« L’Eglise ne prend jamais position contre l’exploitation »

Jean Rohou « L’idée du peuple des chrétiens ne me semble plus opérante aujourd’hui » Photo David Maugendre

Entretien. Humaniste athée, le Montpelliérain Jean Rohou évoque son dernier ouvrage « Le Christ s’est arrêté à Rome » qui interroge l’idéal chrétien face à la trahison du Vatican.

Jean Rohou est un universitaire montpelliérain spécialiste du XVIIe siècle. Il est notamment l’auteur de Fils de Plouc, une analyse pleine d’ironie doublée d’un regard profond sur la culture bretonne dont il est originaire. Libre penseur humaniste il vient de publier Le Christ s’est arrêté à Rome, un essai historico-religieux de 540 pages très documenté dont la thèse avance que le pouvoir religieux aux mains du Vatican discrédite le christianisme. La vocation de ce livre ressource n’est pas d’étayer les arguments des anticléricaux même s’il leur donnera à bien des endroits du grain à moudre. On y apprend par exemple, comment l’église a pu se révéler bien plus efficace que la répression policière et juridique.

Jean Rohou livre une réflexion nourrie sur l’attitude actuelle de l’Eglise figée dans ses dogmes, mais sa principale intention vise à l’ouverture d’un dialogue. Une voix originale à laquelle les grenouilles de bénitiers resteront sourdes. Une partie de la notabilité catholique française, et ce qui reste des militants sociaux et des intellectuels chrétiens devraient plus aisément se retrouver dans ce regard athée, dont les valeurs de gauche poussent à reconnecter les principes de l’Evangile aux sphères sociales et politiques dans le respect des valeurs laïques de 1905.

Comment vous est venue l’envie d’écrire ce livre ?

Quelle idée, en effet, pour une personne athée comme moi, de se lancer dans une telle aventure à un moment où l’église n’a apparemment plus beaucoup de pouvoir. Je l’ai fait pour des raisons politiques. Parce que moi je vis dans une société merveilleuse faite pour les gens qui ont les moyens mais cette société est arrivée aujourd’hui à un stade d’inégalité inadmissible. Je pense que nous traversons une époque dangereuse, et les aggravations attendues liées à la crise et au changement profond pour l’Occident qui doit accepter de ne plus tenir le premier rôle dans les affaires du monde ne sont pas là pour nous rassurer. Je crois par ailleurs que la pensée critique à l’égard de l’église qui anime ce livre est celle de beaucoup de chrétiens.

Vous semblez vous adresser en premier lieu aux chrétiens, pourquoi ce choix ?

La révolution sociale liée aux inégalités n’est pas concevable pour la simple raison que la classe dominante détient tous les pouvoirs : social, financier, médiatique, policier et militaire. S’il y a révolte, ils répondront par des gouvernements autoritaires. On observe déjà une montée du totalitarisme très préoccupante au sein de l’Europe. Une réponse nationaliste et xénophobe se met en place sur tout le continent. Pour y faire face, il faut parvenir à une alliance de tous les groupes sociaux qui sont porteurs d’un idéal de générosité. Cette force liée à l’évolution des consciences a déjà existé. C’est ainsi que les mouvements sociaux ont pu s’imposer face aux décideurs en 36 et en 68. Parmi ceux qui ont un message de générosité il y a les chrétiens. A condition qu’ils suivent le second des « Dix Commandements » : tu aimeras ton prochain comme toi-même. Ce qu’il y a de plus remarquable dans l’attitude du Christ, c’est son refus de toutes les discriminations sociales, envers les pauvres et les réprouvés.

Vous revenez sur la construction du pouvoir religieux dont la conversion de l’Empereur Constantin marque une étape majeure…

Toutes les inventions qui marchent sont récupérées par celui qui détient le pouvoir social. C’est ainsi que l’Empereur romain Constantin s’est converti au christianisme et que l’église est devenue une administration du pouvoir. Mais cette soumission va fausser l’esprit de l’Evangile. « Quand le pouvoir devient chrétien ce n’est pas le pouvoir qui se christianise, c’est le christianisme qui prend tous les plis du pouvoir » disait le père Cardonnel. Tandis que pour l’Abbé Pierre, l’attachement de l’Eglise au pouvoir temporel transforme souvent la religion de l’amour en doctrine de haine et de violence.

Le père Cardonnel bien connu à Montpellier prêchait en 68 sur le thème Evangile et révolution. Où en est la doctrine sociale de l’Eglise ?

En leur temps, les prêtres ouvriers ont soulevé de l’enthousiasme. Ils étaient populaires contre la volonté des cardinaux. Il en va de même pour la théologie de la libération en Amérique latine qui a été contrée par le Vatican.

Depuis Léon XIII (1810-1903), l’Eglise a une doctrine sociale. Ce serait très bien si l’Eglise la mettait en œuvre pour redonner crédit au christianisme. Mais quand l’Eglise condamne l’injustice ce n’est qu’en paroles. Elle ne prend jamais position contre l’exploitation. Aujourd’hui Benoît XVI semble plus soucieux de l’orthodoxie religieuse que de la réduction des égalités. Figé sur ses principes moraux le Vatican est complètement dépassé.

Vous avez confié votre préface à l’archevêque de Poitiers Mgr Albert Rouet qui admet la présence pesante de l’Eglise en lui accordant le mérite de constituer un peuple. Partagez-vous ce regard ?

Mgr Rouet a une vision progressiste de l’Eglise qui ne le met pas dans les bons papiers du Vatican. L’idée du peuple des chrétiens ne me semble plus opérante aujourd’hui et quand cela a été le cas, cette vision soumettait la population sous la hantise du péché. Essayez d’expliquer ce qu’était le péché à un jeune d’aujourd’hui vous rencontrerez les limites de votre pédagogie.

Jean-Marie Dinh

Le Christ s’est arrêté à Rome, éditions Dialogues, 27 euros.

Jean Rohou donnera une conférence sur le thème de son livre à la médiathèque centrale E. Zola le 3 février à 18h30.

Voir aussi : Rubrique Religion Laïcité République et Histoire la sainte trinité, rubrique Société Qui a-t-il sous la burqa ?, La question religieuse dans l’espace social, rubrique On line Paroles d’évêque, Le Monde Avignon Le prélat de la discorde,

La guerre des riches commence au Fouquet

Les Pinçon Charlot dévoilent le fonctionnement des élites. Photo Louis Monier.

On les surnomme les Pinçon Charlot. Ce couple de sociologues, anciens directeurs de recherche au CNRS rattachés à l’Institut de recherche sur les sociétés contemporaines (Iresco), s’est fondé une réputation singulière d’ethnologues de la bourgeoisie. Depuis bientôt trente ans, ils innovent dans le champ sociologique en orientant leurs recherches sur le fonctionnement oligarchique de la classe dominante française. Invités par Les Amis de l’Humanité, ils présentaient mercredi à Montpellier leur dernier ouvrage Le président des riches.

Partout en France, la tournée des Pinçon Charlot déplace des foules. A Montpellier, le débat très participatif a réuni 350 personnes à la salle Guillaume de Nogaret. C’est que le livre tombe plutôt à pic au moment où le chef de l’Etat s’apprête à endosser son costume de président du peuple…

Si une majorité de Français ne semblent spontanément pas prêts à prendre ce mirage pour argent comptant, l’ouvrage des Pinçon Charlot, n’en demeure pas moins fort éclairant sur l’état d’un pays totalement livré aux grandes fortunes. Il démontre aussi que l’échec espéré de Sarkozy en 2012 ne sera pas suffisant pour changer la donne.

Prise de pouvoir politique

Les travaux précédents du couple de chercheurs tendaient à démontrer que derrière les concepts flous de Hedge fund, stock option, loi du marché… il existe bien des agents sociaux, faits de chair et d’os. « Nous cherchions à comprendre le sens. A savoir comment la reproduction des privilèges les plus insensés et les plus arbitraires bénéficiaient toujours aux mêmes familles. »

L’idée de ce livre est apparue le 6 mai 2007. « Avec la fête du Fouquet une nouvelle ère s’est ouverte. Au regard du cynisme d’une violence inouï que cette élite affiche, on est passé de la lutte des classes à la guerre des classes, explique Monique Pinçon- Charlot. Après s’en être pris au système de protection social, et avoir détruit les forces syndicales comme celles des partis qui portaient la voix des classes populaires, les patrons du Cac 40 sont venus fêter aux yeux de tout le monde leur prise de pouvoir politique. »

Tous les jours Noël

Effarés les Pinçon Charlot décident de tenir au jour le jour la chronologie de ce capitalisme décomplexé. De la défiscalisation complète des droits de succession aux gros chèques en passant par le bouclier fiscal et la reconnaissance symbolique des légions d’honneur la liste est longue. « Il n’y a quasiment pas un jour sans tour de passe-passe pour gaver les déjà gavés. Avec l’attaque continue des droits sociaux, c’est le seul terrain où Sarkozy a été constant.» Les auteurs se plongent à nouveaux dans les mailles sophistiqués du trico des réseaux oligarchiques. « Ceux de Sarko et de DSK se recoupent de manière tout à fait préoccupante », constate Michel Pinçon qui rappelle aussi que la recette du FMI appliquée aux « pays défaillants » de l’UE est la même que pour les pays du Sud.

Que faire des riches ?

Les sociologues en arrivent à la conclusion partagée par ne nombreux économistes qu’un changement radical urgent s’impose. Il implique de rester vigilant à ce qui se passe, de favoriser la diversité du personnel politique, de nationaliser le système bancaire et de supprimer les bourses. Mais que faire des riches ? Les imiter suggère le couple. Pas pour devenir riche. Mais pour fonder une solidarité susceptible d’unir les multiples forces de gauche perdues dans leurs divisions. « La puissance de l’élite c’est la solidarité. Elle est leur atout essentiel dans cette guerre des classes qu’ils sont en train de gagner.

Jean-Marie Dinh

Le président des riches, éditions Zone, 14 euros.

Voir aussi : Rubrique Finance, CAC 40 : 40 milliards de dividendes en 2011, rubrique Economie, rubrique Livre, Rencontre surréaliste entre le Marx et le Père Noël, rubrique Mouvements sociaux,

Edwy Plenel : Une leçon de démocratie à la Paillade

kaina-tv

L'équipe de Kaïna.Tv au travail : Photo Defi

Dans le sillage de la chorégraphe Mathilde Monnier, d’Alain Plombat, le Pdg du Midi-Libre et du préfet Claude Baland, c’est Edwy Plenel qui était mardi l’invité de l’émission « Viens chez moi j’habite à la Paillade. » On pourra bientôt la visionner sur le site de Kaïna-tv, la web TV créée par Akli Alliouat qui valorise les initiatives locales et l’expression des habitants de la Paillade.

Centre commercial Saint-Paul au cœur de la cité pailladine, le studio s’improvise au café-resto Le Mirador. « Vous avez mené une enquête fouillée sur moi », plaisante le directeur de Médiapart à l’adresse des jeunes avec lesquels il s’apprête à débattre.

Ca tourne ! Les animateurs précisent d’entrée qu’ils ne sont pas journalistes, se situant avant tout, comme des habitants du quartier. Ce à quoi la fine plume répond que notre époque impose aux pros de descendre de leur estrade pour se mêler aux amateurs. A la différence de la majorité de ses confrères, il affirme croire au journalisme citoyen ce qui justifie sa présence dans le quartier.

La question de la ségrégation dont les habitants sont ici victimes est évidemment soulevée. Elle permet à Edwy Plenel d’enfourcher l’un de ses chevaux de bataille favori : la critique du pouvoir et la restauration de la démocratie. « Je n’hésite jamais à dire, y compris à ceux pour qui c’est difficile à entendre, qu’historiquement notre France est d’origine étrangère. Sous l’occupation, la majorité des gens qui étaient avec De Gaule n’auraient pas de papier aujourd’hui

Ses interlocuteurs le lancent sur le déjà très piteux bilan du quinquennat Sarkozy. « Ma critique ne porte pas sur l’homme, précise Plenel, mais sur le système présidentiel qui permet au chef de l’Etat de faire absolument ce qu’il veut. Au point de nous faire oublier que c’est à nous de faire vivre la démocratie. La démocratie ne doit pas être dictée par l’agenda présidentiel. C’est très concret la démocratie, cela concerne le partage qui se situe au cœur de la question sociale. »

L’orateur est maintenant lancé, il devance les questions. Il est passé au débat sur l’identité nationale. « Une diversion du gouvernement pour échapper à la question sociale. Une façon de ramener chacun à son identité et un moyen pour oublier les conditions que l’on a en commun. » Le rôle des médias, Montaigne, La Boétie, l’esprit des fondateurs de la loi de 1905 sur la laïcité, la nature profonde du racisme… Les sujets s’enchaînent dans la bouche de l’invité. On boit ses paroles, on admire l’intelligence des propos.

« Je ne porte pas un regard aussi pessimiste que vous sur la situation », réplique avec sympathie l’homme de médias aux jeunes qui s’inquiètent du formatage des esprits et du peu d’issues qui s’offrent à eux. « La peur est brandie par le pouvoir pour dire à la population ayez peur, nous nous occupons du reste. Il faut dire nous n’avons pas peur, ne pas rester coller au mur, la République n’est pas figée, elle est en mouvement. » La soirée s’achève. Edwy a un autre rendez-vous, il est parti avant l’heure du couvre-feu.

Jean-Marie Dinh

Voir aussi : Rubrique Médias Médias banlieue et représentations , entretien avec Stéphane Bonnefoi rubrique Politique locale : Un îlot de soleil sous un ciel menaçant Petit Bard Pergola rénovation urbaine, rubrique Justice Les rois du Petit bard, Délinquance en col Blanc rubrique Livre Démocratie de quartier et légitimité politique,

Dissensions après les élections consulaires

Les deux têtes de liste

Les deux têtes de liste

Elections à la CCI de Montpellier : La liste Iovino dénonce des disfonctionnements massifs.

La mise en place du bureau et l’élection de la présidence de la CCI de Montpellier s’est tenue hier dans une atmosphère peu coutumière. La tête de liste de l’équipe CCI autrement Gabrielle Deloncle (CGPME) a été intronisée à huis clos, tandis qu’à l’extérieur une quarantaine de patrons de la liste adverse (soutenu par le Medef) battaient le pavé pour marquer leur désapprobation, le tout, sous l’œil vigilant des forces de l’ordre.

Un cadre ubuesque lié aux élections consulaires tenues en novembre et décembre dernier. Cette campagne à suspense s’était déroulée à couteaux tirés, tenant en haleine les observateurs jusqu’à la dernière minute. Le soir du dépouillement, crédité d’une avance confortable, le candidat Medef MPR sortant Rudy Iovino avait commencé à fêter sa victoire mais le champagne devait prendre le goût d’une potion amère avec l’arrivée de centaines de voix obtenues par vote électronique en faveur de l’équipe menée par Gabrielle Deloncle. Un retournement de situation qui devait finalement donner la victoire à la chef d’entreprise et élue communautaire.

Depuis sa publication, ce résultat entraîne une forte contestation dans le camp Iovino qui ne se prive pas de dénoncer  » la façon douteuse dont se sont déroulées les élections consulaires » pourtant sous le patronage de la commission de dépouillement préfectorale en charge de l’organisation du scrutin. Le 15 décembre, le préfet de l’Hérault, Claude Baland, a officialisé la victoire de la liste CCI autrement. Celle-ci l’emporte dans deux collèges sur trois : industrie et commerce et se voit attribuer 28 sièges, contre 22 pour l’équipe Poursuivons l’élan, majoritaire dans le collège services.

L’affaire est portée au pénal

Mais visiblement, la pilule ne passe toujours pas dans le camp Iovino. La manif de patrons avec sit-in (sic) qui s’est tenue hier visait à le démontrer. Le Medef, la Faduc, l’Umith et la Fédération du bâtiment de l’Hérault, font de la résistance?! Les 22 élus qui ont boycotté l’élection de la présidente devraient néanmoins assurer leurs responsabilités  » pour ne pas nuire à l’intérêt général « , précise le vice-président sortant Michel Fromont qui porte comme Rudy Iovino de sérieux soupçons sur « ces élections faussées. » Sa liste a déposé plusieurs recours. Elle demande l’annulation au TA et porte, attestation d’huissier à l’appui, l’affaire au pénal pour du matériel de vote ayant disparu, et une appropriation de voix de personnes qui n’auraient pas voté. Sans faire tourner les tables, il faudra notamment expliquer comment une électrice de Palavas a pu voter en novembre alors qu’elle est décédée en octobre.

« Ils veulent s’accrocher au pouvoir, leurs recours ne tiennent sur rien. D’ailleurs la préfecture a demandé le rejet de leurs requêtes qui ne sont fondées sur rien de solide » déclare pour sa part Gabrielle Deloncle. La nouvelle présidente entend se mettre très vite au travail afin de rendre les services de la CCI plus efficaces:  » Je suis sidérée de voir ces gesticulations qui pourraient être risibles si elles ne donnaient pas une image si triste de nos décideurs économiques » tacle encore Gabrielle Deloncle, ce en quoi elle n’a pas tout à fait tort…

Jean-Marie Dinh

Voir aussi : Rubrique Montpellier,

Un regard prospectif et sans fard sur le Languedoc-Roussillon

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Ses habitants le savent, parler du Languedoc-Roussillon c’est entrer en paradoxe. A commencer par la dimension bi-culturelle de l’espace territorial situé au Nord de la Méditerranée et au Sud de la France, dans la région, on se reconnaît davantage Languedocien ou Catalan. Georges Frêche en a fait l’amère expérience en accédant à la présidence du Conseil régional en 2004, souligne l’auteur, qui rappelle comment la population a rejeté le vocable « Septimanie » qu’on voulait lui imposer. Si le sentiment d’appartenance identitaire se situe au-delà des frontières administratives, on ne le trouve pas non plus dans une unité naturelle de l’espace en raison de forts contrastes géographiques qui traversent le territoire.

18,7% de la population régionale sous le seuil de pauvreté

L’élément socialement le plus reconnu et le plus valorisé, c’est la luminosité et la durée d’ensoleillement dans l’année.  Une qualité de vie très appréciée qui fait que la région connaît une des plus fortes croissances démographiques de France (+10,4%) derrière la Corse (+ 13%). « Au-delà de son image largement survalorisée par un véritable marketing médiatique, elle a de nombreux atouts mais pose aussi de nombreux problèmes. » C’est la région où se créent le plus d’entreprises mais où leur durée de vie est la plus courte. Première pour le taux de création d’emplois mais 14e pour le nombre d’emplois créés. Le PIB par habitant y est le plus faible de France. La pauvreté et la précarité se développent dans les zones urbaines et rurales où les difficultés de l’agriculture se répercutent avec une virulence particulière. Selon l’Insee 18,7% de la population régionale se trouvent sous le seuil de pauvreté.

La carte de l’innovation

La région joue son avenir dans l’innovation boostée par les pôles de compétitivité, soutient Roques. Mais beaucoup de projets se concentrent sur Montpellier dans l’agroalimentaire, la biologie-santé, l’environnement… Montpellier Agglomération veut devenir une référence pour les jeunes entreprises innovantes « un pari partiellement réussi » indique Georges Roques dont l’expérience européenne* lui fait dire aussi qu’il faut désormais travailler à une autre échelle  » a minima celle de la région, sinon de l’inter région « 

Déséquilibre de l’espace régional

Georges Roques démontre que l’occupation très inégale de l’espace régional est à l’origine de multiples fractures, entre l’urbain, le périurbain, le rurbain et le rural profond. L’hypertrophie de la capitale régionale dénote une croissance peu contrôlée qui conduit à des blocages y compris en terme de qualité de vie. « Montpellier a bien pris le pouvoir en région sur ses voisines, mais elle est trop petite en Europe et en Méditerranée. » On ne peut transférer à la région les recettes qui ont réussi à la ville de Montpellier tout comme on ne peut aborder les relations inter-régionales en considérant Toulouse et Marseille comme des « prédateurs » constate l’auteur en prenant de la distance.

Le livre de Georges Roques pourrait passer pour un pavé lancé dans la marre où se contemplent les acteurs publics de la région Languedoc-Roussillon. Il en dénonce l’image surfaite, évoque son dynamisme et pointe ses faiblesses. Mais l’intérêt de cet ouvrage n’est pas la polémique, il provient plutôt du regard synthétique que porte le géographe sur une multitudes d’indicateurs récents. Le travail de corrélation opéré par l’auteur permet de se faire une idée précise de la situation régionale et des défis qui s’offrent à elle pour les prochaines décennies.

Jean-Marie Dinh

Voir aussi : Rubrique Montpellier, rubrique On line, L’enquête de Montpellier journal, Les montants cachés des relations médias politiques,