En-fin ! Enfin, l’interminable procédure Parcoursup touche à sa fin ce vendredi 21 septembre, dernier jour de la phase dite « complémentaire » où les formations proposaient leurs places vacantes aux candidats restés sans propositions. Le bilan complet de ce nouveau dispositif d’orientation reste donc à faire. Mais les craintes sont grandes qu’il n’ait fait que renforcer les inégalités d’accès à un enseignement supérieur qui, s’il ne cesse de croître, n’est que formellement « ouvert à tous ». État des lieux
1/ Des étudiants toujours plus nombreux, des moyens en berne
310 000 étudiants en 1960, 1,7 million en 1990, 2,71 millions prévus à la rentrée 2018, et sans doute près de trois millions en 2026 : on peut se féliciter que, plus de cinquante après avoir été initié, l’impressionnant mouvement de démocratisation/massification de l’enseignement supérieur soit appelé à se poursuivre dans les années à venir. Mais dans quelles conditions ? Depuis bientôt dix ans la dépense publique par étudiant, déjà peu élevé en comparaison des autres pays européens, est en baisse en France.
Source Ministère de l’Education Nationale calculs Alternatives Economiques
Un choix difficile à justifier alors que le marché de l’emploi demande toujours plus de qualification. Et que les diplômes, même s’ils n’offrent pas (ou plus) toutes les garanties escomptées, restent aujourd’hui la meilleure protection contre le chômage.
2/ L’université, de loin la première destination des étudiants
Malgré leur image souvent mauvaise dans l’opinion publique, les universités accueillaient en 2016, plus de 1,5 millions d’étudiants, soit plus de 60 % des effectifs étudiants. Le million d’étudiants restant se répartit entre les diverses filières sélectives de l’enseignement supérieur
56 % des étudiants sont d’ailleurs… des étudiantes. Leur présence est cependant très variable selon les filières, et suit encore souvent des logiques stéréotypées. Rares parmi les écoles d’ingénieur minoritaires au sein des facultés de science et des classes préparatoires aux grandes écoles, elles dominent nettement dans les études universitaires de santé, de langues, lettres et sciences humaines et surtout les formations paramédicales et sociales.
Mais tous les étudiants ne sont pas traités à la même enseigne. En 2016, les filières sélectives publiques recevaient une dotation par étudiant 1,3 à 1,5 fois plus élevée que les universités, indice le plus implacable du fonctionnement à deux vitesses de l’enseignement supérieur français
3/ … Mais le privé a le vent en poupe
Contre-coup des difficultés des universités ? Les effectifs des établissements privés d’enseignement supérieur ont en tout cas fortement augmenté en quinze ans. Ils accueillent désormais un peu moins d’un étudiant sur cinq (18,18 % en 2016).
Une dynamique dont les écoles de commerce ont le plus largement bénéficié, malgré la hausse vertigineuse de leurs coûts.
4/ Des études toujours aussi sélectives
Malgré un incontestable élargissement de son public, l’enseignement supérieur reste un système hiérarchisé et très sélectif socialement. Nettement sous-représentés, les enfants issus des classes populaires sont quasiment absents des filières sélectives prestigieuses (classes préparatoires, grandes écoles), où les enfants de cadres se taillent la part du lion. A l’université, les fils et filles d’ouvriers et employés se font également plus rares au fur et à mesure de l’avancée dans le cursus Licence-Master-Doctorat. C’est ainsi qu’inégalités économiques et inégalités sociales se redoublent : la collectivité dépense, on l’a vu, 1,5 fois plus pour un élève de classes prépas que pour un étudiant à l’université…
5/ Des enseignants-chercheurs débordés
Depuis plusieurs années, les effectifs d’enseignants titulaires stagnent dans l’enseignement supérieur. Le nombre d’étudiants continuant à augmenter, un vaste volant d’enseignants aux statuts plus précaires (souvent des thésards) s’est développé pour assurer notamment les cours d’amphithéâtre en licence, les groupes de travaux dirigés, ainsi que diverses tâches pédagogiques et administratives…
Egalement chercheurs, parfois responsables administratifs, les enseignants du supérieur connaissent souvent des horaires de travail à rallonge, et peinent à faire face à l’ensemble de leurs obligations. Une enquête récente auprès de plus de 2000 d’entre eux, tous statuts confondus, montre ainsi qu’ils sont sept sur dix à avoir souvent ou toujours le sentiment d’être débordés de travail.
Les comparaisons internationales révèlent en effet que les moyens humains mis au service des étudiants sont plutôt faibles, et en tout cas insuffisants pour mener une politique ambitieuse en matière de formation initiale.