Impossible
« Prises dans leur ensemble, ces données sont susceptibles de permettre de tirer des conclusions très précises concernant la vie privée des personnes », argumente la Cour.
« Et susceptible, ajoutent les juges, de générer dans l’esprit des personnes concernées le sentiment que leur vie privée fait l’objet d’une surveillance constante. »
Le combat contre le terrorisme ne justifie pas tout
« Si l’efficacité de la lutte contre la criminalité grave, notamment contre la criminalité organisée et le terrorisme, peut dépendre dans une large mesure de l’utilisation des techniques modernes d’enquête, un tel objectif d’intérêt général, pour fondamental qu’il soit, ne saurait à lui seul justifier qu’une réglementation nationale prévoyant la conservation généralisée et indifférenciée de l’ensemble des données relatives au trafic et des données de localisation soit considérée comme nécessaire aux fins de ladite lutte. »
5 conditions strictes pour choper les méta-données
- Ces données ne portent pas sur le contenu des communications (le corps d’un e-mail, votre conversation téléphonique…) mais bien sur des informations périphériques et techniques. C’est ce qu’on appelle les méta-données : qui appelle qui, de quel appareil, à quelle heure, combien de temps ? Sur ce point, les Etats sont a priori plutôt au point, même si, à la fleur de flous dans les textes, des différences d’interprétation demeurent encore (par exemple : l’objet d’un e-mail fait-il partie du contenu ou des métadonnées ?).
- Ces données ne portent pas sur toute la population. Seuls des individus ciblés peuvent voir leurs données stockées ; la Cour refuse toute « conservation généralisée et indifférenciée », y compris « à des fins de lutte contre la criminalité ».
- Une fois stockées, ces données ne peuvent être consultées qu’aux « seules fins de lutte contre la criminalité grave », et non pas pour contrer de petits délits.
- Une fois stockées, ces données ne peuvent être consultées qu’après « contrôle préalable par une juridiction ou une autorité administrative indépendante ».
- Enfin, le stockage de ces données ne peut être fait que « sur le territoire de l’Union ».
Enquête judiciaire, administrative, fisc, douane…
- Au départ, elles devaient servir « pour les besoins de la recherche, de la constatation et de la poursuite des infractions pénales. »
- Mais cette consultation s’est étendue du judiciaire à l’administratif. Soit en clair aux services de renseignement. La loi de programmation militaire (LPM) de 2013 y a consacré tout un chapitre, lui-même étoffé par la loi renseignement de 2015.
- Grâce au « droit de communication », invention géniale qui permet à l’administration d’obtenir les infos qu’elle veut, le fisc, les douanes, l’Urssaf, l’Autorité des marchés financiers ou la direction de la concurrence peuvent se faire communiquer ces infos, pour progresser dans leurs enquêtes ou prévenir la fraude.Le gouvernement actuel chérit tellement ce levier qu’il l’a également glissé dans sa loi sur l’immigration, adoptée en mars, pour les étrangers demandant un titre de séjour. Il l’a aussi prévu dans la loi sur le dialogue social et l’emploi pour fliquer les faits et gestes des chômeurs, avant de le retirer in extremis.