Le FMI presse l’Espagne d’adopter des réformes «urgentes»

Le socialiste espagnol Zapatero à l'heure de la rigueur

Le Fonds monétaire international (FMI) recommande à l’Espagne des réformes « urgentes » pour améliorer le fonctionnement de son marché du travail et de son système bancaire, à l’issue d’une mission dans le pays. Cette injonction intervient alors que ce dimanche le chef du gouvernement socialiste espagnol, José Luis Rodriguez Zapatero, a affirmé que son gouvernement tiendrait bon sur la réduction des dépenses publiques malgré les pressions des syndicats qui ont brandi la menace d’une grève générale contre les mesures d’austérité.

« La politique du gouvernement doit se concentrer sur un rééquilibrage en douceur de l’économie », a indiqué le FMI dans un communiqué, appelant à « une action urgente et déterminée ». Le FMI a donné trois priorités.

La première est de « rendre le marché du travail plus flexible pour favoriser l’emploi et sa redistribution entre secteurs », dans un pays où le taux de chômage a dépassé les 20% au premier trimestre. Le Fonds souhaite en particulier que le coût du licenciement soit abaissé « au moins aux niveaux moyens en vigueur dans l’Union européenne », que l’indexation des salaires avec l’inflation soit abolie et une « décentralisation de la fixation des salaires ».

La deuxième priorité est une « consolidation budgétaire pour asseoir les finances publiques sur une base viable ». Le gouvernement a lancé des mesures d’austérité destinées à économiser 15 milliards d’euros en 2010 et 2011. « Une consolidation budgétaire ambitieuse est en cours pour atteindre l’objectif d’un déficit de 3% du PIB d’ici à 2013 », a rappelé le FMI qui a affirmé son soutien aux mesures adoptées en Conseil des ministres jeudi. « Le fait d’atteindre ces objectifs sera critique et tout dérapage doit être vigoureusement contrecarré », a estimé le Fonds, qui, dans les scénarios pouvant menacer la reprise de l’économie espagnole, inclut une hausse des taux d’intérêt pour les emprunts d’Etat mais aussi pour ceux du secteur privé.

La troisième priorité est « une consolidation du secteur bancaire et une réforme pour renforcer la santé et l’efficacité du système », pour lequel « les risques restent élevés et inégalement répartis entre institutions, concentrés principalement sur les caisses d’épargne ». Ces risques ont encore été illustrés samedi par le placement d’une de ces caisses d’épargne, la Cajasur, sous tutelle de la Banque d’Espagne. « L’économie de l’Espagne a besoin de réformes profondes et complètes. Les difficultés sont immenses », a expliqué le FMI, relevant entre autres les « dysfonctionnements du marché du travail », un « déficit budgétaire élevé » ou encore une « croissance de la productivité anémique » et une « faible compétitivité ». Il a rappelé qu’il tablait sur « une poursuite de l’ajustement des divers déséquilibres avec une croissance en hausse progressive, vers 1,5 à 2% à moyen terme ».

En avril, le FMI avait indiqué qu’il prévoyait un recul de 0,4% du produit intérieur brut en 2010, avant une croissance de 0,9% en 2011. Il doit désormais rédiger son rapport annuel sur l’économie espagnole, qui doit détailler tous ces éléments et être publié à l’été.

AFP

Avant son procès, Kerviel dénonce la Société générale

journal-kervielL’ex-trader de la Société générale Jérôme Kerviel a appelé dimanche ses anciens collègues, «qui n’ont pas dit ce qu’(ils) savaient», à «témoigner» à l’approche de son procès en juin, dans un entretien au Journal du dimanche. L’ancien trader doit comparaître du 8 au 23 juin devant le tribunal correctionnel de Paris pour y répondre des 4,9 milliards d’euros de pertes qu’il est soupçonné d’avoir provoqués début 2008.

«Beaucoup de pistes n’ont pas été explorées au cours de l’instruction, beaucoup de questions sont restées en suspens, et de nombreuses personnes n’ont pas dit ce qu’elles savaient, des collègues notamment», affirme Jérôme Kerviel au JDD. «Je lance aujourd’hui un appel aux bonnes volontés, parce que je croise énormément de gens, des milieux financiers ou universitaires qui m’assurent de leur soutien mais refusent de témoigner, parce qu’ils ont peur de représailles ou de perdre leur emploi», ajoute-t-il, estimant que ces personnes «ne peuvent pas dire ouvertement que ce que la Société Générale raconte ne tient pas debout.» Pour l’ex-trader devenu un symbole malgré lui des dérives du monde de la finance, il s’agit d’«ouvrir les yeux à l’opinion publique sur ce qui ne va pas dans milieu-là».

Comme il l’a soutenu tout au long de l’enquête, Jérôme Kerviel affirme que «la thèse de la Société générale selon laquelle personne n’aurait rien vu ne tient pas», notamment «sur la connaissance qu’avaient (ses) supérieurs de ce qu’(il) faisait». Les juges Renaud van Ruymbeke et Françoise Desset en ont jugé autrement et l’ont renvoyé seul devant le tribunal, jugeant que le jeune homme avait outrepassé le mandat confié par la banque en prenant des positions hors normes – jusqu’à 50 milliards d’euros – sur les marchés financiers.

Reconnaissant avoir été «partie prenante» d’un «milieu complètement déconnecté du réel» où l’«on perd la notion des montants», l’ex-trader dit aujourd’hui se demander comment il s’est «laisser entraîner là-dedans». Jérôme Kerviel, qui sera jugé pour abus de confiance, faux et usage de faux et introduction de données frauduleuses dans un système informatique, publie un livre* mercredi sur son expérience.

AFP

* Le journal de Jérôme Kerviel, éditions Thomas,  Le joueur éditions Scali

Voir aussi: Rubrique Finance, Barnier rassure les fonds spéculatifs, Les banquiers reprennent leurs mauvaises habitudes, Rubrique Crise entretien avec Frédéric Lordon, Rubrique Justice Un jugement condamné par la presse,

Les banques françaises épinglées pour les frais cachés

Les banques françaises comptent en Europe parmi les championnes des frais cachés onéreux et incompréhensibles pour leurs clients, dénonce la Commission européenne dans un rapport qui sera rendu public mardi prochain.

Le dossier préparé par les services de la commissaire chargée de la défense des consommateurs, Meglena Kuneva, est très critique pour les banques françaises, mais aussi espagnoles, italiennes et autrichiennes, considérées comme les plus onéreuses pour leurs services et accusées de cacher les frais imputés aux comptes de leurs clients et de ne pas suffisamment les informer, selon une source européenne.

Cette source confirmait des informations de l’hebdomadaire European Voice, spécialisé dans les questions européennes. Les services de Mme Kuneva ont refusé tout commentaire, mais ont confirmé la publication d’un rapport sur la question mardi prochain.

Certaines banques ont des pratiques qui violent les règles communautaires sur la protection des consommateurs et la Commission européenne devrait sommer les autorités nationales de prendre des mesures pour remédier à cette situation, selon le rapport.

 

Frais bancaires: les établissements français épinglés par Bruxelles

La gestion d’un compte courant en France, le compte sur lequel sont versés les salaires et sont effectuées la plupart des transactions revient en moyenne à 154 euros, ce qui place les banques françaises dans le peloton de tête des plus chères, en troisième position derrière l’Italie (253 euros) et l’Espagne (178 euros).

Le rapport ne cite pas de noms, mais les études comparatives réalisées en France montrent que les principales banques du pays se tiennent sur les tarifs (147 à 206 euros).

La cotisation pour une carte bancaire varie ainsi de 39 à 48 euros et le transfert d’un plan d’éparge logement dans un autre établissement est facturé entre 50 et 80 euros.

L’écart est parfois considérable avec les autres pays de l’UE. La Belgique facture ainsi la gestion d’un compte courant 58 euros, la Bulgarie 27 euros.
L’Association française des usagers des banques (Afub) a qualifié, dans un communiqué, ces résultats de « désavoeu » pour les banques françaises, « qui soutenaient jusqu’à présent être dans la moyenne des frais au regard de leurs homologues européens ».

Outre les tarifs, la Commission dénonce le manque de transparence des banques françaises. Les auteurs de l’enquête ont ainsi été contraints de se déplacer dans plus de 50% des banques en France pour obtenir des informations demandées.

La Fédération bancaire française (FBF) « s’étonne des résultats de l’enquête de la Commission européenne », a-t-elle fait savoir dans un communiqué, assurant qu' »il est impossible d’apprécier [leur] fiabilité ». Elle cite les conclusions d’une étude publiée en 2009 par Capgemini et l’association européenne de management et marketing financiers qui placent la France en-dessous de la moyenne européenne sur le plan tarifaire.

La FBF fait valoir des différences entre profils de consommateurs en Europe et souligne que le Français « est un grand utilisateur de services bancaires », « avec des attentes exigeantes en termes de qualité et de diversité ». La Fédération plaide également pour une prise en compte « globale » de la relation entre banque et client, qui intègre notamment le faible niveau des taux d’intérêt en France, « parmi les plus bas d’Europe ».

Le rapport pointe par ailleurs un autre problème, général à l’UE: la fiabilité des conseils, souvent faussée par des conflits d’intérêts.

Les employés chargés de vendre des produits de banque sont motivés par des commissions ou des bonus qui les incitent à placer ceux conseillés par leur établissement, même s’ils ne sont pas les mieux adaptés aux demandes de leurs clients.

Tous ces obstacles sont autant d’entraves pour les consommateurs, qui ne sont pas en mesure de comparer et hésitent à changer de banque. La Commission juge ces pratiques inacceptables, mais elle n’envisage pas d’agir et ne formule aucune menace. Elle veut juste sensibiliser les consommateurs et va sommer les autorités nationales de prendre des mesures pour mettre un terme aux pratiques qui violent les règles communautaires.

L’enquête a porté sur 224 banques de l’UE représentant 81% du marché.
« Ces informations se révéleront inutiles si elles ne sont pas suivies de mesures concrètes et rapides », a averti Monique Goyens, directeur général du Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC), dans un communiqué.

Source : AFP 22 09 09

Les solutions de sortie de crise se heurtent au vide politique

Frédéric Lordon

Cela fait quinze ans que Frédéric Lordon, directeur de recherche au CNRS, se penche sur les montagnes russes du marché financier. Il fait partie de la petite minorité d’experts de la finance qui se distinguent des 95% formés pour défendre le système. Lordon identifie ce qui est vicié dans la finance du marché. Jusqu’ici, on faisait semblant de ne pas l’entendre. A l’instar de Don Quichotte, il apparaît depuis l’automne 2008 comme le héros problématique dans un univers dégradé.

Invité par l’Université Populaire Montpellier Méditerranée, il a donné une juste mesure du marasme qui a débuté avec la contamination des prêts hypothécaires à risque (subprimes) diffusés aux Etats-Unis depuis 2001.

L’injection de finances publiques est absorbée

« L’injection des finances publiques dans le secteur bancaire ne viendra pas à bout de la contraction des crédits, affirme le chercheur. Plutôt que de renflouer les banques, il aurait fallu consacrer cet argent à restaurer les ménages à un niveau solvable pour sauver les banques. » En d’autres termes le plan Paulson (secrétaire au Trésor de G.W Bush), 700
Md$ financés par le contribuable pour assainir le système financier mondial, est un coup d’épée dans l’eau.

Curieusement absent du débat lors des élections européennes, le plan de relance commun européen devrait passer par un doublement de l’UE au financement du FMI qui passerait de 250 Md à 500 Md de dollars sans débat approfondi au Parlement (Mais le chèque signé de l’UE est pour l’instant de 5 Md$). En revanche 400 Md$ vont être débloqués dans le cadre des plans de relance nationaux.

L’onde de choc se poursuit

Depuis l’automne 2008, les actifs «toxiques» dont les banques cherchent à se débarrasser, ne cessent d’affluer. Le plan américain est passé à 1 000 Md$ et la crise s’accroît de manière cumulative. « En novembre, on est entré en récession. L’explosion des mauvaises dettes des ménages s’est transformée en dette des entreprises. Dans ce contexte, vous pouvez renflouer les banques, elles ne se mettront pas à prêter. Parce que pour un banquier, il devient rationnel de ne plus prêter. » Mais si Frédéric Lordon dénonce le plan de sauvetage bancaire comme un scandale, il admet pourtant sa nécessité. « La densité des flux croisés interbancaires fait que la faillite d’une banque entraîne un risque systémique d’écroulement. C’est-à-dire la volatilisation soudaine de tous les avoirs bancaires. Et cela justifie pleinement l’intervention des Etats qui n’ont pas le choix.» Les dernières évaluations du FMI, qui estime les pertes bancaires à 4 000 Md$ et les moins values boursières à 50 000 Md$, donnent une rapide idée de ce qui nous attend.

Montage Alambic'up

Montage Alambic'up

Les propositions

Une fois n’est pas coutume, après l’énoncé des problèmes, le chercheur esquisse les solutions qui appellent à une modification radicale du système. Et notamment celles qui permettent aujourd’hui aux banques de prendre en otage le gouvernement. Frédéric Lordon se prononce pour l’interdiction de la titrisation qui permet aux banques qui ouvrent un crédit de s’en défausser immédiatement. De reprendre le contrôle des entreprises de bourse par leur nationalisation. D’interdire les transactions de gré à gré. D’instaurer une politique monétaire antispéculative en distinguant les taux d’intérêts spéculatifs des taux réels. Et de réviser les formules de rémunération des traders. Ces mesures sont développées dans son dernier livre*. « Leur moyen d’application a déjà été inventé, affirme-t-il, cela s’appelle la conditionnalité. Elle est mise en œuvre par la Banque mondiale et le FMI pour les pays du Sud. »

Ce n’est pas la méthode qui fait défaut, c’est la volonté des gouvernants. « L’ampleur de la secousse est telle qu’elle ouvre une fenêtre d’opportunité politique », insiste le chercheur. Pour l’heure, avec 30% du PIB mondial et un espace économique autosuffisant, l’UE joue la stratégie de la chaise vide et B. Obama vient de renoncer à une législation posant de manière restrictive des limites à la rémunération des patrons et hauts cadres des sociétés financières. Le Président américain préfère s’en remettre au sens éthique des actionnaires. Mais comme le dit Frédéric Lordon dans son livre : « On n’imagine pas une sortie de l’esclavage par appel à la vertu des planteurs ! »

Personne ne sait ce qui va se passer dans les mois qui viennent…

Jean-Marie Dinh La Marseillaise


Dernier ouvrage paru : La crise de trop, Editions Fayard 19 euros

Voir aussi : Rubrique Finance La spéculation attaque l’UE par le Sud, Les banquiers reprennent leurs mauvaises habitudes, Le Sénat américain  adopte un paquet de dépense,

France: record du nombre de dossiers de surendettement déposés en mars

Economie-finance-banque-consommation   PARIS, 4 mai 2009 (AFP) – Le nombre de dossiers de surendettement déposés auprès de la Banque de France a atteint un record en mars, à 21.747, a indiqué lundi l’établissement, confirmant une information du quotidien Libération. Dès février, le nombre de dossiers avait déjà dépassé la barre des 20.000, selon la Banque de France, qui n’a pas souhaité communiquer le chiffre exact, pour la deuxième fois après mars 2004.

Sur les trois premiers mois de l’année, 58.188 dossiers ont été déposés.
Le nombre de dossiers déposés en mars est le plus important depuis 1990, date de création des commissions de surendettement. En 2008, la Banque de France a enregistré 188.485 dépôts de dossiers, un record, dont 158.940 ont été jugés recevables. Le nombre de dossiers est resté stable ces cinq dernières, évoluant entre 188.176 en 2004 et 188.485 en 2008.

Depuis février 2007, le nombre de ménages surendettés en cours de désendettement s’est stabilisé légèrement au-dessus de 700.000.
La ministre de l’Economie Christine Lagarde a présenté le 22 avril un projet de loi encadrant le crédit à la consommation, afin notamment de mieux prévenir le surendettement des ménages.

La réforme vise particulièrement le crédit renouvelable ou « revolving », une réserve d’argent qui se renouvelle au fil des remboursements, qui est présent dans 85% des dossiers de surendettement, selon une étude du cabinet Athling Management. Les ménages qui ont déposé de tels dossiers possèdent, en moyenne, cinq crédits renouvelables. Le projet de loi encadre la publicité, en imposant des mentions obligatoires, ainsi que la distribution, en portant le délai de rétractation de 7 à 14 jours et en obligeant notamment les établissements de crédit à consulter le fichier des incidents de paiement.