Comment le « big data » est utilisé dans les campagnes électorales américaines

BIG-DATAAller sonner à la bonne porte, envoyer le bon tract à la bonne personne, lui présenter l’argument qui fera mouche, en d’autres termes mener des campagnes ultra-ciblées, c’est désormais l’une des clés de la victoire dans les campagnes électorales. La démarche est apparue aux Etats-Unis, en 2002, lors de la campagne de Mitt Romney prétendant au poste de gouverneur du Massachusetts.

Depuis une dizaine d’années la pratique s’est répandue, atteignant des sommets lors des campagnes 2008 et 2012 ; au point qu’un secteur entier dédié aux campagnes ciblées a émergé.

L’un des principaux outils disponibles actuellement s’appelle NationBuilder. Créé en 2009 par Jim Gilliam aux Etats-Unis, ce logiciel sert donc à rationaliser et à optimiser le travail des militants. Dans le cadre des primaires américaines, trois candidats l’utilisent déjà : les Républicains Rick Santorum et Ben Carson, et le démocrate Bernie Sanders.

Comment cet outil fonctionne-t-il ?

Les militants ne vont plus aller tracter de façon aléatoire, mais vont cibler leur action grâce à une cartographie permettant de repérer les zones abstentionnistes, celles qui sont favorables ou défavorables au candidat selon ses promesses – par exemple, une zone lointaine des espaces verts pour un candidat qui soutient un projet de parc…

En outre, le logiciel contient des données sur les électeurs ; du coup, le jour de l’élection, ces informations permettent aux militants qui suivent la participation grâce aux observations de « scrutateurs » (des personnes chargées de surveiller le dépouillement des élections) dans les bureaux de vote de réagir.

Plusieurs moyens d’approche sont possibles : soit en rédigeant des mails « optimisés » grâce à un système de tests A/B – deux versions différentes de courriels sont envoyées à deux panels de sympathisants et un bilan est réalisé pour savoir laquelle des deux versions est la plus efficace (mails ouverts, clics sur la pièce-jointe, réponse…). Soit, encore plus efficace, en envoyant des SMS aux hésitants des zones de faible participation pour les convaincre de se rendre aux urnes et en adaptant le message selon que les citoyens sont des noirs, des femmes, des retraités…

De 29 à 999 dollars par mois

Le logiciel coûte de 29 à 999 dollars par mois, selon la taille de la base de données à stocker, selon aussi le nombre de sites disponibles (ils sont créés à partir de l’interface) et selon le service après-vente désiré (conseil stratégique, support technique…).

Les données sont ici le nerf de la guerre. Nation Builder se vante de « collecter des informations sur n’importe quelle personne qui interragit avec la campagne » électorale. Concrètement, comment sont collectées ces précieuses informations ?

Il y a quatre sources principales de données : celles collectées par les militants, celles des internautes, celles disponibles publiquement et celles achetées aux entreprises.

  • Les militants

Le logiciel intègre des données classiquement recueillies par les militants lors des porte-à-porte et des opérations de mobilisation : meetings, conventions, marchés, etc. Ces informations de première main (elles permettent d’avoir une approche assez fine sur l’engagement potentiel des « contacts ») ont longtemps constitué l’essentiel des données à disposition des partis. Une époque désormais révolue.

Les militants peuvent aussi être incités à aller chercher les sympathisants sur les réseaux sociaux mais le traitement des données et leur utilisation relèvera davantage du logiciel et/ou de l’équipe web dédiée au sein de l’équipe de campagne.

  • Les internautes

Autre source de données : le(s) site(s) dédié(s) à chaque candidat et fourni(s) par la plateforme. Du côté visible par les internautes, le sympathisant peut remplir un formulaire d’engagement puis partager cette promesse d’engagement sur les réseaux sociaux. Côté organisateurs de la campagne, l’interface devient un tableau de données, un « panneau de contrôle », avec des actualisations en temps réel des votes, des dons ou des promesses d’engagement.

Chaque visiteur sur le site aura ainsi une fiche comprenant ses coordonnées et son activité sur les réseaux sociaux que le site intègre automatiquement à partir de l’adresse mail d’origine utilisée pour créer ces comptes : photos, amis, intérêts, nombre de suiveurs…

L’idée sous-jacente de cette industrie émergente du « big data électoral » est que chaque action en ligne crée des données. Il faut ensuite en tirer le meilleur parti ; d’où l’intérêt d’étiqueter et de ranger les profils (selon qu’ils correspondent à des influenceurs, des bénévoles, des donateurs…). Au final, l’idée est d’envoyer les bénévoles et/ou les candidats de façon ciblée dans des quartiers où la concentration de profils « intéressants » est la plus forte.

  • Les données publiques

Les données concernant les votants américains sont « publiques » depuis le début des années 2000 (le Help American Vote Act a poussé en ce sens) mais il y a plus de 3 000 comtés aux Etats-Unis (les comtés et les villes sont responsables des inscriptions sur les listes électorales). Chacun a son propre mode de comptage, certains faxant encore les résultats, d’autres les faisant payer jusqu’à 10 000 dollars (environ 9 000 euros). Selon Nation Builder, le coût total pour acquérir l’ensemble des données électorales américaines dépasse les 100 000 dollars. Bref, elles sont en réalité difficilement accessibles et peu exploitables.

Sans compter qu’elles comprennent des erreurs dues au manque de normes communes entre les comtés. Il est ainsi apparu en 2012 que 1,8 million d’Américains décédés étaient encore inscrits sur les listes électorales et que 2,75 millions de votants étaient inscrits dans plusieurs Etats.

Résultat, seuls les grands partis pouvaient se permettre de mobiliser des équipes pour recueillir et analyser les données, chacun gardant précieusement son trésor de guerre. Les entreprises comme Nation Builder sont entrées dans la danse et vendent leurs services à tous les candidats.

Cette dernière prétend avoir nettoyé, harmonisé et trié les données relatives à 170 millions de votes dans 50 Etats, à un degré de précision impensable chez nous : sur les fichiers électoraux américains, on trouve en effet l’identité de l’inscrit et ses contacts, sa participation aux scrutins précédents, mais aussi son origine ethnique et sa sensibilité politique (déclaratif).

  • Les données privées

En plus d’être de véritables supports de campagne, les réseaux sociaux représentent une source non négligeable de données potentiellement utiles. Ils sont mis à profit pour déterminer quels thèmes ou quelle expression en vogue peuvent emporter le cœur des électeurs. L’équipe de « data scientists » de Mitt Romney a par exemple repris des modèles prédictifs utilisés par les traders sur les marchés financiers pour évaluer l’influence d’une « variable » sur un mouvement général (d’opion ou de marché).

Certains fournisseurs de données vont encore plus loin dans l’intrusion dans la vie privée. Buxton, entreprise spécialisée dans l’analyse de données à des fins marketing (où implanter un nouvel emplacement pour une chaîne de fast-food par exemple) a travaillé pour Mitt Romney. Grâce au travail de Buxton, le candidat républicain, précurseur dans l’utilisation des données, a pu cibler les donateurs en se basant sur des informations aussi précises que les crédits d’un citoyen, le nombre de ses enfants ou ses croyances religieuses.

Ces informations sont souvent issues de bases de données marketing, qui se vendent de façon parfaitement légale, et se nourrissent des informations que les internautes acceptent de laisser disponibles.

« Phoning » et « mailing » se comptent en millions

Cette appétence pour le « data mining » (exploration de données) est aussi notable côté démocrate dont les forces sont montées en puissance entre la première et la deuxième campagne d’Obama.

Déjà en 2008, les chiffres étaient impressionnants : 3 millions d’appels passés aux électeurs, une base email de 13 millions d’Américains, quelques 223 millions de données les concernant. Et au final, une campagne payante : les Américains ont versé 500 millions de dollars (environ 460 millions d’euros) de dons au candidat démocrate.

Blue State Digital, concurrent de Nation Builder aux Etats-Unis et comme lui fondé par des Bostoniens passés par le MIT (en français, l’Institut de technologie du Massachusetts) a été en charge du volet « soutiens en ligne » des campagnes d’Obama depuis le début.

Il a été en charge, avec d’autres intervenants, de la gestion de l’outil avec lequel le candidat démocrate s’est équipé en 2012, un outil décrit comme « mythique » par les acteurs du secteur : le logiciel Narwhal.

Ce dernier permet par exemple de croiser d’un côté des fichiers commerciaux de la même nature que ceux dont disposait Buxton, mais beaucoup plus précis, avec de l’autre côté la liste des votants de la dernière élection. Ceux qui n’avaient pas voté pouvaient être considérés comme un vivier potentiel de voix, atteignables individuellement.

Selon certains observateurs, le nombre d’entrées pour chaque profil cabotait autour de 300, des abonnements du votant à des magazines, en passant par ses dons à des associations jusqu’à la marque de son téléphone portable.

Problème, si les politiques profitent des nouvelles normes en matière d’accès aux données, elles ne font pas toujours, elles, figures de transparence. Les levées de fonds du parti républicain restent un secret jalousement gardé.

L’équipe de campagne de Barack Obama a décidé de faire un premier pas vers un échange à deux sens de l’information : elle a rendu publique la liste de ses donateurs (pour tout don supérieur à 200 dollars) lors de la cérémonie d’investiture.

Mathilde Damgé

Source : Le Monde.fr 09/11/2015

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« Nous préparons la plus grande action de désobéissance pour le climat »

arton8311-8fdd3La Coalition Climat 21, « l’un des plus grands regroupements pour la justice climatique qui aient été mis en place », a prépare des mobilisations pendant la COP21. L’artiste et activiste John Jordan dévoile les grandes lignes des actions visant à « avoir le dernier mot ».

Figure des milieux alternatifs depuis une vingtaine d’années, John Jordan fait la jonction entre le monde de la création et celui de l’activisme. Après un parcours dans l’art et le théâtre, il a impulsé le mouvement altermondialiste Reclaim the streets en Angleterre, avant de cofonder puis de déserter l’armée des clowns, dont les brigades de joyeux activistes ont essaimé dans le monde. Depuis quelques années, il est installé en Bretagne, et pilote avec Isabelle Frémeaux le Laboratoire d’imagination insurrectionnelle (Labofii), une sorte d’incubateur d’idées mêlant activisme politique et création artistique. Rencontre avec un personnage hors cadre et hors norme, au cœur du bocage de Notre-Dame-des-Landes.

John Jordan, Notre-Dame-des-Landes, 13 octobre 2015.

Reporterre – Pourquoi mêler art et activisme ?

John Jordan – Je pense qu’on doit toujours renouveler les formes que prennent les luttes. L’État et la police s’adaptent souvent ; il faut sans cesse nous réinventer. L’armée des clowns est née de cette réflexion. Le personnage du clown est désobéissant, il questionne toujours le pouvoir. Et il est un être hypersensible. Pour moi, le militantisme commence avec la sensibilité, aux injustices par exemple. Par ailleurs, le temps militant et le temps artistique sont très différents. Dans le militantisme, tout va vite car il y a urgence à agir. Il en va autrement pour le temps artistique : tu peux passer des années sur une recherche. Depuis 20 ans je tente de mêler art et activisme, d’appliquer le côté créatif et artistique à l’action directe et à la désobéissance civile. Aujourd’hui, avec le Labofii, on essaye de créer des formes d’actions belles, inattendues, nouvelles. Et efficaces.

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Quelle différence fais-tu entre action directe et désobéissance ?

L’action directe, c’est le fait d’agir directement sur un problème : si tu vois des gens à la rue, tu n’écris pas une lettre à ton élu, tu agis toi-même et tu ouvres un squat. La désobéissance civile est souvent plus symbolique. Par exemple, lors de la lutte pour les droits civiques aux États Unis, le boycott des bus était de l’action directe alors que les marches de Selma étaient, selon moi, de la désobéissance. Dans le cadre de la conférence sur le climat en décembre à Paris, on utilise le terme de désobéissance civile, car les actions vont entrer plutôt dans ce cadre .

Sur la COP justement, quels sont les objectifs de la Coalition Climat 21 ?

La Coalition Climat 21 est un des plus grands regroupements pour la justice climatique qui aient été mis en place, avec environ 150 organisations, ONG, syndicats ainsi que des groupes plus radicaux, comme Climate Justice Action (CJA). Trois moments sont prévus : une grande marche le 29 novembre, un week-end de présentation des alternatives les 5 et 6 décembre, et une journée d’actions le 12 décembre. Dès à présent, il est clair que les gouvernements sont en train de négocier un accord au rabais : il n’aura pas pour objectif de plafonner le réchauffement planétaire à 2°C, comme c’est nécessaire, mais probablement plus. L’objectif de la Coalition est d’avoir le dernier mot, car c’est le peuple qui a les solutions, et sûrement pas les gouvernements, achetés par les multinationales du pétrole, de la croissance, etc. Rappelons que la COP est financée par 35 sponsors dont Engie, Nissan, EDF, Suez…

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Qui compose Climate Justice Action ?

CJA est un réseau de mouvements écologiques radicaux. Il y a des gens issus des Camps climat, de Blockupy, des personnes et des mouvements qui luttent contre des grands projets inutiles et imposés… C’est vraiment la base anticapitaliste du mouvement.

Concrètement, qu’est ce qui se prépare ?

Tout simplement la plus grande action de désobéissance menée pour le climat !
Au-delà de la marche appelée par la Coalition le 29 novembre, des groupes comme CJA, Attac, 350.org, ou la Confédération paysanne ont pris en main des actions prévues à la fin de la COP. Le pire serait que le 12 décembre, François Hollande parade dans les médias en disant qu’il est l’homme qui a sauvé la planète, alors qu’en 20 ans, les émissions de CO2 ont augmenté de 63 %. Le 12 décembre va matérialiser notre refus par une action autour des Red lines (télécharger à droite le document de présentation, en anglais), ainsi qu’avec un autre outil, les Climates Games.

Qu’est-ce que les Red Lines ?

Les Red Lines, c’est l’idée des « lignes rouges » qu’on ne peut pas franchir, qui définissent les limites nécessaires et minimales pour une planète juste et vivable. Chacun au sein du mouvement vient avec ses propres lignes, comme par exemple, « pas de marché carbone », ou encore « ne peut pas dépasser 1,5 °C de réchauffement »… Concrètement, le projet est de faire exister ces lignes avec des structures gonflables. On va encercler la COP avec des milliers de corps désobéissants, bloquer les routes et le transport pendant la dernière plénière. Nous voulons détourner l’attention médiatique des négociations vers les mouvements. Car la COP va être la grande fausse solution.

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Et les Climates Games ?

Il s’agit d’un outil ludique développé il y a deux ans à Amsterdam par un groupe qui s’appelle Groen Front. Cet outil mélange l’Internet et la rue, et l’un de ses buts est d’amener de nouvelles personnes à la désobéissance et l’action directe. En amont, nous avons regroupé des artistes, des activistes, des hackers, des codeurs et des designers pour améliorer l’outil lors de trois sessions. Il y aura des équipes constituées en groupes affinitaires, et une carte sur le Web mise à jour par les joueurs. Et il y a des cibles. Chaque équipe définit sa cible et son action, puis en fait mention sur la carte. En face, il y a l’équipe bleue (la police), et les joueurs sont invités à indiquer les positions des bleus sur la carte. On a aussi imaginé des prix pour l’action la plus drôle, celle la plus inattendue, ou la plus efficace. C’est le côté pédagogique pour montrer comment élaborer une action efficace.

Des limites ont-elles été posées pour ces actions ?

Le mode d’action choisi, c’est la désobéissance créative, et il doit respecter la vie. Pour la journée du 12 décembre, il y a un consensus d’action, écrit et validé collectivement par 150 organisations, qui propose un cadre de désobéissance déterminée mais non-violente. Pour les Climate Games, il y a une équipe modératrice, et on sera un peu obligés de poser des règles. Tout dépend de la façon dont sont imaginées les actions : si elles sont ludiques et créatives, elles seront mises en lignes. Il ne s’agit pas d’une question morale, mais pour nous protéger, afin d’être encore en capacité de continuer dans les années à venir.

« Conscientiser les gens ne suffit pas, il faut créer des leviers qui influent sur les profits »

Quelle perspective ce mouvement a-t-il après la COP ?

La COP n’est qu’une étape. En 2016, nous avons prévu de mener une série d’actions de masse contre les infrastructures des énergies fossiles et les grands projets inutiles. Il y aura des grandes journées de blocages massifs prévues au printemps.

Pour être efficace, l’action directe doit toucher à l’argent : cela coûte beaucoup d’argent de militariser une zone pour protéger des projets imposés. C’est ainsi qu’en Angleterre, on a réussi à faire capoter 700 projets d’autoroutes. Conscientiser les gens ne suffit pas, il faut créer des leviers qui influent directement sur les profits. Et créer une culture de résistance qui soutienne ces actions de désobéissance, pour montrer que c’est possible.

Quelles sont les revendication politiques portées par les Climate Games ?

Les Climate Games sont juste un outil. Mais on peut penser que ce sont la désobéissance et l’action qui changent le monde et non pas les partis politiques ou les gouvernements. Si on revendique quelque chose, c’est : « Nous sommes la Nature qui se défend. » L’important, c’est d’avoir ces deux pôles complémentaires et indispensables que sont la création d’alternatives et la résistance. En ça, l’idée de ZAD, qui incarne la réunion de ces deux aspects, est un exemple parfait.

Pour toi, comment être plus efficaces dans les luttes ?

En créant des liens, des bordures entre les espaces de lutte. Les endroits les plus forts sont les lisières. Les haies, le littoral, les frontières entre forêts et prairies, là où il y a la plus grande biodiversité. Il y a, dans ces espaces, une force révolutionnaire et créative : c’est dense, solide et résilient. La beauté d’un lieu et d’une lutte comme Notre-Dame-des-Landes, c’est d’être une lisière entre agriculteurs, squatteurs, militants… À nous d’adapter nos stratégies aux situations, sans tomber dans les automatisme, afin de créer et maintenir le rapport de force.

- Propos recueillis par Isabelle Rimbert

 

Source Reporterre 22/10/2015 / Entretien avec John Jordan

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Morozov : « Internet est la nouvelle frontière du néolibéralisme »

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Selon le chercheur et essayiste Evgeny Morozov, la technologie sert le néolibéralisme et la domination des Etats-Unis. « Il faut considérer la Silicon Valley comme un projet politique et l’affronter en tant que tel », dit-il.

Evgeny Morozov s’est imposé en quelques années comme l’un des contempteurs les plus féroces de la Silicon Valley. A travers trois ouvrages – « The Net Delusion » (2011, non traduit en français), « Pour tout résoudre, cliquez ici » (2014, FYP éditions) et « Le Mirage numérique » (qui paraît ces jours-ci aux Prairies ordinaires) –, à travers une multitudes d’articles publiés dans la presse du monde entier et des interventions partout où on l’invite, il se fait le porteur d’une critique radicale envers la technologie en tant qu’elle sert la domination des Etats-Unis.

A 31 ans, originaire de Biélorussie, il apprend toutes les langues, donne l’impression d’avoir tout lu, ne se trouve pas beaucoup d’égal et maîtrise sa communication avec un mélange de charme et de froideur toujours désarmant.

L’écouter est une expérience stimulante car il pense largement et brasse aussi bien des références historiques de la pensée (Marx, Simondon…) que l’actualité la plus récente et la plus locale. On se demande toujours ce qui, dans ses propos, est de l’ordre de la posture, d’un agenda indécelable, ou de la virtuosité d’un esprit qui réfléchit très vite, et « worldwide » (à moins que ce soit tout ça ensemble).

Nous nous sommes retrouvés dans un aérogare de Roissy-Charles-de-Gaulle, il était entre deux avions. Nous avons erré pour trouver une salade niçoise, car il voulait absolument une salade niçoise.

Rue89 : Est-ce qu’on se trompe en ayant l’impression que vous êtes de plus en plus radical dans votre critique de la Silicon Valley ?

Evgeny Morozov : Non. Je suis en effet plus radical qu’au début. Mais parce que j’étais dans une forme de confusion, je doutais de ce qu’il fallait faire et penser. J’ai aujourd’hui dépassé cette confusion en comprenant que la Silicon Valley était au centre de ce qui nous arrive, qu’il fallait comprendre sa logique profonde, mais aussi l’intégrer dans un contexte plus large.

Or, la plupart des critiques ne font pas ce travail. Uber, Apple, Microsoft, Google, sont les conséquences de phénomènes de long terme, ils agissent au cœur de notre culture. Il faut bien comprendre que ces entreprises n’existeraient pas – et leur modèle consistant à valoriser nos données personnelles serait impossible – si toute une série de choses n’avaient pas eu lieu : par exemple, la privatisation des entreprises télécoms ou l’amoncellement de données par d’énormes chaînes de grands magasins.

Cette histoire, il faut la raconter de manière plus politique et plus radicale. Il faut traiter cela comme un ensemble, qui existe dans un certain contexte.

Et ce contexte, c’est, il faut le dire, le néolibéralisme. Internet est la nouvelle frontière du néolibéralisme.

Le travail critique de la Silicon Valley ne suffit pas. Il faut expliquer que le néolibéralisme qu’elle promeut n’est pas désirable. Il faut expliquer que :

  • A : le néolibéralisme est un problème ;
  • B : il y a des alternatives.

Il faut travailler à l’émergence d’une gauche qui se dresse contre ce néolibéralisme qui s’insinue notamment par les technologies.

Le travail que fait Podemos en Espagne est intéressant. Mais voir les plateformes seulement comme un moyen de se passer des anciens médias et de promouvoir un renouvellement démocratique ne suffit pas. Il faut aller plus en profondeur et comprendre comment les technologies agissent sur la politique, et ça, Podemos, comme tous les mouvements de gauche radicale en Europe, ne le fait pas.

Mais vous voyez des endroits où ce travail est fait ?

En Amérique latine, on voit émerger ce type de travail. En Argentine, en Bolivie, en Equateur, on peut en voir des ébauches.

En Equateur par exemple, où la question de la souveraineté est essentielle – notamment parce que l’économie reste très dépendante du dollar américain -,- on l’a vue s’articuler à un mouvement en faveur d’une souveraineté technologique.

Mais on ne voit pas de tels mouvements en Europe. C’est certain.

La Silicon Valley va au-delà de tout ce qu’on avait connu auparavant en termes d’impérialisme économique. La Silicon Valley dépasse largement ce qu’on considérait auparavant comme les paragons du néolibéralisme américain – McDonald’s par exemple – car elle affecte tous les secteurs de notre vie.

C’est pourquoi il faut imaginer un projet politique qui rénove en fond notre conception de la politique et de l’économie, un projet qui intègre la question des infrastructures en garantissant leur indépendance par rapport aux Etats-Unis.

Mais si je suis pessimiste quant à l’avenir de l’Europe, c’est moins à cause de son impensée technologique que de l’absence flagrante d’esprit de rébellion qui l’anime aujourd’hui.

Mais est-ce que votre dénonciation tous azimuts de la Silicon Valley ne surestime pas la place de la technologie dans nos vies ? Il y a bien des lieux de nos vies – et ô combien importants – qui ne sont pas ou peu affectés par la technologie…

Je me permets d’être un peu dramatique car je parle de choses fondamentales comme le travail, l’éducation, la santé, la sécurité, les assurances. Dans tous ces secteurs, des changements majeurs sont en train d’avoir lieu et cela va continuer. La nature humaine, ça n’est pas vraiment mon objet, je m’intéresse plus à ses conditions d’existence.

Et puis je suis obligé de constater que la plupart des changements que j’ai pu annoncés il y a quelques années sont en train d’avoir lieu. Donc je ne pense pas surestimer la force de la Silicon Valley.

D’ailleurs, ce ne sont pas les modes de vie que je critique. Ce qui m’intéresse, ce sont les discours de la Silicon Valley, ce sont les buts qu’elle se donne. Peu importe si, au moment où j’en parle, ce sont seulement 2% de la population qui utilisent un service. Il se peut qu’un jour, ce soient 20% de la population qui l’utilisent. Cette possibilité à elle seule justifie d’en faire la critique.

D’accord, mais en vous intéressant à des discours, ne prenez-vous pas le risque de leur donner trop de crédit ? Dans bien des cas, ce ne sont que des discours.

En effet, on peut toujours se dire que tout ça ne marchera pas. Mais ce n’est pas la bonne manière de faire. Car d’autres y croient.

Regardez par exemple ce qui se passe avec ce qu’on appelle les « smart cities ». Quand vous regardez dans le détail ce qui est vendu aux villes, c’est d’une pauvreté confondante. Le problème, c’est que les villes y croient et paient pour ça. Elles croient à cette idée du logiciel qui va faire que tout fonctionne mieux, et plus rationnellement. Donc si la technologie en elle-même ne marche pas vraiment, le discours, lui, fonctionne à plein. Et ce discours porte un agenda propre.

Il est intéressant de regarder ce qui s’est passé avec la reconnaissance faciale. Il y a presque quinze ans, dans la suite du 11 Septembre, les grandes entreprises sont allées vendre aux Etats le discours de la reconnaissance faciale comme solution à tous leurs problèmes de sécurité. Or, à l’époque, la reconnaissance faciale ne marchait absolument pas. Mais avec tout l’argent des contrats, ces entreprises ont investi dans la recherche, et aujourd’hui, la reconnaissance faciale marche. Et c’est un énorme problème. Il faut prendre en compte le caractère autoréalisateur du discours technologique.

Quelle stratégie adopter ?

Il faut considérer la Silicon Valley comme un projet politique, et l’affronter en tant que tel.

Ça veut donc dire qu’un projet politique concurrent sera forcément un projet technologique aussi ?

Oui, mais il n’existe pas d’alternative à Google qui puisse être fabriquée par Linux. La domination de Google ne provient pas seulement de sa part logicielle, mais aussi d’une infrastructure qui recueille et stocke les données, de capteurs et d’autres machines très matérielles. Une alternative ne peut pas seulement être logicielle, elle doit aussi être hardware.

Donc, à l’exception peut-être de la Chine, aucun Etat ne peut construire cette alternative à Google, ça ne peut être qu’un ensemble de pays.

Mais c’est un défi gigantesque parce qu’il comporte deux aspects :

  • un aspect impérialiste : Facebook, Google, Apple, IBM sont très liés aux intérêts extérieurs des Etats-Unis. En son cœur même, la politique économique américaine dépend aujourd’hui de ces entreprises. Un réflexe d’ordre souverainiste se heurterait frontalement à ces intérêts et serait donc voué à l’échec car il n’existe aucun gouvernement aujourd’hui qui soit prêt à affronter les Etats-Unis ;
  • un aspect philosophico-politique  : on pris l’habitude de parler de « post-capitalisme » en parlant de l’idéologie de la Silicon Valley, mais on devrait parler de « post-sociale-démocratie ».

Car quand on regarde comment fonctionne Uber – sans embaucher, en n’assumant aucune des fonctions de protection minimale du travailleur –, quand on regarde les processus d’individualisation des assurances de santé – où revient à la charge de l’assuré de contrôler ses paramètres de santé –, on s’aperçoit à quel point le marché est seul juge.

L’Etat non seulement l’accepte, mais se contente de réguler. Est complètement oubliée la solidarité, qui est au fondement de la sociale-démocratie. Qui sait encore que dans le prix que nous payons un taxi, une part – minime certes – sert à subventionner le transport des malvoyants ? Vous imaginez imposer ça à Uber….

Il faut lire le livre d’Alain Supiot, « La Gouvernance par les nombres » (Fayard, 2015), il a tout juste : nous sommes passés d’un capitalisme tempéré par un compromis social-démocrate à un capitalisme sans protection. C’est donc qu’on en a bien fini avec la sociale-démocratie.

Ce qui m’intrigue, si l’on suit votre raisonnement, c’est : comment on a accepté cela ?

Mais parce que la gauche en Europe est dévastée ! Il suffit de regarder comment, avec le feuilleton grec de cet été, les gauches européennes en ont appelé à la Commission européenne, qui n’est pas une grande défenseure des solidarités, pour sauver l’Europe.

Aujourd’hui, la gauche a fait sienne la logique de l’innovation et de la compétition, elle ne parle plus de justice ou d’égalité.

La Commission européenne est aujourd’hui – on le voit dans les négociations de l’accord Tafta – l’avocate d’un marché de la donnée libre, c’est incroyable ! Son unique objectif est de promouvoir la croissance économique. Si la vie privée est un obstacle à la croissance, il faut la faire sauter !

D’accord, mais je repose alors ma question : comment on en est venus à accepter cela ?

Certains l’ont fait avec plaisir, d’autres avec angoisse, la plupart avec confusion.

Car certains à gauche – notamment dans la gauche radicale – ont pu croire que la Silicon Valley était une alliée dans le mesure où ils avaient un ennemi commun en la personne des médias de masse. Il est facile de croire dans cette idée fausse que les technologies promues par la Silicon Valley permettront l’émergence d’un autre discours.

On a accepté cela comme on accepte toujours les idées dominantes, parce qu’on est convaincus. Ça vient parfois de très loin. L’Europe occidentale vit encore avec l’idée que les Américains ont été des libérateurs, qu’ils ont ensuite été ceux qui ont empêché le communisme de conquérir l’Europe. L’installation de la domination idéologique américaine – de McDonald’s à la Silicon Valley – s’est faite sur ce terreau.

Il y a beaucoup de confusion dans cette Histoire. Il faut donc théoriser la technologie dans un cadre géopolitique et économique global.

En Europe, on a tendance à faire une critique psychologique, philosophique (comme on peut le voir en France chez des gens comme Simondon ou Stiegler). C’est très bien pour comprendre ce qui se passe dans les consciences. Mais il faut monter d’un niveau et regarder ce qui se passe dans les infrastructures, il faut élargir le point de vue.

Il faut oser répondre simplement à la question : Google, c’est bien ou pas ?

Aux Etats-Unis, on a tendance à répondre à la question sur un plan juridique, en imposant des concepts tels que la neutralité du Net. Mais qu’on s’appuie en Europe sur ce concept est encore un signe de la suprématie américaine car, au fond, la neutralité du Net prend racine dans l’idée de Roosevelt d’un Etat qui n’est là que pour réguler le marché d’un point de vue légal.

Il faut aller plus loin et voir comment nous avons succombé à une intériorisation de l’idéologie libérale jusque dans nos infrastructures technologiques.

Et c’est peut-être en Amérique latine, comme je vous le disais tout à l’heure, qu’on trouve la pensée la plus intéressante. Eux sont des marxistes qui n’ont pas lu Simondon. Ils se donnent la liberté de penser des alternatives.

Pour vous, le marxisme reste donc un cadre de pensée opérant aujourd’hui pour agir contre la Silicon Valley ?

En tant qu’il permet de penser les questions liées au travail ou à la valeur, oui. Ces concepts doivent être utilisés. Mais il ne s’agit pas de faire une transposition mécanique. Tout ce qui concerne les données – et qui est essentiel aujourd’hui – n’est évidemment pas dans Marx. Il faut le trouver ailleurs.

Xavier de La Porte

Source : Rue 89 04/10/2015
Voir aussi : Rubrique Médias, rubrique Economie, rubrique Internet, rubrique Science,

 

Le Figaro frappe un grand coup dans le numérique

 CCM Benchmarck était détenu à 60 % par Benoît Sillard. AFP

En entendant le nom « CCM Benchmark », peu connu du grand public, on ne comprend pas forcément l’importance de son rachat pour le groupe Le Figaro, jeudi 1er octobre. L’intérêt de la prise pour le groupe de presse est beaucoup plus évident lorsqu’on lit les adresses des sites spécialisés à très forte audience de CCM Benchmark : Commentcamarche, Le Journal du Net, L’Internaute ou Copains d’avant. Les deux groupes sont entrés en négociations exclusives.

« Cette acquisition nous permet de changer de dimension et de nous battre directement contre Facebook ou Orange en France », se félicite Marc Feuillée, directeur général du Figaro, qui revendique, avec CCM Benchmark, la place de « leader français des médias numériques ».

Les chiffres d’audience sont éloquents : dans le Web hors-mobile, CCM Benchmark occupait la 6e place en France (avec 19 millions de visiteurs uniques en juin selon Mediametrie-Netratings). Le Figaro pointait à la 15e place (avec 12 millions de visiteurs uniques environ), comme les groupes Le Monde et M6.

Dans le mobile, CCM Benchmark est actuellement classé 19e (avec 7,2 millions de visiteurs uniques), proche de groupes comme Le Monde, Yahoo! ou Wikimedia. Le Figaro était 10e (avec 8,2 millions).

Importance de l’investissement, pour Le Figaro

Le nouvel ensemble revendiquera près de 24 millions de visiteurs uniques dans le Web hors mobile, ce qui le placera à la 4e place en France, derrière le moteur de recherche américain Google (41 millions) et l’éditeur de logiciel Microsoft (35 millions), mais à portée du leader des réseaux sociaux Facebook (26 millions). Et devant l’opérateur télécoms historique français Orange (21 millions), ou des groupes comme le spécialiste du divertissement Webedia (19 millions), l’encyclopédie de Wikimedia (18 millions), le groupe de presse norvégien Schibsted éditeur de 20Minutes.fr et de Leboncoin.fr (17 millions) ou encore le distributeur en ligne Amazon (16 millions).

Le prix de la transaction indique aussi l’importance de l’investissement, pour Le Figaro et le secteur des médias français : son montant précis n’est pas communiqué mais CCM Benchmark avait assuré, fin 2014, avoir refusé des offres entre 150 et 200 millions d’euros. Le prix est aujourd’hui estimé entre 110 et 130 millions d’euros, selon une source proche du dossier citée par Les Echos. Si les comparaisons ont leurs limites, le prix de l’ensemble des titres du groupe L’Express-Roularta avait été évalué entre 50 et 70 millions d’euros, tandis que la plateforme de vidéo en ligne Dailymotion, « pépite » de l’Internet français, a été cédée à 80 % à Vivendi pour 217 millions d’euros.

La totalité de l’argent a été amené par le groupe d’aviation de Serge Dassault, propriétaire du Figaro, par l’intermédiaire la société Groupe Figaro, qui acquiert 95 % du capital de CCM Benchmark.

A l’image de l’allemand Axel Springer

Pour Le Figaro, racheter CCM Benchmark est d’abord un moyen de renforcer sa rentabilité : les activités d’information pratique et spécialisée et les sites thématiques ou de service sont financièrement plus attractifs que la presse d’information générale et d’actualité. Le groupe acquis, qui compte cent quatre-vingt-dix employés, affiche une marge opérationnelle de 25 % pour un chiffre d’affaires de 36 millions d’euros.

Or, Le Figaro était déjà bénéficiaire, ce qui n’est pas courant dans le secteur des médias : il revendique un résultat d’exploitation de 20 millions d’euros environ pour 500 millions de chiffres d’affaires, en 2014 et 2015. Le futur ensemble réalisera désormais 34 % de son chiffre d’affaires total dans le numérique, qui représentera 60 % de son bénéfice opérationnel.

« C’est la preuve qu’on peut rééquilibrer nos activités en tant que groupe de presse, grâce au numérique », affirme Marc Feuillée.

La stratégie du Figaro rappelle fortement celle d’un autre groupe de presse européen qui a fortement investi dans le numérique en se diversifiant dans les services : l’allemand Axel Springer. Celui-ci possède des titres de presse comme Die Welt ou Bild, mais aussi des quantités de sites thématiques et des plateformes comme Seloger.com, Aufeminin ou Marmiton.org. Il a racheté, mardi 29 septembre, le site Web américain d’économie Business Insider.

Savoir-faire

« Nous avons des marques de presse traditionnelle fortes et des diversifications pour aller chercher de la croissance », décrit M. Feuillée, qui reconnaît le parallèle avec Springer mais rappelle que Le Figaro suit cette voie depuis plusieurs années déjà. En effet, le groupe de presse de Serge Dassault a une histoire de rachat d’entreprises de services et de sites thématiques : il possède Cadremploi et des sites de petites annonces immobilières. Mais aussi de l’e-commerce avec la billetterie Ticketac ou La Chaîne météo, sans compter les annuaires comme Evene ou Le Conjugueur.

C’est ce savoir-faire qui a convaincu les propriétaires de CCM Benchmark, groupe indépendant né en 2007 du mariage de Commentcamarche et Benchmark (Journal du Net). Jusqu’ici, malgré des offres, ils avaient préféré garder les 60 % du capital : désormais, Benoît Sillard et Jean-François Pillou vendent mais ce dernier intègre la direction du Figaro.

Les titres de CCM Benchmark viennent renforcer le groupe Figaro dans des thématiques éditoriales qui sont autant de territoires publicitaires : l’actualité (avec lefigaro.fr et L’Internaute), le féminin (Madame Figaro et Le Journal des femmes), l’économie et la finance (Le Figaro Economie, Journal du Net, Droit-finances.net, Le Particulier), la santé (Santé-médecine.net et Le Figaro santé) et enfin le high-tech (CCM), énumère le groupe.

Enfin, cet accord est le signe d’une tendance forte dans les médias : celle de la recherche d’une plus grande taille afin de s’adapter à la nouvelle donne de la publicité en ligne, dont la promesse est de toujours mieux cibler les consommateurs. Très technologique, le groupe CCM est spécialiste de la « qualification » de ses audiences. il possède des bases de données précieuses comme les 12 millions d’inscrits du site Copains d’avant. Autant d’informations que le groupe pourra croiser avec la masse de données des habitudes de ses lecteurs sur tous ses sites et thématiques. Un jeu de « data », de logiciels et de puissance.

Alexandre Piquard

Source Le Monde Entreprise 01/10/2015

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