L’UE peut-elle stopper la réforme de la justice polonaise ?
La Commission européenne veut sévir contre la réforme de la justice polonaise, que le Parlement du pays a fait avancer jeudi par l’adoption d’une nouvelle loi. Une nouvelle action devrait ainsi s’ajouter aux 122 autres procédures en cours pour violation des traités européens. Le vice-président de la Commission, Frans Timmermans, a par ailleurs menacé d’activer l’article 7 du traité de Lisbonne, susceptible de priver la Pologne de son droit de vote dans l’UE. La presse européenne s’interroge sur les effets potentiels de cette mesure.
Viser les points sensibles
Pour Newsweek Polska, la suspension du droit de vote ne fait pas peur aux politiques polonais, bien au contraire :
«Si Bruxelles considère les sanctions politiques comme une ‘option nucléaire’, elles n’impressionnent guère le gouvernement. [Le leader du PiS Jaroslaw] Kaczynski, [le ministre des Affaires étrangères Witold] Waszczykowski, [et le ministre de la Défense Antoni] Macierewicz ont un autre seuil de tolérance de la douleur que les politiques d’Europe de l’Ouest. La propagande du parti pourrait même exploiter les sanctions pour leur campagne de paranoïa anti-européenne, par laquelle ils essaient depuis plus d’un an de convaincre les Polonais que la Commission attaque la Pologne. Seule la combinaison des deux types de sanctions [financières et politiques] serait efficace.»
Les sanctions sont peut-être une erreur
Des sanctions pourraient impacter d’autres personnes que les fautifs, prévient Novi list :
«Il avait déjà été envisagé d’activer contre la Pologne, dès fin 2015, ‘l’option nucléaire’ de l’article 7, telle qu’on la surnomme de manière informelle. … L’action du gouvernement suscite fort heureusement la fronde des Polonais, qui s’organisent à nouveau et se rassemblent en comités de défense de la démocratie, formant le plus grand mouvement
de protestation depuis Solidarno ? dans les années 1980. C’est la raison pour laquelle l’UE ferait bien, en prenant des sanctions, de ne pas décourager ceux en Pologne qui manifestent quotidiennement pour défendre l’Etat de droit et la démocratie.»
L’Union n’est pas un libre-service
Politiken appelle l’Union à se montrer ferme :
«Il en va de l’âme de l’UE, du crédit que l’on accorde aux valeurs communes. C’est pourquoi la réaction doit être à la hauteur de l’outrage. La Commission européenne menace d’ouvrir la procédure prévue à l’article 7, qui requiert toutefois l’unanimité. Et la Pologne peut compter sur le soutien de la Hongrie. L’UE doit pourtant agir. Le Danemark et les autres pays de l’UE devraient se pencher sur l’idée évoquée par la Belgique, à savoir restreindre l’accès de la Pologne aux fonds européens, afin de montrer que l’UE n’est pas un libre-service. Les derniers jours ont montré que le temps presse.»
Bruxelles doit actionner tous les leviers
Si le site de la radio Deutschlandfunk approuve que l’on hausse le ton envers la Pologne, elle n’en voit pas moins la Commission en proie à un dilemme :
«Quand on montre les dents, il faut avoir les moyens de mordre, en dernier recours. Or en l’occurrence, Bruxelles pourrait rapidement s’avérer être un tigre de papier. Les procédures d’infraction sont relativement faciles à mettre en œuvre. Pour priver un Etat de son droit de vote en vertu de l’article 7, le soutien unanime des 27 Etats membres est indispensable. La Hongrie a déjà pris position, faisant savoir qu’elle ne souscrirait pas à ce genre de mesure. Peut-être n’est-elle pas le seul pays dans ce cas. … Mais en fin de compte, c’est le message politique qui importe. La Commission doit se servir de la boîte à outil dont elle dispose, même si les outils ne suffisent peut-être pas à arrêter le PiS. … L’heure est à exercer le plus de pression politique possible, car l’UE ne peut tolérer qu’un Etat membre commette une pareille infraction.»
Sans respect des valeurs, pas d’argent
L’UE est la seule à pouvoir faire pression sur Varsovie, juge The Irish Times :
«Deux puissances disposent des meilleurs moyens de pression face à la Pologne : les Etats-Unis et l’UE. Trump, qui a tenu au début du mois à Varsovie un discours en phase avec les tendances nationalistes de ses hôtes, n’est visiblement pas à la hauteur de la tâche. Mais Bruxelles peut et doit agir. Elle devrait d’abord user de son pouvoir et ouvrir une procédure d’infraction contre le pays en raison de ses atteintes à la séparation des pouvoirs. Dès que les discussions portant sur la réduction des fonds européens après le Brexit et leur future répartition auront débuté, il faudra établir clairement que le respect des valeurs fondamentales n’est pas une question négociable si l’on veut toucher des fonds européens.»
Un nouveau fossé Est/Ouest
De Volkskrant redoute une rupture Est/Ouest :
«Le rideau de fer n’est plus, mais il a été remplacé par une barrière mentale. A Budapest et Varsovie, les gouvernements sont ultraconservateurs et ultranationalistes. … Bruxelles, à leurs yeux, est ‘la nouvelle Moscou’, une menace pour leur souveraineté nationale à peine retrouvée. … Les deux pays ne veulent pas accueillir de migrants musulmans, affirmant que ceux-ci menacent le caractère homogène et chrétien de leurs sociétés. Cette perception est assez éloignée de celle qui prédomine en Europe occidentale. … On peut craindre une escalade. ‘Faire entendre raison à ceux qui n’écoutent pas’ : tel est l’appel déjà lancé, en effet, par l’Italie et d’autres Etats membres.»
Dans la nuit du 7 au 8 mars, les Vingt-Huit et la Turquie sont parvenus à un accord censé endiguer l’afflux vers l’UE de réfugiés en provenance du Moyen-Orient. Le texte, qui doit être entériné lors d’un sommet européen le 17 mars, prévoit entre autres, le renvoi vers la Turquie des Syriens candidats à l’asile débarqués illégalement en Grèce (et l’accueil de ceux qui auront déposé une demande en Turquie), le versement d’une aide de 3 milliards d’euros supplémentaires à Ankara pour gérer les réfugiés, des patrouilles maritimes mixtes UE-OTAN en Mer Egée et la réouverture des négociations d’adhésion de la Turquie à l’UE. Si la presse turque fait preuve de réalisme, les journaux européens s’indignent de ce que l’UE se soit pliée aux exigences d’Ankara, au moment où le régime marque une dérive autoritaire sans précédent.
L’Europe brisée en deux au grand bal du Sultan
Il Sole 24 Ore, Milan, 8 mars Pour Adriana Cerretelli, le « pacte de fer » signé avec le pouvoir de Recep Tayyp Erdo?an a « érigé tout à coup la Turquie en 29e Etat membre de l’Union. De fait, si ce n’est de droit. » Qui plus est, après « un volte-face retentissant qui brise les résistances que l’on croyait insurmontables et, surtout, qui ignore les conditions minimales requises, à savoir le respect des valeurs fondamentales européennes, comme la liberté d’information et d’expression, l’égalité des sexes, la protection des minorités. » Ce n’est pas la première fois que les Européens font preuve d’une « amnésie sélective », poursuit la journaliste : « mais il n’était jamais arrivé qu’un candidat à l’adhésion, houspillé encore il y a peu parce qu’il ne remplissait systématiquement pas les conditions essentielles pour devenir un partenaire, rédige carrément un nouvel accord bilatéral dans lequel il multiplie par deux la demande de concessions en échange de l’endiguement des flux migratoires. C’est l’Europe habituelle, cynique et sans scrupules, mais pas plus lucide pour autant. Affaiblie par le triomphe de ses propres nationalismes, elle demeure prisonnière du risque habituel d’être incongrue. Même lorsqu’elle joue avec sa propre identité et qu’elle accepte de voltiger au grand bal du Sultan. On verra avec quels résultats à la fin. »
Culbute
Die Tageszeitung, Berlin, 8 mars « Pervers, fou, juridiquement contestable et moralement insupportable » : Eric Bonse ne mâche pas ses mots. Et sa virulente critique s’adresse avant tout contre la chancelière allemande Angela Merkel : « D’abord une roulade arrière, et maintenant une culbute ? Les méandres de la politique des réfugiés de l’UE laissent pantois. […] Tout d’un coup, non seulement la route des Balkans devrait être bloquée pour les réfugiés. Mais la mer Egée tout entière doit devenir une zone sans passeurs. Et encore plus fou : pour chaque migrant ‘illégal’ que la Grèce renvoie en Turquie, un [migrant] ‘légal’ doit venir en Europe. Ce soi-disant principe un-pour-un, serait, dit-on, une idée du Premier ministre turc Davuto?lu. En vérité, il porte la signature de Merkel – comme d’ailleurs tout ce sommet, qui a été convoqué à la demande de la Chancelière juste avant les élections régionales. Ce principe pervers signifie une rupture radicale avec le droit d’asile tel que nous le connaissons en Europe. Auparavant, ce droit était individuel, maintenant il sera éludé par l’expulsion massive des réfugiés. C’est juridiquement contestable; moralement, c’est insupportable. »
Le pacte de la honte
El País, Madrid, 8 mars Pour l’éditorialiste Rubén Amón, « l’Europe se renie elle-même, offrant à Erdogan l’adhésion de la Turquie à l’UE » : « Ne pouvant et ne voulant pas résoudre la crise des migrants, l’UE a décidé de la sous-traiter. Elle l’a externalisée. Elle a engagé la gendarmerie turque, pas tellement en échange de 6 milliards d’euros – le double de la somme prévue initialement – mais au prix incalculable du reniement des principes fondateurs de l’Union. Soit parce que l’Europe s’exempte de toute responsabilité humanitaire. Soit parce que l’accord entérine des expulsions à chaud. Soit encore parce que l’UE brade les conditions d’adhésion de la Turquie à l’UE. Le grand paradoxe étant qu’Ankara a avancé ses aspirations à l’intégration au moment où elle sape le plus ses standards démocratiques. »
Le Figaro (Pierre Rousselin) La sanction de l’échec des islamistes.
« Mohammed Morsi s’est révélé encore plus incapable de gérer son pays que ne l’avait été Hosni Moubarak. À la différence de son prédécesseur, qui s’était maintenu à la tête de l’Égypte pendant trente longues années, le président islamiste, élu dans la plus stricte légitimité ilyaunan, aura très vite soulevé la vague de contestation qui est en passe de l’emporter. Les événements auxquels nous venons d’assister place Tahrir ressemblent beaucoup à ceux qui s’y sont déroulés en 2011 et qui avaient conduit à la chute du dictateur. Maintenant comme à l’époque, les contestataires sont le fer de lance du mouvement révolutionnaire. Mais, en coulisse, c’est toujours l’armée qui a le dernier mot. Face au soulèvement de la jeunesse urbaine, les généraux avaient, il y a deux ans, lâché le patriarche en bout de course et son clan d’affairistes. Ainsi ont-ils préservé leurs prébendes et leurs intérêts économiques et industriels considérables, qui font de l’institution militaire un État dans l’État égyptien…Une fois installé au pouvoir, avec 51,7% des voix, Morsi a présidé une parodie de démocratie. Sans rien régler des problèmes économiques, sans tenir compte des intérêts du pays, il a imposé la loi de son propre mouvement, le droit de vote n’étant pour ses partisans, qu’un moyen de faire régner la dictature du plus grand nombre. En un an, l’opposition s’est mieux organisée. L’armée, qui s’était accommodée de Morsi, l’a finalement lâché, à son tour. La partie est délicate : il faut éviter l’apparence d’un putsch qui compromettrait l’aide américaine, éviter aussi que les islamistes se présenter en victimes d’un coup d’État contre une démocratie qu’ils n’ont jamais su, ni voulu, faire fonctionner. »
Libération (Fabrice Rousselot)
« Le spectre d’un retour vers le passé. La peur d’une guerre civile et d’un coup d’Etatmilitaire dans la violence comme l’Egypte en a malheureusement déjà connu. En un an de pouvoir, Mohamed Morsi n’a pas su faire la preuve qu’un islam modéré peut évidemment s’inscrire dans un cadre démocratique. Il a, au contraire, suivi sa propre dérive autoritaire, focalisant toutes les frustrations autour de sa réforme controversée de la Constitution, qui porte clairement atteinte aux libertés publiques et aux libertés religieuses. Et ravive les pires inquiétudes. Dans un pays exsangue,Mohamed Morsi n’a pas su répondre non plus aux aspirations économiques d’une population lassée de voir, depuis des décennies, les richesses se concentrer entre les mains de l’élite politique. Aujourd’hui donc, l’armée a repris la main, avec tous les dangers que cela comporte. Les militaires, qui se sont engagés à organiser une nouvelle élection présidentielle, ont la responsabilité de prendre la voie du dialogue et non celle des armes, afin que pouvoir et opposition trouvent une porte de sortie. »
AFP archives/Fred Dufour
Ouest France (Laurent Marchand)
« C’était devenu depuis quelques jours la seule issue prévisible. Sous la pression de la rue. Sous le poids de ses échecs économiques et politiques. Mohamed Morsi, le premier président civil élu démocratiquement de l’Égypte moderne, a été renversé. L’armée est à la manoeuvre, par le biais du général al-Sissi, le chef des armées et ministre de la Défense. La foule scandait son nom sur la place Tahrir depuis dimanche. Devant le risque croissant de guerre civile, l’intervention de l’armée était souhaitée par une large part de l’opinion. Officiellement, les militaires n’entendent pas gouverner, autrement dit revenir à la situation qui prévalait sous Moubarak, mais guider une transition. Tenter de la remettre sur les rails où les Frères musulmans n’ont pas su la tenir. Rédiger une nouvelle constitution…Ce qui est encore totalement imprévisible, c’est l’impact que ce retour du pouvoir de l’armée aura sur toutes les composantes de l’islam politique…Au Caire, c’est l’armée qui écoute la rue à présent. Tout en conservant sa position ultradominante sur l’économie, la sécurité et la politique égyptienne. C’est la révolution qui est permanente, ou la contre-révolution ? »
Le Journal de la Haute Marne (Patrice Chabanet)
« Un coup d’Etat militaire n’est jamais l’expression d’un bon bilan de santé démocratique. Mais entre deux maux il faut choisir le moindre. C’est du moins l’objectif que s’est assigné l’armée égyptienne en suspendant la Constitution du pays et en destituant le président Morsi. Ce dernier, démocratiquement élu c’est vrai, n’a pas su fédérer les énergies d’un pays exsangue. Il n’a pas été capable non plus d’endiguer la montée de groupes plus radicaux que les Frères musulmans, comme en témoignent les agressions contre les chrétiens coptes. L’armée a promis de retourner dans les casernes après une période de transition. Encore faut-il que la classe politique parvienne à réduire ses divisions et à mieux délimiter les prérogatives de la religion. L’Egypte entre donc dans une période d’incertitude où les extrémistes, les salafistes en particulier, vont pousser leurs pions…C’est le président de la Cour constitutionnelle qui assurera l’intérim à la tête de l’Etat. Et ce sont des experts civils qui formeront le gouvernement provisoire. Reste à savoir ce que fera l’Egypte des campagnes, fortement imprégnée de la propagande islamiste. Jusqu’à présent, c’est l’Egypte des villes qui s’est fait entendre. Un univers sépare les deux. Les nouveaux maîtres du Caire sauront-ils les rapprocher ? Rien n’est moins sûr. »
L’Est Républicain (Alain Dusart)
« Comme la société égyptienne, la place Tahrir au Caire, ressemble à un kaléidoscope, inquiétant car en fusion. On y voit des jeunes branchés sur le XXIe siècle, des quadras las d’une dictature chassant l’autre, de troubles larrons en quête de mauvais coups, d’ex-miliciens et autres nervis nostalgiques en quête d’un régime autoritaire. Sur cette place bigarrée, théâtre de tous les espoirs, on y rêve d’un avenir meilleur, on y viole de jeunes femmes en fleur. Ici réside tout le paradoxe de l’Égypte, entre quête de modernité et de démocratie, et bestialité d’une génération de frustrés élevés au biberon des tabous et des interdits. L’ultimatum de la toute puissante armée a expiré hier. L’impopulaire président islamiste Mohamed Morsi a finalement été renversé. Mais les militaires le savent bien: s’ils mènent un coup d’État à leur seul profit, ils perdront le soutien américain. Dans ce tourbillon, les Frères musulmans ont beaucoup à perdre. Certes, ils ont une légitimité démocratique, mais elle a fondu. Les islamistes ont agrégé toutes les colères en un an. Si les généraux déposent Morsi, les Frères musulmans garderont une capacité de nuire. Leurs partisans endoctrinés pourront saboter cette révolution bis, avec le risque jamais loin d’une guerre civile. »
Les Dernières Nouvelles d’Alsace (Dominique Jung)
« Parvenue aux commandes de l’Egypte après des décennies de brimades, de répressions et d’incarcérations, la confrérie des Frères musulmans n’a pas su tenir le choc du pouvoir. Cet échec pèsera dans son histoire. C’est parce qu’il a multiplié les promesses sans les appuyer sur une méthode solide que Mohamed Morsi a perdu sa présidence. Son bilan est calamiteux. Élu démocratiquement, il a présidé arbitrairement. Son erreur a été de penser que parce qu’il avait gagné un scrutin, il pouvait ignorer les attentes de la société civile. Or gouverner un pays, c’est comprendre qu’on devient le président de tous les citoyens, et pas juste de la frange qui vous a hissé au pouvoir. Morsi s’est comporté en otage d’un parti plus qu’en chef d’État, il a piétiné le pouvoir législatif, cela lui a été fatal. Pour autant, le déploiement de blindés constaté hier relève du coup d’État militaire. Morsi restera comme le premier civil égyptien porté à la présidence de la République après une succession de soldats, de Nasser à Moubarak. Il était aussi le premier Égyptien élu à travers une élection au suffrage universel direct. Son mandat avait tout juste un an. Quelle que soit la pression de la rue, aucun pays d’Europe n’admettrait que l’on pose un cercle de barbelés autour du chef de l’État pour l’assigner à résidence. Le respect des procédures et des calendriers est aussi une façon de mesurer le niveau démocratique d’un pays. L’armée est maintenant face à ses responsabilités. »
La République des Pyrénées (Jean-Marcel Bouguereau)
« C’est un paradoxe comme l’histoire les aime : en Egypte un mouvement démocratique qui a vu ces derniers jours des foules immenses descendre dans la rue en a appelé aux forces armées pour évincer un président démocratiquement élu, au nom de la défense de la révolution qui s’était faite contre l’armée ! C’est cette même armée, à l’origine de plusieurs décennies de régimes autoritaires, qui vient de mettre fin à une présidence jugée trop autoritaire ! Car c’est un coup d’état très en douceur qui a eu lieu hier en Egypte, même si les partisans du Président Morsi ont évidemment dénoncé une +rébellion militaire+ qu’ils sont prêts à combattre en versant leur sang. De quoi préparer un futur très incertain à une Egypte qui souffre économiquement, dont les institutions sont faibles et où aucun leader crédible n’émerge. Dans ce pays où l’armée a conservé un énorme crédit, on trouvait ces derniers jours des pancartes portant l’inscription +l’armée et le peuple, une seule main+, cette transition a été mûrement préparée. L’armée a multiplié les ultimatums. Mais en vain, Morsi ne se décidant à aucune concession. Jusqu’à celui intimant au président de +satisfaire les revendications du peuple+. Morsi a tenté, mais trop tard, une ultime ouverture en proposant la formation d’un gouvernement de consensus. Car ce dont les Frères Musulmans ne se sont pas rendus compte, c’est l’énorme coupure entre eux et le peuple qui voyait de plus en plus dans le régime des Frères la restauration d’un régime autoritaire. »
La Nouvelle République du Centre Ouest (Bruno Bécard)
« La charia ne saurait constituer un programme de gouvernement capable de sortir un pays de sa misère sociale et économique. Des dizaines de millions d’Égyptiens ont fait cette douloureuse expérience depuis un an. Et l’armée, forte d’un million d’hommes et dotée d’un matériel moderne imperméable à la crise, a tenu parole hier : fin de l’ultimatum pour obtenir le départ du président Morsi, prise de contrôle de la télévision, les Frères musulmans vissés dans leurs quartiers et les blindés de sortie pour faire bonne mesure. Cet épisode s’appelle un coup d’État militaire. Et maintenant, l’aventure commence ou plutôt continue. L’armée, en appui aux millions d’opposants à Mohamed Morsi, a-t-elle simplement voulu éviter une guerre civile ? Déjà 47 morts depuis trois jours. Son chef Abdel Fattah al-Sissi n’a tenu aucun compte de la proposition présidentielle, celle d’un gouvernement de coalition. Le président élu démocratiquement voici un an est blackboulé par la feuille de route du militaire. L’armée, échaudée par l’année de transition qu’elle a assumée entre 2011 et 2012, annonce déjà des élections anticipées et des avancées démocratiques. Mais montre aussi ses muscles pour que l’ordre règne. +Légitimité+ crie chacun des deux camps opposés. Mais aujourd’hui la place Tahrir manifeste plus de légitimité populaire que finalement celle hier du scrutin présidentiel. Espérons que ne surviendra pas demain l’heure des martyrs de tous bords ».
A l’étranger
L’avertissement égyptien qui fait le tour du Web américain
Le moins que l’on puisse dire, c’est que les États-Unis ont laissé de mauvais souvenirs dans cette région du monde. Face à coup d’Etat « en douceur », le président Obama avait mercredi du mal à se positionner, hésitant entre le soutien au peuple égyptien et l’inquiétude de voir l’armée prendre le pouvoir et destituer un président élu malgré tout démocratiquement..
En fin de soirée mercredi, les Etats-Unis ont d’ailleurs ordonné l’évacuation de leur ambassade au Caire en Egypte quelques heures après le renversement du président Morsi par l’armée, a indiqué un responsable américain sous couvert d’anonymat. Il y a quelques jours, le département d’Etat avait autorisé le personnel diplomatique non essentiel à quitter le pays. Côté officiel, le président Obama ne s’était toujours pas exprimé mercredi à minuit.
Mais les Egyptiens, eux, n’ont pas manqué de faire passer leur message.Une banderole a été déployée écrite en anglais et en arabe. En quelques heures elle est devenue l’un des sujets les plus discutés sur le réseau social Reddit, très utilisé outre-Atlantique:
De la part du peuple égyptien Aux politiciens américains: sortez vos sales pattes de l’Egypte A l’ensemble du peuple américain: la seule chose que nous ayons pour vous, c’est de l’amour
Un message qui a beaucoup fait parler sur le réseau social. Certains déplorant l’anti-américanisme du scandale, mais la majorité se réjouissant que le peuple égyptien soit capable de faire la part des choses entre le gouvernement américain d’une part, et les Américains d’autre part.
Il faut dire que l’affaire Prism, révélée par Edward Snowden, est en train de créer une rupture entre les Américains et leurs représentants, coupables de les avoir mis sur écoute en toute discrétion.
Source : Le HuffPost 04/07/13
L’armée, colonne vertébrale de la nation égyptienne
Des soldats egyptiens prennent position. 3/07/13 Reuters /Amr Abdallah
Décidément, Nasser n’est pas mort. Soixante et un ans presque jour pour jour après la révolution de juilet 1952, lorsque les « officiers libres » ont mis fin au règne du roi Farouk, un militaire – le chef d’état-major Abdel Fattah Al-Sissi – écarte le premier président démocratiquement élu de l’histoire de l’Egypte – Mohamed Morsi – sous les applaudissements d’une majorité de la population.
De 1952 à 2013, l’armée égyptienne est restée la colonne vertébrale de la nation égyptienne. Peu importe la paix signée avec Israël dans les années 1970, peu importe l’enrichissement des hauts gradés dans les années 1980-1990 et 2000 ou la répression menée après la révolution de février 2011, une fois Hosni Moubarak tombé et durant la transition sous l’égide du maréchal Tantaoui, à la tête du SCAF, l’acronyme du Conseil suprême des forces armées.
Peu importent les tests de virginité pratiqués de force sur les manifestantes, les 12 000 procès militaires, la complaisance révélée tardivement lors de la mémorable bataille des chameaux place Tahrir, l’armée reste, dans l’imaginaire de la majorité des Egyptiens, la « fille du peuple » et le seul vecteur du changement politique. Le chemin vers la démocratie est encore long en Egypte…
Christophe Ayad
Source : Le Monde 3 juillet 2013
L’aide US à l’Egypte va être réexaminée
L’aide annuelle d’un montant d’un milliard et demi de dollars que les Etats-Unis allouent à l’Egypte va être réexaminée en tenant compte de l’éviction du président Mohamed Morsi, a indiqué mercredi le sénateur Patrick Leahy qui préside la sous-commission chargée du contrôle de l’aide américaine à l’étranger.
« Les chefs militaires égyptiens affirment ne pas avoir l’intention, ni le désir de gouverner, et j’espère qu’ils tiendront leurs promesses », a commenté Leahy dans un communiqué.
« En attendant, notre droit est clair: l’aide américaine est suspendue lorsqu’un gouvernement démocratiquement élu est déposé par un coup d’Etat ou un décret militaire », a-t-il rappelé.
Des étoiles plein la tête
L’orient du Jour ( Christian Merville)
Mardi soir, les téléspectateurs avaient eu droit, quarante-cinq minutes durant, au spectacle pathétique d’un homme seul, lâché par ses alliés salafistes et par l’armée, désavoué par une importante fraction de son peuple et, le dos au mur, agrippé à une légitimité désormais vidée de toute substance. Une semaine durant, l’Égypte a donné l’impression de vivre un remake des heures de janvier-février 2011 qui avaient débouché sur l’éviction de Hosni Moubarak : le même rejet au niveau de la rue, le même refus obstiné de voir l’évidence, peut-être aussi les mêmes baltaguiyah stérilement acharnés à contre-manifester et au bout du compte la même institution/arbitre, même si son chef – ironie du sort – doit sa promotion à ce président qu’il s’est employé avec succès à renvoyer à ses équerres d’ingénieur. Exit donc l’homme qui avait endossé l’espace d’une courte année un habit trop grand pour lui.
Peut-être pas, après tout, un remake fidèle car, tout comme l’histoire ne repasse jamais les mêmes plats, cette fois les cartes étaient différentes et différente la conjoncture. L’ancien raïs avait mis 30 ans à dilapider le capital qui lui était offert sur le plateau de la présidence. Mohammad Morsi, lui, sera parvenu à se constituer un impressionnant passif fait de décisions improvisées, de faux pas, de mesures impopulaires et d’un blitzkrieg administratif mené tambour battant pour prendre le contrôle de l’appareil étatique. Les messages se multipliaient pourtant, venant de la rue qui lui a rappelé à plus d’une reprise son rejet de toute forme de dictature remplaçant celle de son prédécesseur. Sans résultat, à preuve les dernières nominations de gouverneurs (11 Ikhwane pour un total de 17, dont un responsable venu des rangs de la Gamaa islamiya mais lâché par celle-ci, une trahison qui a achevé de dissiper le peu de crédibilité qui restait au titulaire de la fonction suprême, devenue si dérisoire.
Par le biais du Parti de la construction et du développement, sa branche politique, la Gamaa est entrée sur le tard dans la danse du scalp : son porte-parole, Tarek el-Zommor, a fini par se prononcer pour une élection présidentielle anticipée, précédée toutefois d’un référendum sur son opportunité. Il était clair que les extrémistes islamiques n’avaient pas été saisis d’un soudain prurit démocratique, motivés plutôt par la conviction que les Frères musulmans, devenus décidément infréquentables, pourraient fort bien, lors d’inévitables législatives à venir, leur céder la place, bien sûr en toute fraternité. L’absence d’un ciment unificateur est tout aussi évident dans les rangs de Tamarrod, assemblage hétéroclite de laïcs, de déçus par l’expérience religieuse, d’activistes du mouvement Kefaya et du Front du salut national, d’opportunistes aussi comme il y en a dans tous les courants dits révolutionnaires. Le chef de l’État sortant (ou plutôt sorti) a tenté de jouer sur cette disparité pour proposer à maintes reprises un dialogue, sachant pertinemment que la coalition ne pouvait lui opposer qu’un néo-« front du refus » sans réelle consistance.
Finalement, le camp du « non » a revêtu l’armure du chevalier jusqu’au-boutiste, le régime s’est barricadé dans sa détermination à exciper du verdict des urnes et l’armée s’est posée en gardienne du temple. La conséquence ? Désastreuse à long terme pour tout le monde, puisque aucun des acteurs du psychodrame n’est en mesure de reprendre à son compte le flambeau. Fort heureusement, le ton, très digne, du communiqué de l’armée a permis d’éviter ce qui tournait à la pantalonnade. On a entendu, par exemple, Morsi adopter des accents dignes de Danton pour clamer haut et fort qu’il préférait la mort violente à une condamnation par l’histoire. Salvador Allende, réveille-toi…
Et puisque l’on donne dans la grandiloquence, que faut-il penser du serment prêté par les chefs de l’armée, le général Abdel Fattah Sissi en tête : « Nous jurons devant Dieu que nous sacrifierons notre sang pour l’Égypte et son peuple contre tous les groupes terroristes, extrémistes et ignorants » ? Vaste programme aurait dit le général de Gaulle. Il importe de rappeler pour l’occasion que pas plus que le jugement des urnes, les sacrifices ne sauraient tenir lieu de programme d’action. D’ailleurs, ils ont dû déchanter ceux qui, au soir de dimanche dernier, avaient cru déceler un acte de candidature dans le lâcher de drapeaux au-dessus de la foule agglutinée place Tahrir par des hélicoptères. Non, décidément, l’armée n’a pas des envies de revenez-y. Chiche !
La recette pour une démocratie réussie est fort simple : prendre des démocrates ; adopter une ligne de conduite (et non pas une « feuille de route ») ; donner, mais pas trop, du temps au temps avant de servir, tiède de préférence. Et surtout éviter d’agiter. Scénario à la Nasser : samedi 26 juillet 1952, le roi Farouk, qui vient de signer son acte d’abdication, quitte le palais de Ras el-Tine pour le yacht Mahroussa à bord duquel il doit s’embarquer. Au pied de la passerelle, le général Naguib fait le salut militaire pendant que la fanfare exécute l’hymne national et qu’une salve de 21 coups de canon est tirée. C’est qu’ils savaient, quand il le fallait, y mettre les formes, les hommes en uniforme. Et demain ? On verra bien…
Christian Merville
Source L’Orient du Jour 04/07/13
Silence prudent d’Israël après la chute du président égyptien
AFP | 04/07/2013
Le gouvernement israélien gardait un silence prudent jeudi après la mise à l’écart par l’armée égyptienne du président islamiste Mohamed Morsi.
Selon les médias, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a donné la consigne à ses ministres de ne pas faire le moindre commentaire officiel pour le moment sur la crise en Egypte, pays avec lequel Israël signé un traité de paix en 1979.
« Le gouvernement suit de très près la situation en Egypte mais ne fait pas de prévisions car les choses sont en train d’être décidées », a déclaré à l’AFP un responsable israélien sous couvert de l’anonymat.
« Il est important que le peuple égyptien puisse accéder à un niveau de liberté et d’auto-gestion (…) mais la situation actuelle envoie des ondes de choc dans tout le monde arabe d’où une certaine inquiétude en Israël », a-t-il ajouté.
« Israël fait attention d’éviter même l’apparence d’une interférence avec les événements en Egypte », soulignait le spécialiste militaire du quotidien Haaretz Amos Harel.
Israël et l’Egypte entretenaient des liens réguliers sous la présidence de l’ancien président Hosni Moubarak, chassé du pouvoir par une révolte populaire en février 2011, notamment dans le domaine sécuritaire.
Alors que certains prédisaient une remise en question du traité de paix avec la chute du régime Moubarak, des sources militaires, citées par les médias israéliens, ont affirmé que le bon fonctionnement de la coopération sécuritaire avait continué sous la présidence Morsi.
Selon ces sources, la proximité du mouvement islamiste palestinien Hamas, au pouvoir à Gaza, avec les Frères musulmans avait notamment permis à M. Morsi de lutter plus efficacement que ne l’avait fait son prédécesseur contre les islamistes radicaux dans la péninsule du Sinaï et contre les tunnels de contrebande entre Israël et la bande de Gaza.
Les commentateurs relevaient que les principales inquiétudes israéliennes portent sur les risques d’instabilité accrue dans le Sinaï.
« L’incertitude sur l’avenir de l’Egypte est très important et il est plus difficile pour l’Egypte, occupé par des problèmes intérieurs, de s’occuper des problèmes sécuritaires, et notamment des groupes terroristes dans le Sinaï », a déclaré un responsable israélien non identifié, cité par la radio militaire.
La sécurité dans le Sinaï s’est fortement dégradée et la péninsule a connu une recrudescence d’activités de la part des mouvement islamistes radicaux, jihadistes et salafistes.
Égypte : l’Allemagne parle d’un « échec majeur pour la démocratie »
Le ministre des Affaires étrangères voit dans ce renversement un « réel danger que le processus de transition démocratique soit sérieusement altéré ».
Le renversement du président islamiste égyptien Mohamed Morsi par l’armée égyptienne mercredi constitue un « échec majeur pour la démocratie », a déclaré jeudi le ministre allemand des Affaires étrangères, Guido Westerwelle. « Il est urgent que l’Égypte retourne aussi vite que possible à un ordre constitutionnel (…), il y a un réel danger que le processus de transition démocratique en Égypte soit sérieusement altéré », a-t-il dit, alors que le président du Conseil constitutionnel égyptien, Adly Mansour, a prêté serment dans la matinée comme président du Conseil par intérim.
« Nous appelons toutes les parties à renoncer à la violence. Nous allons suivre de très près les évolutions en Égypte. Et nous allons prendre nos décisions politiques en tirant nos conclusions », a ajouté M. Westerwelle, qui a rencontré dans la matinée le Premier ministre grec pour le soutenir dans sa politique de réformes. « Les arrestations politiques et une vague de répression doivent être évitées à tout prix. Tout doit être mis en oeuvre pour retourner sur le chemin de l’ordre démocratique » a ajouté le ministre. À Londres, le ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague, a indiqué de son côté jeudi matin que le Royaume-Uni allait « travailler » avec le nouveau pouvoir en place en Égypte, tout en réaffirmant que Londres ne soutenait pas « les interventions militaires ».
AFP 14/07/13
Assad: la crise en Egypte incarne « la chute » de « l’islam politique »
« Quiconque utilise la religion dans un but politique ou pour favoriser certains par rapport à d’autres, est condamné à l’échec »
Le président syrien Bachar al-Assad a assuré que les manifestations monstres contre son homologue égyptien déchu Mohamed Morsi marquent la fin de l’islam politique, selon des extraits d’une interview à un journal syrien à paraître jeudi
« Ce qui se passe en Egypte est la chute de ce que l’on connaît comme étant l’islam politique », a déclaré le chef de l’Etat syrien au journal officiel As-Saoura.
« Où que ce soit dans le monde, quiconque utilise la religion dans un but politique ou pour favoriser certains par rapport à d’autres, est condamné à l’échec », a ajouté M. Assad, dont les extraits ont été diffusés sur sa page Facebook.
L’armée égyptienne a annoncé dans un message télévisé mercredi soir avoir écarté M. Morsi, suspendu la Constitution et annoncé la tenue d’une élection présidentielle anticipée en Egypte.
Les propos de Bachar al-Assad ont été publiés quelques heures après une déclaration de son ministre de l’Information, Omrane al-Zohbi, dans laquelle il avait assuré que le départ de Mohamed Morsi était nécessaire à la résolution de la crise égyptienne.
L’animosité entre le régime de Damas et les Frères musulmans dure depuis de longues années et l’appartenance à la confrérie est condamnée de la peine de mort en Syrie depuis les années 1980.
La branche syrienne des Frères musulmans joue aujourd’hui un rôle crucial dans le coalition nationale de l’opposition syrienne en exil, qui est reconnue comme représentante légitime du peuple syrien par plus d’une centaine d’Etats et organisations.
L’Egypte est un pays sunnite, de même que la plupart des rebelles syriens hostiles au régime de Bachar al-Assad tenue par la communauté alaouite, une branche de l’islam chiite, dont est issue le président syrien.
Mohamed Morsi de son côté a, comme de nombreux dirigeant arabes, appelé Bachar al-Assad à démissionner.
Depuis le début en mars 2011 du conflit en Syrie, qui a débuté par un soulèvement populaire pacifique et s’est militarisé face à la répression menée par le régime, plus de 100.000 personnes ont péri selon une ONG syrienne.
AFP 04/07/13
Neutralité chinoise
L’agence de presse officielle chinoise Xinhua se contente d’un communiqué annonçant l’entrée en fonction d’Adli Mansour, le nouveau président égyptien par intérim.
Le juge égyptien Adli Mansour a prêté serment jeudi en tant que président par intérim de l’Egypte après l’évincement de Mohamed Morsi. Il avait prêté serment plus tôt dans la journée en tant que chef de la Cour constitutionnelle suprême (CCS).
« Je prête serment devant Dieu tout-puissant de protéger sincèrement l’ordre républicain et de respecter pleinement la Constitution et l’état de droit, de prendre soin des intérêts du peuple, de préserver l’indépendance du pays et la sécurité de ses territoires », a proclamé M. Adli lors de la cérémonie.
Il a également promis de diriger « un pays moderne, constitutionnel, national et civil ».
Au moins 11 personnes ont été tuées et plus de 500 autres blessées mercredi soir dans des affrontements entre partisans et opposants du président évincé Mohamed Morsi.
La Serbie et le Kosovo se sont entendus vendredi à Bruxelles sur une gestion commune de leurs frontières et sur une représentation internationale du Kosovo sans que la Serbie ne reconnaisse l’Etat. Ce compromis, qui intervient juste avant les délibérations de ce lundi des ministres des Affaires étrangères de l’UE sur l’éventuel octroi à la Serbie du statut de candidat à l’adhésion, est très positif pour Belgrade, estime le quotidien Lidové noviny : « Cet accord arrive littéralement au dernier moment. Aucun progrès n’a été possible pendant des mois. Ce n’est pas un hasard si les choses avancent maintenant : les Serbes sont en effet sous pression. Ils espéraient obtenir dès le mois de décembre le statut de candidat à l’adhésion européenne. … La deuxième occasion approche maintenant. … La Serbie mériterait le statut de candidat. Elle s’efforce de remplir toutes les conditions et ne se trouve pas dans une situation plus mauvaise que la Croatie voisine. Si le statut de candidat devait ne pas lui être accordé, cela pourrait jouer en faveur des nationalistes aux élections du mois de mai. Ce serait à nouveau une régression considérable. »
La Commission européenne a proposé mercredi de geler les 495 millions d’euros de fonds de développement que doit recevoir la Hongrie l’année prochaine, en raison du non-respect par celle-ci du pacte de stabilité. Mais bloquer ce fonds de cohésion est incompréhensible au vu de la situation économique actuelle, critique le quotidien conservateur Dziennik Gazeta Prawna : « Si les Hongrois veulent venir à bout de la crise, ils ont besoin d’une croissance économique au même titre que les pays d’Europe méridionale. Actuellement, les prévisions du PIB pour 2012 varient entre zéro et 0,3 pour cent. Comme si la Commission n’avait pas remarqué le rôle particulier que joue la politique de cohésion pour les pays relativement pauvres de la soit disant nouvelle Europe en matière de relance économique. Il est difficile de trouver judicieux le gel de versements de près d’un demi-milliard d’euros alors que Budapest est au bord de la récession. »
Dans le débat relatif à l’augmentation de l’âge de départ à la retraite en Pologne, le vice-Premier ministre et chef du parti paysan, Waldemar Pawlak, a proposé que pour chaque enfant mis au monde, une mère de famille voit son âge de départ à la retraite diminuer de trois ans. Cette proposition est inacceptable car elle fait de la femme une machine à procréer et occulte les problèmes essentiels, s’emporte la féministe Magdalena ?roda dans une tribune au quotidien libéral Gazeta Wyborcza : « M. le vice-Premier ministre se permet de réduire les femmes à leur fonction purement biologique de procréation. … Pour Pawlak il s’agit de ‘tradition’. Espérons que Pawlak soit pour sa femme un époux fidèle et généreux. Du moins jusqu’à ce qu’il rencontre une femme plus jeune. Car beaucoup d’hommes trouvent soudain une partenaire plus jeune. Une fois qu’ils mènent leur nouvelle vie, ils cessent tout bonnement de verser des pensions alimentaires convenables. Puis ils ne soutiennent plus leur ex-femme à l’âge de la retraite. C’est aussi une tradition. Et celle-ci est également soutenue par le parti paysan. »
Gazeta wyborcza 27.02.2012
Amsterdam : Big Brother à l’hôpital
Les autorités sanitaires néerlandaises ont ouvert une enquête contre la clinique universitaire d’Amsterdam (VU), celle-ci ayant autorisé une chaîne de télévision à filmer le service des urgences à l’aide de 30 caméras cachées. Les patients ont souvent été informés a posteriori que les prises étaient destinées à un reality show. La chaîne privée RTL a annulé l’émission prévue pour le samedi. Ce scandale digne de Big Brother est une conséquence du néolibéralisme, critique le quotidien de centre-gauche De Volkskrant : « Cette affaire dévoile clairement la dégénérescence des normes dans l’espace public. L’appétit de sensationnel des médias, soumis depuis l’avènement de la télévision commerciale au terrorisme de l’audimat, est aiguisé : tout ce qui peut rapporter de l’argent est le bienvenu. On constate en deuxième lieu la mercantilisation de la société. Les hôpitaux sont désormais eux aussi des entreprises qui doivent s’imposer sur le marché. Pour renforcer son image de marque dans une concurrence qui met en opposition les différentes cliniques universitaires, la VU est prête à tout. … Par manque de repères moraux, sa direction a oublié où étaient les limites. »
En Belgique, selon les données officielles, quelque 11.000 enfants et jeunes prennent des psychotropes. Une tendance dangereuse, estime le quotidien de centre-gauche De Morgen : « Sous la pression des vendeurs de médicaments, les sautes d’humeur pubertaires, les caractères rebelles ou les tendances à l’expérimentation – spécificités caractéristiques et même saines des jeunes – sont considérés comme les symptômes de maladies psychiques. … L’industrie pharmaceutique puissante et les médecins trop dociles sont responsables de cet état de fait, mais ils ne sont pas les seuls. La manière dont nous obligeons les enfants à prendre des médicaments reflète l’attitude de notre société en matière d’éducation. Les parents, peu sûrs d’eux, sont poussés dans ce piège par les images de parents et d’enfants parfaits. Ce qui est hors normes, appuyé par une littérature pseudo-scientifique, est jugé malade. … Nous nous rendons nous-mêmes dépendants de l’illusion d’un bonheur prescriptible sur ordonnance. »
Par Bruno Amable professeur de sciences économiques à l’université Paris-I Panthéon- Sorbonne, membre de l’Institut universitaire de France.
Qui aurait souhaité démontrer le caractère antidémocratique de la construction européenne aurait pu difficilement trouver un meilleur exemple que l’histoire du référendum grec. Sa tenue à l’automne avait été annoncée en juin mais cela n’a pas empêché les principaux chefs d’Etat et tous les professionnels de l’intégrisme européen de feindre la surprise et de hurler au «coup de poker irresponsable», mettant en garde contre les «conséquences imprévisibles» (mais certainement abominables) qu’aurait un refus du plan «de sauvetage». On connaît la suite, après s’être vu imposer une reformulation de la question à poser, Georges Papandréou a finalement dû abandonner son projet au terme d’un processus particulièrement humiliant qui a révélé que la Grèce, à la différence de l’Islande, avait un statut de protectorat.
Il y eut aussi cette lettre envoyée le 5 août par le président de la Banque centrale européenne (BCE) et son successeur au Premier ministre italien (son homologue espagnol était destinataire d’une lettre semblable) dans laquelle les premiers, employant à cette occasion le ton qui convient pour indiquer à son majordome la liste des tâches quotidiennes, enjoignaient à Silvio Berlusconi de procéder aux sempiternelles réformes néolibérales : déréglementation du secteur des services, privatisation complète des services publics locaux, décentralisation au niveau de la firme des négociations salariales, abaissement du niveau de protection de l’emploi, durcissement des conditions d’accès à une retraite complète, baisse des salaires dans la fonction publique, instauration de procédures de coupes automatiques dans les dépenses publiques en cas de dépassement des objectifs de déficit, réforme de l’administration pour que celle-ci soit plus «amicale» envers le monde des affaires… Il était aussi précisé que tout ceci devait se faire dans les meilleurs délais : par décrets avec une ratification par le Parlement avant fin septembre.
La démarche des deux banquiers centraux de Francfort a au moins le mérite de dissiper l’hypocrisie habituelle sur ce qui relèverait des domaines communautaires, partagé ou national. Visiblement plus rien n’échappe à la compétence de la Banque centrale européenne. Lorsque celle-ci fut instaurée, comme une banque centrale «indépendante», le traité de Maastricht lui interdit de «solliciter ou accepter» des instructions des gouvernements des Etats membres de l’Union européenne. A l’évidence, ces derniers auraient dû prévoir une clause de réciprocité.
L’intégration européenne a donc d’abord conduit à l’abandon du contrôle de la politique commerciale puis à celui de la politique monétaire avec la création de l’euro. Comme la monnaie unique impose aux pays de la zone euro qui ont perdu en compétitivité (ceux du sud de l’Europe notamment) de chercher à la regagner par la baisse des salaires et des prix au moyen de politiques macroéconomiques restrictives qui mènent à la récession, accroissent le chômage, creusent les déficits publics, rendent les problèmes de dette publique plus difficiles à résoudre et accroissent la fragilité financière, l’abandon de la maîtrise de la politique budgétaire est presque réalisé. Et le renoncement à la conduite de politiques structurelles, de politiques de l’emploi ou de politiques sociales qui s’écarteraient de la saignée néolibérale est en très bonne voie.
Il y a alors une erreur de raisonnement à penser que la situation actuelle, qui voit par exemple les Indignés occuper Wall Street plutôt que manifester devant la Maison Blanche, témoigne du recul de la politique face à l’économie. Ce que cela représente, en fait, c’est le recul de la démocratie élective face à une nouvelle forme de politique, non démocratique. Elle est menée en Europe par des technocrates qui se sont certes garantis une indépendance à l’égard du demos, mais n’en mènent pas moins une action politique au sens où les décisions qu’ils prennent, comme les mesures ou les législations qu’ils contraignent les gouvernements à adopter, favorisent ou protègent certains intérêts, notamment financiers, au détriment d’autres intérêts. De même qu’il n’est pas de pire idéologie que celle de l’absence d’idéologie, il n’est pas de politique plus hypocrite que celle qui se dissimule derrière l’«apolitisme» techniciste ou des «contraintes» qu’on a soi-même contribué à ériger. Abandonner la politique à la bureaucratie néolibérale est bien la dernière bêtise à faire en Europe.
Libération 08/11/11
Papandréou veut bien retirer son référendum mais la crise continue
Georges Papandréou a quasiment enterré jeudi son projet contesté de référendum sur le plan européen de sauvetage de la Grèce pour tenter d’éviter à son pays en crise politique aigüe, la faillite et la sortie de l’euro, alors que les pressions des pays créanciers ont continué de s’accumuler.
A la tête d’un gouvernement déchiré et sur le point de tomber, le Premier ministre grec, aux prises depuis des mois avec la tentaculaire crise de la dette en zone euro, a fait une concession de taille en se disant prêt à retirer son projet de référendum, qui a créé la stupeur en Europe et au delà en début de semaine.
Mais les moyens de sortir de la crise politique dans laquelle s’enfonce la Grèce sont encore loin d’être identifiés, aucun accord de gouvernement n’ayant été trouvé avec l’opposition de droite pour pouvoir ensemble approuver le plan européen de désendettement de la Grèce, adopté dans la nuit du 26 au 27 octobre à Bruxelles.
Gouvernement de transition
Le leader de la Nouvelle Démocratie (droite) Antonis Samaras a pourtant lui aussi fait une concession en laissant entendre pour la première fois depuis le début de cette crise que sa formation était prête, devant la gravité de la situation, à envisager de participer à un gouvernement de transition.
«Là où on en est arrivé avec la politique du gouvernement (socialiste), le nouvel accord sur la poursuite de l’aide à la Grèce est inévitable et il faut le garantir», a déclaré M. Samaras.
Mais à peine les deux camps avaient-ils fait un pas l’un vers l’autre dans la journée que les vieux démons ont repris le dessus. Et le débat parlementaire censé aboutir vendredi à un vote de confiance sur la politique menée par le gouvernement s’est traduit par une reprise des hostilités.
M. Samaras a notamment exigé la démission du Premier ministre en réitérant ses exigences de la tenue d’élections anticipées.
Mais M. Papandréou a répondu qu’«un gouvernement responsable ne peut pas démissionner». Il a appelé en revanche tous les partis politiques «à la formation d’un gouvernement de coalition dans l’immédiat afin de rétablir la stabilité» et assurer l’aide européenne au pays.
A Cannes, réunis pour un sommet du G20, la chancelière allemande Angela Merkel et le président français Nicolas Sarkozy ont averti que la Grèce serait jugée sur ses actes.
Ils ont rappelé qu’ils attendaient d’abord de sa part un «oui» aux décisions prises le 27 octobre par les 17 pays de la zone euro et quelques dizaines de banquiers pour assurer le désendettement de la Grèce.
N’excluant plus une sortie du pays de la zone euro, les créanciers ont suspendu mercredi soir le versement de toute aide financière à la Grèce dans l’attente d’une clarification de la volonté des Grecs sur leur soutien au plan de désendettement du pays.
Sortie de la zone euro
Le président français, radouci, a rappelé ses origines grecques et fait part de son «admiration» pour ce pays, en expliquant qu’il ne voulait «en aucun cas» s’insérer dans la vie politique grecque. Mais il a justifié la position de fermeté adoptée la veille vis-à-vis de M. Papandréou destinée à «défendre l’euro et l’Europe».
«L’important, c’est qu’il y ait vite un ’’oui’’pour les décisions du 27 octobre» en Grèce, a résumé la chancelière allemande.
Dans la journée, l’éventualité de la formation d’un gouvernement de coalition avait encouragé la Bourse d’Athènes qui a clôturé en hausse, après s’être effondrée mardi et mercredi sur le projet de référendum qui a fait craindre aux investisseurs une faillite imminente du pays menaçant la viabilité de l’ensemble de la zone euro.
Dans un climat de grande fébrilité, traversé de rumeurs en tous sens, le ministre des Finances Evangélos Vénizélos, numéro deux du gouvernement et poids lourd de la majorité socialiste, a gardé la tête froide en annonçant publiquement pour la première fois l’échéance fatidique à laquelle est confrontée le pays: le 15 décembre.
Il a clairement fait comprendre qu’à cette date, la Grèce serait en situation de défaut de paiement si elle ne recevait pas la sixième tranche du premier prêt accordé à Athènes en 2010 par l’UE et le FMI, soit 8 milliards d’euros.
Il a également réclamé officiellement à M. Papandréou d’annoncer l’abandon de son projet de référendum pour qu’un processus de validation puisse être entamé.
L’heure de vérité devait sonner dans la nuit de vendredi à samedi, à la fin du débat parlementaire, où un vote de confiance était prévu.
AFP (3/11/11)
Papandréou attendu au G20
Nicolas Sarkozy et la chancelière allemande Angela Merkel, qui se sont rencontrés à Cannes, où doit se tenir un G20 à partir de jeudi, se sont déclarés « déterminés » à faire appliquer le plan de sauvetage de la Grèce malgré l’annonce de référendum.
Georges Papandréou, dont la majorité au parlement fond comme neige au soleil, s’est rendu aussi à Cannes mercredi, où il a rencontré les dirigeants allemand et français, ainsi que ceux de l’Union européenne et du Fonds monétaire international.
L’accord européen du 27 octobre prévoit que les banques créancières de la Grèce acceptent de réduire de moitié la valeur des obligations de dette grecque qu’elles détiennent, ainsi que la poursuite du soutien financier des Etats européens à la Grèce, écrasée par sa dette et par la récession causée par les plans d’austérité successifs.
En échange, il prévoit un renforcement du contrôle des créanciers sur la marche budgétaire du pays, une accélération du programme de privatisations et la poursuite des sévères mesures d’austérité débutées en 2010.
« La seule voie possible »
L’accord est « la seule voie possible pour résoudre le problème de la dette grecque », a martelé Nicolas Sarkozy à l’issue d’une réunion interministérielle à l’Elysée.
Le message que les deux poids lourds de la zone euro doivent adresser à Georges Papandréou est brutal, mais limpide. « Il a le droit de faire un référendum, mais avant Noël et uniquement pour poser la question de l’appartenance à la zone euro », a commenté une source proche du gouvernement français, « et s’ils disent ‘non’, eh bien qu’ils en sortent ».
S’il a lieu, le référendum devrait se tenir en janvier et serait le premier dans le pays depuis celui qui avait aboli la monarchie en 1974.
A Athènes, la fronde de plusieurs parlementaires socialistes, dont l’une a réclamé un gouvernement « de salut national » pour garantir l’exécution du plan de sauvetage, a réduit à 152 sur 300 le nombre de députés acquis à Georges Papandréou.
Au milieu de cette crise politique qui pourrait entraîner la chute du gouvernement, la Grèce a annoncé mardi un changement de tout son état-major militaire.
AFP (02/11/11)
Papandréou est irresponsable
Si l’Europe a montré qu’elle voulait assumer ses responsabilités vis-à-vis de la Grèce, le référendum grec est en revanche une preuve d’irresponsabilité du pays vis-à-vis de l’Europe, critique le quotidien de centre-gauche Süddeutsche Zeitung : « Par son cavalier seul dans le sens d’un référendum, Papandreou vient de replonger l’Europe dans l’incertitude qui caractérisait les jours précédant le sommet européen. Pire encore, alors que l’on pouvait encore agir ces dernières semaines, on risque aujourd’hui la paralysie totale. … Une issue est difficilement envisageable : si Papandreou décide de se retirer une nouvelle fois, il se désavouera lui-même et ne fera vraisemblablement qu’accroître la colère dans les rues d’Athènes et dans les rangs de son propre gouvernement. S’il va jusqu’au bout de son initiative, Angela Merkel et Nicolas Sarkozy, les Etats de la zone euro et l’UE dans son ensemble, la BCE et le FMI, en d’autres termes presque tout le reste du monde, devront trouver quelque chose pour couvrir la période qui s’étendra jusqu’à ce que la décision soit prise ; et aussi savoir quoi faire si une majorité de Grecs se prononcent contre le plan de sauvetage. »
Süddeutsche Zeitung (Allemagne)
Le peuple doit décider seul
Le référendum en Grèce est la bonne voie pour apporter plus de démocratie en Europe, estime le quotidien de centre-gauche Libération : « Papandréou soulève la seule vraie question : que pensent les peuples de la brutale cure d’austérité qui va s’abattre sur eux ? Merci aux Grecs, à l’avant-garde du désespoir, de la poser et d’y répondre en premier. Et de nous rappeler, au passage, que la crise économique sonne toujours le premier acte de l’ébranlement des démocraties. Nous vivons actuellement les effets d’un fédéralisme de la catastrophe, purement négatif. Qui conduit dans l’urgence à mettre sous tutelle certains Etats, dépouillés de leur souveraineté et repris en main par les prêteurs. Gouvernés, de fait, par les dirigeants élus d’autres pays. Dans ce schéma, les peuples ne sont qu’une variable d’ajustement, la démocratie une procédure risquée. En Europe… un fédéralisme positif, doté d’outils de contrôle et de gouvernement, conduira lui aussi à des pertes partielles de souveraineté. … Il devra nécessairement être contrebalancé par des institutions démocratiques. »
Libération
Les Grecs sont leur propre maître
Les vives réactions politiques et économiques consécutives à l’annonce d’un référendum en Grèce prouvent quatre choses, estime l’économiste João Pinto e Castro sur le site de blogs Jugular : « Premièrement, l’idée qui sous-tendait l’accord conclu la semaine dernière n’était pas d’exonérer la Grèce de 50 pour cent de ses dettes, mais de garantir 50 pour cent des paiements. Avec cet accord de nouveau remis en cause, les actions se sont immédiatement mises à baisser. Deuxièmement, le gouvernement allemand n’est pas le seul à avoir le droit de s’inquiéter de son opinion publique. Les Grecs décident dans leur propre pays et leur gouvernement doit répondre devant eux, même s’il prend ainsi des risques énormes. Troisièmement, même les pays en grande difficulté ont toujours une certaine marge de manœuvre. Il est désormais clair qu’aussi bien les débiteurs que les créanciers ont un problème, les deux ayant commis des erreurs dans l’évaluation des risques, et les deux devront au final renoncer à quelque chose. Quatrièmement, si montrer les muscles est la seule langue reconnue dans les relations internationales, chacun utilise les atouts qui sont à sa disposition pour obtenir l’effet voulu. »
Blog Jugular (Portugal)
Les eurocrates refusent d’admettre leur erreur
L’agitation suscitée par l’annonce du référendum grec révèle le véritable problème de l’Europe, à savoir la crainte des eurocrates quant à l’amère réalité de l’Union monétaire, estime le quotidien conservateur The Daily Telegraph : « Les eurocrates sont prêts à payer n’importe quel prix du moment qu’ils n’aient pas à reconnaître que la monnaie unique était une erreur. En d’autres termes, ils attendent de leurs citoyens qu’ils payent tandis que les fonctionnaires européens sont exemptés d’impôts nationaux. Les pays situés à la périphérie de l’Europe souffrent de la pauvreté, du chômage et de l’émigration, les pays au cœur de l’Europe de hausses d’impôts permanentes, afin que les partisans de l’euro puissent sauver la face. Il est triste de devoir écrire cela, mais les dirigeants de l’UE sont manifestement prêts à détruire la démocratie grecque et à anéantir l’économie grecque. Tout cela seulement pour empêcher l’échec de l’euro. »