Censure « La Vie d’Adèle » perd son visa d’exploitation

Photo : Pathé
Le visa d’exploitation du film La Vie d’Adèle a été annulé par la justice. En cause, des « scènes de sexe réalistes de nature à heurter la sensibilité du jeune public ».
Saisie par une association catholique réputée proche de l’extrême-droite, la justice a annulé le visa d’exploitation du film d’Abdellatif Kechiche, palme d’Or au festival de Cannes en 2013.
Dans une décision rendue publique mercredi, la cour administrative d’appel de Paris a demandé à la ministre de la Culture Fleur Pellerin de « procéder au réexamen de la demande de visa » du film dans un « délai de deux mois« . La cour a estimé que La Vie d’Adèle: chapitres 1 et 2, long-métrage d’Abdellatif Kechiche avec Léa Seydoux et Adèle Exarchopoulos sorti en 2013, qui raconte une passion amoureuse entre deux jeunes femmes, comporte « plusieurs scènes de sexe présentées de façon réaliste, en gros plan » qui sont « de nature à heurter la sensibilité du jeune public ».

De ce fait, la ministre « ne pouvait, sans commettre d’erreur d’appréciation » au regard de la loi « accorder un visa d’exploitation (autorisation administrative nécessaire pour une diffusion en salle de cinéma) comportant une interdiction limitée aux mineurs de 12 ans », assortie de messages d’avertissement, ajoute-t-elle. Comme pour le film de Gaspar Noé, Love, en août dernier, le ministère de la Culture a immédiatement annoncé son intention d’introduire un recours devant le Conseil d’Etat.

Chez Bonnet et consorts, la  » lumière  » tire sur le brun

 

La justice avait été saisie par l’association Promouvoir, proche des milieux catholiques traditionalistes d’extrême-droite et de son avocat et cofondateur, André Bonnet, ancien responsable du MNR de Bruno Mégret, qui estimait que le film aurait dû être interdit aux moins de 18 ans. L’association Promouvoir, créée en 1996, avait été déboutée en première instance, en septembre 2014, par le Tribunal administratif de Paris de sa demande d’annulation du visa d’exploitation du film.

Procédurier accompli, André Bonnet n’en est pas à son coup d’assai. Il s’était déjà attaquée avec succès à Baise-moi de Virginie Despentes et de Coralie Trinh Thi, à Ken Park, de Larry Clark, à Nymphomaniac, de Lars von Trier ou encore à la Fnac d’Avignon, coupable selon lui d’avoir disposé dans ses bacs  » des BD avec des fellations en gros plans juste à côté des albums de Boule et Bill « . Au magazine Premiere, André Bonnet expliquait l’objet de son association : « défendre la dignité de la personne humaine et protéger les mineurs, à travers la « promotion des valeurs judéo-chrétiennes » »…

Dans un communiqué, l’ARP, la société des auteurs-réalisateurs-producteurs a réagit vivement à la décision de la justice :  » Nous ne pouvons nous satisfaire de voir la culture et la liberté de création soumises au joug des tendances moralistes  » (…), une décision qui « donne raison aux arguments honteux d’une association résolument obscurantiste ».

Pour le plaisir, la bande annonce du film d’Abdellatif Kechiche, palme d’or au Festival de Cannes 2013 :

Source L’Humanité 09/12/2015

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