Nous connaissons actuellement des records historiquement élevés de déplacements. 65,6? millions de personnes dans le monde ont été forcées de fuir leur foyer, soit un chiffre sans précédent. On compte parmi elles presque 22,5 millions de réfugiés dont plus de la moitié a moins de 18 ans.
Il existe aussi 10 millions de personnes apatrides qui ont été privées de nationalité et d’accès aux droits élémentaires comme l’éducation, les soins de santé, l’emploi et la liberté de circulation.
Dans un monde où près de 20 personnes sont déracinées chaque minute à cause des conflits ou des persécutions, notre travail au HCR est plus important que jamais.
I Am Not Your Negro, de James Baldwin et Raoul Peck, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Pierre Furlan, Robert Laffont/Velvet Film, 144 p., 17 €.
Le verbe de l’écrivain américain, mort il y a trente ans, se déploie dans « I Am Not Your Negro », issu du film de Raoul Peck. Christiane Taubira l’a entendu.
ls sont six autour d’un journaliste et d’une table ronde : trois Afro-Américains et trois Américains blancs. Symétrie fortuite ou délibérée. L’écrivaine Toni Morrison observera plus tard que « dans ce pays, Américain signifie Blanc, toute autre personne a besoin d’un trait d’union » (par exemple : Afro-Américain, Sino-Américain, Italo-Américain, etc.). Ce soir-là, aux côtés de James Baldwin (1924-1987) se tiennent Marlon Brando, Joseph Mankiewicz, Harry Belafonte, Sydney Poitier et… Charlton Heston. Nous sommes le 28 août 1963, cent ans après la Proclamation d’émancipation des esclaves, publiée au mitan de la guerre de Sécession. Les grandes figures de résistance à l’esclavage et de la Civil War, Harriet Tubman, Crispus Attucks, Edward Hector, Austin Dabney, Lemuel Haynes… sont encore peu connues.
Ce mois d’août 1963 est fébrile. Plusieurs organisations ont appelé à marcher sur Washington pour l’emploi et la liberté, « jobs and freedom. NOW ! ». Martin Luther King en est le leader incontesté. Trois ans plus tôt, Abbey Lincoln et Max Roach ont maçonné cet album de jazz crissant, We Insist ! Freedom Now Suite. Aux premiers rangs de la foule immense et ardente qui ondule sur le mall du Lincoln Memorial, ces six-là, de Belafonte à Brando, désignés avec ou sans trait d’union, solidaires, ont choisi de croire au rêve que, dans une fulgurance clairvoyante et généreuse, Mahalia Jackson a demandé au pasteur King de partager avec cet essaim vibrant. « I have a dream. » Mais ils insistent, c’est « NOW ! » L’émission, qui a tourné autour de « Negro question, Negro problem », touche à sa fin. Baldwin est invité à conclure. « I’m not a Negro. I never called myself one. » (« Je ne suis pas un Nègre,…
De nombreux dirigeants se sont retrouvés mercredi, en marge du sommet Europe-Afrique d’Abidjan, pour évoquer une action « immédiate ».
Le premier succès du sommet réunissant l’Union africaine (UA) et l’Union européenne (UE) est déjà de s’être ouvert, mercredi 29 novembre, en Côte d’Ivoire. Car la querelle autour de l’invitation faite à la République arabe sahraouie démocratique (RASD), reconnue par l’UA mais honnie par le Maroc, a failli faire échouer cette rencontre. Finalement, Rabat a mis sa colère en sourdine et le roi du Maroc, Mohammed VI, a fait le déplacement d’Abidjan, une métropole où il a ses habitudes, la capitale d’un pays où son pays investit massivement.
Avec une Afrique retrouvant donc une unité de façade, le sommet était placé sous le thème « Investir dans la jeunesse pour un avenir durable ». Il n’a toutefois pas pu se soustraire à l’actualité. D’autant que celle-ci recoupait en partie le sujet de départ : depuis la diffusion par la chaîne américaine CNN d’un reportage montrant des migrants subsahariens vendus comme esclaves en Libye, les dirigeants du continent africain s’indignent, en appellent à une Cour pénale internationale que beaucoup abhorrent en temps normal pour qu’elle se saisisse de ce drame.
La question migratoire a donc bel et bien été le fil conducteur de la rencontre entre près de 80 chefs d’Etat et de gouvernement, qui devait s’achever, jeudi, par une déclaration longuement soupesée, ménageant les deux parties tout en les plaçant chacune devant ses responsabilités : obligation d’assurer un avenir à sa jeunesse pour l’Afrique, de mettre ses pratiques en concordance avec ses discours généreux pour l’UE. Vraie promesse ou faux semblant ?
« Avoir foi en l’avenir »
« Nous devons tout mettre en œuvre pour votre épanouissement sur notre continent ! Je vous invite à avoir foi dans l’avenir et ne pas vous lancer à l’aventure au péril de vos vies », a, en tout cas, déclaré l’hôte du sommet, le président ivoirien Alassane Ouattara.
Si de jeunes Africains sont jetés sur les routes et tentent de gagner l’Europe en risquant leur vie c’est en raison de « la pauvreté, de la mauvaise gouvernance, du changement climatique », expliquait pour sa part Moussa Faki, le président de la Commission de l’UA. En clair, « des défis communs », « des responsabilités partagées ».
« Ces récentes images atroces nous rappellent l’urgence d’agir. Tous les pays ont le devoir de protéger leurs frontières mais ils doivent le faire dans le respect des droits humains », insistait le Portugais Antonio Gutteres, secrétaire général des Nations unies (ONU). Qui, appuyé par la chancelière allemande Angela Merkel, plaidait pour des canaux de migration « régulière et ordonnée ».
La situation en Libye n’a pas suscité que des commentaires. Elle a été au cœur de plusieurs réunions en marge du sommet. A l’issue de l’une d’elles, où étaient notamment réunis UE, UA, ONU, il a été décidé de mettre en place un groupe d’action censé mieux lutter contre les trafiquants, accélérer les retours de migrants dits économiques vers leur pays d’origine et la réinstallation des réfugiés. Un travail mené en coordination avec les autorités de Tripoli. Le texte évoque aussi l’obligation d’assurer « des opportunités de développement et de stabilité » aux pays d’origine.
« Sur les routes de la nécessité »
En conférence de presse, Emmanuel Macron a expliqué que des migrants seront évacués « en urgence » de Libye et qu’il avait encouragé les états européens à suivre le modèle instauré par la France de sélection des réfugiés, en amont, dans les pays du Sahel avant qu’ils ne s’aventurent « sur les routes de la nécessité ».
Du côté des institutions européennes, on semblait partagé entre le soulagement et une certaine frustration. « L’esclavagisme en Libye existait avant que CNN le découvre, relevait une source à haut niveau, mais tant mieux si l’emballement soudain sur une situation que nous évoquons depuis de nombreux mois permet d’agir. »
Se confiant à quelques journalistes mardi soir, avant l’ouverture du sommet, Federica Mogherini, la Haute Représentante de l’UE pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, se réjouissait aussi que le monde s’agite mais relevait que des témoignages recueillis auprès de femmes, à Lampedusa (Italie), avaient révélé depuis longtemps des situations comparables à celles révélées par la chaîne américaine. Et ils n’avaient pas suscité beaucoup d’émoi.
Faire davantage
Quoi qu’il en soit, « la Libye a besoin de notre aide à tous les deux, pas d’accusations », indiquait Donald Tusk, coprésident de ce sommet. Plus généralement, le président du Conseil se disait prêt à « faire davantage » pour tenter de résoudre cette question de la migration qui, soulignait-il, « va déterminer une part importante de notre relation dans les
années à venir ».
« Faire », mais aussi payer davantage ? Un Fonds fiduciaire pour l’Afrique est actuellement alimenté à hauteur de quelque 3 milliards d’euros par la Commission mais attend encore 66 des 260 millions promis par les pays membres, clairement sous pression pour aller au-delà de cet engagement puisqu’ils se disent désireux d’agir. Un plan d’investissement – semblable dans son principe au « Plan Juncker » pour l’UE – a quant à lui été approuvé en septembre par le Parlement de Strasbourg. La Commission y consacre 4,1 milliards d’euros et lance un appel au secteur privé pour qu’il atteigne un montant jusqu’à dix fois supérieur.
Le drame de l’esclavagisme en Libye a réveillé les consciences et donné soudain un visage à cette « jeunesse africaine » auquel les dirigeants entendent assurer un avenir. Reste une question : jusqu’où ira leur réel investissement ?
Dénoncés aujourd’hui à hauts cris par les dirigeants occidentaux et africains, les viols, les tortures et l’esclavage de milliers de migrants africains en Libye étaient pourtant connus de longue date, soulignent ONG et analystes qui tirent la sonnette d’alarme depuis des mois.
Les images furtives d’une vente aux enchères nocturne de jeunes Africains dans la région de Tripoli, filmées en caméra cachée et diffusées le 14 novembre sur CNN, ont suscité une onde de choc, en se propageant comme une traînée de poudre sur les réseaux sociaux.
Face au tollé, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, s’est dit « horrifié », le président de l’Union africaine Alpha Condé « indigné », l’Union européenne « révoltée » et la France a réclamé une réunion « expresse » du conseil de sécurité de l’ONU.
« Hypocrisie », car « à part le citoyen lambda, tout le monde savait, les gouvernants, les organisations internationales, les leaders politiques », assène le Sénégalais Hamidou Anne, analyste du think tank « L’Afrique des idées ».
« Les prises d’otages, les violences, la torture, les viols, sont monnaie courante en Libye, et l’esclavage, on en parle depuis longtemps », renchérit Alioune Tine, directeur Afrique de l’ouest et du centre d’Amnesty international basé à Dakar.
En plein chaos depuis la chute en 2011 du régime de Mouammar Kadhafi, la Libye est la plaque tournante du transit des migrants d’Afrique subsaharienne cherchant à gagner l’Europe.
Soucieuse de contrôler ce flux migratoire, l’UE peine à trouver des solutions pour ces candidats à l’exil, à la merci des passeurs et trafiquants, un calvaire dont beaucoup ont témoigné dans les médias.
« En Libye, les noirs n’ont aucun droit », avait confié en septembre à l’AFP Karamo Keita, un jeune Gambien de 27 ans, rapatrié dans son pays. « Nous avons été emmenés dans plusieurs fermes où notre geôlier libyen nous vendait comme esclaves ».
‘Tortures et extorsions’
De leur côté, les organisations d’aide aux migrants n’ont cessé d’alerter sur la dégradation de la situation.
Dès le mois d’avril, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) rapportait l’existence de « marchés aux esclaves » en Libye. « Ils y deviennent des marchandises à acheter, vendre et jeter lorsqu’elles ne valent plus rien », avait souligné Leonard Doyle, porte-parole de l’OIM à Genève.
La présidente de Médecins sans frontières, Joanne Liu, avait à son tour dénoncé en septembre, dans une lettre ouverte aux gouvernements européens, « une entreprise prospère d’enlèvement, de torture et d’extorsion » en Libye.
« Dans leurs efforts pour endiguer le flux (migratoire), les gouvernements européens seront-ils prêts à assumer le prix du viol, de la torture, et de l’esclavage ? », avait-elle interpellé. Avant de conclure: « Nous ne pourrons pas dire que nous ne savions pas ».
La semaine dernière, le haut-commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, Zeid Ra’ad Al Hussein, a jugé « inhumaine » la politique de l’UE « consistant à aider les gardes-côtes libyens à intercepter et renvoyer les migrants ».
Une accusation rejetée par Bruxelles, qui souligne ses efforts pour « sauver des vies » en mer et « faciliter l’accès de l’OIM et du Haut-Commissariat aux Réfugiés (HCR) aux centres de détention en Libye pour qu’ils puissent augmenter le niveau d’assistance et organiser des retours volontaires ».
En se posant en « forteresse qui veut coûte que coûte arrêter » les migrants, l’Europe « a une responsabilité fondamentale » dans le désastre actuel, mais elle n’est pas la seule, estime quant à lui Alioune Tine.
‘Racisme systématique’
« Les pays africains ne font rien pour retenir les jeunes, pour leur donner du travail. Ils n’ont pas de politique d’immigration, ils ne font que subir », regrette-t-il.
« Ça ne peut plus durer. Devant un crime contre l’humanité, on ne s’indigne pas, on réagit », juge Hamidou Anne, en critiquant la passivité des dirigeants africains et le « racisme systématique dans les pays du Maghreb ».
« Il faut aller chercher ces jeunes qui sont dans des camps d’internement ou vendus comme esclaves », réclame-t-il, alors que le Rwanda a proposé jeudi d’accueillir 30.000 de ces migrants.
Pour Alioune Tine, la question de l’éradication de l’esclavage doit être inscrite au menu du sommet UE/UA des 29 et 30 novembre à Abidjan, comme l’a suggéré le président nigérien Mahamadou Issoufou.
« Il faut une commission d’enquête impartiale pour voir comment s’organisent ces trafics, qui en sont les responsables. Et que tout le monde prenne ses responsabilités », conclut-il.
Suite à l’attentat terroriste de New York, qui a fait huit morts et onze blessés graves, le président américain a annoncé vouloir durcir les conditions d’entrée sur le territoire américain et mettre fin à la loterie des ‘green cards’. Les journalistes reprochent au président son hypocrisie, et craignent qu’il soit difficile d’empêcher les loups solitaires de sévir.
Trump a plus vivement réagi face à l’attentat de New York qu’à celui beaucoup plus grave de Las Vegas il y a un mois, critique The Guardian
«Lorsqu’un individu fonce dans la foule avec un camion-bélier dans une rue de New York en entonnant ‘Allahu Akbar’, il est accusé de terrorisme islamiste, fait la une de tous les journaux et représente une menace pour la sécurité des Etats. … Après le massacre de Las Vegas en revanche, il n’a aucunement été question de ‘contrôles de sécurité renforcés’ des propriétaires d’armes à feu qui sont largement plus dangereux pour les Américains que n’importe quel terroriste. Aucune déclaration n’a été faite sur la nécessité de modifier la loi pénale ou la juridiction dans ce domaine. Las Vegas a été traité comme un évènement x ou y dans l’histoire des Etats-Unis. Les armes ne sont rien d’autre qu’une forme de terrorisme à l’américaine.»