Le président de Région en appelle à un nouveau serment du Jeu de Paume dans une tribune librede l’hebdomadaire Marianne.
Depuis les dernières élections régionales, les médias nationaux s’intéressent aux joutes politiques du Languedoc-Roussillon. Un intérêt qui tient sans doute moins au destin collectif de sa population qu’à la posture occupée par les acteurs dans la perspective de 2012. Après la tribune d’Hélène Mandroux dans Le Monde, c’est au tour deGeorges Frêche de prendre la plume.
Dans l’hebdomadaire Marianne de cette semaine, le président du Languedoc-Roussillon dénonce le faussé entre les élites parisiennes engluées dans la médiacratie et la « politicaillerie » et le petit peuple. « La France étouffe. Elle ressemble à un Titanic où, côté VIP, on se demande, que peut on dire ?, pendant que, dans les soutes, on crie : que peut on faire pour nous ?
Dans un lexique entre Sénèque et Jaurès, Georges Frêche choisit son vocabulaire pour poser un constat distancié. Aucune référence directe au maire de Montpellier, ni à la première secrétaire du PS, ou à la politique du gouvernement Fillon.Il met en exergue « l’absence de débouché politique » face au « ressenti social ». Rejetant l’idée d’un quelconque complot comme l’image de la main invisible du marché, l’homme fort du Languedoc-Roussillon plaide pour un retour de l’action politique. « L’information continue, le « présentisme »à tous crins, la fausse interactivité, a broyé le temps politique. Il faut répondre vite, penser vite, agir vite, réagir vite. Mais la fast démocratie n’existe pas. »
Pour Georges Frêche, Le malaise social se double d’une fracture territoriale. «La question sociale est de retour. » Et le président de faire l’éloge des élus de province : « Comme on pouvait le dire autrefois du tiers état, ils connaissent mieux quequiconque cette réalité qu’ils se coltinent quotidiennement (…)Ce sont eux qui gardent le cap au beau milieu de la tempête. Il est temps de les réunir, urgent de les écouter (…) il est l’heure de se retrouverpour un nouveau serment du Jeu de Paume. » Reste à savoircommentla mission de dialogue et de rénovation mise en place par le Bureau National du PS pour enquêter sur les fédérations socialistes du L.R appréciera l’abolition de la féodalité !
Essai. A la lumière de l’histoire, l’ouvrage d’Anne Lise Humain-Lamoure analyse les enjeux politiques et les pratiques sociales de la démocratie de proximité.
Faire une démocratie de quartier ? L’ouvrage d’Anne-Lise Humain-Lamoure tombe à pic à l’heure où Montpellier reconduit l’opération Printemps de la démocratie sur fond de bataille pour devenir kalif surdoué. Sur le papier, notamment celui de la presse institutionnelle, il est question » d’aller à la rencontre de l’expression citoyenne, au plus près des habitants, et de consacrer la prise en compte de l’expertise d’usage des habitants dans l’acte décisionnel. » L’objectif affiché ne pouvant être que louable et désintéressé, tout citoyen comprend naturellement que l’intérêt de nos élus locaux pour la démocratie locale s’inscrit avant tout dans un souci électoral. Ce dont convient l’auteur en pointant » le souci de légitimation de leur représentativité dans le cadre d’un contexte politique qui valorise fortement le principe d’une proximité. «
Qu’est ce que la proximité ?
Cette proximité incontournable et cruciale, devenue en quelques années une valeur politique de premier plan sans que l’on puisse pourtant en donner une définition claire, trouve place dans larecherche pluridisciplinaire (géographie, aménagement, sociologie et sciences politiques ) d’Anne-Lise Humain-Lamoure. L’auteure y consacre un chapitre. Sous le titre Quartier et proximité une nouvelle idéologie ? elle analyse le mécanisme de production de légitimité politique comme une rupture symbolique avec une légitimité naguère liée à la distance. Distance de l’intérêt général par rapport à l’intérêt particulier, de l’administration rationnelle par rapport à la relation personnelle et de l’Etat par rapport à la société civile.
De quel quartier parle-ton ?
Si le quartier apparaît unanimement comme le territoire à construire, la division spatiale administrative comme la pertinence de son échelle dans l’espace urbain ne sont ni discutées ni imposées par le cadre légal. » Le quartier apparaît comme une catégorie abstraite dont l’échelle et les critères de délimitation ne sont jamais définis. » En fonction du contexte, les acteurs municipaux peuvent ainsi mobiliser le quartier différemment pour le mettre en lien avec les axes politiques qu’ils entendent mettre en valeur. Tandis que les habitants font référence, dans leur grande majorité, à l’idée de rencontre et d’interaction sociale. Pour la population » Le quartier se définit avant tout par la diversité des personnes qui s’y côtoient. «
Critique du mode électif
L’objet de la loi de démocratie de proximité, adoptée en février 2002 est de lier gestion de proximité et démocratie locale. Le texte se fixe pour objectif de renouveler le lien entre élus et citoyens pour renforcer la démocratie, améliorer l’efficacité de l’action publique, et retrouver un lien social considéré comme érodé.
Cette loi répond avant tout à la crise de représentation » souligne la chercheuse, en fournissant un cadre » pour mieux décider au nom des gens en refondant la légitimité des élus. » Le régime représentatif assuré par les élections certifie théoriquement la légitimité des décisions prises et de ceux qui les prennent. Mais il est aujourd’hui de plus en plus contesté comme l’indique les records atteints par l’abstention dans toutes les élections intermédiaires aux présidentielles. » L’élection suppose une compétition pour la conquête des mandats et des pouvoirs qu’ils confèrent. Or, cette compétition, organisée par et dans les partis politiques, est souvent ressentie comme des réseaux de pouvoir dans lesquels une part croissante de citoyens se sent exclue et oubliée. » A cela s’ajoute la litanie des promesses non tenues, autant que l’impression d’une caste fermée de politique issue des classes les plus favorisées. La critique du modèle républicain revendique aussi l’ouverture des systèmes décisionnels, et la reconnaissance de la différence entre les groupes sociaux, sur la base de leurs origines ethniques et religieuses.
La démocratie de proximité aurait donc pour but d’abolir ou d’atténuer la domination politique, sociale et culturelle. Mais pour la plupart de ses promoteurs officiels, ce n’est guère concevable. » Pour la première fois depuis la Révolution, on choisit de découper un des territoires de la République » rappelle Anne-Lise Humain-Lamoure dont l’essai ausculte la démocratie à partir du plus petit des territoires. Un miroir édifiant sur les pratiques et les questions que suscite notre système politique.
Jean-Marie Dinh
Faire une démocratie de quartier ? Editions Le bord de l’eau, 22 euros
Steven Cohen est un artiste d’Afrique du Sud, il s’est consacré pendant dix ans à la création d’œuvres plastiques exposées dans de nombreux musées internationaux. Il utilise son corps et parfois celui des autres, pour créer un « art vivant » qui empreinte des éléments à la fois à la sculpture, à la danse et au travestissement. Ses performances explorent plusieurs moyens d’expression traitant différentes questions identitaires liées à la judaïté, à l’homosexualité, au racisme et à l’identité ethnique. En résidence pour cinq jours au centre chorégraphique de Montpellier, Steven Cohen s’exprime sans réserve. Dans la vie comme dans l’art, il aborde les sujets de front.
« Votre expression artistique puise sa substance dans la fascination et les contradictions, qu’est-ce qui vous interpelle le plus en ce début de XXIe siècle ?
J’avais déjà commencé au XXe. La contradiction fait partie de la vie. C’est un besoin de l’art qui ne peut se satisfaire d’une pensée unique. Je suis fasciné par mes propres contradictions. Je suis un bon juif et un pédé, un Africain et un blanc. Mon sentiment se situe entre le narcissisme et la révulsion qui me traverse.
Qu’est ce qu’être un bon juif ?
Je suis croyant. Je me considère comme juif mais je suis pédé et dans l’ancien testament, il est écrit trois fois que nous sommes anormaux bref, qu’il faut nous faire disparaître. Je suis respectueux. J’essaie d’être honnête. En même temps, je m’interroge beaucoup sur mon honnêteté. En tant qu’Africain du Sud, j’explore le racisme qui est en moi. Cela dit, je trouve qu’en France les gens sont très racistes. La façon dont on considère les banlieusards est incroyable.
Dans la performance Chandelier qui sera projetée ce soir, on v,ous voit déambuler en chandelier tutu au milieu d’un bidonville en destruction à Johannesburg. Comment cette intrusion a-t-elle été perçue par la population ?
Le mot intrusion est juste parce que je suis blanc. Cependant, ce n’est pas une intrusion chez les gens mais dans l’espace public, là où la vie est en partage. Cela fait partie de mon travail parce qu’en Afrique, on ne va pas au musée. Je crois que les gens n’ont pas vraiment compris. Mais ils s’engagent. J’ai fait une expérience similaire à Lyon où les passants m’ignoraient. Ils faisaient semblant de ne pas voir. C’est vraiment terrible.
La souffrance qui traverse votre œuvre a-t-elle un statut différent en occident ?
En occident, on fuit la souffrance. Ce qui est impossible et donc très différent dans le reste du monde. Si on accepte la souffrance on a la possibilité de se transformer, pas si on la vit comme un déni.
Votre rapport à l’espace et au corps vous ouvre les portes du monde de la danse…
L’art est toujours visuel. Je ne suis pas un danseur, je suis plasticien et psychologue. La danse contemporaine est morte. Tout y est devenu vide et sec. Ils cherchent quelque chose pour se nourrir. Une nouvelle manière d’exprimer les choses. Moi je refais peut être ce qui se faisait dans les années 60 et que je ne connais pas. Quelque part cela m’effraie, mais mon ignorance m’innocente. En ce moment je passe mon temps entre Lille et Johannesburg. A Paris, je me sens comme une merde. Avec ces tours qui vous toisent, cette ville est faite pour ça. Je ne suis pas établi et ne cherche pas à l’être. Un critique a dit de moi que j’étais offshore ça me convient. Je suis établi en mer.
Golgotha, votre dernière création est en lien avec le suicide de votre frère vous y dénoncez les méfais du capitalisme…
Golgotha est le meilleur travail que j’ai fait. Un travail difficile, d’acceptation, c’est aussi un passage dans la sphère privée. Le rapport privé public, m’intéresse beaucoup parce qu’il touche à ce qui se passe derrière la porte. Si l’on parle de nous, on parle des autres. Les gens ont été choqués parce que je marchais sur des crânes humains. J’ai trouvé ces deux têtes asiatiques dans une boutique près de Wall Street. Ce qui est choquant c’est que ces têtes soient vendues avec l’aval de l’Etat qui perçoit des impôts sur ce commerce.
Pensez-vous que l’assassinat du néonazi Eugène Terre’Blanche peut réveiller de vieux démons en Afrique du Sud ?
Je ne suis pas sûr que l’affaire se soit passée telle qu’on l’a décrite. Il aurait été tué par deux de ses salariés esclaves qui gagnent 30 euros par mois. Qui avaient déjà fait de la prison et tué d’autres personnes ! Tout cela me paraît très confus. La position du président Zuma est aussi étrange… En Afrique du Sud rien n’est clair. En tous cas, je pense que c’est bien de parler de cela et pas de la coupe du monde qui occupe tous les esprits.
Quel est votre meilleur et votre pire souvenir ?
Le meilleur c’est quand j’avais six ans et que je me suis déguisé pour la première fois en fille. Mon père a pris une photo que j’ai conservée. Le pire c’était quand mon frère était en train de mourir. Il a dit sauvez-moi avant que je me suicide et je ne l’ai pas compris. Aujourd’hui ces deux souvenirs sont toujours au cœur de mon travail. »
Recueilli par Jean-Marie Dinh
Chandelier le 07 avril. 20h : Chandelierrévèle à travers l’art de la performance, la danse et le film, les contradictions entre l’Europe et l’Afrique, les blancs et les noirs, les riches et les pauvres, l’ombre et la lumière, le privé et le public, les forts et les opprimés, la sécurité et le danger. Les images projetées durant la performance ont été réalisées en 2002 en Afrique du Sud au milieu des SDF noirs de Johannesburg pendant la destruction de leur bidonville par les employés municipaux de la ville dans un ballet où la violence est omniprésente.
Livre document. Témoignages de résistant(e)s de l’Hérault et de la région recueilli par François Berriot.
L’universitaire montpelliérain François Berriot vient de publier aux éditions de l’Harmattan La France Libre, la résistance et la déportation (Hérault, Zone Sud). Ce livre constitué de vingt-quatre témoignages d’hommes et de femmes qui furent des acteurs de la Résistance dans notre région a été réalisé avec le soutien du Centre régional d’Histoire de la Résistance et de la Déportation basé à Castelnau-le-lez.
En zone Sud, la Région 3 regroupe l’Aude, l’Aveyron, le Gard, l’Hérault, la Lozère et les Pyrénées-Orientales. La naissance des maquis, à partir du printemps 1943, répond à des contingences topographiques et sécuritaires, délaissant la plaine côtière et la frontière espagnole au profit de l’arrière-pays. Mais les actes de résistance débutent bien en amont. L’ouvrage met notamment en exergue comment le combat contre l’occupant s’est nourri ici de l’expérience des Républicains espagnols. Comme le démontre le témoignage de Candido Lopez, en charge du dynamitage des trains entre Mireval et Frontignan qui débute dans le village espagnol de Prahua dès 1934 et passe par les conditions lamentables du camp d’Argelès. » Le 28 février 1939, nous arrivons à la frontière épuisés. Un autre cauchemar nous attend en France. «
Beaucoup de jeunes combattants rejoignent la résistance pour échapper à la mobilisation des travailleurs français requis pour le S.T.O afin de travailler pour le Reich. Jean Soto de Paulhan, évoque, lui, son expérience au sein des » Groupe Francs « , puis des M.U.R (Mouvement unis de Résistance) et les contacts avec le Maquis de Bir Hakeim qui se déplace dans le Languedoc-Roussillon et le Sud Ouest.
On survole les techniques de guérilla adoptées, ponctuelles et diffuses. On mesure la volonté d’action de la jeunesse comme l’incertitude liée à la particularité des luttes qui contournent l’affrontement direct avec l’ennemi. » Ce livre se veut uniquement un recueil de témoignages, confié par l’écrit ou, ce qui est encore plus émouvant, par la parole orale, précise François Berriot dans la préface, il ne prétend ni à l’exhaustivité ni au réalisme historique. «
Il est peu question de l’aide fluctuante des Alliés et des choix politiques qui ont joué sur la nature et l’activité de ces maquis. La force de ce recueil vient de l’expérience humaine vécue. De la détermination profonde que le lecteur saisit entre les lignes du récit. Une force qui contribua à la libération du territoire particulièrement violente autour de la capitale régionale. Le livre participe à la construction d’une mémoire combattante, mémoire collective en lien avec le passé des hommes et des femmes, complémentaire à la version historique.
Jean-Marie Dinh
La France libre résistance et la déportation (Hérault zone Sud) Editions de l’Harmattan
Shobhaa Dé une star indienne de passage à Montpelllier
Auteur à succès, journaliste, l’ex mannequin Shobhaa Dé est une star indienne qui s’est imposée avec détermination et dignité. Ecrivain très à l’écoute de la société, ses quatorze livres dont sept romans, abordent à travers le sexe et les problèmes de couples, la condition des femmes de manière décomplexée. Traduits dans plusieurs langues, ils se sont vendus en Inde à plusieurs millions d’exemplaires. Elle était hier l’invitée de la librairie Sauramps à l’occasion de la parution de La nuit aux étoiles, premier livre traduit en français qui dévoile les coulisses peu reluisantes de Bollywood.
Vous êtes un auteur très populaire en Inde où puisez-vous vos sources d’inspiration ?
De ma passion de vivre, de ma passion pour les mots, je pense que c’est cela qui me connecte avec mes lecteurs. C’est une connexion qui vient à la fois de la tête et du cœur.
La nuit des étoiles vous dévoilez l’envers du décor de Bollywood qui révèle un monde brutal…
Le travail d’un écrivain est de dire la vérité. Bollywood est en effet un monde de cruauté et de violence. Cela concerne tout le milieu mais cette violence se révèle plus particulièrement à l’encontre des femmes. J’ai écrit ce livre il y a vingt ans. Depuis les choses ont un peu évolué.
C’est le premier de vos livres traduit en français, pourquoi si tard ?
C’est sans doute lié au développement du cinéma de Bollywood en France. Je pense que chaque livre trouve son propre temps. Ce qui est très important c’est de trouver le bon éditeur.
Qu’est-ce qui a changé en vingt ans ?
Le cinéma indien concernait surtout le public national, avec la mondialisation, il s’est ouvert à l’international. Aujourd’hui les jeunes comédiennes choisissent de faire ce métier et font des études pour cela. Alors qu’auparavant leurs parents choisissaient pour elles. Comme dans le livre où les parents d’Aasha mettent quasiment leur fille de quinze ans dans le lit des producteurs. Le modèle de vie a beaucoup changé en vingt ans du moins dans les villes.
Dans le livre vous mettez en exergue les différences entre le Nord et le Sud ?
C’est différences s’expriment à travers la langue. Il est beaucoup plus difficile de réussir dans le cinéma si vous parler l’Hindi avec l’accent. Et puis il y a aussi la couleur de la peau. Le fait d’avoir des yeux clairs est un avantage.
La condition des femmes, un thème qui traverse votre œuvre, a-t-elle évolué durant cette période ?
A la tête du Congrès, Sonia Gandhi met un point d’honneur à la promotion des femmes dans la sphère politique. La semaine dernière un texte est passé. Il fait suite à la volonté du (BJP) parti nationaliste Hindous de réserver 33% des postes du parlement à des femmes. Elles n’étaient que 9% auparavant. C’est une avancée certaine. Les femmes sont de plus en plus puissantes en Inde.
L’émancipation des femmes s’opère-t-elle aussi face à l’hindouiste qui vénère la femme mais la considère comme servante et garante, à travers la parenté, du système de caste ?
Il y a un fossé entre le monde riche et urbain et le monde pauvre et rural où vit 42% de la population. Mais les choses sont en train de changer. Mayawati, leader du BSP, représentant les intouchables, a été élue à la tête de l’Etat d’Uttar Pradesh, le plus peuplé d’Inde. Aujourd’hui, 7o% de la population à moins de trente ans. Les jeunes femmes ont de plus en plus accès à l’information et elles prennent conscience de leurs droits.