Déchéance de nationalité et déchéance du PS ou comment Hollande prépare sa réélection face au FN.

12391330_591939430953982_9108705163395528224_nAprès le Commissariat avec le système d’alarme, playmobile envisage la mise en vente du coffret Elysée j’y suis j’y reste.

Nos enfants vont devoir redoubler d’efforts pour faire monter le FN puis conquérir le coeur de la France fasciste…

Référence de l’article : 2017

Le commissariat de vos rêves. ( La salle de torture pour les étrangers est en option )

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Commissariat de police avec système d`alarme
Référence de l’article : 5182

Grand commissariat de police avec quatre personnages et de nombreux espaces de jeux : une salle d’accueil, une salle d’interrogatoire, une cellule de prison avec détecteur de mouvement, ainsi que de nombreux accessoires. Le détecteur de mouvement nécessite 2 piles LR03 non fournies.

Voir aussi : Rubrique Politique,Comment Hollande prépare sa réélection face au FN, Politique de l’immigration, rubrique Société, Citoyenneté , Justice,

L’exécutif maintient la déchéance de nationalité pour les terroristes binationaux

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Le PS Bernard Cazeneuve, Manuel Valls et Christiane Taubira à Paris, le 23 décembre 2015. Crédits photo : ERIC FEFERBERG/AFP

C’est un nouveau couac, un désaveu profond et un incroyable rebondissement à la fois. Contre toute attente, et malgré l’intervention de Christiane Taubira depuis l’Algérie mardi, Manuel Valls a annoncé mercredi le maintien dans le projet de réforme de la Constitution de l’extension de la déchéance de nationalité à tous les binationaux, lors de sa conférence de presse de sortie du Conseil des ministres. Tandis qu’il présentait le texte de révision constitutionnelle retenu le matin même, le chef du gouvernement a bel et bien confirmé que l’épineuse question serait prochainement soumise au Parlement, «comme le président de la République l’avait annoncé» au lendemain des attentats de Paris.

«Le gouvernement est uni» a affirmé le premier ministre, mercredi soir lors du 20 heures de TF1. Christiane Taubira «s’est exprimée: elle a rappelé que le président de la République et le Conseil des ministres tranchaient en dernier ressort. C’est tranché», a ajouté le chef du gouvernement.

Manuel Valls s’est également dit «convaincu» d’obtenir «une large majorité» du Parlement «après un débat – et c’est normal – de très grande qualité, mais nous aurons une majorité pour réformer la Constitution». Le projet de loi constitutionnelle, qui arrivera le 3 février à l’Assemblée, nécessite le feu vert des deux assemblées puis un vote à la majorité des 3/5e des députés et sénateurs réunis en Congrès à Versailles. Les voix d’au moins une partie de la droite devraient être nécessaires pour atteindre ce seuil.

Le point sur les mesures annoncées

» La déchéance de nationalité pour les terroristes binationaux nés en France

«Comme l’a annoncé le président de la République devant le Congrès, le gouvernement a décidé de soumettre au Parlement l’extension de la déchéance de nationalité à tous les binationaux», a déclaré Manuel Valls à la surprise générale, précisant que les débats sur le texte commenceraient le 3 février à l’Assemblée nationale. «À partir du moment où c’était un engagement du président de la République et que nous avions un avis particulièrement clair du conseil d’Etat sur la nécessité d’une réforme constitutionnelle, il ne pouvait pas y avoir d’autres solutions que l’adoption de cette mesure», a-t-il expliqué, tandis que le texte suscite un malaise à gauche et que lui-même avait semblé doutait de son intérêt.

» Une retention de sûreté va être créée pour prendre le relai des peines purgées

«L’avis du Conseil d’État sur les possibilités d’édicter des mesures administratives contraignantes supplémentaires, y compris en dehors de l’État d’urgence, est désormais public. Il est très clair sur le fait que seul un juge judiciaire peut décider d’une mesure de privation de liberté. Aucun internement administratif ne peut être décidé à l’encontre d’une personne sur la seule base d’une fiche de renseignements – au-delà de la Constitution d’ailleurs. Les grands traités internationaux relatifs aux Droits de l’Homme l’interdisent», a d’abord constaté Manuel Valls. Avant d’estimer que «la seule hypothèse possible serait, ou sera, la création d’une rétention de sûreté à l’issue d’une condamnation judiciaire exécutée mais dans des conditions très strictes».

» L’État d’urgence sera consitutionnalisé, sa sortie progressive abandonnéee

Contrairement à ce qui avait été initialement annoncé, la sortie progressive de l’État d’urgence semble avoir été enterrée par l’exécutif. «Nous ne (la) retenons pas», a en effet déclaré Manuel Valls. «Conformément à l’avis du Conseil d’Etat que le gouvernement a décidé de suivre, les mesures administratives décidées au titre de l’état d’urgence s’interrompront toutes, en même temps que l’État d’urgence prendra fin», a-t-il poursuivi. S’il a jugé qu’il était «prématuré de dire aujourd’hui si (l’État d’urgence allait être) renouvelé, et si oui pour combien de temps», le premier ministre a confirmé que cette mesure jusqu’à présent exceptionnelle allait être constitutionnalisée pour «le mettre à l’abri de toute dérive partisane».

» L’État d’urgence a permis 312 assignations à résidence

Décrété par François Hollande le 13 novembre au soir, l’État d’urgence a très vite été prolongé par un vote quasi-unanime du Parlement. Pourtant, certains à gauche craignent des abus. «L’État d’urgence s’inscrit pleinement dans l’État de droit», a voulu rassurer Manuel Valls. Avant d’étayer son propos par des chiffres: «2940 perquisitions ont permis de saisir 443 armes», a-t-il précisé. De même, le premier ministre a souligné que «312 assignations à résidence (avaient) été prononcées». «La situation actuelle réclame de ne rien céder sur notre État de droit mais de garder l’efficacité pour seule ligne de conduite. L’État d’urgence c’est une mesure d’efficacité qu’il faut néanmoins adapter à notre époque», a-t-il tenu à préciser.

» Plus de 1000 Français ont rejoint les rangs des djihadistes

«Le seuil des 1000 individus ayant rejoint depuis la France les groupes djihadistes en Syrie ou en Irak vient d’être franchi», a annoncé le premier ministre, sur un ton grave. «Environ 600 d’entre eux y sont toujours et on estime à 148 le nombre d’individus ayant trouvé la mort. 250 sont revenus sur notre sol», a-t-il encore détaillé. «Des individus radicalisés en provenance de nombreux continents rejoignent l’État islamique. Beaucoup d’entre eux viennent de nombreux pays d’Europe, pas seulement de France ou de Belgique. Il y a aussi de nombreux francophones et on sait que les combattants se regroupent souvent en fonction de leur langue, pour se former et préparer des actions terroristes sur notre sol», a-t-il enfin prévenu.

Arthur Berdah

Source : Le Figaro 23/12/2015

 

 

Déchéance de nationalité ou comment Hollande prépare sa réélection face au FN

 

Crédits photo : Geert Vanden Wijngaert/AP

Crédits photo : Geert Vanden Wijngaert/AP

Pour Thomas Guénolé, en maintenant la déchéance de nationalité, François Hollande tente prendre Les Républicains en étau entre le PS et le FN.


Thomas Guénolé est politologue et maître de conférence à Sciences Po, docteur en sciences politiques (Sciences Po – CEVIPOF). Il est l’auteur de Les Jeunes De Banlieue Mangent-ils Les Enfants?aux éditions Le Bord de l’eau

Malgré les propos de Christiane Taubira, le gouvernement maintient la déchéance de la nationalité. En récupérant les propositions de la droite sur l’antiterrorisme, François Hollande est-il en train d’essayer d’étouffer cette dernière entre lui et le FN ?

Entre ses propositions émises depuis les attentats du 13 novembre, et celles que défend historiquement le FN depuis des décennies, pour la droite l’espace d’expression d’un discours spécifique sur la sécurité et le terrorisme s’est extrêmement réduit. Parallèlement, la politique économique d’austérité et de compétitivité-coût conduite par le chef d’Etat est sensiblement la même que celle préconisée par la droite, qui n’a donc pas d’éléments non plus pour se différencier là-dessus. Cette stratégie d’étouffement de la droite semble donc fonctionner: les ténors du parti LR ne trouvent pas comment s’en dépêtrer.

Le but de cette stratégie d’étouffement est-il de programmer un affrontement entre François Hollande et le FN au second tour de 2017 ?

C’est manifeste. Son gouvernement s’oriente d’ailleurs de plus en plus dans des politiques ciblées sur les banlieues, les minorités et les discriminations, qui sont autant de chiffons rouges pour l’extrême droite. Procéder de la sorte est d’ailleurs la suite logique de la «stratégie Terra Nova». Préconisée par feu Olivier Ferrand pour gagner 2012, elle consiste en résumé à abandonner l’électorat populaire, à faire une politique destinée aux classes moyennes, et à ajouter des politiques ciblées envers les minorités discriminées. L’aboutissement de cette «stratégie Terra Nova», c’est de faire du Parti socialiste un parti doublement libéral – libéral sur l’économie et libéral sur les sujets de société – en affrontement existentiel avec le FN, qui est protectionniste sur l’économie et réactionnaire sur les sujets de société.

Le PS version François Hollande est donc devenu un parti complètement libéral ?

Oui. A un moment donné, il faut regarder le PS de François Hollande tel qu’il est. A l’instar du Parti libéral au Canada, des Démocrates américains, ou du New Labour à l’époque de Tony Blair, c’est un parti pro-mondialisation et libéral sur les sujets de société, au sein duquel les porte-voix d’une ligne socialiste sont enfermés dans un statut minoritaire et cantonnés à un rôle de figuration. Jacques Delors en a rêvé, son fils spirituel François Hollande l’a fait. C’est un simple constat.

Compte tenu de la volonté de François Hollande de transformer le PS en parti libéral, les derniers ministres incarnant un ancrage à gauche, comme Christiane Taubira, ne doivent-ils pas être évincés? À défaut, ne devraient-ils pas démissionner ?

Notamment du fait de son combat admirable d’éloquence en faveur du mariage pour tous, Christiane Taubira incarne un ancrage fort à gauche sur les valeurs. Pour autant, ce n’est pas lui faire insulte que de constater qu’en trois ans et demie, elle a avalé une quantité spectaculaire de couleuvres: qu’il s’agisse par exemple de la politique pénale, des positions sécuritaires de Manuel Valls, ou du «Patriot Act» français sous la forme de la Loi Renseignement. François Hollande a donc tout intérêt à conserver au gouvernement une personnalité qui incarne des valeurs ancrées à gauche, mais qui ne claque pas la porte quand la politique dudit gouvernement les prend à contrepied.

Quant à la démission, la question est du même ordre: à partir de combien de couleuvres Christiane Taubira décide de partir par cohérence avec ses valeurs? Il est possible que la déchéance de nationalité, proposition de droite et d’extrême droite reprise à son compte par François Hollande, soit la couleuvre de trop. Mais il est également possible que Christiane Taubira privilégie à nouveau le maintien à son ministère.

Va-t-on vers un changement de nom du PS, qui s’appellerait «Les Réformateurs» ou «Les Progressistes» ?

C’est une des rumeurs qui circulent ces temps-ci. Mais beaucoup de rumeurs circulent.

François Hollande peut-il aller au bout d’un rapprochement avec les centristes ? Peut-il aller jusqu’à un gouvernement de coalition centrale à l’allemande ?

Je ne pense pas que ce soit possible. Peut-être François Hollande, et certainement Manuel Valls, y sont-ils favorables. Cependant les chefs de file centristes ont dans leurs fiefs respectifs une sociologie électorale qui penche nettement à droite, et qui condamne donc la plupart à perdre leurs députations, leurs mairies, et ainsi de suite, s’ils passent alliance avec la gauche. Donc, autant des débauchages marginaux de cadres centristes sont toujours possibles, autant l’émergence en 2016 d’une grande coalition entre le PS et les centristes est invraisemblable. J’ajoute qu’à un an et demie des élections générales, les chefs de file centristes ont objectivement intérêt à miser sur l’alternance en 2017 au bénéfice de la coalition habituelle de droite et de centre-droit, plutôt que de rejoindre un navire PS qui manifestement coule.

François Hollande risque-t-il de découvrir son flanc gauche à force de migrer vers la droite sur l’économie et le sécuritaire ?

En allant braconner sur les thèmes de la droite, voire de l’extrême droite, pour étouffer le parti LR, François Hollande prend trois paris simples: d’une, les forces politiques à sa gauche sont trop éclatées et trop radicalisées pour représenter une concurrence sérieuse ; de deux, le traumatisme du 21 avril 2002 est encore suffisamment présent pour que l’électorat PS soit captif du «vote utile» en sa faveur ; de trois, en tant que président sortant et PS de la République, il est d’office candidat légitime de son camp pour 2017. C’est donc parce qu’il se croit sans concurrence sérieuse à gauche, et parce qu’il croit l’électorat PS condamné à voter pour lui, qu’il ose aller si loin dans le braconnage idéologique à droite.

Cette stratégie de braconnage à droite peut-elle être gagnante pour François Hollande ?

Je ne le pense pas. Il est aussi absurde pour un président de gauche de penser être réélu sur les positions économiques et sécuritaires de la droite, que pour un président de droite de tenter la réélection en se lançant dans des nationalisations et en triplant le montant du SMIC. Par ailleurs je constate qu’aux élections régionales les Français dans leur écrasante majorité ont en fait voté contre: contre François Hollande, contre la droite, contre le FN, contre le système ; mais rarement pour une offre politique qui les enthousiasme. Je suis donc sceptique sur l’inéluctabilité d’un jeu à trois Hollande-Sarkozy-Le Pen, et convaincu que pour 2017 le jeu est beaucoup plus ouvert que l’imaginent la plupart des commentateurs. Bref, je pense que comme d’habitude, dans l’année précédant le scrutin, nous aurons de grosses surprises.

Source : Le Figaro 23/12/2015

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La liberté est le plus difficile des devoirs

Par Amandine

Le 13 novembre, j’étais à un concert avec une amie quand des hommes armés sont entrés dans la salle et ont tiré dans le public. Nous sommes toutes les deux sorties vivantes. Elle a pu s’échapper au bout de vingt minutes, à la faveur d’un chargeur vide. Moi, au bout d’une heure trente durant laquelle je me suis cachée. Je suis allée à un concert et j’en suis sortie en ayant vécu une scène de guerre.

Depuis, j’écris beaucoup. J’ai écrit pour mes proches, pour leur dire ce que j’avais vécu. J’écris pour moi, pour tenter de m’apaiser en mettant des mots sur cette parenthèse barbare qui balafre désormais ma vie. Pour ne jamais oublier toutes les émotions par lesquelles je passe : choc et sensation d’irréalité face à cette violence inouïe et soudaine, joie d’être en vie, tristesse immense en pensant aux personnes blessées et tuées. Mais aussi colère et solitude. Colère contre la classe politique, solitude vis à vis de mes concitoyens qui plébiscitent dans leur grande majorité l’état d’urgence prolongé.

Aujourd’hui, j’écris pour dire pourquoi je ne me sens pas représentée en tant que victime, mais aussi en tant que citoyenne. Car je me sens insultée par les décisions sécuritaires et liberticides qui sont prises, en mon nom, depuis le 13 novembre, sous le coup de l’émotion. Le temps politique n’est pas le même que le temps émotionnel ou que le temps médiatique. Je ne jette pas la pierre à ces millions de Français sidérés, comme moi, par cette violence. Par contre, j’accuse nos responsables politiques d’avoir abusé de l’état de choc de la population pour faire voter précipitamment un ensemble de mesures inadaptées et dangereuses pour notre démocratie.

Tout d’abord, les frappes en Syrie. En quoi une réponse guerrière, des poses viriles, pourraient nous protéger ? Posture infantile et dangereuse, qui ne fait qu’ajouter de la confusion et du danger au lourd bilan des morts. Comment pourrais-je me sentir en sécurité tant que nous serons « en guerre » ? Frappes en Syrie et fermetures des frontières européennes aux réfugiés : un bel exemple de décisions dictées par l’émotion… Comme celles prises en septembre dernier, quand la photo d’un enfant mort sur une plage avait suscité une vague d’émotion en Europe. Hollande et Merkel avaient alors appelé à « la responsabilité de chaque État membre et à la solidarité de tous »., Trois mois après, il y a toujours autant de bambins qui meurent noyés en Méditerranée, toujours autant de Syriens qui fuient la guerre. Mais depuis le 13 novembre, ces réfugiés sont passés du statut de victimes à accueillir à celui de terroristes potentiels. Exit les engagements de septembre, on cadenasse l’Europe et on bombarde la Syrie.

Ensuite, l’état d’urgence prolongé : Une réponse totalitaire et liberticide à l’attaque d’un groupe terroriste, totalitaire et liberticide. En quoi l’interdiction de manifester et la restriction des libertés individuelles et collectives m’apporteraient t plus de sécurité ? En quoi l’autorisation de porter une arme hors service à des policiers exténués depuis janvier pourrait me rassurer ? Comment la déchéance de nationalité permettrait de dissuader des individus qui n’ont pas peur de perdre leur vie ? Nous pouvons déjà tirer un bilan de l’inclusion du « comportement », et non plus seulement des « activités », qui autorise des mesures privatives de liberté sur simple suspicion : intrusions violentes, hors de tout contrôle judiciaire, chez des particuliers aux activités politiques ou religieuses (quand la police ne se trompe pas tout simplement de porte) ; surveillances et assignations à résidence de militants écologistes sans rapport avec le djihad et les armes à feu ; bavures policières… Nous avons désormais le droit de nous rassembler dans un centre commercial, dans un stade, dans un marathon, mais pas de manifester.

Les attentats du 13 novembre se sont déroulés dans un contexte déjà hautement sécuritaire suite aux attentats du 7 janvier. La loi sur le renseignement, votée en mars dernier, copie du Patriot Act, semblait déjà aller beaucoup trop loin. Cet événement dont j’ai été victime pose pourtant la question de l’efficacité des renseignements généraux (RG), de leur incapacité à changer de paradigme depuis les années 1980 (extrême gauche = terroriste). Doit-on rire jaune du pathétique de perquisitionner chez des maraîchers bios, ou au contraire se demander si ce type d’action ne se fait pas au détriment de la lutte contre le djihadisme ? Que dire aux victimes du Bataclan et à leurs proches en apprenant qu’un des tireurs, Ismaël Mostefaï, dans les radars des RG depuis 2009, disparu en 2012, avait été signalé en 2014 par les autorités turques comme djihadiste potentiel ? De retour en France, il ne fera l’objet d’aucune surveillance jusqu’au 13 novembre.

La question de la sortie de l’état d’urgence doit également se poser. Évidemment, la « guerre » conte l’organisation Etat islamique ne sera pas gagnée en trois mois. Alors sur quel motif, François Hollande compte-t-il mettre fin à l’état d’urgence le 26 février prochain ? A moins qu’il ne décide de maintenir une situation d’exception jusqu’à la fin de son mandat, au mépris de nos libertés ? C’est le sens de l’avant-projet de loi constitutionnelle « de la protection de la nation », qui sera examiné en conseil des ministres le 23 décembre.

Je vois dans les choix de ces dernières semaines un président acculé, qui préfère s’octroyer les pleins pouvoirs et faire entrer l’état d’urgence dans la Constitution, plutôt que de faire son examen critique. J’y vois une gauche affaiblie, qui utilise les événements pour braconner sur les terres de la droite et de l’extrême droite. Stratégie électoraliste, indigne des victimes, qui s’est révélée pour le moins peu payante. J’y vois la mise en péril des valeurs fondatrices de notre république (liberté, égalité, fraternité), la fragilisation des solidarités et du collectif, l’appel à l’individualisme, voire à la délation. J’y vois la copie des erreurs américaines du début de ce siècle – fichage global de la population, baisse des libertés et envoi de forces armées à l’étranger – qui ont pourtant participé à la déstabilisation du monde. Cette réponse court-termiste ne prend pas la mesure des causes et des enjeux.

« A terme, le véritable enjeu est la mise en place d’un modèle de développement social et équitable, là-bas et ici », dit Thomas Piketty. On en est loin. En ayant validé, à six élus près, ces choix guerriers, liberticides et simplistes, la classe politique, dans son ensemble, n’est pas à la hauteur et n’assume pas ses responsabilités. Car il me semble que ce 13 novembre pose un certain nombre de questions : quid du financement du terrorisme, des paradis fiscaux ? Quid des relations économiques avec des régimes dictatoriaux ? Quid d’un modèle économique ultralibéral qui laisse trop de monde sur le bord du chemin ? Quid des équilibres mondiaux dictés par les énergies fossiles ?. A un problème multifactoriel et complexe, la classe politique propose une réponse simpliste. Au Bataclan, ce sont de jeunes Français qui sont venus tirer sur d’autres jeunes Français. Nos représentants politiques ne devraient-ils pas considérer ceci comme un constat d’échec ? J’attends d’eux d’avantage de réserve et d’analyse.

Le 13 novembre, des hommes armés nous ont tirés dessus. Aujourd’hui mes convictions sont inchangées, voire renforcées. Je suis convaincue qu’affaiblir la démocratie et les libertés fondamentales est une dangereuse erreur. Il s’agit de l’attentat le plus meurtrier depuis la seconde guerre mondiale. Forcément, je pense à la majorité silencieuse de cette sombre période. Aujourd’hui, dans l’état d’urgence, le simple fait de descendre dans la rue pour exprimer son mécontentement est répréhensible pénalement. Donc devenu un acte de résistance.

Amandine, 34 ans, rescapée du Bataclan

Source Le Monde Idée 21/12/2015

Voir aussi : Actualité France Rubrique SociétéVertus et vices de la comédie sécuritaire,  Citoyenneté, rubrique Politique, Etat d’urgence dans la Constitution : « Une opération d’enfumageTunisie : pas de lutte contre le terrorisme aux dépens des libertés, Rubrique Economie, Du pacte budgétaire au pacte sécuritaire,

Tunisie : pas de lutte contre le terrorisme aux dépens des libertés

Houcine Abbassi (UGTT), Wided Bouchamaoui (Utica), Abdessatar Ben Moussa (LTDH) et Fadhel Mahfoudh (avocats), le 10 décembre 2015 au balcon du Grand Hotel, à Oslo, Norvège - ODD ANDERSEN/AFP

Houcine Abbassi (UGTT), Wided Bouchamaoui (Utica), Abdessatar Ben Moussa (LTDH) et Fadhel Mahfoudh (avocats), le 10 décembre 2015 au balcon du Grand Hotel, à Oslo, Norvège – ODD ANDERSEN/AFP

Alors que la Tunisie est récompensée du prix Nobel de la paix, quatre artistes tunisiens mettent en garde contre l’érosion des libertés dans le pays, sous prétexte de lutte contre le terrorisme.

Le 7 décembre 2015, pour la seconde fois en moins de deux mois, les lauréats du prix Nobel de la paix 2015 étaient reçus par les autorités françaises.

Le prix a été décerné au Quartette à l’initiative du dialogue national :

  • l’Union générale tunisienne du travail (UGTT, principale centrale syndicale),
  • l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica, principale centrale patronale),
  • la Ligue tunisienne pour la défense des droits de l’homme (LTDH),
  • l’ordre des avocats.

Ce prix récompense des organisations censées avoir évité à la Tunisie de sombrer dans la guerre civile en 2013.

La France, premier partenaire économique de la Tunisie, a tenu à être de la partie. Ainsi, après Jack Lang à l’Institut du monde arabe, c’est le président François Hollande – qui a été le premier chef d’Etat à rencontrer les responsables du Quartette après l’annonce du prix – qui remettait en grandes pompes à l’Elysée la Légion d’honneur au quatuor nobélisé.

Cette cérémonie a été l’occasion pour un certain nombre de militants accompagnant les lauréats de se prendre en selfie sous les ors de la République. La fête s’est poursuivie à Oslo où une importante délégation représentant les quatre organisations a fêté comme il se doit cette consécration.

Barbarie dans les terres

Si, en tant que Tunisiens, nous ne pouvons qu’être fiers de cette reconnaissance internationale, si le bonheur de voir que la Tunisie est le seul pays de ce qu’on a appelé « Printemps arabe » où l’espoir que notre révolution aboutisse à une démocratie durable et à la justice sociale est encore permis, ces célébrations qui durent depuis presque deux mois nous amènent à rappeler à nos chers fêtards certaines réalités beaucoup moins réjouissantes.

Le 13 novembre, alors que Paris vivait la pire attaque terroriste de son histoire, l’horreur a également frappé en Tunisie. Mabrouk Soltani un jeune berger de 16 ans était décapité par des terroristes se revendiquant de Daech. La scène a eu lieu à Slatniya dans la région de Sidi Bouzid, foyer de la révolution. Un des cousins du pasteur a été sommé par les terroristes de ramener sa tête à sa famille.

Quelques jours après cet acte barbare, Nassim, le cousin de Mabrouk raconte à la télévision les conditions de vie de toute une partie de la population.

«  J’ai 20 ans, je n’ai jamais vu de responsable en visite dans la région. Je n’ai jamais rencontré de responsable. La nation [la patrie], je ne la connais que sur ma carte d’identité !  »

D’autres priorités pour les autorités

Le récit du jeune homme vient rappeler la quasi-démission de l’Etat dans les régions intérieures, malgré les belles promesses de toute la classe politique. Cette situation, qui a été l’une des principales causes de la révolution, impose à des milliers de laissés-pour-compte de subir à la fois l’extrême pauvreté et la menace terroriste.

Et le plus dramatique, c’est que cinq ans après le déclenchement de la révolution, aucune réforme n’a été entreprise pour sortir ces gens de l’extrême pauvreté.

La priorité affichée par la majorité gouvernementale (la coalition au pouvoir réunit quatre partis libéraux représentant 80% du Parlement) est plus à la réconciliation avec les hommes d’affaires de l’ère Ben Ali et à l’ouverture des marchés d’une économie à l’agonie et gangrénée par la corruption.

La funeste loi sur les stupéfiants

Alors que le pouvoir – dominé par Nidaa Tounes et Ennahdha – pousse à la réconciliation avec les symboles et pratiques de l’ancien régime, des jeunes ont été jugés pour avoir participé à l’épisode révolutionnaire et la plupart des avocats des familles des martyrs de la révolution sont sous le coup de poursuites judiciaires.

Pendant qu’on trinquait à l’Elysée, trois jeunes artistes étaient condamnés à un an de prison et 1 000 DT (environ 500 euros) d’amende pour détention – la consommation n’a pas pu être établie – de cannabis.

Ils rejoignent les quelque 8 000 jeunes condamnés en vertu de la funeste loi 52-1992 qui impose aux magistrats une peine plancher d’une année de réclusion et leur interdit de tenir compte d’éventuelles circonstances atténuantes. Si l’on n’est pas pris en flagrant délit, un test d’urine positif permet d’envoyer un jeune en prison.

L’actuel président de la République Béji Caïd Essebsi a promis de soumettre au Parlement – comme la Constitution l’y autorise – un projet de loi amendant ce texte répressif, un an après son élection, on attend encore une initiative présidentielle.

Le ministère de la Justice a bien travaillé sur projet de loi – qui était loin de faire l’unanimité, mais le limogeage du ministre le 20 octobre et son non-remplacement depuis auront pour conséquence de détruire d’autres vies (l’intérim est assuré par le ministre de la Défense, Farhat Horchani mais en ces temps de guerre contre le terrorisme, on comprend aisément que la gestion de deux ministères régaliens soit particulièrement difficile).

Un défenseur des homosexuels en fuite

Quelques jours avant le second déplacement du Quartette à Paris, un jeune et brillant étudiant en droit quittait son pays pour demander l’asile politique en France. Hédi Sahly, vice-président de l’association Shams pour la défense des homosexuels, a été contrait de fuir la Tunisie après avoir reçu des menaces sérieuses pour sa sécurité et celle de son entourage.

Comment peut-il en être autrement quand on sait que l’article 230 du code pénal (datant de 1913) punit de trois ans de prison la sodomie.

L’ancien ministre de la Justice Mohamed Salah Ben Aïssa a jugé nécessaire l’abrogation de cette loi liberticide et anticonstitutionnelle. Il a été sèchement désavoué par le président de la République, présenté par d’aucuns comme un «  progressiste  ».

A leur retour d’Oslo, les membres du Quartette et l’importante délégation qui les accompagne apprendront que six jeunes étudiants ont été condamnés par un tribunal de Kairouan à trois ans de prison ferme assortis de cinq ans d’interdiction du territoire du gouvernorat éponyme pour «  pratiques homosexuelles  ».

N’ayant pas été pris en flagrant délit, la preuve a été établie par un test anal. Un des coaccusés a également écopé d’un an de réclusion parce qu’on a trouvé dans son ordinateur une séquence pornographique homosexuelle.

Les atteintes aux libertés publiques semblent se multiplier dans une indifférence de plus en plus importante. En effet, une partie de la société civile, aux aguets au moment où les islamistes menaient la coalition gouvernementale, est dans le meilleur des cas silencieuse quand elle n’est pas dans la justification.

Pas de paix sans justice

Heureusement que des organisations – à l’instar la LTDH – poursuivent le combat pour les droits humains, dans un contexte marqué par la montée d’un discours fascisant tenu par une partie de l’élite politique, médiatique et sécuritaire.

La guerre plus que légitime contre le terrorisme ne doit absolument pas justifier des atteintes aux droits et libertés. Ce discours qui sonne comme une évidence, est de plus en plus inaudible et les victimes des dérives policières sont souvent des jeunes n’ayant aucun lien avec le terrorisme djihadiste.

A l’occasion des célébrations du Nobel de la paix, il semble plus que jamais essentiel de rappeler que l’état de paix ne saurait être défini par la seule absence de guerres.

Le souci de la justice sociale, de l’égalité de traitement des citoyens, le respect des convictions de chacun et des libertés fondamentales, la dignité, sont autant d’exigences pour atteindre et pérenniser cet objectif. L’Histoire ne cesse de nous enseigner qu’il n’y a pas de paix sans justice.

Missy Ness, & Hatem Nafti

Source Rue 89 17/12/2015

Voir aussi : Actualité Internationale, Rubrique Méditerranée, Tunisie, rubrique Politique, Société civile, rubrique Société, Citoyenneté, Droit des femmes,

« Le vote blanc : de l’anti-vote à l’alter-vote ? »

1992+Affiche+Gerard+Gautier+Votez+Blanc+c_est+Exprime

Par Jérémie Moualek

Au lendemain du 1er tour de l’élection présidentielle de 1969, Georges Pompidou – alors premier ministre et candidat en tête – prend une mesure destinée à freiner l’abstention annoncée importante, en avançant d’une semaine l’ouverture de la pêche prévue initialement la veille du second tour ! Sans même évoquer l’inanité évidente de cette décision, c’était aussi sans compter sur les électeurs qui choisirent de voter blanc et nul : 1 303 798. Depuis lors, l’ampleur de ce phénomène électoral n’a jamais été démentie (901 301 voix au 1er tour des régionales ; 4,6% des votants en moyenne entre 1992 et 2015), ni même sa perpétuelle négation institutionnelle. Comptés mais non comptabilisés dans les suffrages exprimés, ces « votes sans voix » n’ont aucun poids dans la balance électorale (depuis la loi électorale du 15 mars 1849).

Au lendemain des régionales, le sujet « vote blanc » est revenu à la table des débats médiatico-politiques. Et ce, en raison de la présence du Front national (FN) qui bouleverse l’offre politique. Dans plusieurs régions, l’électeur (dit de « gauche », notamment) n’aurait plus l’embarras du choix mais le choix de l’embarras. Et, ce n’est pas la loi du 21 février 2014 « visant à reconnaître le vote blanc » qui va lui simplifier la tâche.

Appliquée la première fois lors des dernières élections européennes, cette loi, adoptée suite à un accord transpartisan, répondait à une « demande » ancienne qui se faisait de plus en plus intense (des 61 propositions de loi déposées depuis 1880, 43 l’ont été après 1993). Certains scrutins – rimant avec des pourcentages conséquents de votes blancs et nuls (seconds tours des présidentielles 1969 et 2012 ; législatives 1993 et 1997 ; référendum 2000) ou une configuration « extraordinaire » (2nd tour de la présidentielle 2002) – ont semble-t-il été des moments propices à la multiplication des initiatives parlementaires. Après la présidentielle de 2002, 11 propositions de loi ont ainsi été émises, notamment dans le but d’ « enrayer » la hausse de l’abstention et des partis dits « extrêmes ».

Le non-choix volontaire

Passé d’anti-vote – étant vu, depuis près d’un siècle et demi, comme contraire à la définition légitime du vote – à antidote – à l’abstention, à la montée des « extrêmes »,…-, le « vote blanc » s’est donc affirmé depuis les années 1990 comme une alternative électorale de plus en plus légitime. D’abord mis en évidence dans le seul cadre d’une offre politique trop restreinte (candidat ou liste unique, référendum), celui-ci tend à devenir l’expression plus générale du non-choix volontaire, voire de la neutralité (une opinion « blanche »). Et ce, au point que la loi lui a octroyé le statut de catégorie électorale autonome en le distinguant – dans le décompte des voix et la présentation des résultats – du « vote nul ».

En résumé, pour le législateur, soit l’électeur refuse ou est en incapacité de choisir (vote blanc), soit il est incapable de voter « normalement », c’est-à-dire en suivant les règles prescrites (vote nul). Cette binarité presque manichéenne – mettant dos à dos un acte « positif » et un acte « négatif » – et cette hiérarchisation des voix non exprimées est factice : voter blanc ou nul demeure encore un vote « à blanc », sans conséquence sur l’issue d’un scrutin.

Surtout, la loi se méprend sur les réalités sociologiques des électeurs et sur leurs pratiques de vote. Car, ce qui est devenu commun d’appeler aujourd’hui « vote blanc » correspond pourtant, toujours, à un usage pluriel du bulletin de vote. En quoi, par exemple, une profession de foi, un papier avec un texte revendicatif ou encore un mouchoir blanc – tous considérés légalement comme des « votes nuls » – ne pourraient-ils pas chacun être des « vote blancs » aux yeux de l’électeur ?

Tant que des bulletins blancs officiels ne seront pas mis à disposition et que le « vote blanc » n’est pas reconnu dans les suffrages exprimés, il semblera hasardeux d’analyser celui-ci distinctement du « vote nul ».

Ils choisissent de « crier »

Beaucoup de ceux qui souhaiteraient voter blanc continuent en effet de céder à la tentation de livrer des « bulletins blancs à message » : à force de ne pas être pris en compte, ils choisissent de « crier » (en ornant leur bulletin d’inscriptions diverses et en le rendant, de fait, nul) plutôt que de « se taire » en livrant une enveloppe vide. Par ailleurs, cette dernière – seule modalité fiable pour voter blanc car un papier vierge est considéré comme nul s’il n’est pas aux mêmes dimensions qu’un bulletin officiel – rebute un bon nombre d’électeurs qui craignent que la légèreté (matérielle) de leur vote ne les trahisse auprès des assesseurs capables alors de deviner la nature de celui-ci. Dès lors, la distinction effectuée avec le « vote nul » ne provoque qu’une nouvelle euphémisation de la portée chiffrée du phénomène, en divisant le pourcentage, autrefois obtenu, en deux.

À l’heure où de plus en plus d’électeurs ne trouvent pas « bulletins à leur urne » ou les désertent (52,8 des inscrits au 1er tour des régionales, sans compter les 3 millions de non-inscrits), l’ambiguïté du code électorale et sa faiblesse (puisque la loi n’est pas vouée à s’appliquer pour les référendums et, surtout, pour la présidentielle) sont à déplorer. Car, tout en étant un refus de choisir dans l’offre politique proposée, le vote blanc et nul est aussi un refus citoyen de renoncer à voter. Il s’avère être un droit de choisir de ne pas choisir : un « alter-vote » qui fait parfois du bulletin bien davantage qu’un instrument destiné à désigner un gagnant. Et, même s’il peut être parfois synonyme d’indifférence, ce geste électoral est plus souvent un moyen d’exprimer une forme d’exigence démocratique à travers l’émission de « bulletins porte-voix ».

Jérémie Moualek est chercheur en sociologie politique, à l’Université d’Évry (Centre Pierre Naville). Il poursuit actuellement une thèse de doctorat sur le vote blanc et nul

Source : La Monde 14/12/2015

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