Rémi Fraisse et la résistance citoyenne

1102 ventre Une Montpellier dimanche


Pour les manifestants la mort du jeune homme de 21 ans n’est pas une bavure

Société civile. A Montpellier, la manifestations contre la violence d’Etat rassemble 400 personnes.

La mort de Rémi Fraisse lors d’une manifestation contre le barrage de Sivens le week-end dernier soulève un mouvement d’indignation dans la société civile.  Des dizaines de manifestations se sont tenues hier dans les villes françaises contre les brutalités policières, les manifestations servent de plateforme pour mettre en évidence les cas, de plus en plus nombreux, de violence de la police qui vont crescendo en parallèle avec l’intensification des luttes sociales et la défense de l’environnement face à l’aménagement marchant du territoire.

A Montpellier, la mobilisation a rassemblé 400 personnes: citoyens, membres des partis (PG, NPA, Ensemble, EELV ), anarchistes, écologistes, organisations et ONG (Attac, LDH, la Confédération Paysanne Le Centre démocratique Kurde de Montpellier…) Parti de la Comédie, le cortège s’est orienté vers la préfecture où plusieurs prises de parole se sont succédé suivies d’une minute de silence à la mémoire de Rémi Fraisse.

Les opinions exprimées hier devant la préfecture mettent en exergue le phénomène de violence policière de moins en moins contrôlé par le pouvoir politique. En rappelant le précédent lors de l’expulsion de la zad de Notre Dame des Landes où de nombreux jeunes militants ont été blessés gravement par des tirs de flasballs et grenades.

Les positions de la rue divergent sur l’avenir attendu et les moyens à déployer pour y parvenir mais les expressions convergent sur la responsabilité du gouvernement et du le CG du Tarn qui avaient stigmatisé les manifestants, et «tenté de les diviser pour noyer le poisson». L’ensemble des forces représentées a finalement scandé en coeur « Cazeneuve démission

Ce sinistre événement témoigne d’une fracture entre une raison d’Etat qui s’éloigne du service public et des contestataires qui militent pour des droits environnementaux. L’engagement en acte dans la résistance pourrait être contagieux, certains évoquant « La future gare TGV Odysseum de Maugère construite en zone inondable.»

JMDH

Source : L’Hérault du Jour : 02/11/20142

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Cinemed. Les courts témoignent de leur époque.

1101 PAGE13 104B P1 culture cinemed« Drag me » de Nikos Kellis 2014, 5,46mn. Photo dr.

Festival. La sélection de quarante courts métrages et d’une dizaine de films documentaires séduit le public très assidu du Cinemed.

Salle comble à l’Utopia pour le programme des six court métrages grecs. Jeudi, plusieurs dizaines de spectateurs n’ont pu assister à la soirée faute de places. Ils pourront se rattraper aujourd’hui : la programmation est rediffusée à midi salle Einstein.

Cet engouement pour les courts et moyens métrages ne se dément pas au Cinemed qui présente cette année une sélection de quarante films en provenance de tout le bassin méditerranéen sur les six cents reçus.

La sélection s’opère sur la qualité des images, celle du scénario et sur l’intention qui anime les réalisateurs. Pour beaucoup des élus sélectionnés au festival, la programmation à Montpellier leur permettra de poursuivre leur travail avec un soutien à la production pour leur futur film, court, moyen voire long métrage.

L’engouement du public cinéphile de Montpellier pour le court et les films documentaires (un peu sous représentés cette année) répond à plusieurs paramètres, à commencer par celui d’être informé. Les médias français, sont, on le sait, très sélectifs, dans le traitement  de l’information internationale, cela tant au niveau des zones géographiques prises en compte, que des angles choisis pour aborder les sujets, souvent limités et ethnocentrés.

Un regard comme celui du réalisateur égyptien Ahmed Nour, qui présente le documentaire très abouti Vagues dont le sujet questionne le quotidien de la population de Suez dans la société post-Moubarak, apporte une contribution historique et contemporaine à la compréhension, avec un sens affirmé de l’esthétique. La diversité des sujets, des lieux, et des formes figure parmi les  critères du public montpelliérain.

La manière dont le film d’animation de Nikos Kellis, Drag me, plonge dans la jungle urbaine et celle dont on suit l’engrenage dans l’extrémisme du jeune ouvrier Giorgos dans le court métrage Red Hulk d’Asimina Proedou offrent deux restitutions talentueuses de la violence sociale.

Si le court métrage donne de l’intensité aux émotions, il est aussi un lieu d’expérimentation et de découvertes. Par son exigence cinématographique et son ouverture, le festival Cinemed a au fil du temps permis d’aiguiser le regard du public et d’attiser sa soif de culture.  Il en redemande. Pourvu que ça dure !

 Jean-Marie Dinh

Source : La Marseillaise L’Hérault du Jour 01/11/2014

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Cinemed. Standing aside watching. Un retour aux sources d’Antigone

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Antigone révèle les tensions et le pouvoir corrompus qui paralysent. Photo dr

« C’est mon premier film. Je n’ai pas réalisé de court-métrage auparavant », confie Yorgos Servetas. Ce jeune trentenaire athénien signe Standing aside watching, un film qu’il plante au coeur de la province voisine de Thèbes pour évoquer la déliquescence actuelle de la société grecque. « On voit mieux ce qui se passe que dans une métropole. Les choses apparaissent de manière plus lisible. En province il y a moins de distance entre la population et l’autorité.»

Référence subtile à la tragédie grecque classique, le film met en scène une Antigone du XXIème siècle qui quitte la capitale pour retrouver les sources de sa ville natale. Petit village de bord de mer où elle pense endiguer ses problèmes économiques et renouer quelque peu avec le sens des choses. Elle arrive dans une ville fantôme, à commencer par la gare où un vieil homme assis qui pourrait tenir le rôle du coryphée, lui prédit une tempête à venir. Dehors les bâtiments sont couverts de graffitis et la forêt a brûlé.

Antigone trouve un job d’institutrice, retrouve ses amis Eleni, et Dimitri, et répond aux avances  du beau et jeune Nikos qui travaille à la casse. Mais la tension est perceptible et sa personnalité de feu va vite se révéler incompatible avec le monde rural qui s’est assombri depuis son départ.

Le village heureux d’autrefois a laissé place à la violence et à l’intolérance. Comme dans la pièce de Sophocle, elle s’oppose au tenant du pouvoir incarné par Nondas, le patron de la casse, un repris de justice qui exerce sa domination sordide sur la population avec la complicité du responsable de la police.

Le réalisateur use du parallèle entre la nature à l’abandon et la désespérance des habitants résignés qui permet à Nondas d’exercer le pouvoir paralysant sur leur vie. « Seuls les Pakistanais arrivent, d’ici on ne peut que partir », lâchera l’homme de la gare au départ d’Antigone. « Pour moi, il incarne l’ancienne bourgeoisie du berceau de laquelle naît le fascisme », signale Yorgos Servetas qui met à jour le thème de la rébellion morale et offre une vision renouvelée de l’austérité contemporaine.

JMDH

Source : L’Hérault du Jour La Marseillaise 31/10/2014

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Cinemed. Atlit de Shirel Amitay : « Soyons nombreux à parler de paix »

Trois actrices différentes et remarquables. photo dr

Trois actrices différentes et remarquables. photo dr

Compétition long-métrage. Atlit, premier long-métrage ambitieux et profond de
Shirel Amitay. La réalisatrice explore les blocages invisibles au processus de paix.

En compétition long-métrage pour l’Antigone d’Or, Shirel Amitay signe avec Atlit* un premier opus d’une grande maîtrise. Après le décès de leurs parents, trois soeurs (Géraldine Nakache, Judith Chemia), se retrouvent en Israël pour la vente de la maison familiale. L’action se situe deux ans après la signature des accord d’Oslo, en 1995, à 10 jours de la grande manifestation pour la paix qui mit fin au processus pacifique du dialogue israélo-palestinien avec l’assassinat du 1er ministre Yitzhak Rabin.

Le récit qui soulève le problème de la transmission entre les trois soeurs au sein d’une cellule familiale prend pied sur un territoire intime à l’orée duquel s’ouvre une parabole cinématographique qui met en question l’idéologie collective enfouie à l’origine du revirement belliqueux d’Israël.

Rencontre avec Shirel Amitay

Shirel Amitay

Shirel Amitay

« Je voulais parler de la Paix, explique la réalisatrice, et situer l’action du film à un moment où Israël avait trouvé en Rabin un père pour l’évoquer

Dans le film on voit Rabin plaisanter en public sur la propension d’Arafat à parler qui en fait « presque un juif » selon lui. « Je ne tiens pas un propos proprement politique. La seule chose que j’ai envie de dire, c’est : soyons nombreux à parler de paix. Cet extrait montre la proximité où nous étions parvenus dans le dialogue avec les Arabes. Nous avons besoin d’avoir des parents responsables mais aujourd’hui le père est mort. »

Atlic met à jour le conflit entre les trois soeurs. Dans la maison familiale, l’aînée tient le rôle de gardienne du temple. « Elle représente la génération qui défend la mythologie d’État et l’idée selon laquelle les juifs sont arrivés sur une terre vierge et qu’ils ont tout construit. La cadette vit au présent, elle se sent bien ainsi et veut oublier le passé, tandis que la benjamine se dit pas du tout concernée. Elle veut juste vendre la maison pour aller courir le monde. Mais aucune des trois n’assume vraiment sa vie. »

La présence fantomatique des parents est une des clés du film. « Face au visible, je voulais évoquer la part d’invisible qui est une permanence dans l’histoire des familles et dans l’histoire d’Israël. Les parents parlent simplement tandis que les soeurs restent dans leurs histoires mais cette confrontation va permettre aux enfants de retrouver la paix, de libérer leur espace intérieur pour recevoir et donner de l’amour. »

Comment réagir face à la mobilisation des pro-palestiniens qui ont perturbé une séance du festival ?

« Let’s talk. Les ombres portées sont très lourdes. On a vu des slogans véhiculés de parts et d’autres par des milliers de fantômes dans les événements tragiques de cet été. On est toujours très prompts à distribuer les bons et les mauvais points. Je pense qu’il faut converser l’espoir de voir les choses autrement. »

Jean-Marie Dinh

Source : L’Hérault du Jour 28/10/2014

w * Sortie le 21 janvier 2015.

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Les espoirs du peuple tunisien toujours d’actualité

L’implication totale des femmes tunisiennes a été et reste déterminant pour la démocratie. Photo DR.

Le réalisateur Christophe Cotteret présente en avant-Première « Démocratie année zéro » qui retrace la fulgurante révolution du jasmin, des révoltes de 2008 aux premières élections libres.

A quelques jours des élections législatives tunisiennes qui se tiendront dimanche prochain, le documentaire Démocratie Année zéro réalisé par Christophe Cotteret sera projeté ce jeudi 23 octobre en avant-première à Montpellier. En deux chapitres et un an d’investigation le film distribué par Les films des deux rives s’appuie sur le regard des principaux opposants et acteurs à l’origine de la révolution tunisienne. Il apporte un éclairage nécessaire à la compréhension des événements.

Le réalisateur belge retrace l’histoire contemporaine depuis les révoltes du bassin minier de Gafsa en janvier 2008 aux premières élections libres d’octobre 2011 en passant par l’immolation de Mohamed Bouazizi le 17 décembre 2010 à Sidi Bouzid qui a embrasé le monde arabe en précipitant la chute de Ben Ali, Moubarak et Kadhafi et en portant l’incendie à Bahreïn, au Yémen et en Syrie. Avec ce récit au long court du combat contre la corruption d’un pouvoir népotique jusqu’au processus de transition, Christophe Cotteret osculte la réalité tunisienne tout en interrogeant la capacité universelle d’un modèle révolutionnaire au XXIe siècle.

Trois ans plus tard, où en sont la liberté, la démocratie et la justice sociale revendiquées ? Dimanche, les Tunisiens sont appelés à choisir les 217 membres de leur première Chambre des représentants du peuple, élue en vertu de la Constitution du 27 janvier 2014. 1327 listes électorales se disputent la sympathie de 5 236 244 électeurs. Ce nombre colossal de listes candidates fait planer le risque d’une dispersion des voix, comme ce fut le cas en 2011.

On s’attend à un fort taux d’abstention qui s’explique en partie par la non-inscription sur les listes électorales mais surtout par la pauvreté des propositions politiques. Le parti musulman Ennahdha et le parti social- démocrate de Nida Tounes devraient se partager la majorité des suffrages mais aucun n’obtiendra la majorité absolue.

Le peu d’intérêt des Tunisiens pour ces élections pourrait paraître inquiétant dans une démocratie naissante mais comme l’analyse l’écrivain Gilbert Naccache* dans le film c’est une révolution de la société civile contre la société politique toute entière, la première du XXI siècle.

Jean-Marie Dinh

* voir les propos de Gilbert Naccache dans la bande annonce du film.

Entretien avec Christophe Cotteret

f1Unzka6D’où est partie l’idée du film ?

Je me trouvais à Tunis quelques mois avant le déclenchement de la révolution. On sentait les événements venir. J’ai rencontré plusieurs futurs protagonistes de la révolution avant le 17 décembre avec qui je suis resté en contact. Cela m’a donné envie de travailler sur cette histoire en revenant sur les bases pour restituer un récit sur le long terme.

Le film démarre en 2008 avec la révolte des mineurs de la région Gafsa, épicentre du mouvement, qui cumule deux problèmes majeurs, disparité régionale et pauvreté…

Dans le sud-ouest, la ville de Redeyef est un bastion ouvrier dont le pouvoir s’est toujours méfié. Ce n’est pas la région la plus pauvre mais elle rencontre de grandes difficultés en partie liées à l’exode lybien. Les événements de 2008 sont très importants. Ils annoncent des transformations dans la lutte sociale comme l’occupation par de jeunes chômeurs du siège régional de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) qui débouche sur une transformation de l’action syndicale.

L’unité de la population et notamment l’action des femmes s’est avérée déterminante …

Oui, ouvriers, chômeurs, lycéens et habitants ont multipliés les grèves et les actions. A propos de la Tunisie, on a parlé de révolution de palais et de manipulation américaine mais tout est parti d’un petit noyau d’activistes. Quatre personnes entraînent quatre autres personnes et si la police, envoyée sur place pour réprimer, tue cela passe à 400 personnes puis 800 et le mouvement s’étend rapidement passant des révoltes à une révolution.

Dans la seconde partie, vous suivez les jeunes acteurs de la transition politique dont l’arme la plus redoutable a été la circulation de l’info. Elle a aujourd’hui trouvé ses limites ?

Cette jeunesse est dépossédée de son pouvoir politique et elle peine aujourd’hui à réunir 100 personnes mais elle a grandement contribué à sortir de la dictature. Durant le mouvement ce ne sont pas les réseaux sociaux qui ont permis la chute de Ben Ali, ce sont les activistes qui ont utilisé ce médium. Après le renversement du régime les réseaux sociaux sont devenus un lieu de désinformation utilisé par tous les partis. Le problème de l’information concerne aussi la formation des journalistes. Quand vous avez relayé les infos du ministère de l’Intérieur pendant des décennies, vous ne devenez pas du jour au lendemain un journaliste d’investigation.

Avec l’entrée médiatisée d’Ennahdha dans la campagne vous évoquez la remise sur le devant de la scène d’une problématique qui arrange tous les partis et rassure sur la portée des réformes…

Dans un pays où la majorité de la population se déclare religieuse, cette question doit être abordée globalement. Ennahdha regroupe des franges de la population qui correspondent à un vrai électorat. Pour les partis musulmans radicaux ce parti s’éloigne de la pratique des «bons musulmans», pour les laïques il va restreindre dangereusement les libertés tandis que les libéraux y voit un cheval de Troie potentiel pour le retour de l’ancien régime.

Mais la vraie question c’est de réduire le chômage et relancer l’économie partout dans le pays.

Recueilli par JMDH

Source : La Marseillaise 23/10/2014

Voir aussi : Rubrique Cinéma, rubrique Tunisie, La faiblesse du président Marzouki, Les éditocrates repartent en guerre, rubrique PolitiqueMoyen Orient, Agiter le peuple avant de s’en servir, rubrique Rencontre, Nadia El Fani,