Car tu es poussière de Pinter : Une mémoire à trou cyclonique

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Un texte méconnu de Pinter

Car tu es poussière d’Harold Pinter mis en scène par Stéphane Laudier d’après un texte adapté par Jean-Marie Besset ouvre actuellement la saison du CDN à Grammont. Cette
pièce poignante du Prix Nobel britannique fut écrite et montée en 1996 au Théâtre du Rond-Point à Paris. Elle est donnée, comme il se doit en petite forme.

Artisan éclairé de l’écriture dramatique, Pinter aborde la Shoah par le truchement de la mémoire d’une femme. Nichée dans la sphère intime d’un couple en situation d’échec, la tragédie s’émancipe progressivement de l’espace intérieur pour rejoindre l’histoire collective.

Adepte de l’essentiel, Stéphane Laudier concentre son travail sur le pouvoir hypnotique du texte en puisant en profondeur dans les ressources des deux comédiens. Dans le rôle de Rebecca, Fanny Rudelle se révèle saisissante d’authenticité, tandis que son compagnon Jean-Marc Bourg (Devlin) campe un jeu subtil et périlleux qui vise autant à interpréter la fêlure de sa compagne qu’à y succomber.

Orfèvre de la dérive humaine, Pinter aborde le traumatisme sous l’angle des dégâts et non
de la réparation. Le texte fragmenté exhume la blessure d’une mémoire qui refuse à se révéler. Trahie par la résistance au sens commun, la charge de l’émotion s’en trouve décuplée. On frise parfois l’absurde.

Le respect porté au texte et la précision du jeu restitue l’étendue sous-tendue par cette oeuvre extrême.

JMDH

Après la création à Montpellier, le spectacle « Car tu es poussière » sera en tournée dans la région Languedoc-Roussillon : A Narbonne, au Théâtre Scène Nationale les 3 et 4 décembre 2013 et à Pézenas en juin 2014, dans le cadre du festival Molière dans tous ses états

Voir aussi : Rubrique Théâtre, Arthur Nauzyciel  Le rôle des alliés face au génocide,

Opéra orchestre de Montpellier. Le vaisseau fantôme sort de la tempête

 Après deux années de tempête la sérénité pointerait-elle à l’horizon pour l’Opéra orchestre national de Montpellier ? L’annonce des candidats retenus pour succéder au prince de la discorde, Jean-Paul Scarpitta va dans ce sens. Celui-ci devrait céder ses fonctions de directeur général à la fin de l’année et conserver son poste de directeur artistique jusqu’en juillet 2014.

La nomination du nouveau directeur général sera connue le 18 novembre prochain. Le statut associatif de la maison sera transformé en EPCC (établissement public à caractère culturel) dès la fin de l’année. Mais le chantier de restauration du navire ne fait que débuter.

Le conflit ouvert entre l’ensemble des personnels et le directeur général de la structure s’était propagé aux deux principaux tuteurs de la structure, l’Agglomération de Montpellier et la Région, dans un duel politique opposant les deux présidents socialistes. Le coup de poker du président de Région Christian Bourquin menaçant de suspendre la subvention régionale de 9,5 M d’euros restera dans les mémoires, même si celui-ci est revenu partiellement sur sa décision en maintenant un apport financier régional de 3,5 M. A la tête de l’Agglo dont l’enveloppe s’élevait déjà à 10M, Jean-Pierre Mourre s’est engagé à subvenir au désistement, mais en a-t-il les moyens ?

Le budget global qui oscillait entre 23 M et 24 M devrait accuser cette année une baisse conséquente pour s’établir autour de 20 M. « Nous nous donnons deux ans pour revenir au budget, peut-être moins…», confie Nicole Bigas, vice-présidente de l’Agglomération déléguée à la Culture. Le résultat des élections municipales pourrait en effet avoir une incidence sur l’hypothétique retour d’une participation financière de la Ville de Montpellier.

Cinq candidats en lice

Un jury constitué des représentants qualifiés des différents tuteurs et de professionnels unanimement reconnus a établi une sélection de cinq candidats sur les 52 dossiers déposés. Parmi les critères de sélection figuraient notamment l’expérience, la légitimité artistique, le fait d’être en activité, de disposer d’un réseau européen, d’avoir des compétences musicales, managériales et de gestion… Toutes les exigences de fiabilité qu’exigent souvent les tuteurs après une expérience malheureuse.

Le nom de la personne qui succédera à Jean-Paul Scarpitta à la tête de l’Opéra orchestre
national de Montpellier sera connu le 18 novembre, après une audition des cinq candidats:
Valérie Chevalier-Delacour (directrice de l’administration artistique de l’Opéra de Lorraine),
Laurent Spielmann (directeur de l’Opéra de Nancy depuis 2001), Alain Surrans (directeur de l’Opéra de Rennes depuis 2005, actuel président du syndicat des directeurs d’opéras), Georg-Friedrich Heckel (patron de l’Opéra de Darmstadt en Allemagne) et Eric Vigié (directeur de l’Opéra de Lausanne).

Du côté des personnels, on estime «extrêmement important de redémarrer avec une personne de dialogue et un directeur artistique de qualité». La question du salaire du futur directeur tiendra également une place importante lors de la dernière audition. Mais avec ses deux salles, son orchestre de cent musiciens et son choeur de 32 chanteurs la maison qui a été en souffrance n’en demeure pas moins attractive.

Jean-Marie Dinh

Source : L’Hérault du Jour 04/11/2013

Voir aussi : Rubrique Musique, rubrique Montpellier,, rubrique Politique culturelle,

Orphée consolée par la modernité

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Rentrée lyrique à l’Opéra Comédie avec Orfeo ed Euridice  de Gluck mis en scène par Chiara Muti. Dirigé par Balàzs Kocsàr, avec Marie Karall (Orféo), Eleonora Buratto, (Euridice) et Christina Gansch (Amore).Durée 1h 40.

Dans la version de Gluck créée en 1762, le mythe grec d’Orphée et Euridice liée à la religion du mystère est abordé sous un jour nouveau en rupture avec l’adaptation lyrique qu’en avait donné Monterverdi en 1607. « Le livret n’est plus qu’un prétexte et sa mise en musique résulte d’une réflexion collective menée par Gluck et ses collaborateurs. » souligne, Chira Muti. Pour la metteur en scène, le choix de la version viennoise en italien relève d’une volonté de restituer selon, une rigueur initiale quelque peut  édulcorée, pour satisfaire au goût des Français, par Gluck lui-même lorsqu’il endossa le titre de professeur de clavecin de Marie-Antoinette, puis par Berlioz. « L’œuvre viennoise souligne la pureté et la limpidité de la musique de Gluck » soutient la fille de Ricardo. Cet approche, plus synthétique se traduit p/2013ar une action resserrée, mettant en avant la clarté et la simplicité de l’expression des émotions avec une mise en avant du chœur et des ballets.
L’œuvre baigne dans l’esprit des Lumières, avec de nombreuses références maçonniques et une mise en avant de la raison et de la mesure qui aboutissent à une rédemption. Orphée ne peut refuser la mort, fille de la nature mais elle parviendra à faire son deuil…

JMDH

Opéra Comédie , vend 27 sept à 20h, Dimanche 29 à 15h et mardi 1er octobre à 20h.

Source : L’Hérault du Jour, 20/09/2013

Voir aussi : Rubrique Musique, rubrique Montpellier,

Un partenariat sous le signe de la sagesse confucéenne

L'institut Confucius de Montpellier

L’institut Confucius de Montpellier

Coopération. L’ouverture de l’institut Confucius à Montpellier devrait renforcer les liens avec Chengdu et la Chine.

L’opération qui a mobilisé les trois universités montpelliéraines, la Ville et le rectorat durant un an et demi s’est conclue hier par l’inauguration de l’institut Confucius de Montpellier, l’équivalent chinois des Instituts français. Facilité par un jumelage de longue date entre Montpellier et Chengdu initié dès 1981 par Georges Frêche et relayé par Hélène Mandroux avec la création de la Maison de Montpellier à Chengdu en 2006, l’opération a été rondement menée.

« La principale difficulté a été de convaincre Pékin, confie le président de Montpellier 2 Michel Robert, le ministère de l’Éducation a mis un frein à l’ouverture des instituts Confucius dans le monde. Il y avait douze candidats sur ce dossier. Je crois que nous l’avons emporté grâce aux relations de confiance tissées avec nos homologues de Chengdu et grâce à l’originalité de notre proposition qui offre un modèle associant les universités, la Ville et l’État à travers le rectorat. »

Ce dernier prend en charge l’un des postes de la direction bicéphale franco-chinoise. La
ville met les locaux à disposition et le budget de fonctionnement sera assuré par l’organisme d’État Hanban qui gère les 282 instituts Confucius dans le monde. La collaboration scientifique a déjà débuté entre Montpellier 2 et l’UESTC de Chengdu. Elle renforce les liens existants entre les hôpitaux des deux villes dans la recherche sur le cancer et le diabète. Ce nouveau rapprochement devrait déboucher sur la mise en place de projets avec les trois universités montpelliéraines, notamment dans le domaine des sciences sociales, de la technologie électronique et de la biologie.

L’institut Confucius dont la vocation première est de diffuser la culture chinoise dispensera
des cours de langue, répondant aux besoins des étudiants mais aussi aux désirs des Montpelliérains. Il devrait aussi être à l’origine d’interventions dans les lycées autour de la langue et de la culture. Sur place, on pourra suivre des conférences sur la société chinoise ou s’initier à la cuisine. Les entreprises pourront y trouver des ressources.

C’est plutôt à bon escient que l’économie de marché chinoise convoque le sage Confucius.

Jean-Marie Dinh

Source : L’Hérault du Jour 20/09/2013

Voir aussi :  Rubrique Montpellier, Le jumelage Montpellier Chengdu, rubrique Chine, Confucius ou l’éternel retour,

Delteil : J’ai été créé pour me tourner les pouces au soleil.

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Delteil lettre B comme Baiser « Le mot baiser, si chaste en substantif, si lascif en verbe ». photo Dr

Roman. Avec «Delteil Soleil», l’écrivain audois Jean-Louis Malves célèbre la Saint Joseph avec un alphabet pour lui rendre hommage.

Les 26 courts chapitres de Delteil Soleil sont autant de fenêtres ouvertes par l’écrivain audois Jean-Louis Malves pour éclairer l’homme que fut son ami Joseph Delteil. Du « A » comme Alice, l’une des trois héroïnes pubères et vierges de Choléra qui se donne la mort par amour : « Alice se jeta dans le lac, en silence de tout son long, mais de telle façon toutefois que la bouche d’abord touchât l’eau et que cette mort commençât par un baiser », au Z de Zénon et de ses paradoxes comme celui du temps que traverse l’oeuvre du poète, les 26 lettres de l’alphabet assemblées avec la liberté d’un grand jardinier produisent une nouvelle floraison de mots. Mots que Delteil considérait comme des êtres vivants, mots qui dessinent une existence lumineuse, mots dont surgissent une soif nouvelle qui pousse vers les sources d’une oeuvre immense.

C’est le 4e ouvrage que Jean Louis Malves signe à la gloire de son ami Delteil. Ce frère audois avec qui il partage l’amour de leur département natal. On mesure à la lecture, ce que le Midi doit au poète – pas seulement par ce qu’il fut représentant en blanquette de Limoux – et réciproquement ce que le poète doit au Midi. Ce goût de la terre qu’on emporte avec nous sous les semelles, ce goût du sang et de la provocation que l’on a dans la bouche, cet accent effroyable au yeux des grands intellectuels vaniteux comme Derrida. « Delteil est un petit homme blond dont il faut passer sur son air si ordinaire, si pauvret, si empêtré, pour voir qu’il a des traits fins et un regard candide

Il faisait partie de ses individus qui ont l’art de s’attirer les foudres. A ses débuts, dans les années vingt, il fut associé au premier équipage des surréalistes. La parution, en 1922, de son premier roman Sur le fleuve Amour attire l’attention de Louis Aragon et André Bre- ton, ce dernier le cite dans son Manifeste du surréalisme comme l’un de ceux qui ont fait « acte de surréalisme absolu ».

Puis vînt l’excommunication pour s’être attaqué à des sujets (les poilus, Jeanne d’Arc, Jésus…) en apparence plus conservateurs, touchant à la fibre patriotique encore à vif. « Suffisant pour déclencher la colère divine du clan Breton», souligne Jean Louis Malves. C’est à la suite de la parution de Jésus II dans les années 30 que Delteil rencontre Henry Miller avec qui il lie une profonde amitié qui donnera lieu à une longue correspondance rassemblée par le poète Frédéric Jacques Temple qui partage la retraite occitane de Delteil au même titre que Brassens et Soulages. «J’ai été créé pour me tourner les pouces, au soleil, sur une plage » affirmait Delteil avec un goût certain de la provocation.

Jean-Marie Dinh

Delteil Soleil, éditions Domens, 20 euros

Source. La Marseillaise 17/08/2013

Voir aussi : Rubrique Livre, Littérature française, rubrique Culture d’Oc, rubrique Poésie,