The Encounter de McBurney. Interconnexion : la langue entre en jungle

Plongée dans l'univers cognitif de McBurney

Plongée dans l’univers cognitif de McBurney

«The Encounter», première française de l’auteur britannique Simon McBurney embarque le public du Printemps des Comédiens ici , là bas et ailleurs au fin fond de la forêt amazonnienne pour y vivre une expérience onirique qui frappe à la porte du réel.

« Je pensais que la seule façon de représenter l’endroit où la biodiversité est la plus riche sur la planète était de permettre au gens de l’imaginer. Et le voyage de McIntyre est avant tout intérieur comme une expérience somatique. Peut-être que  ce qu’il vivait intérieurement était plus difficile à surmonter que ses difficultés physiques », confie McBurney à propos de sa dernière création The Encounter (La rencontre) sur laquelle il a travaillé huit ans avec sa compagnie Complice.

Les liens que tisse cet artiste singulier semblent ténus mais ils trempent dans une expérimentation du réel qui les rend résistants à toute épreuve. En 1984, il s’était introduit clandestinement dans un bidonville au Chili pour jouer, puis diffuser en live ce spectacle dans les cinémas du monde entier. Cette fois il s’engage sur les pas de Loren McIntyre, un photographe parti en expédition en 1971 pour localiser la source de l’Amazone au Brésil. Ses voyages sont relatés dans le livre Amazon Beaming de l’écrivain Roumain Petru Popescu qui raconte comment le photographe se perd et se trouve capturé par une tribu indienne isolée non loin de la source du plus grand fleuve du monde.

Seul sur scène Simon McBurney réussit le tour de force de restituer un univers complexe au grand public. Le processus narratif prend pied dans la salle de spectacle avant de se transporter dans plusieurs espaces qui s’interconnectent pour dépeindre la perdition d’un occidental avec une puissance digne de Conrad. L’usage de la technologie produit des effets vertigineux où l’énoncé impossible qui ne peut être vrai dans un seul espace le devient dans plusieurs. McBurney fait renaître ce qui n’est pas là.

« Je me tiens debout devant le chef du Marajaì. Entassés dans sa hutte, la moitié des habitants du village, me regardent.

–  Pourquoi es-tu ici ? 

– Je suis ici parce que je ne suis jamais allé en Amazonie, je n’ai jamais vu la forêt tropicale. Je suis ici à cause du livre que j’ai décidé d’adapter… »

Lui raconte l’histoire dans des micros et vous entendez la parole qui se déplace dans votre casque, où différents niveaux de temps se superposent pour finalement conduire à son abolition. Une langue drôle, libre et insoumise, que nous rapporte McBurney,  la sienne, celle de sa fille, du photographe explorateur, celle des indiens du bout du monde … qui tourne dans notre crâne, s’y pose. Actionne des touches invisibles et nous transporte en plusieurs lieux simultanés.

Ainsi le corps parlant sur scène ne cherche pas à contrôler la parole. Le corps sur le plateau entraîne la naissance de la voix qui passe comme un liquide, comme le fleuve qui nous fait sentir l’anachronisme entre le monde extérieur et la création sensitive. Surgit le charme intrigant du personnage faillible et désenchanté qui ne renonce jamais à affronter la vie et donc apprend à la connaître dans la disparition de la personne dont elle porte le souvenir. Celle du matérialiste ?

Jean-Marie Dinh

Source La Marseillaise 21/06/2016

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Le Festival de Thau solidaire et engagé

Angelique Ionatos Abbaye de Valmagne le 24 juillet  2016.  Photo dr

Angelique Ionatos Abbaye de Valmagne le 24 juillet 2016. Photo dr

La  26e édition du Festival de Thau qui mixe cultures musicales de la planète et conscience écologique affirme sa singularité  du 18 au 24 juillet.

Outre qu’il est toujours attractif avec une affiche très alléchante, la certification à la norme Iso 20121,  rend cette année le Festival de Thau officiellement responsable. De quoi glaner quelques précisions auprès de sa fondatrice Monique Tessier sur ce qui se cache derrière ce sigle qui en dépit des apparences n’a rien de barbare.

« Cela fait 10 ans que nous avons positionné le festival sur l’axe du développement durable. Notre association (Jazzamèze) a été certifiée en juillet 2015 nous avions candidaté parce que ce label correspond à notre démarche initiale. Pour l’heure, très peu de structures organisatrices de festivals bénéficient en France, de cette certification. C’est le cas des TransMusicales de Rennes par exemple.»

On  constatera une nouvelle fois avec l’édition 2016, que le Festival de Thau, moment phare d’un travail de développement d’activités artistiques à l’année, ne se contente pas d’une simple programmation musicale, mais s’efforce de trouver en permanence des prolongements à un moment festif qui favorise l’échange toujours en lien avec son territoire.

Cette année les Eco-Dialogues concoctés par Thierry Salomon, tourneront autour du film «Demain» de Cyril Dion et Mélanie Laurent. L’action avec le Silo, centre de création coopératif dédié aux musiques du monde et traditionnelles porté par Le Festival Détours du Monde et le Festival de Thau se consolide. Il donnera lieu à trois créations. Le 18 juillet à Bouzigues on pourra découvrir Raizes. Une rencontre musicale entre le Brésil et la Syrie sur le thème de la migration. Avec la création Béatik, le 20 juillet à Montbazin, Stéphane et Beata (France/Slovaquie) emprunteront à des chants traditionnels pour donner vie à une musique audacieuse reliant l’Est et l’Ouest de l’Europe. Le 22 juillet à Mèze la création Uèi fera pont entre la France et l’Occitanie, Marseille et Montpellier  autour de chants polyphoniques teintés d’électro.

Elargir le réseau

Pour le festival, l’obtention du label Iso 20121 vient couronner  un long travail de construction et le pousse à prolonger son travail dans des domaines comme l’économie durable, la réduction de l’empreinte environnementale, l’accessibilité des publics ou la promotion du respect de l’environnement.

« C’est un peu fou de l’obtenir pour une petite structure comme la nôtre. Cela nous pousse à aller plus loin, confirme Monique Tessier, à réfléchir à la gouvernance, à travailler de manière transversale, à mettre tous les salariés au même niveau d’information. Pour ne pas rester isolés, nous nous ouvrons à différentes collaborations au Vigan, à Bédarieux ou encore à Sète avec le festival Images Singulières

Côté concerts, la 26e édition demeure éclectique avec une forte présence africaine doublée d’une  thématique sur les femmes engagées à l’image des Amazones d’Afrique, premier groupe malien exclusivement féminin. A noter aussi la présence de l’ambassadrice Rokia Traoré, le retour de la reine du Calypso qui a fait succomber Manu Chao, Calypso Rose, ou encore la sublime chanteuse grecque Angélique Ionatos accompagnée par Katerina Fotinaki  qui apporteront une réponse poétique à la situation de leur pays.

Le festival de Thau est une perle dont la brillance comporte  plusieurs facettes. « C’est encore assez peu compris », indique Monique Tessier, On a du mal a appréhender un festival de musique plus largement ouvert sur la vie sociale, la lutte contre les discriminations, pourtant cette notion, on aimerait la porter au même niveau que les concerts…

JMDH

Source : La Marseillaise 08/06/2016

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4 x 11 : l’Ensad se déchaîne sur scène

"NNN" : les élèves mi humains mi robots abordent le travail de désynchronisation  avec Gildas Milin.  Photo dr

« NNN » : les élèves mi humains mi robots abordent le travail de désynchronisation avec Gildas Milin. Photo dr

Le Printemps des Comédiens ouvre largement son programme aux étudiants de  l’Ensad dont on découvre le talent au travers de  quatre création

Le festival qui porte haut l’art du théâtre, entretient de longue date un lien étroit avec l’école nationale supérieure d’art dramatique (Ensad) de Montpellier.  Avant de fouler les planches du Théâtre d’Aubervilliers en novembre, la promo du regretté Richard Mitou, l’ex directeur de l’Ensad, libère une énergie époustouflante dans les quatre pièces données au Théâtre du Hangar.

Le marathon s’organise jusqu’au 24 juin, sous la houlette de Gildas Milin, le nouveau directeur de l’Ensad qui impulse une énergie de création continue, dans une optique de professionnalisation. 4 x 11 est un projet où les  élèves se confrontent à quatre metteurs en scène de générations différentes : Alain Françon, Robert Cantarella, Jean-Pierre Baro et Gildas Milin. Une traversée de plusieurs décennies à partir de textes choisis aboutissant à quatre créations aux esthétiques et rythmes très différentes.

Robert Cantarella emprunte à Rivette, Corneille et Marivaux pour construire  Monstre, dont la trame tourne autour du jeu collectif et du complot. Jean-Pierre Baro, le benjamin, explore  l’intime et le politique avec La mort de Danton. Alain Françon, pose un montage de textes de Botho Strauss sur la table. La langue soutenue du dramaturge allemand, nourrit un regard satyrique sur le couple toujours au cœur de l’ordre social, dont il renouvelle les problématiques. La mutation physique et celle des modes de vie sont abordées par Gildas Milin avec NNN (Ni égaux, Ni frères Ni libres) inspiré de  la fiction théâtrale des années 20 de Karel Capek RUR. La pièce apparaît toujours comme l’ovni qui a pu séduire Artaud.

La fougue des onze jeunes comédiens relègue le ballon rond aux oubliettes pour investir un tout autre terrain de jeu à découvrir.

JMDH

"Triptyque" Les 7 doigts de la main photo dr

« Triptyque » Les 7 doigts de la main photo dr

Nouveau Cirque. « Tripyque »  Un défi à l’apesanteur au Printemps des comédiens

C’était en 2012. Et l’amphi d’O, plein jusqu’au faîte, avait retenu son souffle. Ce que proposaient cette année-là les danseurs-acrobates des 7 doigts de la main, était un peu la quintessence de ce nouveau cirque dont le Printemps des Comédiens a été, avant tout le monde, une constante vitrine. C’est-à-dire l’alliance de la poésie et de la performance physique, de l’humour et de la prouesse technique, de l’imaginaire et du corps. Revoici les Canadiens avec un spectacle plus ambitieux encore. Leur credo de base est le même : relever le défi permanent de la gravité. Gravité dans ses deux sens : celui de l’attraction terrestre qui contraint le corps du lever au coucher, celui de la légèreté souriante à mettre cette confrontation en scène. Pour les trois pièces dont est composé ce spectacle, la compagnie s’est, pour la première fois, alliée à trois chorégraphes et à une danseuse étoile québécoise. Est-ce à dire que la danse prend le pas sur la performance physique ? Non : Triptyque amalgame les deux plus étroitement encore, repousse un peu plus loin les frontières entre les disciplines. Et garde intacte cette capacité d’émerveillement que chacun de ses spectacles sait faire naître.

Aujourd’hui et demain  à 22h

Source La Marseillaise 14/06/2016

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Cirque Balthazar. 100 Zissu ou le risque à prendre pour s’en sortir

Le plein d’énergie de la classe pro.   Photo Corinne Gal

Le plein d’énergie de la classe pro. Photo Corinne Gal

Les classes pro du centre des Arts du Cirque Balthazar présentent vingt courts poèmes corporels dans le cadre du Printemps des Comédiens. Espace Chapiteaux jusqu’au 11 juin.

Le  spectacle des classes pro de Balthazar est un rendez-vous attendu du Printemps des Comédiens dont la programmation est largement ouverte à l’art du cirque. Au programme cette année, la Compagnie Vol’e Temps, Yoann Bourgeois, le CirkVOSK, Les 7 doigts de la main, Julien Candy et sa Compagnie la Faux Populaire-Le Mort aux Dents, Zingaro,  Matthieu Gary / Sidney Pin, présentent chacun à leur manière des spectacles qui déplacent les normes traditionnelles et qui ont tous à voir avec l’art du cirque.Cette forme d’expression cultive on le sait une floraison de métaphores de la condition humaine réunies lors de cette édition 2016  en un bouquet très varié.

A Montpellier, porté par des artistes pionniers du renouveau du cirque, le Centre des arts du cirque forme depuis plus de vingt ans les talents de demain. Reconnu par l’Etat, financé par la Région, hébergé par le Département, et soutenu par bien d’autres partenaires, la structure encadre les pratiques amateurs et assure une formation professionnelle en favorisant les passerelles  et en affirmant de nombreux projets novateurs sur le plan artistique et pédagogique.

Assister à la représentation des classes pro du Centre des arts du cirque c’est toujours empoigner le réel avec de jeunes artistes qui savent transformer le manque de maturité en un vrai atout. Le public est composé de beaucoup de fidèles  séduits par l’énergie brute des numéros et l’implication qui lui est demandée. Ce que l’on n’attend généralement plus dans les spectacles rodés, quelle que soit la qualité artistique de  la représentation.

Poèmes Corporel

Le spectacle 2016, mis en piste par Martine Leroy aborde des champs actifs de notre histoire contemporaine. Une vingtaine de jeunes artistes est invitée à chercher des solutions à des situations qui semblent sans issue. Chacun compose un petit poème corporel en lien avec son cheminement personnel depuis une impasse vers une sortie.

La scénographie composée de cartons évoque tout autant la précarité que l’inventivité et la mobilité. Des fenêtres s’ouvrent et se referment du mur en fond de scène comme autant de quêtes de savoir, d’étonnements et de signes culturels.

Si les capacités physiques permettent une belle maîtrise, l’esprit Balthazar a toujours porté en créant une complicité spontanée des hommes et des femmes de tous horizons par l’émotion.

Ce réexamen de ce qui se passe aujourd’hui par le biais poétique libère du sentiment d’impuissance. Il interpelle l’individu. Les identités sortent des cartons. Tels les martinets coincés sous les tuiles des toits prenant leur envol avec le sentiment d’appartenance au ciel, les poètes saltimbanques se livrent au cirque. La piste devient un vaste parvis de corps, de sons, et d’images, dilatant sur une très vaste échelle, les émotions reçues et vécues en commun.

JMDH

Source : La Marseillaise 10/06/2016

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Festival Résurgence. Esprit ouvert dans l’espace public

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Compagnie Kiaï «Cri» Photo DR

Pour la seconde édition, le festival Résurgence affiche ses couleurs en invitant à la découverte des arts vivants du 21 au 24 juillet.

Théâtre de rue, concerts, cirque une trentaine de spectacles portés par une vingtaine de compagnies investiront les rues de Lodève pour la seconde édition du Festival Résurgence cet été.  Le terme  « résurgence » fut probablement choisi pour réaffirmer la volonté de la Communauté de communes du Lodévois Larzac de maintenir une offre culturelle de qualité après la disparition du festival de poésie Voix de la Méditerranée en 2015 pour des raisons budgétaires. «  Lodève a été nourrie par la poésie durant de nombreuses années et continue de l’être à travers le Printemps des poètes, indique le directeur des affaires culturelles Franck Loyat,  Nous avons repensé un événement culturel  recentré sur les arts vivants avec certes moins de moyens, mais en maintenant le rapport entre l’art et l’espace public.» L’année dernière, la première édition  a rassemblé 8 000 spectateurs (un quart en provenance de la communauté de communes, et 50% d’Héraultais). Ce succès  ouvre de belles perspectives

Soutien à  la création

Résurgence profite de la fraîcheur de la nouveauté et s’affirme « comme une preuve de la capacité du territoire à rebondir même dans les situations les plus difficiles », souligne la maire de Lodève, Marie-Christine Bousquet. Le festival donne aussi l’occasion de découvrir le riche patrimoine de Lodève.

Avec le sourire, si l’on suit La vaste entreprise, dans sa fausse visite de la ville. Cette compagnie utilise des éléments réels comme point de départ de leurs créations. Le groupe partira bien du monument aux morts. Les guides vous souhaitent une bonne visite en  prévenant d’entrée que tout va bien se passer même si vous n’apprendrez rien et qu’il est conseillé à tous de rester groupés…

Autre déambulation proposée par les quatre comédiens du Groupe Tonne, Ae-Les années, s’inspire de l’univers littéraire d’Annie Ernaut concentré sur le matériau autobiographique sans enluminure et à la fois très ouvert sur le monde réel qui nous entoure. Départ place de la république.  «La Place» justement, qui est aussi le nom du roman d’ Ernaut couronné par le Prix Renaudot.

Gratuité et petits prix

La majorité des spectacles sont gratuits à l’exception de Cirques Rouages pour son spectacle Sodade une fable circassienne et musicale  qui se déroule comme un rêve éveillé sur fil infini. De la création Gravitty.0 du chorégraphe Yann Lheureux qui allie dans cette pièce danse contemporaine et  acrobatie et du concert d’Anass Habib  jeune Syrien  accompagné de quatre  musiciens pour un concert de chants sacrés et profanes  associant les répertoires des chants arabes soufis, des chants maronites syriaques, et des chants sépharades andalous dans la Cathédrale de Lodève.

En se positionnant  sur la création,  en la soutenant comme elle le fait avec  la compagnie Nocturne  en résidence sur le territoire, le festival  joue la carte du développement culturel qualitatif à l’échelle locale en tentant de répondre aux attentes d’un public exigeants, sans oublier la convivialité.

 JMDH

Source La Marseillaise 21/05/2016

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