« Changer la géographie du monde » pourquoi Lula a « presque » tenu son pari

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Luiz Inacio Lula da Silva

Il ne voulait rien de moins, avait-il confié un jour au Time, que « changer la géographie politique et économique du monde ».

Un pari fou que, huit ans après son arrivée à la tête du Brésil et alors qu’il va passer le flambeau, Luiz Inacio Lula da Silva est pourtant en passe de tenir, à en croire la tribune que son ministre des Affaires étrangères, Celso Amorim, a signée cette semaine dans Le Monde : « Depuis près de huit ans, le Brésil a oeuvré avec audace et, à l’instar d’autres pays en développement, nous avons changé notre importance sur la carte du monde. Nos pays sont vus aujourd’hui, même par les critiques éventuels, comme des acteurs dont les responsabilités sont croissantes et dont le rôle est de plus en plus central dans les décisions qui affectent l’avenir de la planète. »

Et ce tout en ayant réussi à séduire aussi bien au Forum social mondial de Porto Alegre qu’au Forum économique mondial de Davos.

Comment diable a-t-il fait ?

Porte-parole des pays du Sud

Rééquilibrer l’échiquier mondial, jusque-là accaparé par la Triade (Etats-Unis, Europe, Japon), en donnant aux pays du Sud une place à la mesure de leur poids politique et économique : tel va être pendant huit ans le cheval de bataille de Lula. La méthode va consister à « lancer toute une série de groupes de pression au niveau international pour provoquer une gestion multilatérale dans le commerce mais aussi dans d’autres domaines », explique Jean-Jacques Kourliandsky, chercheur à l’Iris. Lula va ainsi multiplier les alliances avec les pays en voie de développement.

Il va donner le ton dès 2003, lors de la conférence de l’OMC à Cancun, en prenant la tête d’une coalition de pays émergents pour refuser des accords commerciaux favorables aux pays du Nord. C’est à lui que l’on doit l’élargissement du cercle des décideurs de la planète du G8 au G20. Le Brésil de Lula participe aussi, avec l’Inde et l’Afrique du Sud, à l’IBAS, un groupe chargé de faire du lobbying, chacun dans sa zone respective. Et au BRIC, avec la Russie, l’Inde et la Chine, qui a pour mission de coordonner leur action. Il a aussi noué des relations privilégiées avec les pays arabes et avec l’Afrique noire.

Le président brésilien ne va pas pour autant délaisser son continent. Là aussi, il va nouer des alliances avec ses voisins émergents face au géant nord-américain. Il est à l’initiative de la création, en 2008, d’une Union des nations sud-américaines, l’UNASUR. Objectif : laver son linge sale en famille, pour éviter d’avoir recours aux Etats-Unis ou à l’ONU en cas de crise.
Il défend ses voisins face aux appétits américains – c’est ainsi qu’il s’est opposé au projet de Zone de libre-échange des Amériques voulu par les Etats-Unis (ZLEA) ou qu’il a soutenu le président déchu hondurien contre l’avis de Washington –, se pose en arbitre dans les conflits de la région et cherche avec eux le compromis – par exemple dans le contentieux qui a opposé la Bolivie à Petrobras en 2006, Lula a préféré chercher le compromis plutôt que de défendre bec et ongles l’entreprise brésilienne.

« Le fait que le Brésil n’ait pas revendiqué le siège de l’UNASUR, qui est revenu à l’Equateur, témoigne de sa prise en compte de ses voisins », fait également remarquer Jean-Jacques Kourliandsky. Du coup, même si certains pays d’Amérique latine demeurent méfiants, soupçonnant leur gigantesque voisin d’avoir des desseins expansionnistes, reste que « le Brésil est devenu un facteur de stabilité dans la région, garant de la souveraineté populaire et de la légitimité des gouvernements », constate le sociologue et historien Laurent Delcourt.

Cette politique du « gentil géant », comme il la qualifie, ou ce « leadership qui se veut aimable », comme l’appelle Jean-Jacques Kourliandsky, est donc l’une des clés du succès de la diplomatie brésilienne.

Un rêve de puissance

Mais son « multilatéralisme va aussi dans le sens du renforcement de la présence du Brésil dans le monde », relève ce dernier. « Ce militantisme pour un système international plus démocratique masque des stratégies unilatérales dues à la puissance économique et politique du Brésil, » renchérit Laurent Delcourt. « Il poursuit aussi des intérêts nationaux, notamment en poussant l’expansion de ses entreprises multinationales. »
Si Lula exerce une politique étrangère progressiste, sur le plan économique et commercial, il s’inscrit dans une certaine continuité : « Il est le champion de la libéralisation du marché agricole, et quand il fait des discours enflammés sur la réforme du système financier international, il s’oppose en même temps à la taxation de ses banques », poursuit le chercheur.

Car dans la géographie mondiale que Lula entend redessiner, le Brésil prétend au rang de grande puissance. Ce pays qui n’était encore en 2002 que la première puissance d’Amérique du Sud est, en l’espace de huit ans, non seulement devenu la première puissance d’Amérique Latine, au nez et à la barbe du Mexique qui hier encore occupait cette place de choix, mais également un acteur global. Il entend donc revendiquer le statut qui va avec ce poids politique et économique.

Mais, au fait, c’est quoi une grande puissance ? Aujourd’hui, cela répond encore à des critères auxquels le Brésil ne répond pas, note Jean-Jacques Kourliandsky : être une puissance nucléaire, être membre du G8 et faire partie du Conseil de sécurité.

Certes, il n’est pas une puissance nucléaire, mais il est en train de se doter de capacités militaires (notamment via un accord stratégique signé en 2008 avec la France).
Certes, il n’est pas membre du G8, mais il est dans le G20. Fort de ses nombreuses entreprises multinationales (Pétrobras, Vale, Embraer, Votorantim…) qui gagnent toujours plus de parts de marché dans le monde, il est aujourd’hui la 8e puissance économique mondiale. Dans moins de dix ans, il pourrait grimper sur la cinquième marche du podium, à en croire le FMI, en ayant au passage rejoint les plus grands exportateurs de pétrole de la planète.
Enfin, il fait tout pour décrocher le fameux siège au Conseil de Sécurité de l’ONU. Et là aussi le Brésil a su jouer collectif. C’est avec cet objectif en tête qu’il dirige depuis 2004 une opération de paix de l’ONU, la MINUSTA à Haïti, ce qui est une première pour un pays d’Amérique Latine, et qu’il a constitué le G4, aux côtés de l’Allemagne, du Japon, et de l’Inde, autant de pays qui, comme lui, entendent pousser la porte jalousement gardée du Conseil de sécurité.

Bref, Lula a donné un sacré coup d’accélérateur : entre 2002 et 2010, « le Brésil est entré dans le sas entre pays émergent et grande puissance. Il peut à juste titre être placé dans le deuxième cercle« , estime Jean-Jacques Kourliandsky. « Il a tendance non plus à se considérer comme une puissance émergente mais émergée », constate Laurent Delcourt.

Alors que son prédécesseur Fernando Henrique Cardoso voulait entrer discrètement dans la mondialisation, Lula a choisi de conduire une diplomatie audacieuse et décomplexée qui a donc porté ses fruits. Mais parfois au risque de se montrer peut-être trop gourmand.

« Risible et ingénu ». Le jugement de la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton sur sa proposition de médiation au Proche-Orient est sans appel. L’accueil glacial avec lequel ont été reçues ses tentatives de coups d’éclat – ses interventions dans le conflit israélo-palestinien et dans le dossier du nucléaire iranien – montrent qu' »il a tendance à mettre la charrue avant les bœufs » et qu' »il n’est pas encore assez mûr pour prétendre exercer ce rôle », de l’avis de Laurent Delcourt. A moins qu’il ne témoigne de l’agacement des grandes puissances face à la propension de cet outsider à vouloir jouer dans la cour des grands ?

L’homme politique le plus populaire du monde

N’empêche, même Barack Obama a avoué sa fascination pour Lula : « J’adore ce type ! C’est l’homme politique le plus populaire du monde ! », s’était-il exclamé, à la surprise générale, en marge d’une réunion du G20 en avril 2009.

Il ne fait nul doute qu’une bonne part de ce que le président brésilien a accompli est à mettre sur le compte de sa personnalité. D’abord, il y a cette « bonhommie toute populaire qui l’aide à créer un sentiment de sympathie », souligne Laurent Delcourt. Ensuite, « il a su appliquer sa culture du combat syndical à la gestion des affaires du monde : il a su discerner les conflits, définir son objectif, se chercher des alliés, faire preuve de compromis », ajoute Jean-Jacques Kourliandsky.

Mais derrière le charisme et l’intelligence de l’ouvrier métallurgiste devenu président, il y a aussi une diplomatie très compétente, l’Itamaraty, rappellent les deux chercheurs. C’est l’une des meilleures du monde. Qu’il a d’ailleurs contribué à renforcer en doublant son réseau d’ambassades à force de sillonner la planète.

De quoi conclure que même si l’architecte s’en va, l’échafaudage diplomatique qu’il a bâti saura survivre à l’élection de ce dimanche ?

Il y a fort à parier que personne, quelle que soit la personnalité qui sera élue et a fortiori si c’est sa dauphine Dilma Rousseff, ne reniera un travail aussi titanesque et populaire. La plupart des candidats reconnaissent d’ailleurs autant le bilan positif de Lula sur le plan de la politique extérieure qu’intérieure.

Sarah Halifa-Legrand Nouvelobs.com

Voir Aussi : Rubrique Brésil, Sarkozy retrouve Lula avec l’ambition de lui vendre le Rafale,

Maroc : Mort d’un journal

Le magazine marocain Nichane, version arabophone de l’hebdomadaire francophone TelQuel met la clé sous la porte. Il était devenu le premier hebdomadaire en langue arabe avec 20 000 exemplaires vendus mais il a vu chuter, en un an, ses recettes publicitaires de 77%. Le groupe TelQuel et son directeur, Ahmed  Benchemsi, dénonce un « étouffement financier » par le biais d’un « boycott publicitaire initié par le holding royal ONA/SNI ».

Les habitudes ont décidément la vie dure ! Au début du règne, le ton nouveau adopté par une partie de la presse ne déplaisait pas en haut lieu : il « collait » avec l’image que le Maroc souhaitait donner de lui-même, celle d’un pays en « transition démocratique ». Mais les journalistes ont fait bouger les lignes. Et le mahzen – l’entourage royal- a du mal à accepter qu’une partie du discours publique, à travers l’existence d’une presse à la fois indépendante et crédible, puisse échapper à son contrôle. Si les interdictions et les saisies sont devenues exceptionnelles, c’est sur le terrain de l’économie que se joue aujourd’hui la liberté de la presse au Maroc. La très grande proximité du monde de l’entreprise avec le palais et l’existence d’un holding royal, l’ONA/SNI, qui irrigue une bonne partie du secteur privé du royaume rendent cette arme particulièrement efficace. La plupart annonceurs potentiels sont des entreprises publiques ou des groupes privés proches du pouvoir, ce qui créée une dépendance de facto à leur égard de la quasi-totalité des publications marocaines. En outre, depuis quelques mois, apparaissent au Maroc de nouveaux journaux édités par des sociétés liées à des groupes détenus en partie au moins par le holding royal qui concurrencent les pionniers de la presse indépendante.

Niger : Enlèvement des Français, à qui profite le crime ?

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A long terme, le coup d’éclat d’Al-Qaida Maghreb islamique dans le Nord du pays pourrait bien servir l’intérêt de la France. Elle pourra ainsi légitimer sa volonté de contrôler militairement la région, estime Aïr Info, titre influent d’Agadez.

Au secours ! Un grand complot se trame sur le dos du Niger. Ce qui s’est passé à Arlit dans la nuit du mercredi au jeudi 16 septembre [Cinq Français, un Malgache et un Togolais ont été enlevés. Une action revendiquée par AQMI (Al-Qaida Maghreb islamisé)] prend une sale tournure pour le Niger et les Nigériens, pour leur amour-propre et leur souveraineté. C’est comme si une machine de diabolisation de l’image du Niger et celle d’une frange de sa population était en branle pour servir et légaliser des intérêts impérialistes qui ne disent pas leur nom. Depuis l’enlèvement spectaculaire de cinq Français et de leurs deux collaborateurs africains à Arlit, des médias occidentaux et autres oiseaux de mauvais augure ne cessent de jeter l’opprobre sur notre vaillante armée ; sur nos frères touaregs et, le comble, sur notre système de sécurité. Même les sociétés de gardiennage appartenant à des ex-chefs rebelles ne sont pas épargnées !

Le Niger subit de plein fouet les conséquences d’une guerre qui ne le regarde point ! Une guerre d’intérêts inavoués entre les « fous de Dieu » et « les gourmands d’uranate ». Parce que la France de Sarkozy et AQMI ont un problème à régler entre eux, ils choisissent curieusement le terrain Niger pour s’affronter, portant de ce fait un rude coup à la stabilité de notre cher pays et surtout à la survie d’une région alanguie par des années d’insécurité. Qui en veut réellement aux intérêts de la France au Niger ? Qui a intérêt à ce qu’il y ait désordre dans la partie septentrionale de notre pays ? Est-ce que réellement la France et ses alliés veulent en finir avec le phénomène AQMI au Sahel ?

Au lieu de critiquer la négligence et l’imprudence de la société française AREVA, des personnalités françaises n’ont pas hésité à jeter leur fiel sur la défense sécuritaire au Niger et sur les ex-combattants touaregs, qu’ils qualifient à tort de « complicités locales » ! Les Touaregs ne sont pas des terroristes. Non ! Ils ne sont pas non plus complices des terroristes ! Il faut absolument que l’amalgame qui se fait sur cette affaire s’arrête. Pourquoi veut-on absolument faire croire que la région d’Agadez est invivable maintenant alors qu’elle a servie pendant plus de quarante ans d’espace libre et tranquille à une France prédatrice de notre uranium ? Pourquoi l’impossibilité de cette exploitation commence curieusement au moment où le Niger souverain diversifie ses partenaires ? Qui a intérêt aujourd’hui à ce que l’ordre défaille au nord Niger ? En tous cas, pas les autorités de notre pays et encore moins ces populations meurtries !

Ceux qui veulent aujourd’hui que le désordre s’installe sont ailleurs ! Ils ne sont ni Nigériens ni amis des Nigériens ! Voilà pourquoi, une dynamique est en marche : celle de ternir l’image de ce beau pays qu’est le Niger. En jetant l’opprobre sur les touaregs d’Agadez en particulier et le Niger en général, un lobby sans foi ni loi veut rendre notre pays infréquentable aux autres amis du Niger pour protéger ses arrières, c’est-à-dire ses intérêts tapis sous le sol d’Agadez. Des indicateurs sont là pour le prouver : Agadez est passée de la zone orange à la zone rouge. Tous les Français qui travaillent à Arlit ont quitté la région. Presque tous les pays occidentaux interdisent la destination Agadez par crainte de représailles terroristes.

Qui nous dit aujourd’hui que certaines sociétés minières œuvrant au Niger et Aqmi n’ont pas le même objectif ? Celui de déstabiliser notre région pour empêcher que des nouvelles sociétés exploitent un périmètre légalement acquis ? Après cette phase de diabolisation de la région d’Agadez, qui s’opposera demain à ce que des militaires étrangers au nom de la prétendue sécurité de leurs concitoyens installent leur base quelque part dans l’Aïr ou le Ténéré ? Qui trouvera à redire au Niger si, au nom de la lutte contre les terroristes d’Aqmi, des services de renseignement extérieurs violent jusqu’à l’intimité des campements nomades ? On comprendra trop tard que cette présence, outre qu’elle ait aliéné notre souveraineté, a sapé aussi ce beau projet d’intégration sous-régionale si cher à nos pays qui se matérialise par le biais de la route transsaharienne !

En un mot, il serait bien de se demander si la lutte contre AQMI et sa nébuleuse n’est pas un bon prétexte pour faire d’Agadez une nouvelle base militaire étrangère ? Tous ces kidnappings, toutes ces frappes des grottes d’AQMI, le tapage médiatique autour de ces enlèvements ne militent-ils pas pour une seule chose : le contrôle de nos ressources minières par des pays étrangers ? En diabolisant notre pays, on en fera très facilement ensuite une nouvelle colonie où régnera un seul ou deux maîtres, avides de pétrole et d’uranate ! Nigériens de tous bords, disons non à ce complot qui n’est que le résultat de manipulations et d’ingérences voulant aliéner à jamais notre droit à la souveraineté nationale.

Salif Bah

Voir aussi : Rubrique Niger, Coup d’Etat contre Tandja, Rubrique Afrique, La Françafrique se porte bien,

L’Asie dope la vente des journaux dans le monde

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Selon un rapport de l’Association mondiale des journaux, l’optimisme est de règle sur l’avenir des quotidiens, dans un marché principalement soutenu par l’Inde et la Chine.

Dans le monde, un quart de la population adulte lit chaque jour un quotidien payant. Soit 1,7 milliard de personnes. En ajoutant les autres titres, non quotidiens, on arrive à un total de 37 % de la population mondiale parcourant chaque jour les nouvelles des journaux de presse écrite. Ces chiffres proviennent d’une étude de l’Association mondiale des journaux et éditeurs de médias d’informations (WAN), dans son rapport annuel sur les tendances mondiales de la presse. Selon l’étude, l’année 2009 a vu la diffusion des quotidiens essuyer un recul de 0,8 %, alors que sur cinq ans une augmentation de 5,7 % de la vente de journaux a été constatée. La raison, selon le WAN, « est que moins de journaux sont achetés dans le monde “développé” où les médias sont “matures” », alors qu’en revanche « l’Asie continue de bénéficier d’une hausse significative de la diffusion avec 1% de plus en 2009 et 13 % d’augmentation sur les cinq dernières années ».

Dans son rapport, l’Association mondiale des journaux a recensé en 2009 à travers le monde quelque 12 477 titres de journaux. Un chiffre en augmentation de 1,7 % par rapport à l’année précédente. Ces titres de presse représentent 517 millions d’exemplaires vendus chaque jour. Pour l’association, « si globalement les ventes de quotidiens stagnent, celles de la presse magazine affichent, par contre, une croissance moyenne de 2,5 % que n’empêche en rien un recul de – 6,2 % en Afrique et de – 1,4 % en Amérique du Nord ». Selon le rapport du WAN, le marché mondial de la presse est boosté par l’Asie. Avec 110 millions de quotidiens vendus chaque jour, l’Inde arrive en tête du palmarès des plus fortes ventes. Elle est suivie par la Chine avec 100 millions d’exemplaires et le Japon avec 50 millions. Le continent européen est loin de ces chiffres issus des plus grands marchés de la presse. L’Allemagne, qui caracole en tête en Europe, se contente de 20 millions d’exemplaires achetés quotidiennement. Quant à l’Afrique, le continent présente l’un des marchés les plus dynamiques avec une hausse moyenne de 4,8 % des ventes de quotidiens.

La WAN se dit plutôt « optimiste sur la reprise des recettes publicitaires ». L’association estime, en effet, sur la base d’études menées par les acheteurs d’espaces, «qu’une croissance de 3,5 % est envisageable en 2010 ». En 2009, le chiffre d’affaires publicitaire des quotidiens avait reculé de 17 % sur un an. Un effondrement qui « reflète l’impact de la récession internationale sur tous les secteurs industriels ». Les journaux représentent 24 % du gâteau publicitaire mondial, contre 39 % pour la télévision et 12 % pour Internet. En termes d’efficacité, la publicité dans la presse écrite est la mieux placée. Pour la WAN, l’avenir de la presse quotidienne passe avant tout par la recherche de nouveaux modèles économiques, tels les services mobiles.

Fernand Nouvet (L’Humanité)

Voir aussi : Rubrique Médias, Les jeunes journalistes contraints de s’adapter à une presse en crise, Le Midi Libre trop friand d’info Frêche, Rubrique Edition, Pour une critique de l’édition dominante, Rubrique LivreLe postulat de la presse libre revue et corrigé,

Paul Kagamé, un dictateur en voie de réélection

Le Président Paul Kagame

Le Président Paul Kagame

Il  n’y a pas qu’au Rwanda que la série d’assassinats d’opposants politiques et de journalistes suscite une désapprobation. L’élimination physique de tous ceux qui peuvent gêner Paul Kagamé à sa réélection du 9 août prochain ne plaît pas hors des frontières du pays des mille collines. Le chef de l’Etat Paul Kagamé s’en est lui-même rendu compte, le 16 juillet dernier,  à l’occasion d’un déplacement en Espagne. Le Premier ministre espagnol, Jose Luis Rodriguez Zapatero, a renoncé au dernier moment à co-présider avec lui une rencontre de l’ONU sur la pauvreté. En outre, le lieu de la rencontre a été changé au dernier moment comme pour éviter que Paul Kagamé ne souille le siège du gouvernement du sang que des ONG espagnoles l’accusent d’avoir sur les mains. Une véritable claque administrée malgré lui par Zapatero, obligé d’agir ainsi pour ne pas rester sourd au tollé suscité en Espagne par la visite du numéro un rwandais à un moment où des opposants politiques et des journalistes sont tués chez lui.

 Il a aussi été question au cours de la rencontre, suite à l’exhortation du secrétaire général de l’ONU d’élucider certains meurtres, dont ceux du vice-président du Parti démocratique vert, André Kagwa Rwisereka, dont le corps a été retrouvé pratiquement sans tête le 14 juillet, et du journaliste indépendant Jean Léonard Rugambage tué par balles à Kigali le 24 juin dernier. Il faut aussi dire qu’avant ces assassinats, la justice espagnole avait émis [en février 2008] des mandats d’arrêt internationaux [pour « génocide »] contre 40 militaires du régime de Paul Kagamé, pour des crimes commis avant l’arrivée au pouvoir du Front patriotique rwandais (FPR). Paul Kagamé est épargné par ces mandats du fait de l’immunité liée à sa fonction. Ce qui ne l’empêche nullement de se rendre en Espagne. Mais pour les défenseurs des droits humains ibériques, si l’on ne peut pas l’arrêter, on peut tout de même lui signifier qu’il n’est pas un ange, un saint et le sauveur du Rwanda que lui et son entourage s’évertuent à montrer. S’il est vrai que l’arrivée au pouvoir du FPR [qui a chassé en juillet 94 le régime génocidaire] a ramené la stabilité et favorisé la croissance, il n’en demeure pas moins que la traque, les assassinats d’opposants politiques, l’absence de libertés réelles comme celle d’expression et de la presse, l’opposition au révisionnisme ont fini par faire oublier aujourd’hui les bonnes actions des hommes forts du FPR.

Le Rwanda renvoie l’image d’un pays dirigé par un dictateur qui n’en a pas l’air, un militaire qui ne supporte pas la contradiction à tau point point que ceux de son camp qui se permettent un zeste de critique deviennent des ennemis à abattre quel que soit l’endroit du monde où ils se trouvent. Paul Kagamé donne aussi l’air d’une personne obsédée par le pouvoir qu’il veut garder à tout prix, quitte à marcher sur des cadavres d’opposants et de dissidents. Paradoxalement, ses agissements ne font pas l’objet de condamnations comme il se doit à cause d’un certain nombre de soutiens comme ceux des Américains qui se présentent comme des alliés sûrs pour l’homme mince de Kigali. C’est d’ailleurs ce qui fait que l’ONU ne peut véritablement pas taper du poing sur la table, amenant son secrétaire général à être prudent sur l’emploi des mots au point qu’il ne veuille « s’immiscer dans les affaires intérieures d’un Etat souverain ». D’autres pays sont dans leurs petits souliers pour avoir fait des mains et des pieds pour être dans les bonnes grâces de Kigali avec lesquels ils ont beaucoup de contentieux historiques. Et il ne faut pas compter sur leurs dirigeants pour oser une remarque « déplacée » sur l’attitude des autorités rwandaises par rapport au respect des droits humains et des libertés fondamentales. Leur société civile a beau grogner, cela ne les gêne pas de dérouler le tapis rouge à l’ami rwandais.

Séni Dabo Le Pays (Burkina Faso)

Voir aussi : Rubrique Rwanda Sarkozy en mission de réconciliation,