Jean Joubert libre enfance

jean-joubertC’est un poète et un romancier discret dont l’exigence habite les paroles. Il combat pour une poésie ouverte, limpide et maîtrisée dans sa forme qui restitue l’émotion pleine. Avec une certaine prédilection pour exprimer la lumière de l’enfance et sa perte : Portrait.

La voix du grand poète Jean Joubert s’est éveillée à Châlette-sur-loing, près de Montargis en 1928. A vingt ans, il quitte son Guâtinais natal pour s’installer en Languedoc. Il réside aujourd’hui dans un village de l’arrière pays au Nord de Montpellier. On croise son élégance discrète dans certaines rencontres littéraires.  » C’est quelqu’un de très simple dans sa façon d’être, confie son amie de longue date, Annie Estève, qui assure la direction artistique de La Maison de la Poésie dans la région. « Jean Joubert a une profonde nostalgie de l’enfance que l’on retrouve dans sa façon d’être. Dans cette capacité de pouvoir espérer, de jouer, de regarder. Il aime transmettre à la jeunesse et il le fait avec une extrême bienveillance. C’est un homme lumineux et aussi très secret. Il ne fait pas partager ses chagrins, ses soucis. Cela il préfère le taire.

Fils unique d’une famille modeste. Jean Joubert grandit dans un univers d’agriculteurs et d’ouvriers.  » Je considère avoir eu une enfance heureuse. Ce qui est une vision paradoxale car j’ai connu la guerre à la fin de mon enfance. J’ai grandi dans un monde à la fois rural et urbain. » Cette juxtaposition d’univers semble avoir traversé le parcours de l’écrivain. « A Châlette, il y avait encore des troupeaux, et de l’autre côté de la rivière une zone industrielle, avec des usines comme St Gobain et d’autres. »

Son père travaillait dans l’usine anglaise de pneus Huchitson. « J’ai visité son lieu de travail pour la première fois en 1936. Il m’a fait entrer dans l’usine qui était alors occupée par les grévistes. Je me souviens de la visite des ateliers. J’ai découvert les conditions de travail très dures des ouvriers.? »

Faut-il voir là l’origine de son ancrage à gauche? Sans doute, mais l’influence de son oncle Georges, anarchiste pacifiste et sabotier de son métier n’y est pas non plus étrangère. « C’est à lui que je dois mon goût pour la littérature. J’ai reçu de son héritage les œuvres complètes de Zola que j’ai conservées. C’était un homme très convaincu qui avait toujours un livre dans les mains quand ce n’était pas un sabot. Il était marié à une institutrice qui refusait de faire chanter la Marseillaise à ses élèves. Toute ma famille se tenait loin de l’église. Un jour le curé du village a dit : Les Joubert, c’est une famille perdue. Cette formule m’est restée.  »

De l’enfance reste aussi la nature. La grande forêt de Montargis que lui fait découvrir son père.  » Papa m’a aussi initié au jardinage. J’ai toujours eu un jardin dont je me suis occupé. Sauf cette année. Ce qui n’est pas très bon signe. J’ai trop de chose à faire. » Jean Joubert ne s’attarde guère sur sa mère si ce n’est pour dire très sobrement : « Je l’ai au fond du cœur « . Dans le très bon numéro que vient de consacrer la revue Souffles* au poète, l’auteur Béatrice Libert remonte le fil. Elle relève quelques mots de Joubert écrits après la mort de sa mère :  » Comme tu m’as porté,/ en rêve je te porte/ vers des sommets de lumière et de neige « . Jean Joubert revient au cœur de son enfance, habité par les personnages et le « paysage d’eaux lentes et de brumes «  dans son beau roman Les Sabots rouges qui vient d’être réédité aux Editions de l’Ecluse.

Après de brillantes études de lettres, Jean Joubert se spécialise en littérature anglo-américaine et se met à l’écriture. Il poursuit parallèlement une carrière d’enseignant dans un lycée de Montpellier puis à l’Université Paul Valéry. En 1954, son premier recueil de poésie Les lignes de la main est couronné par le Prix Artaud de Rodez dont le jury est présidé par un certain Frédéric Jacques Temple. Au début des années 60, l’auteur s’attaque à l’art romanesque puis à la littérature jeunesse.  » Je suis plutôt un poète qui écrit des romans qu’un romancier qui s’adonne à la poésie « , précise-t-il. L’auteur dit son peu de goût pour la poésie hermétique.  » La poésie est un moment de perception, de réjouissance, un rêve communicable. Elle permet d’aller plus loin. Etant poète je considère que je suis à la fois un homme, une femme, un enfant, un adolescent, un vieillard, un oiseau…« 

Jean Joubert appartient à cette génération d’écrivains vrais et entiers. C’est un franc-tireur qui se refuse aux figures de style ou aux courants intellectuels du moment mais ouvre volontiers, comme le définissait Breton, « au poème qui cogne à la vitre ».

Jean-Marie Dinh

* Souffles revue de l’association des écrivains méditerranéens février 2010.

Bibliographie selective

Poésie Roman et Conte de Jean Joubert a découvrir

L’œuvre de Jean Joubert compte une centaine d’œuvres. En 1975, il obtient le Prix Renaudot pour l’Homme de sable.  » Cela ne m’est pas monté à la tête, mais cela m’a fait du bien, » souligne l’auteur. Parmi ses autres romans on retient : La forêt blanche, éditions Grasset 1969. Les Sabots rouges, éditions Grasset 1979 réédité chez l’Ecluse en 2007. Le lézard grec, Grasset, 1984. Mademoiselle Blanche, Grasset, 1990.

Parmi ces œuvres poétiques Cinquante toiles pour un espace blanc, éditions Grasset, 1987. Les vingt-cinq heures du jour, éditions Grasset Anthologie personnelle, éditions Actes Sud, 1997. Etat d’urgence : Poèmes, 1996/2008, Editions Editinter, 2008.

Littérature pour la jeunesse Hibou blanc et souris bleue, l’école des loisirs, 1978, Les enfants de Noé, un roman d’anticipation écologique prix de la Fondation de France du meilleur roman pour la jeunesse, l’école des loisirs, 1988.

Voir aussi : Rubrique Poésie, Quelques prévisions de veillées poétiques, Voix de la Méditerranée le contenu d’une union , L’espace des mots de Pierre Torreilles, Salah Stétié, Rubrique Rencontre Jean Joubert, Bernard Noël, Gabriel Monnet,

Conte du bambou après la pluie

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Lang Toi le nouveau cirque vietnamien au Printemps des Comédiens

Le jour se lève sur un village vietnamien. Cette image paisible ouvre le spectacle. Elle est belle et le restera jusqu’au bout de la représentation. Une image qui vient contredire partiellement celle d’une mémoire cinématographique où le calme des villages est généralement suivi d’une intrusion brutale de l’armée – française ou américaine – et de scènes de violences insoutenables . Cette page-là est tournée. Ce que donne à voir Lang Toi mon village, c’est l’humanité d’avant-guerre qui a resurgi après-guerre. Parce que les fondements de la culture vietnamienne, son attachement profond à la terre ne semblent pas prêts de s’éteindre.

La nature reine

Ce n’est pas un hasard, si la toute première représentation de nouveau cirque créée au Vietnam a été conçue pour le musée des Arts Premiers du quai Branly. Le spectacle est un tout qui invite à la découverte de la culture vietnamienne. La scénographie et les costumes sont inspirés par la vie rurale des différentes ethnies vietnamiennes (on en dénombre 54). Elle remonte aux origines dans une continuité dramaturgique dont le tempo est calé sur la nature. Si le bambou s’y taille la place du tigre, la force et la souplesse des artistes, une vingtaine sur scène, sont proprement captivante. Rien ne résiste tout se transforme. Avec très peu de moyens, l’âme du peuple vietnamien se façonne sous le regard subjugué des spectateurs. Les groupes se font et se défont faisant par moment surgir la personnalité d’un artiste avant de la fondre dans l’énergie commune. Ce mouvement continu offre un hommage à l’impermanence de toute chose sans se prendre un instant au sérieux.

Captivante densité du style

lang-toi2Prendre le cirque comme témoin n’est pas une simple vision de l’esprit tant celui-ci a, sous l’influence chinoise, traversé les siècles. Les tableaux d’acrobatie, d’équilibre et de jonglerie s’enchaînent dans une parfaite maîtrise technique que l’on oublie captivé par la fluidité des mouvements. La place du rythme est prédominante. L’univers musical qui occupe une place de choix est assuré par un orchestre de cinq musiciens qui explorent avec virtuosité les sonorités des instruments ancestraux (vielle, tambour, flûte, cithare). et accompagnent les artistes sur scène.

Ce spectacle se réclame à juste titre du nouveau cirque du Vietnam. Pour n’être point classique, il n’en est que plus vigoureusement libéré des servitudes traditionnelles et politiques. Ce qui lui permet de renouer librement avec les origines : l’ingéniosité des paysans, le jeu, la poésie, le chant, la douceur et la mélancolie qui fondent l’esthétisme de la culture vietnamienne.

Nhat Ly et Lan Nguyen, les créateurs du spectacle sont français d’origine vietnamienne. Ils ont été formés à l’école nationale du cirque de Hanoi, ont puisé dans la culture occidentale en passant notamment par le cirque Plume et l’école de cirque de Chambéry. Tuan Lé, le metteur en scène,  a gardé sa nationalité vietnamienne, il vit entre Berlin et le Vietnam.  Nhat Ly vient de s’établir à Hanoi où il se consacre à la production de spectacle vivant. A l’image de Lang-Toi-mon village, ces artistes reviennent aux racines à travers une réinvention. Beaucoup plus qu’un simple exercice de style démonstratif leur proposition s’inscrit dans une réelle modernité qui n’a rien à voir avec le pastiche d’un art ancien. Il suffit de s’y rendre pour s’en convaincre.

Jean-Marie Dinh

Le cirque Romanès guidé par une « brindille sur le bord du chemin »

Photo Marie Clauzade.

Photo Marie Clauzade.

Rien dans les poches ». Le cirque tsigane Romanès, c’est presque comme à la maison jusqu’à mercredi au Printemps des Comédiens

Un jour on les voit passer, un autre ils s’arrêtent là où vous habitez, gonflent la toile de leur chapiteau et partagent quelques moments de votre vie avec la leur. C’est comme ça, chez les Romanès, on a le sens de l’hospitalité. On vous accueille au cœur. Toute la famille est là assise face à vous. Ce sont au moins trois générations réunies et disponibles qui participent au spectacle endiablé par une troupe de cinq musiciens qui rythment les numéros d’un bout à l’autre de la représentation.

Fondée par Alexandre Romanès, la troupe de cirque tsigane est née en 1994. Equilibriste et dresseur, l’homme est issu de la famille Bouglione dont il se sépare à vingt ans pour y revenir plus tard en choisissant la vie libre et nomade du cirque itinérant. Alexandre est aussi un auteur. Il écrit des poèmes sur les conseils de Jean Genet qu’il rencontre en 1976 lors d’un spectacle de rue à St Germain des Prés. Tous deux entretiennent une longue amitié jusqu’à la mort de l’écrivain dix ans plus tard. Genet n’avait pas tort. Celui qui ne savait ni lire ni écrire apprend pour exprimer ce qu’il vit. Comme sur les planches, ses mots forment des petits moments représentatifs de ce qu’il ressent « Moi je préfère la brindille sur le bord du chemin et la tresse impeccable des petites filles. » Aujourd’hui son troisième recueil de poésie vient d’être publié chez Gallimard.

Sur scène, Alexandre tient son rôle de chef de famille. Il veille au grain. C’est l’homme orchestre, celui qui assure la sécurité des petits et dit aux grands de bien se tenir. Il paraît difficile d’évoquer un numéro en particulier parce que c’est la famille dans son ensemble qui est l’esprit conducteur. On ne sait jamais vraiment ce qu’il y a d’écrit sous leur crane. Ce sont des poètes, ceux dont les ailes montent et descendent. Ils ont des yeux dans lesquels entre la lumière. Enfants de la balle, acrobates, trapézistes, jongleurs, funambule se succèdent à un rythme effréné entraînant les spectateurs dans un grand vertige. Le chapiteau est un peu grand pour parvenir à nous perdre totalement. Mais la tête tourne suffisamment pour nous faire rejoindre un ailleurs. Demain à l’aube, ils partiront vers une nouvelle destination tirée au sort.

Jean-Marie Dinh

La vie du livre n’est pas un long fleuve tranquille

FRANCE BOOK FAIRSalon du livre 2010. Vitalité de la diversité éditoriale et tendance mutante au premier rendez-vous de l’édition en France.

Le Salon du livre de Paris qui s’est tenu du 26 au 31 mars fêtait cette année sa trentième édition. Commencée sur fond de crise et d’inquiétudes diverses relatives à son avenir, la manifestation s’est achevée sur un bilan assez mitigé. 190 000 visiteurs ont été accueillis cette année soit un recul de 7% par rapport aux 204 000 de l’année 2009. Les vives critiques de certains éditeurs sur le prix de location des stands rejoints par plusieurs conseils régionaux – c’est notamment le cas du Languedoc-Roussillon qui préfère depuis deux ans adapter son soutien à la demande plus spécifique des éditeurs – ne sont sans doute pas étrangères à ce recul.

Plusieurs éditeurs se sont abstenus dont Bayard et le groupe Hachette (Fayard, Grasset, Stock…). Un vent de fronde s’est levé pour un retour au Grand Palais, lieu de naissance de la manifestation qui fut conçue peu avant l’adoption du prix du livre unique en 1981 pour rassembler les acteurs du livre et faire de ce rendez-vous public une manifestation culturelle de première importance.

On peut regretter l’absence cette année d’un pays invité d’honneur, remplacé par un triple hommage, à la littérature turque, russe et africaine autour de la célébration du cinquantenaire de l’indépendance dans quatorze pays africains. Cet éclatement thématique dissipe la force d’un thème central. Comme le souligne Arnaud Laporte, animateur de l’émission Tout arrive sur France Culture : « La pertinence de la formule un « Pays invité » permettait de mettre en lumière des écrivains dont nous n’aurions jamais entendu parler et soulignait le travail remarquable souvent entrepris par des petites maisons d’édition qui ont le goût et l’envie de nous faire découvrir d’autres horizons littéraires, par le biais de la traduction. »

Si en 2008 l’invitation de la littérature israélienne avait entraîné un mouvement de boycott, le coup de projecteur sur la littérature mexicaine, invitée d’honneur l’année dernière, s’était soldé par une vraie découverte avec plus de 20 000 livres vendus.

Le Salon du livre reste, quoiqu’on en dise, une occasion de prendre la température auprès de l’ensemble des acteurs de la chaîne du livre. Avec 63 690 nouveautés parues cette année, malgré la crise, le secteur maintient une stabilité de la production (+ 0,1%) après avoir cru de 62% en dix ans. La tendance se révèle dans les ajustements par genre. En baisse, les ouvrages de loisirs créatifs (- 23%) l’ésotérisme (-11%), la gestion (-13%), on observe en revanche une hausse des romans fantastiques (+20%), des livres de cuisine (+13%) et leur pendant avec les livres de santé et de diététique (+11%). Les romans français accusent une légère baisse de 2% et les romans étrangers de 3%.

L’édition 2010 a tenté de développer la professionnalisation avec l’ouverture d’un centre de droits et du licensing qui a reçu les agents littéraires et les responsables de droits étrangers ainsi qu’un marché des droits audiovisuels ouvert aux producteurs. Mais le salon parisien privilégie toujours la rencontre des écrivains et des lecteurs. Toutes les mouvances esthétiques et les écoles d’écriture s’y retrouvent pour étancher la soif de curiosité du public. Et les interminables files d’attente des lecteurs de Paul Auster, Salman Rushdie ou Amélie Nothom démontrent que les dédicaces convoitées n’ont pas de prix.

Jean-Marie Dinh

Le salon de conversations

Place des Livres, au fond du salon, les débats se succèdent. « Avec ses impératifs liés aux maquettes, la presse offre un espace de plus en plus réduit à la critique, constate Jean-Claude Lebrun qui pratique le genre depuis plus de vingt cinq ans pour l’Humanité. On est obligés d’écarter beaucoup des aspects de l’approche pour restituer un rendu global. C’est aux lecteurs de fournir la part complémentaire… »


Air du temps et du livre numérique qui pose la mort du papier comme un thème littéraire. La presse semble de plus en plus contournable pour les éditeurs qui misent désormais sur les libraires pour assurer le bouche à oreille essentiel pour vendre un livre. Problème, les libraires indépendants sont aussi en danger face au développement des grandes surfaces culturelles ou pas.

Au salon, il y a aussi de petits éditeurs qui remontent leurs manches pour défendre eux-mêmes leurs poulains. C’est le cas des Editions montpelliéraines Le Chèvre feuille étoilé qui, depuis dix ans, publient des femmes méditerranéennes (Wassyla Tamzali, Claude Ber, Maïssa Bey, Peggy Inès Sultan, Catherine Rossi, Najia Mehadji, Leïla Sebbar). Elles sont montées à Paris pour fêter leur dixième anniversaire.

Marion Mazauric

Marion Mazauric

Au diable Vauvert qui a le même âge, a eu la même idée. Eux aussi sont arrivés en famille avec Pierre Bordage, Régis de Sa Moreira, Ménéas Marphil, Nicolas Ray et Catherine Fradier la petite dernière venue présenter son dernier livre Cristal défense qui est sorti la veille. Ce bouquin écrit comme une série TV tombe comme un pavé dans la marre des spécialistes du renseignement économique, du contre-espionnage et de l’info-guerre au cœur des entreprises. Le catalogue du Diable est impressionnant. « Nous sommes nés adultes, précise Marion Mazauric qui dirigeait la collection J’ai lu, avant de créer sa propre structure, La maison est née pour des auteurs traduits qui ne disposaient pas de lisibilité. Notre créneau ce sont des écrivains hors genre pour la plupart issus de la génération née dans les années 60. Je publie ce qui me dérange. Ce qui modifie mon paysage. » la lucidité frappe toujours deux fois !

JMDH

Lecture politique

Les quatorze travaux de Frédéric

mitterrand-lectureLa princesse de Clèves fut la star du salon 2009 après la sortie de Sarkozy qui l’avait rendue si populaire. Alors que le salon fermait ses portes, c’est sans doute pour lui voler la vedette que le ministre de la Culture a présenté quatorze propositions visant à redonner aux Français l’envie de lire. Pour mettre fin «  à la lente érosion de la lecture et à son déclin en tant que pratique culturelle de référence depuis les années 1980 », Frédéric Mitterrand promet de débloquer tous les ans une enveloppe de près de 100 millions d’euros. Dans une société où la lecture ne passe plus uniquement par le support papier, l’ensemble des bibliothèques et médiathèques des communes de plus de 20 000 habitants passeront toutes d’ici à 2015 à l’ère du numérique, avec un accès à Internet et leur propre site web.

Le ministère souhaite également que les 50 bibliothèques des agglomérations les plus densément peuplées après Paris soient ouvertes « 50 heures » par semaine, contre 38 en moyenne actuellement. Enfin, la tradition qui consistait à offrir une anthologie de poésie aux jeunes mariés sera remise au goût du jour, de même que l’opération « Premières pages » qui consiste à offrir un livre à chaque nouveau-né. Frédéric Mitterrand lance A vous de lire ! anciennement Lire en fête . Les festivités sont d’ores et déjà prévues dans toute la France du 27 au 30 mai. Et le bilan des effets concrets de ces annonces un peu plus tard…

Voir aussi : Rubrique Politique culturelle, Elections régionales 2010 l’enjeu culturel,   model culturel français et perspectives,

Rapport pour avis du député Marcel Rogemont sur les crédits création; transmission des savoirs et démocratisation de la culture du Ministère de la Culture et de la Communication présenté au nom de la commission  des affaires culturelles et de l’éducation.

Régionales : Visions croisées sur l’enjeu de la culture

Le Banquet de Lagrasse

Le Banquet de Lagrasse

Culture. La politique régionale du Languedoc Roussillon : bilan, constats et projets en devenir. Un tour d’horizon des propositions des principales listes joignables sur fond de désengagement de l’Etat.

Ni obligatoire, ni optionnelle. A l’image de l’emploi, du développement économique ou de l’environnement, la culture figure, depuis la loi de décentralisation de 1983, dans les secteurs auxquels les Régions doivent concourir au développement. A la faveur de la baisse des crédits d’Etat qui sont désormais inférieurs à ceux des collectivités territoriales, la région Languedoc-Roussillon assume les activités artistiques et culturelles sur son territoire.

blanche-neige-photo_c_jc_carbonne-ed088En 2004, lorsque que la majorité actuelle prends les commandes, tout était à faire.  » Il a fallu construire une stratégie dans tous les secteurs « , indique la déléguée régionale à la culture Josyane Collerais. Le travail se met en œuvre dans une collaboration étroite avec la Drac et le Rectorat. La région initie des conventions d’objectifs pluripartites entre L’Etat et les collectivités.  » Le bilan est très vaste, commente sans modestie la conseillère régionale, On peut citer, la création de L.R cinéma, le développement de l’éducation artistique dans les lycées. Aujourd’hui, 60 000 lycéens sont impliqués. Et nous comptons doubler ce chiffre à l’avenir.  » Conformément à l’image de bâtisseur de son chef, le programme de la liste sortante envisage le développement des éléments structurants, avec le Théâtre Archipel à Perpignan, une salle de musiques actuelles à Nîmes, le développement du pôle cirque d’Alès et la Cité de la Danse à Montpellier… Nous maintiendrons aussi l’emploi dans le secteur et le soutien aux langues régionales et aux radios associatives ainsi que les projets d’actions innovantes « , promet Josyane Collerais.

errance1-depardonAutre son de cloche pour Nicolas Dubourg, de la liste Europe Ecologie :  » Frêche s’est toujours prévalu de mener une politique de pointe, ce qui n’était pas faux à son arrivée à Montpellier, mais aujourd’hui la tendance est à la ringardisation., Souligne ce trentenaire qui a quitté le PS.  » Rien n’est fait pour renouveler les élites artistiques qui fonctionnent en réseaux de pouvoir depuis trente ans. Nous nous défendons la culture dans la diversité des pratiques de chacun en proposant de développer des structures publiques associant acteurs culturels, associations et collectivités, dans un esprit de dialogue.  » Pour faire face au déficit de responsabilité politique lié aux financements croisés, la liste Europe écologie propose de former les élus aux spécificités du secteur culturel.

Robert Lecou, l’ex maire UMP de Lodève,revient lui sur la gestion politique.  » A travers la diversité qui la compose, ses langues, son patrimoine… notre région a une identité forte. Elle est porteuse d’un message culturel qui doit être valorisé. Je ne veux pas m’attarder sur les critiques du système Frêche. Je dis seulement moins de bla-bla et davantage d’actes et d’équité pour les acteurs culturels qui viennent de tous les bords politiques.  » Le député de droite voit dans la culture  » un formidable levier économique « . Son candidat Raymond Couderc, qui était en charge des finances sous la mandature Blanc veut soudainement faire passer le budget de la culture de 3,6% à 5%.

THE LIMITS OF CONTROLJean-Pierre Gallepe, du Front de Gauche, souligne l’absence de transparence :  » L’exemple de la nomination du directeur des Treize Vents qui s’est décidée lors d’une conversation intime entre Georges Frêche et le ministre de la Culture, me vient à l’esprit comme la chasse aux sorcières qui a fait suite à l’élection Frêche. Aujourd’hui c’est pareil. Il est très difficile pour les acteurs culturels de prendre position contre le président car tous le monde craint les conséquences. «  Le Front de Gauche souhaite renouer avec la réflexion collective.  » Frêche favorise les centres principaux. Les grands ténors font vitrine et les pratiques amateurs, comme l’éducation populaire, sont oubliées. Nous pensons aussi que la question de la gratuité doit être posée pour élargir l’accessibilité de l’offre.

Entre images et réalités

La politique culturelle régionale serait-elle par sa nature propice au flou artistique ? Sur le papier, les grands objectifs poursuivis mis en œuvre à l’issue des lois de décentralisation concernent l’aménagement culturel du territoire, la mise en valeur du patrimoine, l’éducation artistique, le soutien à la création… Mais le secteur protéiforme de la culture prête à bien des interprétations et rend l’évaluation des politiques menées difficile.

Ici, comme dans d’autres secteurs, la particularité de la région Languedoc-Roussillon tient à son système de gouvernance. On confond trop souvent culture politique et politique culturelle. Après avoir mis la culture au cœur de sa stratégie municipale avec succès, l’ancien maire de Montpellier a tenté de reproduire ce schéma en région. Il n’a cessé de presser les grosses machines culturelles de la capitale régionale à décentraliser leur offre sans produire de résultats probants. La mandature régionale de Georges Frêche a cependant fait évoluer les choses, dans le domaine de l’audiovisuel notamment avec l’ouverture de l’antenne régionale du cinéma, dans celui des arts plastiques avec la mise en place de grandes expositions itinérantes et dans le travail de valorisation du patrimoine. Sur ce dernier point où les actions fédératrices sont plus simples, la Région travaille main dans la mains avec l’Etat. Mais il ne suffit plus aujourd’hui d’envisager la culture comme faire-valoir économique. Avec l’apparition des nouveaux modes de consommation culturels surgit l’urgence d’un soutien à la culture en tant qu’outil de socialisation.

Jean-Marie Dinh

Voir aussi : Rubrique politique culturelle, le modèle français, Lien Externe , facteur culturel gauche et droite,