Non, le report de l’âge légal de 60 à 62 n’est pas inévitable

Le 10 septembre, sur France-Inter, Bernard Maris affirmait que le report de l’âge légal de date en retraite de 60 à 62 ans était inévitable car la majorité des salariés avait à 60 ans les annuités nécessaires à une retraite à taux plein.Cette affirmation de Bernard Maris rencontrait – qui s’en étonnerait ? – l’entier assentiment du néolibéral Dominique Seux avec lequel il était supposé débattre.

Cette affirmation ne peut pourtant, en aucun cas, prétendre à l’objectivité que revendiquaient les deux compères. Pour le Conseil d’Orientation des Retraites, l’âge moyen de départ en retraite est égal à 61,5 ans et l’âge moyen de sortie définitive du marché du travail est de 58,5 ans.

60 % des salariés du secteur privé qui prennent leur retraite ne sont plus, en effet, au travail. Ils sont au chômage, en maladie ou en invalidité. Avec un report de 2 ans de l’âge légal de départ en retraite, c’est 10 % à 15 % de salariés supplémentaires qui se retrouveraient dans cette situation et partiraient donc avec une retraite minorée, contrairement à toutes les affirmations péremptoires de M. Sarkozy. En effet, les droits acquis pour la retraite sont loin d’être identiques selon que l’on est au travail, au chômage, en invalidité ou en maladie. De surcroît, le problème serait reporté sur les caisses d’assurance maladie ou d’assurance chômage. Quel serait l’intérêt de ce report ?

L’espérance de vie en bonne santé est de 63,1 ans pour les hommes et de 64,2 ans pour les femmes. Pour un ouvrier, l’espérance de vie (calculée à l’âge de 35 ans) est inférieure de 10 ans à celle d’un cadre. Comment, dans ces conditions, peut-on estimer que 2 ans de retraite en moins ne pourraient avoir qu’une importance très relative et n’être qu’un paramètre comme un autre ?

Les salariés qui ont, aujourd’hui, le nombre d’annuités suffisantes pour partir en retraite à 60 ans ont commencé à travailler tôt, parfois très tôt, sans pour autant pouvoir profiter des dispositions de plus en plus restrictives de départ anticipé en retraite pour les carrières longues. S’appuyer sur cette réalité pour vouloir les faire travailler après 60 ans est donc particulièrement cynique.

Reporter de deux ans l’âge de départ en retraite, c’est soit allonger le temps durant lequel des salariés qui ne sont déjà plus travail ne seront pas pour autant en retraite, soit laisser au travail des salariés âgés alors que des centaines de milliers de jeunes ne trouvent pas de travail.

Pour le gouvernement de Nicolas Sarkozy, le passage de l’âge légal de 60 à 62 ans implique le passage de 65 à 67 ans de l’âge auquel un salarié pourrait bénéficier du taux plein (50 %) même s’il n’a pas le nombre de trimestres nécessaires. 25 % des femmes, aujourd’hui, ne bénéficient du taux plein qu’à 65 ans. Faudra-t-il qu’elles attendent deux ans de plus pour bénéficier de ce taux ? Et dans quelle situation attendraient-elles d’avoir 67 ans ? Au chômage (alors que Christine Lagarde a fait savoir sa volonté d’en finir avec la dispense de recherche d’emploi pour les salariés âgés) ou sans aucune ressource autre que le RSA ?

Maris et Seux avancent l’exemple de l’Allemagne pour justifier la régressions des retraites en France. Il faut cependant savoir qu’en Allemagne le report de l’âge légal à 67 ans dont les libéraux nous rebattent les oreilles ne se fera qu’en 2029. Par ailleurs, seulement 21,5 % des salariés allemands de plus de 60 ans ont aujourd’hui un travail (cf.Le Monde de l’économie du 7 septembre) ce qui relance le débat au sein du SPD, lui qui est convaincu d’avoir perdu les élections pour avoir accepté le passage à 67 ans alors que 80 % des allemands y étaient opposés. Si les salariés allemands ont subi, au cours des dernières années, une défaite sociale extrêmement dure, nous n’avons aucune raison d’accepter de subir les conséquences dans notre pays. Il faut, enfin, savoir que la situation démographique française n’a rien à voir avec la situation démographique allemande. En France, selon l’institut Nationale d’Etudes Démographiques (INED), le taux de fécondité des femmes est égal à 2,09 enfants par femmes (assurant ainsi le renouvellement des générations) alors qu’il n’est que de 1,5 en Allemagne. Dans ces conditions, comme le souligne l’économiste Dominique Taddéi, vouloir imposer des règles européennes communes à l’évolution des retraites revient à « fixer la même politique de chauffage pour Helsinki, l’Andalousie ou la Sicile ! »

Pourquoi, enfin, le report de l’âge légal serait-il « inévitable » ? Il n’est « inévitable » que pour ceux qui veulent ignorer qu’il est tout à fait possible de financer nos retraites par répartition sans toucher à l’âge légal ou à la durée de cotisation mais en augmentant les cotisations retraites et en priorité les cotisations retraites patronales. Sarkozy a d’emblée, refusé tout débat sur le montant des cotisations retraites. La contre-réforme qu’il veut nous imposer pèse à 90 % sur les seuls salariés et ne fait qu’égratigner les profits et la rente. Comment Maris peut-il accepter de justifier un tel déni de démocratie ?

En refusant de prendre en considération la situation des salariés âgées, des jeunes, des femmes, en refusant de regarder au-delà des caisses de retraites et de s’intéresser aux caisses d’assurance-maladie et d’assurance chômage, en refusant de chercher une solution au problème de nos retraites du côté des recettes et de l’augmentation des cotisations retraites patronales, Bernard Maris ne fait, hélas, que s’aligner sur Nicolas Sarkozy et le néolibéralisme le plus plat, celui de Dominique Seux.

Jean-Jacques Chavigné (Démocratie et socialisme)

Le projet de réforme de la procédure pénale présente des risques pour le respect des droits de l’homme

 

 

republique-francaiseCOMMISSION NATIONALE CONSULTATIVE

DES DROITS DE L’HOMME

 

 

Communiqué de presse de la CNCDH – 21 juin 2010

Le projet actuel de réforme de la procédure pénale présente des risques pour le respect des droits de l’homme

 

Intervenant dans le débat sur la réforme de la procédure pénale, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) prend position sur les garanties indispensables au respect des droits de l’homme dans la phase préparatoire au procès pénal. Elle rappelle dans un avis rendu public aujourd’hui les principes qui doivent guider toute réforme dans le domaine de la procédure pénale, domaine particulièrement sensible pour les droits de l’homme et les libertés publiques, le droit à un procès équitable étant la pierre angulaire de sa réflexion. Elle se réserve par ailleurs la possibilité de se prononcer ultérieurement sur un projet de loi abouti dont elle demande à être saisie.

 

La CNCDH demande de toute urgence une réforme de la garde-à-vue. Elle dénonce dans son avis le recours abusif car quasi-systématique à une telle mesure privative de liberté. Si le projet de réforme cherche à en limiter le recours, la CNCDH considère que les propositions restent bien insuffisantes et souhaite que les conditions de placement en garde-à-vue soient limitées par des critères objectifs. De plus, le respect des droits de la défense de la personne gardée à vue passe par l’assistance effective d’un avocat dès le début de la mesure, et pendant les interrogatoires. Il est indispensable de rendre cette assistance possible, en droit comme en pratique, à travers l’accès au dossier, mais aussi un renforcement des crédits alloués à l’aide juridictionnelle. Par ailleurs, les droits de la défense ne peuvent être exercés dans le cadre d’une audition libre, sorte de « pré garde-à-vue », dont la CNCDH demande la suppression, en alertant sur les risques de banalisation de tels régimes dérogatoires, présentés au départ comme une amélioration mais qui se révèlent en réalité être une régression en matière de respect des droits. La CNCDH revient également dans son avis sur les conditions mêmes de la garde-à-vue souvent décriées par les instances nationales et internationales des droits de l’homme, comme conditions indignes de la personne humaine. La CNCDH insiste pour que des mesures adéquates soient prises, limitant notamment à des cas exceptionnels les fouilles à nu, de façon à assurer des conditions matérielles de garde-à-vue conformes aux droits de l’homme.

 

S’agissant de la disparition annoncée du juge d’instruction et du transfert des pouvoirs d’enquête au Parquet, la CNCDH recommande à titre principal que soit immédiatement appliquée la loi du 5 mars 2007, cherchant à remédier aux problèmes du système actuel en instaurant la collégialité de l’instruction, qui a été soutenue par la grande majorité des professionnels du droit, et qui est l’expression de la volonté populaire. Elle alerte par ailleurs sur les risques que les principes d’indépendance de la justice et de séparation des pouvoirs, fondements d’une société démocratique, soient mis à mal si la réforme était effectivement mise en œuvre. Si le Parquet, actuellement hiérarchiquement subordonné au Ministre de la Justice, assure la direction de toutes les enquêtes pénales, on aboutit à une violation inévitable du principe d’égalité des armes entre les parties. A titre subsidiaire, la CNCDH insiste pour que la réforme, si elle devait être présentée en l’état au Parlement, soit accompagnée des « garde-fous » indispensables face à l’extension progressive mais certaine des pouvoirs du Parquet. Or, en l’état actuel du texte, ces garanties sont inexistantes, et le projet de réforme n’est pas acceptable au regard des dangers qu’il comporte pour le respect des droits de l’homme et l’indépendance de l’institution judiciaire.


(pour lire l’avis : cliquez ici).

Bibliothèque interuniversitaire : Le logiciel du ministère est allergique à la fusion

BIU de Montpellier III. Photo Rédouane Anfoussi

Enseignement supérieur. Souvent prise en exemple pour la qualité de son offre, la Bibliothèque interuniversitaire de Montpellier est coincée entre l’opération Campus et la loi d’autonomie.

L’autonomie des universités, la création des Pres (pôles de recherche et d’enseignement supérieur ) dans le cadre de la mise en œuvre du plan Campus, produisent de sérieux remous dans l’organisation de l’enseignement supérieur. Notamment pour le réseau des bibliothèques interuniversitaires dont tout le monde s’accorde à reconnaître l’intérêt essentiel. La situation actuelle nécessite « que soit entreprise dès 2009-2010 une réforme complète de l’organisation et du fonctionnement des BIU ». indique un rapport de l’Inspection générale des bibliothèques, adressé à Valérie Pécresse, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, daté de septembre 2009 et récemment rendu public. Il souligne que « les restructurations universitaires en cours ne peuvent pas rester sans conséquence sur des bibliothèques interuniversitaires dont l’organisation générale n’a guère varié depuis plus de 30 ans ».


Un trou d’air dans la gestion

Mais les premiers pas de la réforme produisent quelques couacs notamment à Montpellier pourtant classé 2e université française pour son offre de documentation électronique. « La BIU est totalement prête pour la fusion des universités prévue en 2012, mais d’ici là il y a nécessité de gérer l’existant. Depuis que les crédits ont été défléchés, les universités ne disposent plus d’enveloppes pour la bibliothèque et doivent s’entendre pour la nourrir. » explique diplomatiquement le Directeur de la BIU, Jean-François Foucaud.

La BIU n’étant pas un établissement, elle doit être rattachée à une université. C’est Paul Valéry qui a la gestion des neuf sites depuis de nombreuses années. Le service commun de la Bibliothèque Interuniversitaire de Montpellier qui assure la documentation auprès des usagers des trois universités a vu récemment ses moyens remis en cause.  » Un comble pour ce service déjà mutualisé ! souligne Juliette Philippe représentante du personnel. Les trois universités concernées par la fusion n’arrivent pas à se mettre d’accord. Deux titulaires rattachés à un atelier de restauration dans le cadre de la numérisation des ouvrages patrimoniaux ont déjà été remplacés par des contractuels affectés à une autre mission. Nous refusons que le personnel serve de variable d’ajustement. »

Le ministère botte en touche

La nouveauté vient du récent modèle ministériel d’allocation des moyens informatisés. (voir ci dessous) «  Le ministère a adopté le dispositif « Sympa » qui ne l’est pas, plaisante Michel Crespy membre du Conseil d’administration de Montpellier III, le logiciel ne prend pas en compte l’interuniversitaire. C’est sans doute une erreur de conception. Nous avons demandé au ministère de recalculer mais il retombe peu ou prou sur le même résultat. Et botte en touche en demandant aux trois universités de s’arranger entre-elles. » Pour l’heure, Montpellier III se voit imputer les dépenses de fonctionnement près de 4M d’euros et cumule surtout le contingent des trois universités (157 postes) dans son personnel global ce qui fait exploser son plafonnement d’emplois (1). L’Université Paul Valery qui utilise 46 postes pour la BIU ne peut assumer seule le coût financier et cumuler la dotation en personnel.

Les négociations patinent

Depuis maintenant plus d’un an, les négociations se multiplient tantôt entre les trois président(e)s d’université, tantôt avec le ministère, tantôt avec le rectorat et vice et versa sans que des solutions satisfaisantes ne soient trouvées. Il a même été demandé à la direction de la BIU de restituer des postes, ce qui évidemment accentuerait le déficit déjà existant. « A ce jour, nous ne savons toujours pas comment ce problème sera réglé ? Nous demandons que cesse cette cacophonie et que la BIU, un modèle d’exception dans le paysage universitaire français, soit reconnue comme telle par ses instances de tutelle, » indique le personnel dans un communiqué.

Dans ce dossier, le ministère de tutelle apparaît quelque peu en contradiction avec son discours. Signe avant coureur d’un avenir prochain, la négociation interuniversitaire prend le pas sur la collaboration interuniversitaire. Dans le cadre des BIU, le défléchage des crédits ajoute à la confusion. La rétrocession des postes correspondants à la réalité du terrain pose problème à Montpellier I et Montpellier II qui craignent des coupes dans leur dotation globale. « Si nous ne parvenons pas à trouver un accord, il faudrait scinder les BU en trois, ce serait une erreur majeure que personne ne souhaite, observe Michel Crespy, Mais on n’en est pas là… »

Jean-Marie Dinh

(1) La loi LRU entrée en vigueur en 2007 modifie le type de gouvernance et donne une possibilité aux universités d’embaucher en plus des emplois d’Etat. Mais cette embauche est plafonnée.

La BU de Montpellier III un des neuf sites du service interuniversitaire classé second en France pour son offre numérique.


Un modèle « Sympa » mais limité

Le modèle SYMPA (Système de répartition des Moyens à la Performance et à l’Activité) marque une rupture profonde avec les autres modèles qui ont servi à justifier les allocations de moyens aux Universités. La rupture va bien au-delà de la simple introduction d’un critère dit de « Performance » dans les paramètres du modèle. Certes perfectibles, les modèles précédents prenaient comme point de départ les besoins des établissements pour mener leurs différentes missions. Tandis que SYMPA se borne à répartir, selon des critères simplistes, (la version du logiciel ne prend pas en compte la dimension interuniversitaire pourtant au cœur du projet Campus) les moyens emplois crédits  votés par le Parlement. « Si demain, l’Etat diminue la part de budget allouée aux dotations à l’enseignement supérieur public au profit – par exemple – de crédits d’impôts aux entreprises, les dotations théoriques des établissements se trouvent automatiquement diminuées dans les mêmes proportions. » souligne François-Gilles Carpentier, Maître de conférence à l’université de Bretagne. Elucubration théorique et technocratique coupée de la réalité des établissements, le modèle SYMPA ne prend pas en compte l’inégalité des territoires en terme d’accès à l’enseignement supérieur. L’Etat abandonne la mission consistant à assurer le fonctionnement de l’enseignement supérieur pour devenir un simple financeur parmi d’autres.

Réforme des lycées : Le diable est dans les détails

propagande1A la veille d’une journée de grève dans les collèges et Lycées, le journaliste Luc Cédelle se fend d’un l’article publié dans Le Monde  sous le titre ambigu, Lycée : pas de révolution, juste une réforme de fond. Le papier résume bien la stratégie de rupture entreprise par le président de la République. Le problème c’est que le journaliste du Monde de l’Education tend à confondre information et propagande gouvernementale. A le lire, on  se demande si ce défenseur de la pédagogie* n’a pas laissé choir les principes élémentaires de l’éducation et du journalisme comme des illusions fanées pour adopter le modèle d’instruction que nous propose la nouvelle gouvernance.

Jean-Marie Dinh

Un plaisir de collège (Le Seuil 2008)

Lycée : pas de révolution, juste une réforme de fond

En septembre 2010, le lycée change : un peu, uniquement en seconde et dans le cadre d’une réforme qui doit s’étendre les années suivantes aux classes de première et terminale. L’ambition est à la fois de rééquilibrer les filières générales, actuellement dominées par la filière scientifique, d’introduire un « accompagnement » des lycéens et d’accroître la marge d’autonomie des établissements.

Le mot « ambition » ne doit pas être pris dans un sens triomphaliste. A bien des égards, c’est une réforme à minima. Elle découle, après filtrage, des propositions consensuelles issues du rapport rendu par le directeur de Sciences Po Paris, Richard Descoings, en juin 2009. Cette réforme modeste est venue remplacer le projet de lycée « modulaire » que proposait auparavant Xavier Darcos, le précédent ministre de l’éducation, et qu’un vent de contestation, renforcé par la hantise gouvernementale d’une révolte « à la grecque », avait bloqué en décembre 2008.

La réforme actuelle a une architecture générale : elle conserve à la classe de seconde son caractère de « détermination », c’est-à-dire de découverte de nouvelles disciplines, elle renforce le tronc commun en première afin de faciliter d’éventuelles réorientations, et elle accroît la spécialisation de la terminale. Derrière chacun de ces choix se cachent de délicates questions d’horaires des disciplines qui, le diable étant dans les détails, restent âprement débattues même une fois les décisions prises.

Amorce d’évolution de fond

Sous une apparence anodine, plusieurs des nouveautés introduites cette année en seconde montrent qu’une réforme modeste peut quand même amorcer des évolutions de fond. Tel est le cas de l’accompagnement personnalisé : deux heures hebdomadaires dans l’emploi du temps des élèves pour leur apporter une aide méthodologique, de « l’approfondissement » sur certains sujets et des conseils d’orientation.

Ses modalités doivent être arrêtées par l’équipe pédagogique, et tous les professeurs, pour qui ces heures seront décomptées au même titre que des heures de cours, sont en principe concernés. Certains râlent d’avance sur le thème « on ne sait pas ce que cela va donner », mais se montrent quand même intéressés par la perspective d’un rapport différent à leurs élèves, et veulent s’assurer qu’il s’agira d’un « vrai » accompagnement.

L’autonomie donnée aux lycées sur 30 % de leur dotation horaire s’applique en classe de seconde : en plus des heures d’enseignement « normales », l’établissement répartira lui-même 10 h 30 de cours pour faire des demi-groupes. Cette répartition était auparavant fixée au niveau national. Certains s’inquiètent d’une possible « foire d’empoigne » entre enseignants. Autre innovation, qui reste à cerner dans la pratique : l’apprentissage des langues en « groupes de compétences ».

Comment ces dispositions seront-elles accueillies sur le terrain ? Observer le parcours d’une réforme, dans l’éducation nationale, c’est voir se mettre en mouvement, l’un après l’autre, les rouages d’une mécanique du refus. Mais celle-ci n’a pas toujours le dernier mot.

Dans ce cas précis, les textes officiels modifiant le lycée sont déjà parus, la machine administrative fonctionne pour leur application et il faudrait, pour bloquer le processus, une opposition d’une exceptionnelle intensité.

Une part appréciable du monde syndical enseignant approuve

En outre, l’aspect politique pèse lourd : le gouvernement ne peut se permettre un nouveau recul sur le lycée, d’autant que le président de la République s’est lui-même, à plusieurs reprises, engagé sur ce projet.

Pour la première fois, une part appréciable du monde syndical enseignant, en l’occurrence le « bloc » formé par le SE-UNSA et le SGEN-CFDT, approuve cette réforme et assume fermement sa position. Elle prend ainsi un risque calculé vis-à-vis de sa base.

Les partisans de la réforme veulent exorciser l’image, qui leur semble dangereuse, du service public refusant toute évolution. Il convient de rappeler qu’ils sont minoritaires parmi les enseignants de lycée, où le SNES-FSU, en l’occurrence allié au Syndicat national des lycées et collèges (apolitique), pèse de tout son poids pour tenter d’obtenir un improbable « retrait » de la réforme, en fait pour tenter de l’enliser.

Pour cela, le SNES va jusqu’à s’afficher en accord avec une organisation lycéenne, la Fédération indépendante démocratique des lycéens (FIDL), tandis que l’Union nationale des lycéens (UNL), plus implantée, a fait savoir qu’elle trouvait la réforme plutôt à son goût. Les prochaines semaines diront de quel côté le vent souffle le plus fort.

Luc Cédelle Le Monde


Les réactions des abonnés du Monde.fr à la lecture de cette information apportent un contre-point utile pour comprendre les effets de cette réforme sur le terrain.

Un copié collé acritique du site du ministère. Accompagnement personnalisé ? remplace les modules mais sans cadrage disciplinaire. 30% des dotations horaires en dédoublement à la disposition de l’établissement ? oui, mais sans aucune inscription dans les horaires règlementaires des élèves donc marge de manoeuvre de gestion pour les rectorats qui seront amené à les supprimer en cas de suppression d’emplois. Conclusion : avant d’avaler tout cru les propos d’un DRH, on s’informe.

jjd

10.03.10 | 12h40

Un tissu d’omissions et de contre vérités 1)« Pour tous les élèves deux heures d’accompagnement « 2 heures profs par division , c’est-à-dire une heure en demi groupe , une demi-heure en groupe de 8,etc. deux heures d’aide individualisée existaient :supprimées. silence radio 2) les heures de dédoublements : la répartition pourra varier du tout au tout d’un lycée à l’autre= les contenus enseignés, de fait ne seront plus les mêmes , c’est le lycée à plusieurs vitesse, l’explosion des inégalités

jjd

10.03.10 | 12h37

Décorer le soldat Cédelle de la médaille militaire pour son ardeur à valoriser la Sarkozye une part appréciable (souligné) du monde syndical enseignant, approuve cette réforme : les organisations qui refusent cette réforme régressive représentant 80% des voix !.il est très difficile de trouver dans les établissements des partisans de cette réforme, tout simplement parce que la réalité de ce qui se met en place n’a rien à voir avec ce qui est dit par la propagande Chatel et ses relais dévoués

LibertéEquitéSolidarité

10.03.10 | 11h52

Le SNES-FSU qui s’allie avec le SNALC et un syndicat minoritaire lycéen pour « enliser » un début de réforme qu’un autre syndicat lycéen trouve plutôt à son goût ; réforme a minima car le pouvoir, craignant le « syndrome grec », a reculé devant le projet de Darcos, pourtant plus que justifié. Et 120000 gosses qui quittent le système scolaire chaque année sans la moindre qualification pour justifier un emploi au SMIC. Désespérant, lamentable, ahurissant.

JHU

10.03.10 | 10h59

On aurait voulu tuer la section L qu’on ne s’y serait pas pris autrement: garder l’enseignement scientifique mais supprimer les maths en 1ère (donc pas de probabilités…)alors que les écoles de commerce s’ouvrent enfin aux littéraires !!! En S, il fallait supprimer l’Hist-Géo à l’écrit et mettre cette matière à l’oral du 2nd groupe, comme il y a 35 ans !… Et répartir les points de coefficient à l’écrit sur les matières scientifiques pour rendre justement le bac S plus scientifique….

Hans

10.03.10 | 10h50

Accompagnement de l’élève, renforcement du tronc commun en première : on ouvre les vannes du Lycée à tous les collégiens. Un pied dans le général, et c’est tout schuss vers le bac. En fait, le taux de redoublement en seconde est trop élevé (trop chers aussi les redoublants), et la scolarité dans un Lycée général coûte moins cher que dans le technique ou le professionnel. On arrive donc aux 80% annoncés par Jospin, en facilitant l’accès au bac général.

ganelon

10.03.10 | 10h31

Depuis 30 ans ,c’est la réforme permanente et les problèmes ne sont pas résolus voire se sont amplifiés. Depuis 30 ans les enseignants se sont souvent opposés aux réformes. Alors peut-être qu’ils n’avaient pas tort et que leur opposition à ces réformes démagogiques était et est toujours fondée.Que les bouffeurs de prof s’en étranglent.

Pascal R.

10.03.10 | 10h25

Mon père allait à l’école, du dimanche au samedi (internat), pour recevoir l’enseignement. Je suis allé à l’école, du lundi au vendredi (internat), recevoir un enseignement. Il n’y a pas de secret, il faut travailler élèves comme professeurs. Avec la réforme on cherche juste à faire « réussir » en voulant faire travailler moins et superficiellement.

Paco

10.03.10 | 10h23

Luc Cédelle a bien mérité de Luc Chatel. Quant à ceux qui tapent sur les enseignants (pas « les profs », un peu de respect,merci),que ne sont-ils pas, ou pas devenus,puisqu’ils seraient meilleurs que ceux qu’ils dénigrent.

10.03.10 | 10h07

Article lamentable qui ne fait que reprendre le discours technocratique du ministère. Cette réforme ne fait que réduire le nombre d’heures d’enseignement pour des raisons d’économie. Il suffit de voir le nombre de postes fermés dans chaque lycée à la rentrée prochaine. Quant à l’accompagnement personnalisé, ce n’est qu’un leurre ! En réalité, l’aide individualisée qui existait jusqu’à présent disparaît et le nombre d’heures en demi-classe est réduit. Les parents commencent tout juste à réaliser.

papa tango

10.03.10 | 10h02

L’accompagnement personnalisé c’est surtout les cours que nous parents nous nous ruinons à payer oui, et ce dès la 6ème !!! Je suis déléguée de parents de classe depuis longtemps et..au départ j’avais honte d’en parler quand je me suis aperçue que tout le monde fait pareil COCORICO ! Merci aux profs pour leur plaisir à enseigner à nos enfants.. Quelle rigolade -jaune-.

BL

10.03.10 | 09h37

Holà Maki ! Tu crois qu’on fait ce métier uniquement pour l’honneur et le plaisir insigne d’enseigner à tes enfants ? Que c’est toute notre vie, nuit et jour, qu’on ne pense qu’à ça, que tout le reste n’est rien ? On est des salariés comme les autres, mal payés, continuellement emmerdés, et on a une vie (on essaie d’en avoir un petite) en dehors de la salle de classe. Alors garde tes remontrances. On n’est ni des martyrs ni des moines, on n’a pas fait voeu de pauvreté et d’obéissance.

bela

10.03.10 | 09h31

« Certains râlent d’avance sur le thème, mais se montrent quand même intéressés » : je ne sais pas où vous avez trouvé ces profs, pour ma part, je n’en connais aucun, et cette phrase est formulée de manière à distordre la réalité : le mot « râlent » disqualifie celui qui peut émettre une critique argumetée (et pas râler, grogner), et d’autre part c’est plutôt : tous « râlent » hormis quelques-uns.

MAKI

10.03.10 | 09h03

« Prof lamda » vous etes le digne représentant d’une corporation qui refuse systématiquement de s’occuper de ce qui doit etre son unique objectif, i.e., former du mieux possible nos enfants. Par contre vous etes au top pour défendre vos petits privèges multiples. Et finalement c’est la déroute du système et surtout le gachis des nouvelles générations. Si vous etiez honnete avec vous meme soit vous changez radicalement soit vous démisssionnez!

prof lambda

09.03.10 | 23h50

L’aide personnalisée consistera à prendre les élèves en groupe…Pour que ca marche faudra beaucoup, mais beaucoup d’investissement du prof…Un gros boulot en plus de ce qui est déjà, mais les salaires et la reconnaissance resteront à minima…

simplex

09.03.10 | 22h01

Cette réforme casse l’Education nationale; cf les réductions d’horaires, destinées à combler le non-remplacement d’un professeur retraité sur 2, l’absence de formation pédagogique aux néo-enseignants jetés sans préparation devant leurs classes avec un emploi du temps de titulaire et un salaire de stagiaire, les remplacements prévus pour des étudiants… Bref, un rideau de fumée qui masque mal des économies budgétaires et une déréglementation du métier de professeur.

Martin-Dupont

09.03.10 | 21h36

La moindre réformette attire les foudres, bien sûr, des opposants systématiques, qui attendent que leurs amis soient au pouvoir pour en tirer des avantages catégoriels. Cette réformette mérite simplement d’être prise. Pour le reste, il faudrait une réforme fondamentale de l’enseignement secondaire, fondée sur une collège qui éduque et enseigne l’essentiel de la vie sociale, et sur un lycée qui prépare vraiment une classe d’âge à la vie professionnelle (60% des élèves) et le reste aux études sup.

ganelon

09.03.10 | 21h32

L’accompagnement personnalisé que l’on présente comme la solution miracle est une escroquerie. Les parents qui pensent que leurs enfants vont avoir droit à des cours particuliers vont être très déçus. Les problèmes, ils se règlent dans les cours en effectif réduit, et ça la réforme fait tout pour qu’ils soient moins nombreux, pour que les effectifs réduits augmentent(24 au lieu de 17) que les heures de cours diminuent. Cet article est peu objectif voire même tendancieux, c’est suspect!

thierry guitard

09.03.10 | 21h08

le problème, M Cedelle et vous le savez parfaitement est que les syndicats que vous citez comme soutien de la réforme ne sont pas représentatifs dans les Lycées ! Qu’en pensent d’ailleurs les syndicats classés à droite ? qu’elle est excécrable.

JérômeLAG.

09.03.10 | 20h45

Le journal « Le Monde » doit-il être au service de la campagne de publicité de M. Châtel. La réforme du lycée et la « mastérisation » sont des catastrophes qui favorisent une école à deux vitesses. Les objections à ces réformes auront-ils droit au même traitement médiatique?

Vieillesse: seule la dépendance lourde prise en charge, propose l’APREF

L’Association des professionnels de la réassurance en France (APREF) a rédigé un projet de réforme de la prise en charge de la dépendance qui prévoit de la limiter à la dépendance lourde, et de diminuer les allocations versées par l’Etat au profit d’un système d’assurance. « Il serait souhaitable de cibler la couverture sur la dépendance lourde, et d’exclure la dépendance légère », qui « ne pose pas de réel problème financier aux ménages » et « est plus susceptible de donner lieu à dérive, voire à fraude », proposent les réassureurs dans un projet révélé par Les Echos mardi, et dont l’AFP a obtenu copie.

La définition de la dépendance lourde, qui serait mieux indemnisée, « demande une réflexion approfondie des pouvoirs publics, organismes de santé, experts, assureurs et réassureurs », souligne l’Apref. Elle suggère pour sa part de la définir comme l’incapacité de la personne à effectuer trois Actes de la vie quotidienne (AVQ) sur quatre (toilette, habillement, déplacement, alimentation). Un affinement de la grille des AVQ pourrait être souhaitable si cette logique était retenue.

L’association estime que la dépendance réduite n’impose « pas de dépenses importantes » (440 euros en moyenne par mois). Elle reconnaît toutefois que sa non prise en charge pourrait « poser des problèmes en terme de perception sociale ». Autre proposition majeure de l’association: un rôle accru pour les assureurs, avec « une offre de marché adressée à la demande +solvable+, qui couvre la majorité de la population française, et une offre publique (…) dédiée à la demande +moins solvable+ ».

La garantie qu’un tel système mettrait en place apparaît à l’Apref « plus intéressante, transparente et crédible » que celle offerte par une prise en charge dans le cadre de la sécurité sociale, compte tenu de la dégradation des finances publiques. Dans le schéma proposée par l’association, la cotisation annuelle pour un contrat dépendance à 60 ans serait d’environ 900 euros par an pour une personne seule et d’environ 1.200 euros par an pour un couple.       L’Allocation personnalisée d’autonomie (APA) serait réformée, avec une prise en charge plus restreinte. La souscription d’une assurance serait facultative mais favorisée par des incitations fiscales.

D’après les calculs de l’Apref, le coût pour l’Etat de l’APA passerait grâce à ces deux changements majeurs de cinq milliards d’euros en 2009 à 1,25 milliard. A plus long terme « l’économie pour les finances publiques serait beaucoup plus importante en raison de la progression des effectifs de personnes dépendantes ».     Le coût de l’APA pourrait s’élever à une dizaine de milliards en 2040, si elle n’est pas réformée, estime l’Apref. Une loi sur la dépendance pourrait voir le jour au deuxième semestre 2010, a indiqué la secrétaire d’Etat aux Aînés, Nora Berra, fin novembre. Elle devrait améliorer la prise en charge de la dépendance et introduire une part de financement privé.

Voir aussi : Rubrique Santé Entretien avec Patrick Pelloux