Une manifestation de jeunes Maliens a été dispersée par la police à Bamako le 10 janvier 2018. Un groupe de nationalistes entendait protester contre la présence et la partialité de la France au Mali. Il faut dire que cinq ans après le début de l’opération Serval, devenue depuis Barkane, la situation est loin d’être normalisée.
Il y a cinq ans, la France intervenait au Mali pour bloquer l’offensive des djihadistes. Depuis, la situation est figée. Débarrassé du pouvoir islamiste, le pays reste néanmoins sous la menace des islamistes qui multiplient les coups de main. Le parti d’opposition Parena prétend même que l’année 2017 a été la plus meurtrière pour le pays. Pour le journal l’Opinion, «la guerre au Mali, c’est deux morts par jour».
Aux yeux de la France, la création du groupe dit du G5-Sahel en mai 2017 devait régler le problème. Mais sa montée en puissance se fait lentement, faute d’un financement à la mesure de la tâche. Les Etats-Unis bloquent une contribution onusienne (tout en donnant 51 millions d’euros), et Paris n’a pu obtenir que le soutien de l’Union européenne. Désormais, c’est vers Pékin que se tourne Emmanuel Macron pour trouver une aide financière.
«Monter à bord du G5-Sahel pourrait être l’occasion pour la Chine de suivre de plus près la situation dans une zone stratégique qui lui échappe complètement», écrit le journal Le Monde.
L’autre problématique repose sur la menace de partition du Mali. Le pouvoir central ne contrôle plus le nord et le centre du pays, livrés aux groupes armés. L’accord de paix signé en 2015 avec différents mouvements touaregs tarde à s’appliquer. Mais le pouvoir de Bamako compte aussi des alliés au sein des factions qui régulièrement veulent mettre la région Nord sous leur coupe.
A l’occasion de l’anniversaire de l’intervention française, plusieurs associations de jeunes ont appelé à manifester à Bamako le 10 janvier 2018. Une énième manifestation contre la France qui n’a pas rassemblé grand monde. Une centaine de personnes qui ont été dispersés par la police à l’approche de l’ambassade de France.
Des jeunes nationalistes voient dans l’intervention de la France une atteinte à la souveraineté du Mali. Surtout Paris est accusé de cantonner les troupes maliennes dans leurs casernes, afin de les empêcher d’attaquer les Touaregs. «Que la France arrête de favoriser ou protéger un groupe armé au détriment d’un autre», réclame le mouvement On a tout compris.
Au premier rang et de gauche à droite, le ministre de l’Intérieur, Herbert Kickl, la ministre de la famille, Juliane Bogner-Strauß, la ministre des Affaires étrangères, Karin Kneissl, le vice-chancelier Christian Strache, le chancelier Sebastian Kurz, la ministre de l’environnement, Elisabeth Koestinger, le ministre de la culture, Gernot Bluemel, la ministre des Sciences Margarete Schramboeck et le ministre des Transports, de l’Innovation, de la Technologie et de la recherche, Norbert Hofer. Au second rang, de gauche à droite ?: le secrétaire d’Etat aux Finances, Hubert Fuchs, le ministre de l’Education, Heinz Fassmann, la ministre de la Santé, des Affaires sociales et du Travail, Beate Hartinger, la ministre des Finances, Hartwig Loeger, le ministre de la Défense, Mario Kunasek, le ministre de la Justice, Josef Moser et la secrétaire d’état, Karoline Edtstadler lors de la cérémonie d’inauguration du nouveau gouvernement à Vienne, le 18 décembre 2017. / Hans Punz/AFP
Heinz-Christian Strache
Vice-chancelier
Ministre de la fonction publique et des sports
? À 48 ans, ce prothésiste dentaire de formation au physique de gendre idéal est à l’aise aussi bien dans les boîtes de nuit et sur les réseaux sociaux que dans les arcanes partisans.
? Amateur d’échecs, « remarquable communiquant, il se distingue par son sens de la formule et par son talent d’appareil, estime Patrick Moreau, spécialiste de l’extrême droite au CNRS à Strasbourg. Il a progressivement adapté son discours au jeu démocratique, en choisissant des termes plus neutres et acceptables ». Nonobstant ses douteuses affinités néonazies de jeunesse, il est devenu peu à peu « fréquentable » grâce à ses habiles précautions langagières.
? Policé à l’extérieur, il demeure radical à l’intérieur. Partisan d’une ligne très dure sur l’immigration, il estime que « l’islam n’a pas sa place en Autriche ».
Karin Kneissl
Ministre des affaires étrangères
? Cette universitaire polyglotte de 52 ans, diplômée de l’université américaine de Georgetown et de l’École nationale d’administration (ENA), est une experte reconnue du Moyen-Orient.
? Proche du FPÖ, bien que n’étant pas formellement membre du parti, elle a fréquemment vilipendé dans la presse autrichienne l’islam politique et les choix migratoires d’Angela Merkel.
? Il est à prévoir qu’elle entrera en conflit avec la Commission européenne – sans pour autant remettre en cause la place de l’Autriche dans l’UE – pour obtenir des gains politiques.
Herbert Kickl
Ministre de l’intérieur
? Considéré comme une éminence grise, ce stratège de l’ombre a conçu les campagnes électorales et théorisé le recentrage de l’image du FPÖ, afin de l’amener au pouvoir.
? Issu d’un milieu modeste, « doté d’un sens politique extrêmement développé, idéologue très radical, il est en quelque sorte le cerveau de Strache, son cardinal Mazarin », confie Patrick Moreau.
Mario Kunasek
Ministre de la défense
? Jeune dirigeant régional du parti, Mario Kunasek, 41 ans, représente l’un des nouveaux visages promus au gouvernement.
Cet ancien officier de carrière a été l’un des analystes de la politique militaire de l’Autriche – pays à tradition de neutralité.
? Au sein d’un gouvernement partiellement pro-russe, il sera notamment en charge du dossier de l’acquisition d’équipements communs et ne devrait pas, a priori, bloquer des quatre fers la dynamique de Défense européenne.
Norbert Hofer
Ministre fédéral des transports, de l’innovation, de la technologie et de la recherche
? Après avoir été vice-président du Parlement et candidat à l’élection présidentielle, il est à 46 ans un fin politicien et l’un des hommes forts de ce gouvernement.
? Ce technicien aéronautique de formation aurait apparemment choisi lui-même son ministère, déclinant les Affaires étrangères et l’Intérieur « pour ne pas attirer à lui les dossiers épineux et ménager son avenir politique », précise Patrick Moreau.
? D’apparence lisse et mesuré, citant volontiers Margaret Tatcher et Charles de Gaulle, cet homme se présente comme un défenseur inflexible des valeurs traditionalistes du FPÖ.
? Très hostile à l’immigration, il considère que l’Autriche appartient à la « communauté culturelle allemande ».
Beate Hartinger-Klein
Ministre fédéral de la santé, des affaires sociales et du travail
? Cette femme politique de 58 ans, dont la carrière professionnelle a gravité autour du périmètre de son actuel ministère (santé, sécurité sociale, éducation), n’est certes pas la personnalité la plus forte du gouvernement (elle aurait été choisie par défaut parmi la base restreinte de « ministrables » du FPÖ)?;
? Elle devra toutefois incarner l’offre sociale du parti et prendre en charge des réformes importantes, notamment dans le domaine de la santé, réformes qui s’annoncent conflictuelles.
Benjamin Boutin
Source La Croix 18/12/2017
Editorial du « Monde ».
En Autriche, l’extrême droite banalisée
La nomination comme vice-chancelier de Heinz-Christian Strache, proche des néonazis dans sa jeunesse, et de deux ministres d’extrême droite aux postes régaliens n’a pas suscité l’indignation.
Où est passée Elfriede Jelinek ? Le silence de la Prix Nobel de littérature autrichienne symbolise, à lui seul, les changements majeurs survenus en Europe en moins de deux décennies. En 2000, le pacte inédit dans l’Union européenne entre les conservateurs autrichiens et l’extrême droite avait suscité une vague d’indignation dont elle est restée l’égérie. L’Europe avait voté des sanctions. L’Autriche avait été boycottée. On parlait de cordon sanitaire. Et pourtant, le sulfureux Jörg Haider avait renoncé à un strapontin et le président conservateur Thomas Klestil avait barré la route à deux personnalités ouvertement xénophobes.
Dix-sept ans plus tard, quel spectacle stupéfiant que de voir, samedi 16 décembre, le président autrichien, l’écologiste Alexander Van der Bellen, entériner la nomination comme vice-chancelier de Heinz-Christian Strache, proche des néonazis dans sa jeunesse. Tout aussi sidérante, l’annonce de la nomination de deux ministres d’extrême droite aux postes régaliens de l’intérieur et de la défense, alors que les conservateurs, arrivés largement en tête lors des élections législatives du 15 octobre, ne paraissaient pas contraints à de telles concessions.
Pourtant, le chef de l’Etat autrichien fut le premier à redonner un peu d’espoir aux opposants à tous les extrémismes en l’emportant avec panache face au FPÖ, l’année dernière, en dépit du Brexit et de l’élection de Donald Trump à la Maison blanche survenus dans les mois précédents. Il a été très actif en coulisse pour imposer des garde-fous permettant à l’Autriche de s’affirmer encore comme étant « pro-européenne ». Mais il lui faudra faire avec cette réalité bien triste : les premières réactions à l’annonce du retour des héritiers de M. Haider sous les dorures de la Hofburg, à Vienne, auront été celles des organisations juives : le Congrès juif mondial s’est dit « bouleversé ».
Ankara se permet de faire la leçon aux Européens
Rapidement, il a été rejoint par l’Italie, indignée qu’on veuille offrir des passeports à ses citoyens du Tyrol du Sud sans la consulter et qui a dénoncé un « nationalisme ethnique ». Puis par la Turquie, outrée de voir le nouveau pacte gouvernemental autrichien souhaiter l’arrêt formel des négociations de son adhésion à l’Union européenne. En pleine dérive autoritaire, Ankara se permet même de faire la leçon aux Européens : le ministre des affaires européennes turc a ainsi affirmé « qu’ignorer les approches racistes du programme du gouvernement autrichien (…) c’est faire montre de faiblesse ».
Il est pour le moins regrettable que la Commission européenne, comme Paris et Berlin, laissent le champ libre au régime turc pour exprimer des inquiétudes tout à fait légitimes sur l’avenir des musulmans vivant en Autriche. Pour l’instant, aucune réaction n’est venue de ceux qui défendent la démocratie, que ce soit du côté d’Emmanuel Macron ou d’Angela Merkel.
Quant à Elfriede Jelinek, on ne peut la blâmer de se taire. A 71 ans, elle s’est retirée de la vie publique, et plus personne ne menace, comme elle l’avait fait, de déserter le pays. En fait, cela fait bien longtemps que l’imprécatrice aux phrases acérées a délaissé le champ de bataille. Elle a pu expérimenter le sentiment d’impuissance si cuisant des artistes en Autriche. Les manifestations prévues lundi 18 décembre seront le baromètre de la banalisation de l’extrême droite. Pour rappel, 250 000 personnes défilaient, il y a dix-sept ans, dans les rues de Vienne contre le FPÖ.
La voiture de Daphne Caruana Galizia après son explosion, à Bidnija, à Malte, le 16 octobre. Photo Darrin Zammit Lupi. Reuters
La blogueuse et journaliste maltaise Daphne Caruana Galizia, à l’origine d’accusations de corruption qui avaient provoqué des élections anticipées en juin, a été tuée lundi par une bombe placée sous sa voiture.
Daphne Caruana Galizia est à l’origine d’accusations de corruption contre l’entourage du Premier ministre, Joseph Muscat. Ce dernier a évoqué « une journée noire pour notre démocratie », après le drame.
«Cet escroc de Schembri était au tribunal aujourd’hui, plaidant qu’il n’est pas un escroc» : le titre du dernier billet publié ce lundi à 14h35 par Daphne Caruana Galizia (photo AFP) sur son «carnet» en ligne, Running Commentary, résume assez bien son style offensif. Une demi-heure plus tard, la journaliste et blogueuse de 53 ans a été tuée par une bombe placée sous sa voiture, alors qu’elle conduisait près de son village de Bidnija, dans le nord de Malte. En décembre, la version européenne du magazine Politico la faisait figurer dans son classement des «28 qui font bouger l’Europe». Et la décrivait comme «un WikiLeaks à elle toute seule, en croisade contre l’opacité et la corruption à Malte».
L’an dernier, en plein scandale des Panama Papers, Caruana Galizia avait été en première ligne des révélations sur les sociétés offshore détenues par Keith Schembri, le chef de cabinet du Premier ministre travailliste, Joseph Muscat, et par le ministre de l’Energie, Konrad Mizzi. Cette année, au mois d’avril, elle avait cette fois accusé la femme de Muscat d’être la bénéficiaire d’une société-écran domiciliée au Panama, sur les comptes de laquelle un million de dollars auraient été versés par la fille du président azerbaïdjanais Ilham Aliyev. Le couple Muscat avait nié, accusant la journaliste d’avoir été manipulée par une lanceuse d’alerte russe. La justice n’en avait pas moins ouvert une enquête, et le gouvernement maltais avait convoqué des législatives anticipées – remportées en juin par les travaillistes.
Jusqu’à 400 000 lecteurs
Entre-temps, Daphne Caruana Galizia avait également dénoncé le lobbying de l’industrie du tabac en révélant que le vice-gouverneur de la Banque centrale de Malte, Alfred Mifsud, avait été rémunéré pendant plusieurs mois par Philip Morris au début des années 2010. En février, son compte bancaire avait été gelé sur demande du ministre de l’Economie, Christian Cardona ; un mois plus tôt, elle avait accusé ce dernier d’avoir visité une maison close alors qu’il était en voyage d’affaires en Allemagne. Et celle qui se définissait auprès du Monde comme une «journaliste d’opinion», et assumait ouvertement sa proximité avec le Parti nationaliste (conservateur), s’était aussi fait des ennemis à droite après avoir accusé Adrian Delia, le nouveau leader de l’opposition, d’avoir un compte offshore à Jersey, alimenté, écrivait-elle, par l’argent d’un réseau de prostitution.
Dans un pays que Reporters sans frontières place 47e dans son classement mondial de la liberté de la presse, où les poursuites judiciaires à l’encontre des médias sont courantes, Caruana Galizia pouvait attirer certains jours, selon Politico, jusqu’à 400 000 lecteurs – presque autant que la population totale de l’île. Lors d’une conférence de presse, ce lundi, Joseph Muscat a dénoncé un acte «barbare», «une journée noire pour notre démocratie et notre liberté d’expression».
Par un arrêt rendu le 22 juin 2017 (n°8806/12) et devenu définitif le 22 septembre 2017, la Cour européenne a condamné? la France en raison d’un prélèvement ADN pour alimenter le Fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG). Ce dernier a été créé en 1998 et devait, à l’origine, être constitué des empreintes génétiques pour des infractions criminelles ou à caractère sexuel. Progressivement, le périmètre de ce fichier a été considérablement élargi, jusqu’à comprendre les infractions les moins graves, tel le vol simple.
Le requérant, syndicaliste, avait été condamné pour des violences commises à l’occasion d’une manifestation, à savoir des coups de parapluie contre un gendarme dont l’identité n’a pu être déterminée. À la suite de cette condamnation, sur le fondement des articles 706-55 et 706-56 du code de procédure pénale, il devait se soumettre à un prélèvement d’ADN, afin d’être fiché au FNAEG. Son refus a entrainé une nouvelle condamnation à une amende correctionnelle de cinq cents euros. Après épuisement des voies de recours internes, la Cour européenne des droits de l’Homme a été saisie, pour violation de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme, qui protège le droit à une vie privée.
La Cour européenne des droits de l’Homme rappelle que « La protection des données à caractère personnel joue un rôle fondamental dans l’exercice du droit au respect de la vie privée consacré par l’article 8 de la Convention. La législation interne doit donc ménager des garanties appropriées pour empêcher toute utilisation de données à caractère personnel qui ne serait pas conforme aux garanties prévues par cet article. (…) Le droit interne doit aussi contenir des garanties aptes à protéger efficacement les données à caractère personnel enregistrées contre les usages impropres et abusifs (…), tout en offrant une possibilité concrète de présenter une requête en effacement des données mémorisées ».
La Cour de Strasbourg retient que la législation française n’offre pas de possibilité de solliciter l’effacement d’un fichage au FNAEG et que les données collectées sont conservées pendant quarante ans. Ces modalités sont disproportionnées au regard du droit au respect de la vie privée de telle sorte que l’article 8 de la Convention n’est pas respecté par la France, qui est condamnée.
Le SAF, qui condamne depuis longtemps ces fichages, se félicite de cette décision, laquelle aurait dû entrainer un abandon de la plupart des poursuites pénales pour refus de prélèvement ADN. Or, le Ministère public français ne semble pas avoir pris toute la mesure de l’arrêt du 22 juin 2017, puisque des convocations en justice, pour répondre de cette infraction, ont été émises en août et en septembre 2017.
L’Etat français doit tirer toutes les conséquences de cette condamnation en modifiant sa législation afin de la rendre compatible avec les exigences de la Convention européenne des droits de l’Homme à laquelle elle est partie .
Par ailleurs, il appartiendra aux personnes concernées de faire valoir la primauté du droit de la Convention européenne des droits de l’Homme. Le SAF sera à leurs côtés pour faire valoir leurs droits.
Source : SAF Syndicat des avocats de France 09/10/2017
Officier dans l’armée de l’air, le général retraité Françis Lenne participe aux commémorations des bombardements d’Hiroshima et Nagasaki. Il donnera une conférence autour de son livre Le deuil d’Hiroshima qui dénonce la dissuasion nucléaire et ses dénis et prend position en faveur du traité pour le désarmement nucléaire mondial qui sera proposé à l’ONU le 20 septembre prochain.
Entretien
Après avoir été impliqué dans la dimension stratégique, comment est né votre engagement en faveur du désarmement nucléaire ?
La problématique du désarmement nucléaire n’est pas un sujet simple, d’autant qu’on cherche à l’embrouiller de la base jusqu’au plus haut niveau de l’État. Moi comme bien d’autres, j’ai eu le cerveau lavé par des considérations politiques de part et d’autre de l’Atlantique. J’ai travaillé sur la dissuasion dans un programme de transmission en relation avec les USA qui avaient un programme similaire. A ce titre, j’ai rencontré des stratégistes qui évoquaient savamment les biens faits de la dissuasion. Je me suis progressivement rendu compte que lorsque je grattais un peu leurs théories, ils fuyaient n’hésitant pas à avoir recours à des sophismes qu’auraient décelé des enfants de 7 ou 8 ans.
Cela m’a conduit à débuter mes recherches. N’étant plus à ce jour tenu par mon devoir de réserve, j’affiche ma thèse sans faux fuyant, selon laquelle la dissuasion nucléaire est le passage à l’acte d’une psychose liée au traumatisme d’Hiroshima et de Nagasaki, et justifiée par une transformation de l’Histoire.
Une forme de perversion constitutionnelle ?
On peut l’entendre ainsi, avec pour origine psychotique les événements de Hiroshima et de Nagasaki qui ont été refoulés. A partir de là, la collectivité s’est construite une autre réalité, celle de la stratégie de la dissuasion qui a justifié les bombes jusqu’à la fin de la guerre froide. Après la chute du mur, comme il n’y avait plus d’ennemi réel, cela s’est compliqué, il a fallu en trouver d’autres… Aujourd’hui, cette autre réalité, il est très difficile de l’évacuer, parce qu’on a construit dessus toute une série de dénis pour justifier l’événement et le rendre acceptable.
Cette falsification de l’Histoire est-elle également relative au contexte des journées des 6 et 9 août 1945 et de la réédition japonaise ?
La décision de produire la bombe atomique fut prise en décembre 1942. Roosevelt meurt en avril 1945, son successeur, Truman débarque dans un moment difficile. Le secrétaire à la Guerre Stimson, lui révèle le projet seulement deux semaines après son entrée en fonction. Truman n’a qu’une connaissance approximative de leur capacité de destruction. Il arrive à Posdam au lendemain du 1er essai qui eu lieu le 16 juillet à Alamogordo, au Nouveau-Mexique. Staline qui avait un espion dans la place est au courant.
Pour Stimson le largage de la bombe est un moyen d’anticiper l’attaque Russe en Mandchourie qui eu lieu dans la nuit du 8 au 9 août. Le Japon était à plat. Le ministre de la guerre avait envoyé à son ambassadeur un message, intercepté par les américains, signifiant qu’ils étaient en train de se rendre. Truman n’est pas vraiment au fait des enjeux. Il donne son accord tout en faisant promettre d’épargner les femmes et les enfants.
L’ultimatum envoyé au japonais ne mentionne pas la bombe atomique. Après Hiroshima, les journalistes japonais demandent à leur Premier ministre sa position. Celui si leur répond « Nous réfléchissons» une formule japonaise ambiguë qui peut aussi être interprétée par «aller vous faire voir». Ce titre fait la une des journaux japonais et il n’est pas étranger au largage de la seconde bombe sur Nagasaki. Par la suite, on a réécrit l’histoire pour dire que les bombes avaient permis d’épargner deux millions de morts. L’histoire a été déniée y compris par les Japonais.
Plus de 70 ans après le drame, les risques nucléaires militaires ont-ils diminué ?
La situation a empiré. Elle s’est aussi complexifiée. Les armes nucléaires ont été produites de manière compulsive. L’arsenal planétaire comprend actuellement entre 15 000 à 16 000 têtes nucléaires. On sait qu’il suffirait que cinq bombes explosent pour empêcher la terre de respirer.
Quand est il des risques accidentels ?
On dénombre de nombreux accidents qui ne sont que la face immergée de l’iceberg car beaucoup restent non connus. En France dans les année 60, un orage qui avait produit un bug dans les transmissions électriques a fait décollé un mirage 4 armé de bombe nucléaire. Le pilote n’a pas largué parce qu’il n’a pas trouvé son point de ravitaillement.
Les Russes et les Américains ont aussi connu des accidents. Jusqu’ici nous avons eu beaucoup de chance mais on doit s’attendre au jour où cette chance ne sera pas au rendez-vous. En 2009 deux sous-marin à propulsion nucléaire français et britannique sont entrés en collision. Il y avait 90 bombes à bord plus les moteurs nucléaires…
Cela paraît incroyable…
Non, justement parce que ces sous-marins sont construits pour être indétectables. Quand ils sortent de leur port d’attache, ils émettent des bruits pour se faire repérer puis ils disparaissent, et à partir de ce moment, leur mission débute.
Quelle place occupe le nucléaire dans l’armée ? Comment ce sujet est-il vécu par les hommes ?
C’est très particulier et en même temps lointain parce que très cloisonné. Les gens qui ne participent pas aux forces de frappe n’ont aucune connaissance de ce sujet. Je ne sais pas précisément combien de personnes sont dans la confidence peut-être 280 ou 300 tout au plus. On ne pénètre pas comme ça dans le petit monde du nucléaire.
Les personnes informées sont très surveillées. Ils sont aussi formatés. J’ai quelques amis qui en font partie. Ils sont dans le déni total. Ce sont des gens intelligents par ailleurs, mais dès que l’on aborde ce sujet ils périclitent.
Le traité sur l’interdiction des armes nucléaires qui vient d’être adopté à l’ONU en juillet ouvre-il des perspectives ?
Effectivement, les choses évoluent. C’est la première fois que nous avons quelque chose sur la table. Le travail mené à l’ONU en faveur du désarmement nucléaire mondial vient d’aboutir avec ce traité sur lequel les ONG et un certains nombres d’États travaillent depuis 2011. Après la résolution fin 2016, la contribution de 122 pays a permis sa publication le 7 juillet dernier. Il faut noter qu’aucune des puissances atomiques ne l’a ratifié et que les Pays-Bas, seul pays parmi les 29 membres de l’OTAN à avoir suivi les discussions, se sont abstenus lors de l’adoption de la résolution.
Ce traité devrait entrer en vigueur en septembre une fois ratifié par 50 pays. Le texte du traité doit être accompagné d’un projet pour concrétiser cette avancée. Il n’y a que l’ONU qui peut le conduire.
Recueilli par Jean-Marie Dinh
En savoir plus : « Le deuil d’Hiroshima » gratuit et libre de droit. https://www.dropbox.com/s/ysfew6nich6w6tu/Le%20deuil%20Hiroshima%20-2017.pdf?dl=0
Source La Marseillaise 5 août 2017
4 jours de jeûne pour l’abolition des Armes nucléaires
Il y a 72 ans… Le 6 août 1945 à 8h15 du matin la première bombe atomique explosait sur Hiroshima. Le 9 août la seconde tombait sur Nagasaki.
Dans de nombreuses villes de France et d’autres pays (Royaume Uni, Allemagne, Togo, Etats-Unis…) un jeûne s’organise du 6 au 9 août pour exprimer la volonté d’éliminer les armes atomiques et se consacrer à l’information du public sur cette menace imminente et inacceptable pour le monde. Si le nucléaire civile et militaire sont liés depuis le début comme les doigts de la main.
A Montpellier, le collectif Stop armes nucléaire, regroupant les associations : Arrêt du nucléaire 34, Mouvement pour une alternative Non violente, Maison de la paix-Amis de l’Arche-Canva, Mouvement pour le désarmement, la paix et la liberté 34,(MdpL), Pax Christi, compte un certain nombre de militants pour le désarmement. Le collectif montpelliérain qui s’associe au jeûne pour la seconde année, sera à l’initiative de différentes actions de sensibilisation durant ces quatre jour.
« Le jeûne est une manière de se consacrer à cet événement, indique Didier Lator, membre de Sortir du Nucléaire, durant quatre jours, on donne de notre personne, sans mettre notre vie en danger, pour un sujet important. Cela a un impact auprès de certaines personnes qui réalisent, à travers la teneur de notre engagement que c’est un vrai sujet. Mais beaucoup ont le sentiment que c’est un combat perdu d’avance. Parce que les centrales sont là et qu’on tient des discours complexes et très techniques pour que les citoyens ne s’emparent pas de cette question. Alors que 42 des 58 réacteurs nucléaires français ont dépassé la durée de vie de 30 ans pour lesquels ils ont été construits. A 75 km de Nîmes le réacteur n°1 de centrale Tricastin comporte 17 fissures.»
Au niveau local le collectif entend réitérer sa demande de rendez-vous restée lettre morte avec le maire Philippe Saurel. « Nous souhaitons juste le rencontrer pour connaître sa position.»
Du 6 au 9 août permanence sur l’esplanade de 11h à 17h. Le 6 août à 11h commémoration sur l’Esplanade. Le 7 août, à 20h,projection du Miracle Mile film à l’Utopia suivi d’un débat avec le Général Françis Lanne. Le 8 août à 18h30 sur l’Esplanade conférence du Général Françis Lanne, le 9 août à 11h02 , prise de parole à l’heure précise du bombardement de Nagasaki.