HACHE/AFP

La réalisatrice Houda Benyamina lors de la cérémonie de clôture du 69e Festival de Cannes, le 22 mai 2016.

« Cannes, c’est aussi notre place à nous. Cannes est à nous, à nous les femmes ! ». La réalisatrice a un peu réveillé une salle endormie en début de cérémonie, avec un discours d’anthologie. Dans le film, l’actrice principale (et petite sœur de la réalisatrice), Oulaya Amamra, 20 ans, incarne Dounia, une jeune fille qui vit dans un camp de Roms en marge d’une cité de la banlieue parisienne, et a décidé que dans sa vie, tout serait possible.

  • La Palme d’or du court-métrage à Timecode, de l’Espagnol Juanjo Gimenez, ainsi qu’une mention spéciale du jury pour le Brésilien Joao Paulo Miranda Maria, pour La Jeune Fille qui dansait avec le diable.

Source : Le Monde 22/05/2016

Voir aussi ; Actualité Internationale, Rubrique Festival, rubrique Cinéma,

 

 

Arabesques « Le combat est culturel. Nous devons être au front »

Arabesques : pour se construire il faut savoir d’où l’on vient

Nesma  dépeint l’itinéraire de la poésie  arabo-andalouse.  Photo dr

Nesma dépeint l’itinéraire de la poésie arabo-andalouse. Photo dr

Le festival Arabesques qui met en lumière la richesse des cultures arabes est aussi un vecteur d’intégration.

A travers cette 11e édition, le festival Arabesques poursuit l’exploration des multiples richesses de la culture du Monde Arabe. Un voyage qui nous conduit à travers l’histoire sur des terres d’échanges et de tolérance en se gardant bien de la tentation exotique ou folklorique au sens touristique du terme. Il s’attache aux racines comme à la réalité multiculturelle, y compris dans l’hexagone. L’action menée auprès des scolaires durant toute l’année par l’association Uni’Son, mis à l’honneur au début du festival, est une pierre angulaire d’une manifestation dont la programmation reste avant tout festive.

Hier au cinéma Diagonal, la projection du documentaire de Wahid Chaïb et Laurent Benitah s’inscrit pleinement dans cet esprit. Le film Chaâba du bled au bidonville évoque le Chaâba, lieu d’habitation surnommé par ses habitants qui signifie « trou», « patelin lointain » en arabe dialectal. Il propose un coup de projecteur sur un lieu de vie de 1949 à 1967 d’une trentaine de familles algériennes venues en France au sortir de la seconde guerre avec l’espoir d’améliorer le quotidien de leurs familles restée en Algérie.

Ce témoignage soulève la difficulté d’une génération de migrants et de leurs descendants à évoquer le passé. Il participe pleinement à la démarche positive d’Arabesques quant aux origines déjà évoquées lors des éditions précédentes avec le témoignage des Chibanis.

Le passage de repères identitaires bouleversés  à celui de cultures partagées suppose un travail de (re) connaissance auquel s’emploie le festival à travers de multiples propositions.
A l’heure de la montée de l’influence salafiste auprès d’une partie de la jeunesse, les déclarations du chef du gouvernement actant que le courant fondamentaliste « était en train de gagner la bataille idéologique et culturelle » ne peuvent que renforcer l’échec de l’intégration. Parce qu’elles tendent à désigner l’islam en général comme une menace dirigée contre la France.

La partie de la compréhension et de l’humanisme défendue par Arabesques qui concerne la grande majorité des musulmans français sans se limiter à une communauté religieuse ou une carte d’identité, porte en revanche ses fruits. On le voit dans la diversité du public.

A l’heure où les bidonvilles ressurgissent dans les grandes villes françaises, poussés par les inégalités croissantes, et l’arrivée de nouvelles populations migrantes il parait urgent de s’intéresser, aux origines des problèmes posés, à la richesse des identités culturelles concernées pour ne pas reproduire un schéma discriminant voué à l’échec.

JMDH

Source : La Marseillaise 19/05/2016

Du bonheur en perspective

Orchestre arabo-andalou de Fès

Orchestre arabo-andalou de Fès

Le début de semaine fut illuminé par la présence exceptionnelle et  hypnotisante de l’Orchestre arabo-andalou de Fès à l’Opéra Comédie.  Sous le serein patronage de Mohamed Briouel qui se produit aussi en compagnie d’artistes de traditions juives, les huit musiciens chanteurs de l’orchestre national ont interprété un répertoire traditionnel du XV² siècle. La restitution de la musique ancienne andalouse marocaine dans la pure tradition, porte en elle une dimension populaire attisée par la présence des artistes qui a conquis le public Montpelliérain.

La fin de semaine s’annonce également riche en propositions.

Hindi Zahra

Hindi Zahra

Vendredi  à 19h30 au Théâtre Jean-Claude Carrière, un concert de  Bab Assalan quartet issue d’une rencontre entre le luthiste syrien Khaled et son frère percussionniste, Mohanad  Aljaramani et le clarinettiste français  Raphaël Vuillard. A 21h30 suivra dans l’Amphi D’O un double plateau plein d’énergie. Karimouche la chanteuse danseuse rappeuse et comédienne  débarque sur scène avec son style et son franc-parler pour embarquer le public dans un show musical où se côtoient ragga, reggae électro et pop music. Dans un style tout autre, plus dépouillé, la chanteuse d’origine berbère Hindi Zahra pose le charme de sa voix sur des mélodies jazz, soul et folk.

Waed Bouhassoun

Waed Bouhassoun

Samedi, le rêve commence à 15h avec la conteuse Halima Hamdane (pour enfant). A 16h le journaliste Rabah Mezouane fait le point sur la musique du Maghreb dans le paysage français. A 18h, il ne faut pas manquer le récital de la syrienne Waed Bouhassoun, une outiste talentueuse qui chante des poèmes d’Adonis, Mansur al-Hajjal, d’al -?Mulawwah, ou d’Ibn Arabi sur ses propres compositions.

Voir programme jusqu’à dimanche Festival Arabesques 2016.

 

 

 

« Faire émerger l’idée d’une communauté au sein de laquelle ce qui nous unit est plus fort que ce qui nous divise. »

Habib Dechraoui

Habib Dechraoui

Entretien avec Habib Dechraoui, le directeur du festival Arabesques qui a débuté par deux journées dédiées au public scolaire.

Fort de son expérience, le festival Arabesques se positionne aujourd’hui comme un carrefour permettant le croisement des richesses artistiques du monde arabe et comme un merveilleux outil de coopération avec les villes et acteurs culturels des pays de l’autre rive de la Méditerranée. L’édition 2016 qui se tient à Montpellier jusqu’au 22 mai rend compte de ce mouvement, de ces croisements, de ces apports culturels.

Après la dixième édition célébrée l’année dernière, quel type de motivation vous guide dans le contexte difficile que traversent les pays arabes ?


L’édition 2015, a été très appréciée pour sa qualité artistique et très suivie avec près de 200 000 personnes concernées par le festival et tout le travail réalisé en amont par l’association Uni’Sons qui oeuvre notamment auprès des scolaires. Avec Jeunesse en Arabesques, nos activités de sensibilisation artistique qui contribuent au rapprochement entre les peuples, connaissent une demande exponentielle. Pour une autre partie du public,  l’opéra du Caire perpétuant le répertoire Oum Kalsoum à l’opéra Comédie reste un souvenir inoubliable.

C’est aussi un vecteur qui fait sens  car il s’agit  de musique classique. Un double rapprochement s’est opéré du public habituel de l’opéra vers un répertoire différent et d’un public qui apprécie ce répertoire mais n’avait jamais franchi les portes de l’opéra. Avec la directrice de l’opéra, Valérie Chevalier, très enthousiasmée par cette expérience, nous poursuivons notre collaboration. Cette année nous recevons l’orchestre arabo-andalou de Fès, le groupe le plus important  du genre andalou marocain. Ils seront à Montpellier lundi 16 mai pour une date unique en France. Et d’autres projets sont en cours.

Sous quelles étoiles s’inscrit le thème de l’Orient merveilleux ?


Sous le ciel  aux mille et une étoiles de l’héritage arabo-andalou. Nous avions choisi la thématique avant les attentats de novembre dernier. Ces sinistres événements nous renforcent dans notre conviction que la culture est le vecteur essentiel du savoir vivre ensemble. Il s’agit de souligner et de faire émerger l’idée d’une communauté au sein de laquelle  ce qui nous unit est plus fort que ce qui nous divise. Cet héritage commun n’appartient pas à une religion ou une autre.

Vous employez  le terme communauté, comment faut-il l’entendre ?


Lorsque je parle d’Arabesques, je fais tout pour ne pas évoquer la religion qui relève du domaine privé. La communauté à laquelle je fais référence se compose d’une pluralité d’identités à la fois sociales, géographiques, ethniques, populaire, rurales et urbaines… La communauté est la somme de ces identités qui composent le public d’Arabesques.

Auquel s’ajoute les artistes qui viennent d’autres rives de la Méditerranée. J’admire par exemple le courage de la société civile tunisienne qui est très active. J’ai envie d’y contribuer à un petit niveau en faisant venir des artistes. La scène émergente du monde arabe est pleine de vivacité à l’instar du  festival musical de Beyrouth Beirut & Beyond dont la dernière édition à pour la première fois été annulée en raison des troubles que connaît la capitale libanaise. Tous ces artistes composent une partie de notre communauté. Il nous font du bien. C’est une des raisons d’être du festival Arabesques de donner à comprendre,  de préserver l’art traditionnel arabe et de rendre visibles les créateurs émergents. Pour des raisons budgétaires, j’ai malheureusement dû annuler deux projets auxquels je tenais beaucoup : une création audiovisuelle égyptienne, et un groupe palestinien.

Le festival ne se réduit pas  à établir une programmation, où en êtes-vous dans la mise en perspective ?

Nous avons passé le cap des dix ans l’an dernier. Après chaque édition l’équipe du festival se retrouve dans les Cévennes pour faire le bilan. Je sais généralement où je veux aller mais il est important pour moi de rester à l’écoute des acteurs qui m’accompagnent depuis le début. Si la musique reste  au centre de notre programmation parce qu’elle est populaire et fédératrice le festival a la volonté d’amener le public ailleurs . Aussi bien vers des  formes classiques que vers la découverte de groupes rock et électro qui font une percée significative dans les pays arabes. Nous avons aussi la volonté d’ouvrir le festival à d’autres formes d’expressions artistiques comme les arts plastiques,  le théâtre, le cirque… pour suivre le mouvement de la nouvelle scène arabe qui diversifie ses moyens d’expression.

La délocalisation du festival pourrait-elle être en jeu dans les années à venir ?

Depuis trois ans les sollicitations se succèdent à l’échelle européenne et au-delà. Mais je suis attaché à mon territoire d’action qui est un des plus sinistrés. Notre QG se situe toujours dans le quartier haut de La Paillade. Je pense que le combat doit se mener au front. C’est important de ne pas déserter parce que le monde à horreur du vide.

Aujourd’hui dans les quartiers, on voit les acteurs économiques, sociaux et culturels agoniser. Une fois qu’ils ne seront plus là, ce sera la fin. Après les attentats de Bruxelles, le  Bourgmestre à fait un constat très lucide en affirmant que le combat contre le terrorisme et le repli identitaire passaient d’abord par la culture et l’éducation.
Pour moi le succès  du festival n’est pas une surprise. Il est lié au soutien du Conseil départemental, mais je connaissais dès le début le potentiel de ce projet. Après 10 ans nous devons projeter de nouveaux axes de développement. Je persiste à penser que nous devons lancer des passerelles à partir d’ici, des racines. Mes parents sont arrivés là dans les années 50. Tout cela je le valorise aujourd’hui et cela me donne de la force. On ne devrait pas accorder tant d’attention aux gens qui présentent leur projet avant de leur demander leur bilan. Ce qu’il ont fait concrètement.

Vos coup de coeur à l’affiche de cette 11e édition…

Le cabaret Tam Tam qui nous fait replonger dans les nuits parisiennes festives de la diaspora orientale parisienne dans les années 40. Et le récital  de Waed Bouhassoun réfugiée syrienne qui interprète ses compositions au Luth sur des poèmes d’Adonis, Sorhawardi ou Ibn Arabi. Elle me touche beaucoup.

Recueilli par Jean-Marie Dinh

Source : La Marseillaise 14/05/2016

Voir aussi : Rubrique  Festival, Il était une fois les Chibanis, rubrique Méditerranée, rubrique Montpellier, rubrique Politique, Politique Immigration, Politique Culturelle, Politique de l’Education,

Isabelle Munoz : « La photo c’est une façon d’aimer »

Isabel Muñoz (born 1951, in Barcelona) is a Spanish photographer who lives in Madrid.

Isabel Muñoz (née en 1951, in Barcelona) is a Spanish photographer who lives in Madrid.

Sète. Rencontre avec Isabelle Munoz une grande dame de la photographie espagnole invitée du festival imageSingulières

Portée par une passion humaniste, l’infatigable Isabelle Munoz parcourt le monde pour traduire son évolution. Ses images de corps d’hommes et de  femmes, où le grain de la peau se fond dans un velouté sensuel, transportent notre regard dans un espace universel. L’oeuvre de l’artiste s’inscrit dans le panorama proposé dans le cadre du double hommage rendu cette année à la photographie espagnole et à l’agence VU’  qui fête à Sète son 30e anniversaire.

AR1MSC2839

Isabel Muñoz

Vous faites partie des photographes fidèles à l’Agence VU’, comment a débuté cette aventure ?

L’hommage qui est rendu ici à la photographie espagnole n’aurait jamais existé sans Christian Caujolle, le directeur artistique et membre fondateur de l’agence VU’. Nous lui devons tous beaucoup, car c’est lui qui a permis aux photographes espagnols qui gravitaient autour de la petite école de photo à Madrid, de se révéler. Les gens de ma génération ont été élevés sous Franco. Je veux dire que nous savons apprécier la liberté. Il est venu à notre rencontre et nous a permis de montrer ce que nous avions à exprimer.

Dans quelles circonstances ?

Lorsque j’ai rencontré  Christian je lui ai montré mes grandes platines (procédé alternatif de tirage utilisé par une minorité d’artistes photographes) il les a embarquées pour les montrer à l’étranger, ce qui m’a permis de poursuivre mon travail et de me réaliser. Ce qui est formidable c’est que Christian a fait cela dans le monde entier, du Mexique à la Chine et qu’il poursuit cette démarche en dépit des difficultés économiques que rencontre le secteur. Il est à l’origine d’une nouvelle génération de photographes cambodgiens qui s’est révélée cinq ans après son passage dans ce pays.  Si tu ne montres pas ton travail il n’existe pas. C’est pour cela que des rencontres comme celles d’images Singulières sont très importantes.

Isabel Muñoz

Isabel Muñoz

Vous êtes aussi une grande voyageuse …

Oui, je me déplace beaucoup dans le monde, à travers mes voyages, c’est l’être humain qui m’intéresse. J’ai récemment travailler sur les fillettes prostituées au Cambodge et les femmes utilisées comme armes de guerre au Congo. L’amour ce n’est pas seulement les petites fleurs. Parfois elles sont là si tu sais les regarder, sinon elles passent. On est dans un monde où j’ai besoin de témoigner.

La reconnaissance dont vous bénéficiez aujourd’hui modifie-t-elle votre approche ?

Mon langage ne change pas. C’est la vie qui change le regard. Dans mon cas l’art est une nécessité parce qu’il me permet d’entrer dans des lieux où je n’aurais jamais été entendue. Une image n’est rien si il n’y a pas une histoire autour de ce langage.

Votre travail explore le corps ou y renvoie presque inévitablement ?

Le corps est un livre de ce que nous sommes. On peut lire à travers le mouvement, le regard, parcourir les corps pour parler de la dignité, du désir… L’art a le pouvoir de faire sortir la lumière du corps et particulièrement l’art photographique. La photo, c’est une façon d’aimer.

Sur quoi travaillez-vous ?

Sur ce qui me préoccupe.  Les changements  liés à la crise modifient les choses. Il existe des lieux et des artistes reconnus mais les jeunes n’y trouvent plus de place. Comme dans la société en général. Je ne comprends pas la politique mais je comprends le besoin des autres. Je travail sur la jeunesse pour étudier ce qui se passe. Un peu partout dans le monde, les jeunes cherchent leur identité, des liens d’appartenance avec une tribu. Et ils utilisent leurs corps qu’ils modifient en faisant des suspensions, des piercings ou en pratiquant la scarification. L’humain ne peut pas vivre sans rêve.

Recueilli par Jean-Marie Dinh

 

IMG_1586

Photo Chema Madoz
Il est un formidable illusionniste. Celui qui réalise depuis des décennies des « natures mortes » dont la caractéristique essentielle est d’agiter les idées et de donner vie aussi bien à la fantaisie qu’à la poésie

 

Zoom sur VU’
Une agence de photographes qui mise sur la force des identités

Dès sa création en 1986, VU’ s’est définie comme une “agence de photographes” plutôt que comme une agence photographique, affirmant ainsi la spécificité des identités qui la composent. Son nom, éponyme du célèbre magazine des années 1920 qui révolutionna le concept d’illustration, affiche une filiation ambitieuse. Elle a progressivement imposé un regard neuf et affirme chaque jour l’engagement d’intelligence et de créativité de ses auteurs. Découvrir, favoriser, diffuser mais aussi exposer dans une vaste galerie … L’équipe de VU’ fait d’une aventure collective un laboratoire permanent de réflexion sur les évolutions de la photographie et sa place dans le monde de l’image ; sociale, documentaire, plasticienne, il importe de décrypter la dimension polysémique de la création contemporaine et d’interroger son traitement par les médias, les entreprises ou les institutions.De l’actualité immédiate à l’enquête au long cours, de l’oeuvre formelle au récit intimiste, les photographes de VU’ dressent depuis vingt ans un panorama pluriel et mouvant de la photographie.

Ricard Terré Il fut membre du groupe AFAL qui, sous le franquisme, réunit pendant quelques temps les plus intéressants des photographes espagnols, ceux qui, malgré l’isolement qui leur était imposé, menaient à la fois une réflexion de fond et développaient une recherche plastique.

Richard Terré
Il fut membre du groupe AFAL qui, sous le franquisme, réunit pendant quelques temps les plus intéressants des photographes espagnols, ceux qui, malgré l’isolement qui leur était imposé, menaient à la fois une réflexion de fond et développaient une recherche plastique.

Le parrain Christian Caujolle

Présent à Sète à l’occasion du festival, Christian Caujolle est et le directeur artistique de l’Agence VU’. Il a activement soutenu les photographes espagnols dont le travail est présenté, Juan Manuel Castro Prieto, Alberto Garcia-Alix, Cristina Garcia-Rodero, Chema Madoz, Isabel Munoz, Ricard Terré, Virxilio Viétiez, ces deux derniers ayant essentiellement produits sous le franquisme. On peut découvrir leur travail au Chais des Moulins dans la diversité de styles et de propos, du photojournalisme aux expérimentations formelles. Ils ont enrichi l’agence VU’ qui a toujours donné une place importante aux regards des talents locaux, comme se fut le cas dès 1988 en signant des contrats avec des photographes chinois qui ont documentés les événements de la place Tianmen.

Christian Caujolle a  été élève de l’École normale supérieure de Saint-Cloud,et élève et collaborateur de Michel Foucault, Roland Barthes, Pierre Bourdieu.
Crédit Photo dr

Source La Marseillaise 07/05/2016

Voir aussi : Rubrique Festival, rubrique Photo, imageSingulière 2016, rubrique Exposition, rubrique Rencontre, rubrique Espagne

Saperlipopette rêves d’hier aux goûts du jour

ALBA-2015-Credit-Daniel-Michelon-06

Roue libre par Les Nouveaux Nez&Cie Crédit Photo Daniel Michelon

Jeune public. Le festival des enfants et des parents Saperlipopette démarre demain au Domaine D’O et se poursuit jusqu’au 29 mai dans tout l’Hérault.

Il faudra se coucher tôt ce soir pour être en forme demain et après-demain afin de profiter d’une immense partie de cache-cache dans le parc du Domaine D’O. On y découvrira au gré des chemins et bosquets une multitude de spectacles sélectionnés avec attention par Isabelle Grison, la directrice de ce festival jeune public. « Pour sa 19e édition, Saperlipopette nous emmène dans nos souvenirs les plus tendres sur le thème : Il était une fois aujourd’hui. » Et ce aujourd’hui revêt toute son importance car « les artistes choisis ont en commun l’adaptation des histoires à la sauce contemporaine… Un peu plus de cruauté par ci, un peu plus d’humour par là ! qui garantissent un peu de bousculade dans le souvenir des grands. »

On retrouvera ainsi Blanche neige et moi, par la compagnie La servante qui explore à travers un texte audacieux la quête d’identité. Ceux qui attendent la petite farandole des 7 Nains rentrant du boulot resteront sur leur faim. Ici le nain Edwin souffre de schizophrénie et regroupe sept personnalités en un seul petit homme. Avec Boris et les sœurs Sushis, la Cie sétoise Effet mer poursuit l’exploration de la complexité à s’intégrer dans la société pour des personnages hors normes. Les trois personnages principaux sont des enfants.

La Cie Théâtre du Petit Pois, propose une libre adaptation du chef d’oeuvre de Lewis Carrol avec Le Thé d’Alice qui associe Théâtre, conte, marionnettes et livre pop-up. Le théâtre Magnétic de Bruxelles ressort du tiroir trois petits cochons paumés, un loup très malin pour nous conter une histoire désossée. Dans l’amphithéâtre, les Nouveaux Nez& Cie se déploient sur deux ou une roue provoquant l’émoi des premières et incertaines promenades à vélo.

La Cie des Plumés met ses poules sur leur trente-et-un pour leur numéro de dressage. Le spectacle Prends-en de la graine mêle le cirque, le théâtre et l’art du clown dans un numéro surprenant et poétique. Bien d’autres propositions d’ouverture au monde sont à l’affiche de Saperlipopette ce week-end au Domaine D’O avant de partir sur les routes héraultaises.

JMDH


Entrée nord samedi 7 mai et dimanche 8 mai de 12h à 20h. Achat des places sur place.

Source : La Marseillaise 06/05/2016

Fiest’A Sète canaliseur de musique vivante du 23 juillet au 7 août

fiesta-sete-2016Pour sa 20e édition, le festival des musiques du monde cultive les terres fertiles des grands ancêtres et invite les pousses les plus vivantes

L’affiche est belle. Elle est signée Le Bail. Ce portrait un peu barré nous rappelle un grand monsieur, maintenant que tout lui est permis, il semble naviguer sur ses quatre jambes. Il n’en faudra pas moins pour suivre l’édition 2016 avec toute la vigueur convoquée par l’équipe de Fiest’A Sète sur la scène du Théâtre de la mer et  celles du Bassin de Thau du 23 juillet au 8 août prochain. L’inébranlable directeur José Bel a présenté cette semaine dans le détail, les artistes qui se succéderont dans la chaleur climatique et corporelle de l’été.

Pour ceux qui n’auraient pas suivi, on peut dire que la composition des soirées de Fiest’A Sète relève en elle-même du grand art. Les soirées thématiques guidées par « une certaine idée de la modernité, du métissage et du mouvement,» répondent à une volonté de croisement des esthétiques musicales et de rencontres.

Depuis vingt ans cet axe a produit un paquet de moments hors du temps. La fibre d’esprit qui pousse l’équipe vers l’avant et l’avenir, garde ces orfèvres programmateurs de tomber dans la nostalgie. Là où certains en auraient fait des caisses autour du vingtième anniversaire, José Bel évoque les racines musicales des monstres présents cette année, et du devenir des jeunes talents qui l’ont émus. Après trente ans derrière  le comptoir de sa boutique de disque et vingt ans de festival, il sait un peu de quoi il parle, mais sa nature modeste le pousse à nous transmettre l’essentiel :  partager ce qu’il aime.

Un flingue à sept coups

L’édition 2016 dure 14 jours durant lesquels elle accueillera 25 groupes lors de 14 concerts.  La première semaine donne lieu à 8 concerts gratuits autours du bassin de Thau. En seconde semaine tout se recentre au Théâtre de la Mer avec 7 concerts payants. Fait singulier, Fiest’A Sète assure 75% de son budget en autofinancement. Comme les tarifs sont accessibles et que l’on pratique le hors piste sans lésiner sur le risque, l’avenir du festival est chaque année remis sur le tapis. Raison de plus pour se jeter dans l’effervescence des soirées qui rythment cette 20e édition.

Omara+Portuondo+OmaraPortuondo450x

Omara Portuondo

Ca commence avec Siempre Cuba y España le 2 août en présence  de la grande Omara Portuondo exhumée de l’oublie sur le vieux continent par Wim Wenders. Pour ce set, elle sera accompagnée par  le célèbre chanteur de flamenco Diego el Cigala. Un des premiers à débusquer le cousinage de sa tradition flamenca avec les expressions créoles qu’elle a su jadis inspirer.  Pour parfaire l’émotion de ce croisement des cultures, la violoniste et chanteuse cubaine Ylian Canizares nourrira l’atmosphère de sa vitalité créative.

John Mclaughlin

John Mclaughlin

Soirée jazz du monde le lendemain avec Ilhan Ersahin’s de mère suédoise et de père turc, il a grandi à Stockholm ce qui ne l’a pas empêché de plonger dans le bain du jamaïcain. Il partage aussi le parcours de Truffaz, bref un souffle voyageur bienvenu pour une escale sétoise. Le second concert est une légende de la guitare précurseur de la world music, il a joué avec les plus grands en voyageant sur les grands fleuves musicaux de la planète : John Mclaughlin.

Bachar Mar-Khalife

Bachar Mar-Khalife

La nuit orientale du 4 août se conjuguera les notes du pianistes  franco-libanais Bachar Mar-Khalife avec les étoiles. Il a participé à plusieurs projets qui mélangent jazz, world music, électro et hip-hop et joué sous la direction de Lorin Maazel. Natacha Atlas viendra faire planer le voile du mystère de ses origines et de sa trajectoire musicale dont la récente rencontre avec Ibrahim Maalouf donne à la diva l’occasion d’exercer tout son talent.

 Fred Wesley

Fred Wesley

Deux dinosaures de la black music se retrouvent le 5 août. Fred Wesley, pièce maîtresse dans l’élaboration du son de la soul music. Il fut le directeur musical de James Brown. Lucky Peterson occupe lui une place prépondérante  dans l’histoire du blues.

320x240_fiestasete-06-08-2016-2554316Pascale Comelade bénéficie d’une carte blanche dont il profitera pour inviter sa bande de potes catalans le 6 août. La nuit est annoncée sous le thème de nuit singulière  Elle convient aussi au grand violoncelliste Vincent Segal qui se produira accompagné du virtuose de la Kora le Bamakois Ballaké Sissoko.

Le 7 août honneur à l’Afrique lusophone avec la volcanique Capverdienne Lura et l’Angolais Bonga. L’édition se clôture avec la soirée cubaine du 8 août en compagnie de Omar Sosa& Gustavo Ovalles et le NY salsa all Stars.

Lura

Lura

Prêts pour le grand bain ?

JMDH

Source : La Marseillaise  16/04/2016

Voir aussi : Rubrique Actualité Locale, Rubrique Musique, rubrique Festival, Fiest’A Sète archives, On Line Site Officiel.