Quand la France se renie elle-même

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En expulsant des centaines de citoyens européens, Nicolas Sarkozy foule aux pieds la tradition humaniste que la France défend depuis la Révolution.

Un leader aussi soucieux de son image que Nicolas Sarkozy ne décide pas l’expulsion de Roumains d’origine tsigane sans en mesurer les conséquences. Il a en fait calculé qu’une telle mesure redonnerait des couleurs à sa popularité en berne, en dehors de toute autre considération, y compris celle de lutter contre la délinquance. Se laissant entraîner par un populisme grandissant en Europe, Sarkozy en adopte certains arguments et initiatives sous prétexte de le combattre. Il se pose ainsi en exécuteur implacable de la loi, non pas tant pour la faire respecter mais pour faire converger les regards sur lui et sur sa prétendue détermination politique.

Car enfin, Sarkozy n’expulse pas quelques centaines de Roms qui vivent dans des campements de fortune. Il expulse des citoyens européens de nationalité roumaine dont l’origine ethnique ne devrait pas entrer en ligne de compte, en vertu des principes défendus par l’Union européenne (UE) et par la République française elle-même. En justifiant cette mesure par l’appartenance ethnique des intéressés, Sarkozy et son gouvernement foulent aux pieds une tradition dont la France peut s’enorgueillir et qu’elle a en outre contribué à diffuser en Europe et dans le reste du monde.

La mesure de Sarkozy ressemble à s’y méprendre à celle adoptée en Italie par Silvio Berlusconi et annonce peut-être celles d’autres gouvernements de l’UE. L’exclusion sociale des Roms est un phénomène généralisé en Europe, au point que leur qualité de citoyens semble de plus en plus passer au second plan. En mettant l’Etat de droit non plus au service de l’égalité et de la justice, mais des besoins politiques à court terme, Sarkozy porte une lourde responsabilité dans cette dérive, au même titre que Berlusconi.

El  Pais

Voir aussi : Rubrique rencontre Tony Gatlif,

Paul Kagamé, un dictateur en voie de réélection

Le Président Paul Kagame

Le Président Paul Kagame

Il  n’y a pas qu’au Rwanda que la série d’assassinats d’opposants politiques et de journalistes suscite une désapprobation. L’élimination physique de tous ceux qui peuvent gêner Paul Kagamé à sa réélection du 9 août prochain ne plaît pas hors des frontières du pays des mille collines. Le chef de l’Etat Paul Kagamé s’en est lui-même rendu compte, le 16 juillet dernier,  à l’occasion d’un déplacement en Espagne. Le Premier ministre espagnol, Jose Luis Rodriguez Zapatero, a renoncé au dernier moment à co-présider avec lui une rencontre de l’ONU sur la pauvreté. En outre, le lieu de la rencontre a été changé au dernier moment comme pour éviter que Paul Kagamé ne souille le siège du gouvernement du sang que des ONG espagnoles l’accusent d’avoir sur les mains. Une véritable claque administrée malgré lui par Zapatero, obligé d’agir ainsi pour ne pas rester sourd au tollé suscité en Espagne par la visite du numéro un rwandais à un moment où des opposants politiques et des journalistes sont tués chez lui.

 Il a aussi été question au cours de la rencontre, suite à l’exhortation du secrétaire général de l’ONU d’élucider certains meurtres, dont ceux du vice-président du Parti démocratique vert, André Kagwa Rwisereka, dont le corps a été retrouvé pratiquement sans tête le 14 juillet, et du journaliste indépendant Jean Léonard Rugambage tué par balles à Kigali le 24 juin dernier. Il faut aussi dire qu’avant ces assassinats, la justice espagnole avait émis [en février 2008] des mandats d’arrêt internationaux [pour « génocide »] contre 40 militaires du régime de Paul Kagamé, pour des crimes commis avant l’arrivée au pouvoir du Front patriotique rwandais (FPR). Paul Kagamé est épargné par ces mandats du fait de l’immunité liée à sa fonction. Ce qui ne l’empêche nullement de se rendre en Espagne. Mais pour les défenseurs des droits humains ibériques, si l’on ne peut pas l’arrêter, on peut tout de même lui signifier qu’il n’est pas un ange, un saint et le sauveur du Rwanda que lui et son entourage s’évertuent à montrer. S’il est vrai que l’arrivée au pouvoir du FPR [qui a chassé en juillet 94 le régime génocidaire] a ramené la stabilité et favorisé la croissance, il n’en demeure pas moins que la traque, les assassinats d’opposants politiques, l’absence de libertés réelles comme celle d’expression et de la presse, l’opposition au révisionnisme ont fini par faire oublier aujourd’hui les bonnes actions des hommes forts du FPR.

Le Rwanda renvoie l’image d’un pays dirigé par un dictateur qui n’en a pas l’air, un militaire qui ne supporte pas la contradiction à tau point point que ceux de son camp qui se permettent un zeste de critique deviennent des ennemis à abattre quel que soit l’endroit du monde où ils se trouvent. Paul Kagamé donne aussi l’air d’une personne obsédée par le pouvoir qu’il veut garder à tout prix, quitte à marcher sur des cadavres d’opposants et de dissidents. Paradoxalement, ses agissements ne font pas l’objet de condamnations comme il se doit à cause d’un certain nombre de soutiens comme ceux des Américains qui se présentent comme des alliés sûrs pour l’homme mince de Kigali. C’est d’ailleurs ce qui fait que l’ONU ne peut véritablement pas taper du poing sur la table, amenant son secrétaire général à être prudent sur l’emploi des mots au point qu’il ne veuille « s’immiscer dans les affaires intérieures d’un Etat souverain ». D’autres pays sont dans leurs petits souliers pour avoir fait des mains et des pieds pour être dans les bonnes grâces de Kigali avec lesquels ils ont beaucoup de contentieux historiques. Et il ne faut pas compter sur leurs dirigeants pour oser une remarque « déplacée » sur l’attitude des autorités rwandaises par rapport au respect des droits humains et des libertés fondamentales. Leur société civile a beau grogner, cela ne les gêne pas de dérouler le tapis rouge à l’ami rwandais.

Séni Dabo Le Pays (Burkina Faso)

Voir aussi : Rubrique Rwanda Sarkozy en mission de réconciliation,

Espagne : Zapatero isolé pour le débat sur l’état de la Nation

Le premier ministre espagnol devant le Parlement, à Madrid, le 14 juillet. Photo AFP.

Seul contre tous. C’est dans cette position inconfortable que José Luis Rodriguez Zapatero a abordé, mercredi 14 juillet devant le Parlement, le débat sur l’état de la Nation. Pour ce rendez-vous politique le plus important de l’année, le chef du gouvernement espagnol ne devra pas seulement affronter les attaques prévisibles de Mariano Rajoy, le chef du Parti populaire (PP, droite), la principale formation d’opposition. Pendant les deux journées de ce traditionnel débat parlementaire, instauré par le socialiste Felipe Gonzalez en 1983, M. Zapatero devait s’attendre à un feu croisé de critiques.Le changement de cap qu’il a imposé à sa politique économique, en annonçant en mai un drastique plan d’austérité, lui vaut l’hostilité de la gauche. Izquierda unida (IU, écolocommuniste) ne peut montrer aucune indulgence alors que les syndicats ont programmé pour le 29 septembre une grève générale, la première depuis le retour des socialistes au pouvoir en 2004. Dans son discours sur l’état de la Nation, principalement consacré à la crise économique, M. Zapatero a du également aborder la question du statut catalan, dont le Tribunal constitutionnel vient d’invalider plusieurs articles, provoquant une large indignation en Catalogne.

Après la manifestation qui a réuní samedi 10 juillet à Barcelone près d’un demi-million de personnes à l’appel de tous les partis et syndicats locaux (à l’exception du PP), José Luis Rodríguez Zapatero ne peut plus compter sur le soutien des nationalistes de Convergencia i Unio (CiU) que les sondages donnent vainqueurs lors des élections régionales de l’automne. En vue de ce scrutin, CiU a intérêt à radicaliser son discours pour mettre en porte-à-faux le Parti socialiste catalan (PSC). Sur le point de perdre le pouvoir en Catalogne, celui-ci réclame au PSOE une improbable renégociation du statut.

Sept voix manquantes

Si, au cœur de l’été, le débat sur l’état de la Nation sert de thermomètre politique avant la présentation de la loi de finances, la rentrée parlementaire menace d’être chaude et orageuse pour José Luis Rodríguez Zapatero. Où trouver les sept voix qui manquent au PSOE pour atteindre la majorité absolue au Congrès des deputés et faire voter son budget 2011 ? En réaffirmant ses derniers choix, le président socialiste n’a pas rassuré les partis de gauche hostiles aux réformes des retraites et du marché du travail, ni convaincu la droite.

La chance du chef de gouvernement espagnol est que personne n’a très envie d’être à sa place alors que la crise économique est à son comble avec plus de 20 % de chômeurs, et que l’Espagne est régulièrement la cible des spéculateurs internationaux. Le Parti populaire a mis une sourdine à son exigence d’élections anticipées. Même si Mariano Rajoy a répliqué au discours de son adversaire par un dur réquisitoire, le programme économique du PP n’est guère différent de celui du PSOE. Ni plus convaincant.

Le sort du gouvernement dépendra en fin de compte des six voix des députés du Parti nationaliste basque (PNV, nationaliste) et de trois députés de Navarre et des Canaries. Selon les observateurs, le soutien de ces formations au projet de budget 2011 paraît acquis … moyennant quelques concessions.

Le juge espagnol Garzon proposé pour le prix Nobel de la paix

Le juge Garzon et la journaliste espagnole Pilar del Rio, veuve de l'écrivain portugais Jose Saramago. Photo Desiree Martin AFP.

La Fondation Saramago va proposer la candidature au prix Nobel de la paix du juge espagnol Baltasar Garzon, suspendu de ses fonctions pour avoir voulu enquêter sur les crimes amnistiés du franquisme, a indiqué la veuve de l’écrivain portugais au journal El Pais, vendredi 2 juillet.

La fondation, qui porte le nom du Prix Nobel de littérature portugais José Saramago, mort le 18 juin à l’âge de 87 ans, va proposer la candidature du juge Garzon « pour son engagement en faveur de la défense des droits de l’homme », a précisé Pilar del Rio à El Pais. Selon les règles du comité Nobel, seuls des parlementaires, ministres, précédents lauréats, certains professeurs d’université et le comité lui-même peuvent proposer des candidats pour ce prix prestigieux.

Le juge Garzon, qui « n’a jamais baissé la tête face à aucun subterfuge et aucun pouvoir » mérite cette récompense « pour s’être toujours mis du côté des victimes de n’importe quel continent ou pays », a-t-elle ajouté.

« Il faut résister et aller de l’avant »

Baltasar Garzon doit être prochainement jugé pour « forfaiture » (abus de pouvoir) pour avoir voulu enquêter sur les disparus de la guerre civile (1936-39) et du franquisme (1939-75) malgré l’existence d’une loi d’amnistie. Il est actuellement suspendu de ses fonctions en Espagne et encourt une peine de vingt ans d’interdiction d’exercice de sa fonction de juge.

Il a toutefois été provisoirement autorisé à travailler à la cour pénale internationale de La Haye comme consultant. Le juge Garzon a reçu le soutien de nombreux juristes de par le monde qui estiment que les crimes contre l’humanité sont imprescriptibles et que la loi d’amnistie espagnole n’est pas conforme au droit international. Son procès pourrait avoir lieu peu après la fin de l’été.

Le juge Garzon et la veuve de Saramago ont participé jeudi soir à Lanzarote à la présentation d’une biographie de l’auteur portugais. « Je suis assez pessimiste concernant mon futur proche, mais cela ne veut pas dire que je renonce au combat », quand « les temps sont durs, il faut résister et aller de l’avant », a déclaré jeudi le juge, qui s’est dit tranquille à l’approche de son procès, ayant la certitude de « n’avoir commis aucun délit ».

(AFP)

Voir aussi : Rubrique Espagne , Soutien à Baltasar Garzon,

L’Europe en mode rigueur

monnaieEn France: Le déficit public, attendu au niveau record de 8% du PIB cette année, doit revenir à 3% en 2013, a promis le gouvernement, qui a annoncé un gel des dépenses de l’Etat pendant trois ans. D’autres réductions des dépenses sont aussi à l’ordre du jour, ainsi qu’une diminution de cinq milliards en deux ans des niches fiscales.

Au Royaume-Uni: Le nouveau gouvernement a présenté lundi un premier programme de 6,2 milliards de livres (7,2 milliards d’euros) de coupes immédiates dans les dépenses des ministères, n’épargnant que la santé, la défense et l’aide au développement. Les «quangos», des organismes para-publics, seront fortement réduits et les recrutements sont gelés. Le déficit britannique a atteint 11,1% du PIB à la fin de l’année budgétaire achevée fin mars.

En Espagne: Madrid a annoncé en janvier un plan d’austérité de 50 milliards d’euros d’ici 2013 afin de ramener le déficit public à 3% du PIB en 2013, contre 11,2% en 2009. Sous la pression des marchés et des partenaires européens, le gouvernement a approuvé la semaine dernière une accélération de cette cure, avec des économies de 15 milliards dès 2010 et 2011. Cela comprend une baisse des salaires des fonctionnaires en moyenne de 5% dès juin et un gel de la revalorisation de certaines retraites en 2011.

Au Portugal: Face au risque d’une contagion de la crise grecque, Lisbonne a renforcé en mai ses objectifs de redressement budgétaire, promettant de ramener son déficit de 9,4% du PIB en 2009 à 4,6% dès 2011. Après l’annonce en février d’un programme axé sur une réduction des dépenses, le gouvernement a décidé une hausse générale des impôts

En Grèce: Après avoir annoncé en mars des économies de 4,8 milliards d’euros, Athènes a adopté en mai un nouveau plan visant à réduire de 30 milliards le déficit public, qui frôlait l’an dernier 14% du PIB, pour le ramener d’ici 2014 sous le seuil européen de 3%. Cette cure de rigueur sans précédent, contrepartie de l’aide financière de la zone euro et du FMI, combine des hausses des prélèvements obligatoires, notamment de la TVA, et des coupes salariales dans la fonction publique. Les réformes des retraites et du marché du travail, ainsi que la lutte contre une évasion fiscale endémique, doivent compléter ce programme..

En Irlande: En 2009, Dublin a adopté deux plans d’austérité de 3 et 4 milliards d’euros, pour ramener le déficit public à 11,5% du PIB en 2010, après 14,3% en 2009. Parmi ces mesures figurent une baisse des allocations sociales et une réduction de 5 à 15% des salaires des fonctionnaires.

En Italie: Rome devait approuver mardi une cure d’austérité de 24 milliards d’euros pour 2011-2012. Il devrait s’agir de deux tiers de réductions des dépenses publiques et d’un tiers de recettes fiscales supplémentaires, tandis que les salaires des fonctionnaires seraient gelés pendant trois ans. Le déficit public de l’Italie est resté limité à 5,3% du PIB en 2009, mais la dette, l’une des plus élevées au monde, représentait 115,8% du PIB.

AFP

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