Anzac Wallace, totalement possédé par son personnage. Photo dr
Cinéma
Après que l’armée britannique a massacré les siens, un soldat maori, d’abord au service de la Couronne, se venge. Reprise en version restaurée d’un néo-western totalement envoûtant. Film maudit...
En 1983 le réalisateur Geoff Murphy vient présenter, à Cannes, hors compétition, le premier film néo-zélandais. Mais Utu ne connaît pas le même destin, que Le Seigneur des anneaux de Peter Jackson, bien au contraire. La carrière du film tourne court en raison de problèmes entre les producteurs qui finissent par avoir raison du film. Le film restera invisible pendant plus de 30 ans. L’œuvre ressort aujourd’hui en version restaurée et augmentée, portant fièrement les trois lettres rouge sang de son titre, Utu, qui en maori signifient « vengeance ».
Conflit colonial oublié
Les deux îles principales constituant la Nouvelle-Zélande est l’un des territoires les plus tardivement peuplés de la planète. La date de l’arrivée des premiers Maoris s’établit entre 1250 et 1350. Le film évoque le grand conflit de la colonisation entre les Maoris et les Britanniques partiellement oublié dans le grand lissage de l’histoire occidentale. Après que les Néerlandais aient été reconduits par les Maoris au milieu du XVIIe siècle. La conquête britannique s’établit à travers le commerce. Elle s’opère dans les traces des premiers pas du capitaine James Cook sur les côtes en 1770.
En 1854, le premier Parlement de Nouvelle-Zélande, établi par le Parlement du Royaume-Uni, conduit le pays vers une autonomie partielle. Cette période verra une explosion démographique. En 1893, la Nouvelle-Zélande est le premier pays à donner le droit de vote aux femmes. Après les baleiniers, les missionnaires débarquent d’Europe pour un tout autre commerce, celui du « sauvetage des âmes ».
A cet égard, la scène où le prêtre anglican se fait décapiter en présence de ses fidèles appelés au retour des croyances animistes par le Maori renégat, est un vrai morceau d’anthologie cinématographique.
Absence de héros
La lutte hégémonique pour l’expansion coloniale entre la France et la Grande-Bretagne poussent les Anglais à obtenir à l’arrachée l’adhésion d’une grande partie des chefs maoris à un traité les liant à la Couronne. Le traité de Waitangi fera office de constitution de cette nouvelle colonie. Si le scénario autour de la vengeance s’avère assez classique, Utu révèle en toile de fond un contexte historique et culturel beaucoup plus singulier. La galerie des personnages qui se révèlent dans le feu des événements dresse le portrait d’un monde où la lutte pour le pouvoir fait basculer la société. Du révolté, au loyal, du fermier vengeur, au jeune soldat britannique et, même l’officier inflexible, « tous apparaissent victimes d’un système qui les dépasse et les projette les uns contre les autres ». Les préjugés sont mis à rude épreuve dans la nouvelle grille de lecture que propose Utu du fait colonial.
L’euphorie de Paris, où les pays sont arrivés à un consensus pour lutter contre le changement climatique, s’est un peu émoussée. Deux ans après, à Bonn, les pays africains plaideront de nouveau pour que les nations riches tiennent leurs promesses de les aider à s’adapter au réchauffement. Un soutien qui doit devenir une réalité avant même l’entrée en vigueur de l’accord climat de Paris en 2020.
Pour les pays africains, l’un des principaux défis de la COP 23 (Conférence des Nations unies sur le changement climatique), qui a démarré le 6 novembre 2017 à Bonn (Allemagne) sous la présidence des îles Fidji, sera notamment de «clarifier» la question du financement de l’atténuation (réduction des émissions) et de l’adaptation au changement climatique.
Partout sur la planète, les catastrophes naturelles se multiplient, rappelle Aissatou Diouf de l’ONG sénégalaise Enda Energie, l’une des structures coordinatrices du Réseau Climat & Développement (RC&D). «L’Afrique de l’Est et l’Afrique australe font face à de longs cycles de sécheresse (…), des pluies inattendues ont causé des inondations mortelles et des glissements de terrain en Sierra Leone et en République démocratique du Congo (RDC).»
Dans tous les pays, poursuit la militante, les conséquences de ces catastrophes aggravent les inégalites sociales. «Avec l’accord de Paris, les gouvernements ont promis de combattre le changement climatique. Maintenant, il est temps de donner corps à cette promesse». Et Bonn pourrait être une étape décisive dans la bonne direction si les principales attentes des pays africains trouvaient satisfaction.
«Les gouvernements africains peuvent et s’engagent dans des stratégies d’atténuation et d’adaptation, et nous, la société civile, les obligerons à rendre des comptes quant à leur application, précise Aissatou Diouf. Cependant, pour mener à bien tous ces programmes, nous avons besoin que les pays riches tiennent leurs promesses. L’engagement de réunir 100 milliards de dollars par an pour financer l’adaptation et l’atténuation doit être concrétisé.»
Penser au pré-2020
Des revendications qui sont aussi celles du monde en développement. «Nous avons besoin que la COP 23 soit celle du financement et du soutien. Les PMA (Pays les moins avancés) appellent les pays développés à accélérer la mise en œuvre de leurs obligations en matière de financement climatique et à combler le fossé financier toujours croissant avant qu’il ne devienne trop important», plaide la présidence du groupe des PMA (qui regroupe 47 pays dont la majorité sont africains) assurée par l’Ethiopien Gebru Jember Endalew.
«Les besoins financiers ne sont pas en adéquation avec les moyens mis a disposition pour l’instant (…)», note son prédécesseur et actuel négociateur de la RDC, Tosi Mpanu-Mpanu. «Il commence bien évidemment à y avoir des solutions grâce aux différents fonds climatiques existant et dont les pays en developpement ne maîtrisent d’ailleurs pas toujours les mécanismes.» Mais les Etats africains financent la plupart de leurs besoins climatiques, notamment après des catastrophes climatiques.
«Pour nous, cette COP, contrairement à ce que certains en disent, est une COP à enjeux». A Bonn,«on pourrait prendre une décision qui est double pour l’Afrique. Elle porte à la fois sur le financement et l’adaptation. Aujourd’hui, le fond dédié au financement de l’adaptation dépend du protocole de Kyoto. Nous voudrions que la Conférence des parties puisse adopter le principe selon lequel le fonds d’adaptation puisse servir l’accord de Paris qui est aujourd’hui la référence.»
En outre, «l’accord de Paris va définir la gouvernance climatique à partir de 2020 mais il y a le pré-2020. Et dans le pré-2020, il faut réfléchir à la façon de relever le niveau d’ambition, ajoute Tosi Mpanu-Mpanu. Dans cette optique, les pays africains «attendent de la clarté sur la façon dont nous atteindrons les 100 milliards de dollars par à partir de 2020. Certains pays (riches), en utilisant une comptabilité peu créative (…), estiment que 64 milliards de dollars ont déjà été mobilisés sur la période 2015-2016 pour le financement climatique. C’est un calcul que nous ne comprenons pas (…). Nous demandons donc plus de transparence et de convergence.»
«Les pays doivent avoir l’assurance que le financement international prendra le relais»
La question du financement est cruciale dans la lutte engagée par les pays africains contre le changement climatique. «Dans les contributions déterminées au niveau national (CND), beaucoup de pays Africains ont conditionné une partie de leurs actions, explique Tosi Mpanu-Mpanu. A l’instar de mon pays, la RDC». L’état congolais «prévoit de réduire ses émissions de 17% entre 2020 et 2030», à condition que «21 milliards de dollars lui soient mis à disposition (9 milliards pour l’adaptation et 12 milliards pour l’atténuation).
De même, «nous avons besoin d’un soutien financier, technologique et de renforcement des capacités dans la planification, l’élaboration et la mise en oeuvre de nos plans nationaux d’adaptation (PNA)». Pour beaucoup de pays africains, ces plans sont envisagés comme le volet adaptation de leurs contributions nationales. Le fonds vert, dont Tosi Mpanu-Mpanu est l’un des administrateurs, a décidé «de mettre à disposition 3 millions de dollars par pays pour faire leurs plans. Pour certains pays, ce sera suffisant, pour d’autres non.» Alors même qu’une épée de Damoclès plane sur les ressources du fond.
«Les pays ont pris des engagements à hauteur de 10,2 milliards de dollars en ce qui concerne le fonds vert», affirme Tosi Mpanu-Mpanu.Les États-Unis, à eux seuls, avaient promis se contribuer à hauteur de 3 milliards. Et l’administration Obama a déjà versé un milliard. Aujourd’hui, après l’annonce du président Donald Trump qui souhaite que son pays quitte l’accord de Paris, le reliquat de deux milliards ne devrait pas arriver de si tôt.
«Le manque de certitude a propos de ce financement peut miner la dynamique, le cercle vertueux auquel les pays en développement veulent se joindre. Il faut donc qu’on ait un signal fort que d’autres pays vont prendre le relais. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui». «Il n’y a pas péril dans la demeure (plus d’une cinquantaine de projets ont été approuvés pour une valeur de 2,5 milliards de dollars)», assure Tosi Mpanu-Mpanu. Cependant, ajoute-t-il, la question du refinancement du fonds vert pourrait poser problème. .
A Bonn, résume Tosi Mpanu-Mpanu, il faudra «continuer à encourager les pays, à leur montrer qu’ils peuvent continuer à faire des efforts avec leurs petits deniers tout en sachant que le financement international prendra le relais. Les Etats africains doivent avoir l’assurance que l’argent sera disponible.»
Le Conseil de sécurité de l’ONU se prononce sur un texte demandant à Israël de cesser toute activité de colonisation Photo Amanda VOISARD. AFP
Le Conseil de sécurité a adopté la mesure à la quasi-unanimité, les Etats-Unis ayant choisi de ne pas y opposer leur veto, se contentant d’une abstention. Un camouflet pour Israël et son Premier ministre.
Une résolution contre la colonisation des territoires palestiniens adoptée
Très gros malaise à Jérusalem après le vote, vendredi soir, par le Conseil de sécurité, d’une résolution exigeant l’«arrêt immédiat et complet des activités israéliennes de colonisation dans les territoires palestiniens occupés», y compris Jérusalem-Est. Cette résolution, la première depuis 1979, est un camouflet pour l’Etat hébreu qui se voit condamné par la communauté internationale. Et qui risque des sanctions économiques et politiques s’il poursuit l’occupation des territoires palestiniens. L’important dans cette affaire est que le texte a été voté, les Etats-Unis n’y ayant pas opposé leur veto, comme ils le faisaient régulièrement. Leur représentante s’est contentée de s’abstenir. Une nuance qui change tout.
A l’origine, un premier texte égyptien soutenu par la Ligue arabe devait être présenté jeudi soir au vote du Conseil de sécurité et les Etats-Unis avaient déjà fait savoir qu’ils ne s’y opposeraient pas. Est-ce parce que Barack Obama a des comptes à régler avec Benyamin Nétanyahou depuis que ce dernier a tenté de torpiller la signature de l’accord sur le nucléaire iranien ? Peut-être. Mais également parce la politique du président américain au Proche-Orient n’a pas convaincu grand monde pendant huit ans et que celui-ci semble avoir voulu, à trois semaines de son départ de la Maison Blanche, poser un geste majeur.
Ces dernières semaines, conscients du danger que représentait ce revirement, Nétanyahou et les principaux responsables israéliens avaient multiplié les appels du pied vers Washington afin que les Etats-Unis bloquent la résolution égyptienne. «Nous espérons que les Etats-Unis ne modifieront pas leur engagement de longue date de faire progresser la paix», avait d’ailleurs déclaré Nétanyahou au début de la semaine. Parallèlement, l’Etat hébreu a mené une offensive diplomatique visant à convaincre le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi de reporter le vote du texte. Pour cela, ses envoyés ont notamment pris langue avec Donald Trump, en lui demandant de téléphoner au leader égyptien. Ce que le président élu a fait, non sans avoir twitté son opposition au vote de la résolution.
Persuadés d’avoir écarté le danger, Nétanyahou et ses conseillers ont pavoisé trop vite. Car dans la journée de vendredi, la Nouvelle-Zélande, le Venezuela, la Malaisie et le Sénégal ont repris l’initiative en proposant, avec le soutien de la France, qu’un nouveau texte exigeant l’arrêt immédiat et complet de la colonisation soit soumis au vote à la fin de la journée. En panique ou presque, l’entourage du Premier ministre israélien a aussitôt accusé Obama et le secrétaire d’Etat John Kerry d’être derrière ce «coup bas» et «d’avoir laissé tomber Israël».«Ce n’est pas une résolution contre la colonisation, c’est un texte anti-israélien», s’est par exemple exclamé le ministre Youval Steinitz (Likoud). Quant aux émissaires de l’Etat hébreu, ils sont repartis à l’offensive en sollicitant leurs soutiens à Washington et en tentant même d’obtenir un contact avec les proches de Vladimir Poutine. Qui n’ont pas donné suite.
Sans attendre son intronisation, le successeur de Barack Obama a déjà pris en main l’épineux dossier israélo-palestinien. A la demande du Premier ministre israélien, Donald Trump a fait reporter un vote à l’ONU sur la colonisation en territoire palestinien. Une démarche suivie par l’Egypte, à l’origine de la résolution, en gage d’alignement du président Sissi sur le nouveau pouvoir américain.
Dans une démarche qui en dit long sur la nouvelle gouvernance américaine, Donald Trump, élu mais pas encore officiellement en exercice, a fait une irruption personnelle et prématurée dans le jeu proche-oriental.
Appelant à un veto américain lors d’un vote du conseil de sécurité de l’ONU sur les colonies israéliennes en Cisjordanie, initialement prévu le 22 décembre, Donald Trump a obtenu le report de la consultation.
Le projet de résolution présenté par l’Egypte devait exhorter Israël à «cesser immédiatement et complètement toute activité de colonisation en territoire palestinien occupé, dont Jérusalem Est».
L’Etat Hébreu s’est aussitôt mobilisé pour faire échec à l’opération. «Quand ils ont eu connaissance du fait que l’administration actuelle ne mettrait pas son veto à cette résolution, des responsables israéliens ont pris contact avec l’équipe de transition de Trump pour demander son aide», a indiqué à l’Agence France Presse une source israélienne sous couvert d’anonymat.
Donald Trump et Benjamin Netanyahu sur la même longueur d’ondes
Le successeur élu de Barack Obama a alors appelé le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi, à l’origine du projet de résolution contestée, obtenant rapidement gain de cause.
L’Egypte a demandé le report du vote, tandis que la présidence publiait un communiqué justifiant la décision: «Les deux dirigeants se sont mis d’accord sur l’importance de donner à la nouvelle administration américaine une chance de gérer tous les aspects de la cause palestinienne pour arriver à un accord complet» sur le dossier.
Donald Trump, qui a nommé comme ambassadeur en Israël David Friedman, un homme favorable au développement des colonies, s’est lui aussi expliqué sur son choix.
«Comme les Etats-Unis le disent depuis longtemps, la paix entre Israéliens et Palestiniens ne peut venir que de négociations directes entre les deux parties, et non à travers des conditions imposées par les Nations Unies», dit le nouvel élu dans son communiqué, reprenant une formule de Benjamin Netanyahu lui-même.
Ce qui a fait dire à l’ambassadeur palestinien, Riyad Mansour, à l’issu d’une réunion des ambassadeurs arabes à l’ONU, que Trump «agissait au nom de Netanyahu»
. Abdel Fattah al-Sissi donne des gages à Trump
Pas un mot, en revanche, sur le retournement improvisé du président Sissi. Ce dernier, en désaccord ouvert avec les pétromonarchies du Golfe et surtout l’Arabie Saoudite, en raison de son ralliement au régime de Bachar al-Assad, fait de son alliance avec Washington une priorité.
Le président égyptien est le premier dirigeant arabe à avoir rencontré le candidat Trump, avec lequel il s’est entretenu en septembre 2016, en marge de l’assemblée générale de l’ONU. Avant même le scrutin, il ne cachait pas son admiration pour le dirigeant républicain. «Je n’ai aucun doute sur le fait qu’il sera un bon dirigeant», disait-il.
En froid avec l’administration Obama pour avoir destitué, en 2013, son prédécesseur le président Mohamed Morsi, issu des Frères Musulmans, et pour le peu de respect dont il fait preuve pour les droits de l’Homme, Abdel Fattah al-Sissi donne ainsi des gages à la nouvelle administration Trump.
Le jour même où ce dernier réaffirmait, après l’attentat de Berlin, «avoir raison à 100%» dans son projet d’interdire l’entrée des musulmans aux Etats-Unis.
La mémoire et l’histoire de l’esclavage sont des affaires sérieuses ! S’il faut encore le rappeler de façon si péremptoire, c’est que la vigilance doit être soutenue, encore et toujours, pour que les luttes des esclaves qui ont participés à la construction de la République et des valeurs qui nous rassemblent, ne disparaissent pas sous l’effet du souffle de la méconnaissance ou de l’idéologie nocive sur l’inégalité des acteurs de l’Histoire. La loi du 21 mai 2001, première loi Taubira, a déclaré l’esclavage et la traite dans l’Atlantique et l’Océan Indien comme crime comme l’humanité et aussi inscrit dans son article 2, que leur enseignement était obligatoire. Les programmes en ont tenu compte … sept ans plus tard, en 2008, pour le collège et le lycée mais il a fallut toute la ténacité du Comité National pour la Mémoire et l’Histoire de l’Esclavage pour que la question ne disparaisse pas des nouveaux programmes du primaire et du collège. Les contempteurs de cette histoire arguent que finalement ce phénomène historique n’était pas si important ni au niveau de la France, ni au niveau du monde, simplement treize millions de personnes africaines déportées vers les Amériques et un million vers l’Océan Indien.
Outre le mépris que ce jugement manifeste vis-à-vis de ces personnes, ces chiffres ne disent rien de l’importance de l’histoire de l’esclavage dans l’histoire de France, surtout dans ce moment fondateur du récit national qu’est la Révolution française. La Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et surtout Saint-Domingue (futur Haïti) ont cru pleinement au combat pour les valeurs de Liberté, d’Egalité et de Fraternité et l’ont porté si haut que la Convention nationale a aboli l’esclavage pour la première fois, le 4 février 1794 dans l’ensemble des colonies françaises de l’époque. Pendant la bataille de La-Crête-à-Pierrot menée lors de la tentative de rétablissement de l’esclavage par Napoléon, autant les esclaves de Saint-Domingue que les troupes françaises qui s’affrontaient, chantaient la Marseillaise ! Plus de cinquante ans plus tard, le 27 avril 1848, la deuxième République abolissait pour la seconde fois l’esclavage, cette fois-ci définitivement pour les colonies de l’Atlantique et de l’Océan Indien. La France célèbre chaque 10 mai la « Journée nationale des mémoires des traites, de l’esclavage et de leur abolitions » en hommage aux esclaves et aux abolitionnistes.
En effet, les esclaves qui s’étaient révoltés continuellement depuis le XVe siècle mais encore plus depuis la fin du XVIIIe siècle et qui, par leurs soulèvements contre le pouvoir colonial, avaient nourri la réflexion abolitionniste sur l’égalité du genre humain, ont accueilli l’émancipation légale au cris de « Vive la République ». Les esclaves n’avaient jamais renoncé à leur humanité, même au sein du cadre contraint et violent de l’esclavage. Ils l’ont imposée par la force ou par la résistance quotidienne. Ils croyaient à l’égalité, ils la réclamaient, et ce d’autant plus qu’au sein des sociétés coloniales esclavagistes de l’Atlantique se sont construites ces équivalences de termes entre noirs/esclaves et blancs/maîtres. Avant cette expérience, il n’y avait pas de « Blanc » (ce qualificatif utilisé dans les colonies atlantiques devait être expliqué au public européen) et pas de hiérarchies socio/raciales en Europe. C’est bien dans ces colonies de sucre, de café et de coton que la « race » n’a plus été le marqueur d’une appartenance familiale ou lignagère mais s’est transmuée en élément biologique qui, par le sang, transmettait un statut.
L’origine de l’idéologie raciale et du racisme
Ce récit sur les sociétés esclavagistes n’est pas simple détour, il souligne l’origine de l’idéologie raciale et du racisme. Les mémoires -définies comme expériences sociales du passé dans le contemporain- se sont précisément opposées – parfois, souvent – à la jauge de l’expérience du racisme produite par les événements de violence extrême de l’histoire. Alors que faire ? Si l’urgence actuelle de créer du collectif dans l’égalité des droits et des devoirs est bien réelle, les conditions doivent en être posées. Elles ne passent pas, me semble-t-il, par des combats auto-déclarés comme « anti-racistes » -dont le pluriel est suspect et qui sont parfois aporétiques- mais bien par la reconnaissance mutuelle des phénomènes historiques qui ont engendré des faits de racisme (mise en discours, idéologie, de l’exclusion et de la dépréciation de l’autre). Les mémoires ne doivent pas se croiser mais faire « causes communes » pour reprendre le titre de l’ouvrage de Nicole Lapierre ou mieux encore « Histoire commune ». Peut-être alors pourrait-on sortir de la « race » comme totalitarisme c’est-à-dire d’un système où la « race » et conséquemment le racisme ne peuvent être dénoncés et combattus qu’en utilisant les propres catégories qui les créent. C’est faire ici le pari de la connaissance et de l’enseignement, de la recherche universitaire, d’une certaine exigence de la pensée qui se partage.
C’est aussi celui que font de nombreuses associations de citoyens qui souhaitent fermement dépasser la mémoire pour aller vers l’histoire. Quoiqu’on cherche à la leur imposer, certaines d’entre elles ne se reconnaissent pas dans des identités sans espoir comme celle de « victimes de l’esclavage colonial ». Elles veulent avoir leur place dans le monde, à égalité…
* Myriam Cottias est directrice de recherche au CNRS, présidente du Comité national pour la mémoire et l’histoire de l’esclavage
Ciné. L’intégrale de Jane Campion un coffret Pathé de 12 DVD avec tous ses longs métrages et sept courts.
Jane Campion est la seule réalisatrice à avoir remporté la Palme d’Or du Festival de Cannes pour La Leçon de Piano en 1993. Ceux qui on vu des films de cette célèbre réalisatrice néo-zélandaise s’en souviennent. Son œuvre est imprégnée d’un féminisme particulier, qui s’affranchit des clichés et des normes, au travers de multiples portraits de femmes qu’elle esquisse et développe un peu plus à chaque film.
Elle se rapproprie avec une aisance déconcertante les codes du genre comme dans le thriller érotique In the cut, ou les films en costumes aux images somptueuses comme Portrait de femme ou Bright Star.
« A partir de Tissues, (un court réalisé à 25 ans) je n’ai eu de cesse de penser au cinéma. Chaque film n’était pour moi qu’un projet, une idée que je voulais voir se réaliser en images. Personne n’allait le faire à ma place, alors je l’ai fait.» Explique Jane Campion dans la présentation du coffret.
« Lorsque j’ai fini mon école, je ne savais pas que je deviendrai réalisatrice. Dans mon esprit, il fallait que les gens aient envie de voir vos films, et je ne pensais tout simplement pas que les gens voudraient voir les miens.»
Campion pratique un art à mille lieues d’un cinéma joli et académique. Bien au contraire, son cinéma ne cesse d’être en recherche de formes, naviguant entre rébellion, doute et désir d’apaisement. L’humour décapant qui l’anime apparaît dès ses premiers courts. On le retrouve plus tard avec un art éveillé du second degré dont le sommet est atteint dans Holy Smoke.
« Le tournant a été en 1984, lorsque A girl’s own story a été projeté avec d’autres films de fin d’étude. Il reçut à ma grande surprise une incroyable ovation. Il y avait donc une place dans ce monde pour faire entendre ma voix, pour ce que j’avais naturellement envie de faire..»
Jane Campion a poursuivi en créant des films plus que troublants qui changent et nous changent. Une oeuvre à (re) découvrir d’urgence.
JMDH
Coffret Pathé 12 DVD 99,99 euros Blu-ray 119.99 euros.