On l’avait compris et Mathieu Bauer, qui met en scène, l’avait précisé : en adaptant le livre d’entretiens de Legs McNeil et Gillian McCain, Please kill me au théâtre, il ne s’agissait pas de reconstituer un concert punk. Ce bouquin feuilleté sur la scène du Rockstore sert de matière première. Les anecdotes des protagonistes célèbres qu’il renferme, suffisent à faire rêver. Elles nous propulsent au coeur d’un univers de dingue peuplé d’hallucinés, des Stooge aux New York Dolls, en passant par MC 5 Télévision, Ramones ou les Talking Heads. On croise des figures singulières comme Lou Reed, Sid Vicious ou Malcom McLaren… Il est même question de cette étrange et historique collision entre l’underground new-yorkais et le punk anglais. Désœuvrement d’une jeunesse dont tout le monde se foutait aux States et lutte des classes en Angleterre. Deux visions témoignant surtout d’un état d’esprit, que les acteurs ne visent pas à faire revivre. Et c’est tant mieux.
« La musique punk ce n’est pas ma tasse de thé » considère Mathieu Bauer qui revendique une esthétique de la fragmentation. La mise en scène joue habilement sur les tableaux mythiques pour passer de l’extrême au convenu en réduisant le fossé qui sépare le théâtre des scènes nationales des concerts trashs. Sur scène les rixes ne sont pas crédibles, pas plus que l’arrachage de Tee-shirt. Bref, ça manque un peu de rage authentique. Le play-back et le sens de l’auto-dérision sont salvateurs. Le long plan cinématographique final est très réussi. Entre célébration et implication, le public campe un peu entre deux chaises. Il est jeune et semble percevoir le décalage entre l’intensité vécue par les jeunes à cette période et le patinage actuel. Punk is dead. Aujourd’hui les aspirations de la jeunesse prennent bien d’autres formes mais savons-nous bien lesquelles ?
« Chibanis la question », le projet lauréat du prix de l’audace artistique et culturel de l’EN poursuit sa route
Le projet lancé par Uni’sons avec la Caravane Arabesque allait de soi comme les caravanes qui passent et traversent l’histoire avec un grand H. Dans leurs sillages, il y a des vies qui glissent de nos mémoires un peu comme les mirages économiques qui justifient l’austérité, jusqu’au jour où le pays se déclare dans l’incapacité de rembourser sa dette ou dans l’incapacité de reconnaître le travail des hommes qui ont fondé son existence. C’est précisément le sort des Chibanis en France.
Ce sont ces vies qui se poursuivent dans l’oubli du monde et des villes aveugles que le photographe Luc Jennepin met en lumière actuellement à la médiathèque Jean-Jacques Rousseau jusqu’au 21 décembre.
Une juste émotion
Le projet est itinérant, à la croisée de l’histoire, de l’action culturelle et de la démarche artistique (photographique, musicale et littéraire). Il présente l’intérêt de circuler à l’intérieur des villes étapes pour trouver d’autres témoins muets de cette histoire perdue loin de ses racines. Après Montpellier où il a vu le jour dans le foyer d’insertion Adoma, le projet partira dans toute la France. Il est attendu dans des espaces prestigieux de l’architecture contemporaine à Toulouse, Marseille, Bordeaux, Lyon, Nantes, Paris et s’enrichira à chacune des étapes de nouveaux portraits.
Grand amateur d’aventure sans frontière, le clarinettiste Louis Sclavis a créé une bande dédiée aux Chibanis. Les plumes de Nasser Djemaï, Magyd Cherfi, Pascal Blanchard, sont également mobilisées autour de Chibanis la question qui trouve ainsi un relais littéraire. Il suffisait d’aller à leur rencontre, les acteurs de cette aventure l’on fait avec un esprit juste et beaucoup de talent.
Carnages de François Cervantes. Photo : Christophe Raynaud
Politique Culturelle. A l’occasion de la présentation de la saison d’hiver duDomaine d’O, la question de la gouvernance prend des contours incertains.
Une présentation de saison d’hiver peu ordinaire s’est tenue jeudi au Domaine d’O. Le vice-président du conseil général Jacques Atlan et le directeur par intérim Marc Lugand entourés des directeurs artistiques des festivals d’été : Jérôme Pillement pour les Folies lyriques, Habib Dechraoui pour Arabesques, une collaboratrice de Sabine Maillard pour les Nuits d’O, Jean Varéla pour le Printemps des comédiens et Isabelle Grison pour Saperlipopette, ont écouté religieusement l’équipe du service de communication présenter l’offre culturelle du Domaine d’O jusqu’en avril prochain.
Une situation cocasse dont le plus sûr mérite fut sans nul doute d’entrer dans le vif du sujet : la question de la gouvernance du Domaine après le départ de Christopher Crimes qui cumulait, non sans quelques difficultés, la responsabilité de la direction artistique et celle de l’Epic.
« Il n’y aura pas de directeur artistique », a annoncé Jacques Atlan comme pour couper court aux espoirs de ceux qui attendaient encore une fumée blanche. « Marc Lugand assurera la cohérence et la vision départementale dans la gestion administrative et financière du domaine ». Pour le délégué départemental à la culture, la question de la cohérence artistique ne semble pas se poser. « Nous ne nous contentons pas d’être un guichet. Nous voulons plus de publics et de diversité artistique. Nous avons demandé aux directeurs de festival qui connaissent bien le domaine et le font vivre, de proposer des spectacles. C’est une année de transition. »
Si les différents directeurs de festival affichaient une solidarité de rigueur, la tension et l’inquiétude étaient perceptibles chez les acteurs en charge de faire vivre ce lieu incontournable qui concentre, avec SortieOuest, le budget culturel départemental.
La question du budget artistique n’a pas été abordée avec beaucoup de précisions. « Il sera le même, à 90%… » Faut-il entendre que le nouveau théâtre Jean-Claude Carrière de 600 places assises qui complète l’équipement structurel du domaine depuis deux mois doit enrichir l’offre artistique à fonds constants ?
Il serait regrettable que le développement du Domaine d’O et ses acquis en termes d’accessibilité, de fréquentation, et de qualité de l’offre, se réduisent à un mode de gestion patrimoniale. Par ailleurs, la volonté de « sanctuariser les acteurs » habituels ne peut pas tenir lieu de politique. L’économie d’un poste de directeur artistique, correspond aussi à la suppression d’une fonction qui touche l’identité du lieu. Et tous le monde croise les doigts pour que cette identité demeure à la hauteur des ambitions culturelles affichées.
Jean-Marie Dinh
Les planches qui chaufferont l’hiver 2013/2014
Opéra Rock : Les ailes du désir
Spectacles vivants. Les rendez-vous du Festival d’hiver au Domaine d’O.
En 2014, dix-huit spectacles ponctueront nos fraîches soirées d’hiver 2014. ça commence le 11 janvier avec l’Orchestre national de Barbès pour se clôturer par Idir le 12 avril prochain. La plus grande part de cette programmation a été programmée par l’ancien directeur Christopher Crimes. Ce n’est donc qu’à partir du printemps que vont se dessiner les vrais premiers pas de la programmation multipolaire. Rétrécie par les contraintes budgétaires, la programmation d’hiver passe de trente-six dates à vingt-quatre.
Plus de champagne ni fête du nouvel an dans le domaine départemental cette année mais une série de rendez-vous à ne pas manquer. Le Domaine d’O privilégie l’ouverture à de nouvelles formes de spectacles vivants et les relations dans la durée avec les artistes. Ainsi retrouverons-nous la Cie l’Entreprise de François Cervantes avec Carnages : une fête collective des grands clowns du XXe siècle. Toujours en janvier Thomas Fersen est attendu avec Ginger Accident dans une rencontre qui promet d’être surprenante. On aurait tort de manquer le spectacle de Josse De Pauw autour de Monk, le 4 février. Nasser Djemai sera lui aussi de retour, après sa création sur les Chibanis en 2011, avec une pièce réaliste sur la jeunesse : Immortels le 7 février. La clown Emma taquinera la mort, pour en rire, et Mulatu Astatke nous emportera dans les profondeurs de l’Ethio-Jazz le 20 février.
Réservation : n°Vert 0 800 200 165
Source l’Hérault du Jour : 23/11/2013
Politique. Le directeur de l’Opéra de Rennes pourrait prendre la direction générale de l’Orchestre opéra national de Montpellier à la fin de l’année.
La succession de Jean-Paul Scarpitta fait encore quelques vagues. Le patron controversé de l’OONM cédera ses fonctions de directeur général à la fin de l’année tout en conservant son poste de directeur artistique jusqu’à l’été 2014. Composé pour ne pas renouveler une aventure malheureuse, le jury chargé de sélectionner le futur directeur aurait donné son avis et choisi Alain Surrans, actuel directeur général de l’Opéra de Rennes.
De l’avis des membres du Jury, Alain Surrans était le mieux placé des quatre candidats en lice (Valérie Chevalier, Georg Friedrich Heckel, Eri Vigié) après le retrait du directeur de l’Opéra de Nancy Laurent Spielmann. La décision du jury, a été révélée par nos confrères du Midi Libre après que le Conseil d’Administration ait repoussé sa ratification attendue le 18 au 26 novembre. L’agglomération de Montpellier s’est aussitôt fendue d’un communiqué pour démentir que le jury présidé par Nicole Bigas ait fait ce choix. « Il l’annoncera dans les jours à venir et proposera pour validation définitive au CA le 5 décembre. »
Un profil de favori
Durant le conflit opposant Scarpitta à la quasi totalité des personnels, on n’a pas vu Alain Surrans, qui présidait alors le syndicat des directeurs d’opéras, faire un signe pour soutenir le Directeur général de Montpellier. Alain Surrans a été nommé directeur de l’Opéra de Rennes en janvier 2005. Auparavant, il avait été le collaborateur de Maurice Fleuret au Festival de Lille puis au ministère de la Culture (1980 à 1987), avant de diriger le Festival de Lille (1988), l’association Île-de-France Opéra et Ballet (1989-1993) et la programmation de l’Auditorium et de l’Orchestre national de Lyon (1994-1998). Après trois années (1998-2001) au ministère de la Culture où il a occupé les fonctions de conseiller pour la musique à la direction de la Musique, de la Danse, et du Théâtre, il a exercé les fonctions de conseiller à l’Opéra de Paris.
Avec un budget de moins de 4 M d’euros son bilan artistique à Rennes n’a pas à rougir. La mission du futur directeur sera délicate. Face à un public exigeant, il devra éviter de puiser dans le catalogue des oeuvres que l’on retrouve sans grand intérêt un peu partout en France. De la même façon, les restrictions budgétaires ne lui permettront pas de privilégier les artistes vedettes que l’on fait venir à grands frais d’où l’importance d’un bon carnet d’adresses. Le rapport avec les tuteurs locaux nécessite une habileté certaine. Enfin, les personnels qui sortent de deux années de conflit attendent « une personne de dialogue et un directeur artistique de qualité » Alain Surrans pourrait correspondre à ce profil mais shuut, le sort n’en est pas encore tout à fait jeté.
Après deux années de tempête la sérénité pointerait-elle à l’horizon pour l’Opéra orchestre national de Montpellier ? L’annonce des candidats retenus pour succéder au prince de la discorde, Jean-Paul Scarpitta va dans ce sens. Celui-ci devrait céder ses fonctions de directeur général à la fin de l’année et conserver son poste de directeur artistique jusqu’en juillet 2014.
La nomination du nouveau directeur général sera connue le 18 novembre prochain. Le statut associatif de la maison sera transformé en EPCC (établissement public à caractère culturel) dès la fin de l’année. Mais le chantier de restauration du navire ne fait que débuter.
Le conflit ouvert entre l’ensemble des personnels et le directeur général de la structure s’était propagé aux deux principaux tuteurs de la structure, l’Agglomération de Montpellier et la Région, dans un duel politique opposant les deux présidents socialistes. Le coup de poker du président de Région Christian Bourquin menaçant de suspendre la subvention régionale de 9,5 M d’euros restera dans les mémoires, même si celui-ci est revenu partiellement sur sa décision en maintenant un apport financier régional de 3,5 M. A la tête de l’Agglo dont l’enveloppe s’élevait déjà à 10M, Jean-Pierre Mourre s’est engagé à subvenir au désistement, mais en a-t-il les moyens ?
Le budget global qui oscillait entre 23 M et 24 M devrait accuser cette année une baisse conséquente pour s’établir autour de 20 M. « Nous nous donnons deux ans pour revenir au budget, peut-être moins…», confie Nicole Bigas, vice-présidente de l’Agglomération déléguée à la Culture. Le résultat des élections municipales pourrait en effet avoir une incidence sur l’hypothétique retour d’une participation financière de la Ville de Montpellier.
Cinq candidats en lice
Un jury constitué des représentants qualifiés des différents tuteurs et de professionnels unanimement reconnus a établi une sélection de cinq candidats sur les 52 dossiers déposés. Parmi les critères de sélection figuraient notamment l’expérience, la légitimité artistique, le fait d’être en activité, de disposer d’un réseau européen, d’avoir des compétences musicales, managériales et de gestion… Toutes les exigences de fiabilité qu’exigent souvent les tuteurs après une expérience malheureuse.
Le nom de la personne qui succédera à Jean-Paul Scarpitta à la tête de l’Opéra orchestre national de Montpellier sera connu le 18 novembre, après une audition des cinq candidats: Valérie Chevalier-Delacour (directrice de l’administration artistique de l’Opéra de Lorraine), Laurent Spielmann (directeur de l’Opéra de Nancy depuis 2001), Alain Surrans (directeur de l’Opéra de Rennes depuis 2005, actuel président du syndicat des directeurs d’opéras), Georg-Friedrich Heckel (patron de l’Opéra de Darmstadt en Allemagne) et Eric Vigié (directeur de l’Opéra de Lausanne).
Du côté des personnels, on estime «extrêmement important de redémarrer avec une personne de dialogue et un directeur artistique de qualité». La question du salaire du futur directeur tiendra également une place importante lors de la dernière audition. Mais avec ses deux salles, son orchestre de cent musiciens et son choeur de 32 chanteurs la maison qui a été en souffrance n’en demeure pas moins attractive.