Rencontre avec l’auteur israélien Yishaï Sarid au Festival international du roman noir à Frontignan.
Né en 1956 à Tel-Aviv, Yishaï Sarid est le fils d’un député de gauche militant pour la paix. Son deuxième roman, « Le poète de Gaza » traduit de l’hébreu au printemps a été salué par la presse israélienne. Un ouvrage captivant qui évoque la vie d’un agent israélien de la sécurité intérieure dont l’engagement contre les attentats terroristes le conduit régulièrement à s’exonérer les droits de l’homme. A l’occasion d’une mission, il croise le chemin d’une romancière israélienne et d’un poète palestinien. L’humanité de ces rencontres vient perturber son sens aveugle du devoir.
On est saisi par le rythme de votre thriller qui joue finement sur l’intensité émotive du personnage et on adhère tout de suite à votre style épuré. Quelle a été votre démarche du point de vue de l’écriture ?
« Je voulais me garder de l’émotion facile, éviter les stéréotype de situation. J’ai beaucoup travaillé pour épurer le style sans endommager le sentiment. Je me suis efforcé de restituer la façon dont mon héros parle et pense en restant proche de lui à un point où j’ai pu voir à travers les yeux du héros.
On suit cet homme dans sa vie de tous les jours avec ses difficultés familiales et professionnelles. Ce personnage n’a rien d’une brute. Il est cultivé, sensible et en même temps, il est animé d’un sentiment patriotique très fort qui joue presque contre lui…
En Israël la famille est très importante. Dans cette histoire, le personnage n’arrive pas à gérer cette situation. Quand il a fini son travail, il rentre chez lui mais ne parvient pas à s’adapter à une situation normale. Il est aspiré par son engagement qui lui fait perdre le contrôle de sa propre vie.
Le livre fait état d’une situation politique à l’égard de laquelle vous prenez une distance très mesurée.
Je ne voulais vraiment pas faire du roman un thème politique. Ce n’est pas intéressant, ce qui présente de l’intérêt c’est la dimension humaine. A travers les yeux du personnage principal, je regarde ce qui se passe en essayant de ne pas le juger parce que je pourrais très bien me trouver à sa place. En Israël, la politique est une histoire sans fin. Ce sont toujours les mêmes situations qui se répètent. Traiter de politique à travers la littérature ne sert ni la littérature ni la politique. Ce qui m’intéresse ce sont les conséquences d’une situation politique sur les gens. Cela peut d’ailleurs avoir un impact profond sur la conscience du lecteur.
Comment vivez-vous votre condition d’artiste israélien lorsque vous êtes à l’étranger ?
C’est assez variable. La situation diffère entre les Etats-Unis et l’Europe où la question palestinienne est posée de manière plus exacerbée. Moi je suis un homme de gauche, mais je me sens aussi patriote. De manière générale, quand on sort d’Israël on est considéré comme des ambassadeurs du gouvernement et quand on revient dans le pays on nous considère comme des opposants critiques… »
Arabesques est un festival qui s’est bâti ici sur l’enthousiasme et la volonté d’échanges avec les cultures de l’autre rive de la méditerranéenne. En rendant compte d’une pluralité d’expression artistique où se mêle tradition et modernité, il offrait en perspective le désir d’une jeunesse que confirme le mouvement de démocratisation impulsé dans les pays arabes qui surprend le monde depuis six mois. Il faut rendre hommage à l’équipe d’Uni’Sons pour la volonté de conduire ce projet et au Conseil général de l’Hérault de lui avoir fait confiance, car souvent les vérités ne sont pas bonnes à dire avant l’heure.
On peut s’attendre à ce que cette sixième édition soit emprunte d’un vent de joie et de liberté particuliers dont la mesure nous en sera offerte dès ce soir. A 18h débute sur l’esplanade royale du Peyrou de Montpellier – qui porte singulièrement bien son nom pour l’occasion – la parade équestre et musicale marocaine. Un avant goût des réjouissances à retrouver au Domaine D’O du 20 au 22 mai.
Cette année Arabesques investit l’ensemble du site départemental dédié à la culture. Al andaluz, le paradis éternel ouvre vendredi la grande soirée de l’amphithéâtre avec le spectacle Rêves d’Andalousie qui fusionne l’esprit andalou. Une ébullition joyeuse et colorée de musiques et de danses arabes, de flamenco et de poésie s’inscrit sur scène sous le signe de la tolérance propre à cette civilisation.
Samedi ce sera au tour de l’orchestre national de Barbès de faire vibrer la grande scène qui donne la part belle aux « péchés originaux ».
Dimanche l’orchestre traditionnel Marrakechi Jil Jilala jouera sur les modulations vocales pour exhumer les textes malhouns du terreau de la culture maghrébine et renouer avec les maîtres musiciens de l’art gnaoua. Les spectacles de 19h de la Kasbah D’o sont très alléchants. A ne pas manquer notamment le Trio Joubran qui fera parler le oud avec la Palestine au cœur et de nombreuses rencontres autour du monde arabe.
L’historienne Agnès Carayon retrace » la destinée héroïque des cavaliers zénètes berbères «
Agnès Carayon est historienne, spécialiste du cheval dans le monde arabe médiéval. Elle s’est intéressée au statut du cheval et du cavalier dans la civilisation d’al-Andalus, notamment au rôle décisif des berbères zénètes et de leur chevaux à barbes dans l’armé musulmane d’opposition à la Reconquista (reconquête chrétienne des royaumes musulmans de la péninsule ibérique). Elle consacre aujourd’hui ses recherches à un autre peuple d’éminents cavaliers en terre d’islam : les Mamlûks d’Egypte.
D’où vient l’origine des Fantasias dites aussi Tbourida ?
« A l’origine la Tbourida provient des zénètes une branche de la confédération berbère qui occupait les hauts plateaux du Sahara et les franches côtières au Moyen âge. Les membres de la cavalerie légère des Berbères zénètes étaient renommés pour être de grands guerriers. A l’époque il n’y avait pas d’arme à feu. Durant la Reconquista, la cavalerie lourde des Chrétiens s’est trouvée dans un premier temps décontenancée par cette façon de combattre. Puis ils décidèrent de l’adopter, lui donnant le nom de monta a la gineta (Le bon cavalier) en l’honneur de ces Berbères qui excellaient en sa maîtrise. Les Zénètes qui étaient nomades se sont progressivement sédentarisés. Ils ont fondé des dynasties importantes notamment au Maroc. Ils ont mis le cavalier à l’honneur. Ce sont les ancêtres de la Fantasia.
L’Andalousie actuelle reconnaît-elle ou ignore-t-elle plutôt l’héritage de ses cavaliers Berbères ?
Cet héritage a été accepté dès le Moyen âge. A l’époque, l’art équestre des cavaliers guerriers a été intégré dans toutes les cours d’Espagne. On montrait ainsi une certaine admiration à l’égard des Maures. Les cavaliers zénètes sont également entrés dans la littérature. Le cheval andalou provient du croisement avec des purs sangs arabes. Aujourd’hui toutes ses choses sont un peu noyées.
Le Maroc célèbre ses fêtes nationales et religieuses avec des Fantasias, ces manifestations véhiculent-elles une dimension spirituelle ?
La destinée fantastique du cheval arabe est étroitement liée à l’Islam. Selon la légende, Allah aurait créé le cheval arabe. « Deviens chair, car je vais faire de toi une nouvelle créature, en l’honneur de mon Saint Dieu, et pour la défaite de mes ennemis, afin que tu sois le serviteur de ceux qui me sont soumis », aurait-il dit au vent du Sud avant de prendre une poignée de vent, de souffler dessus et de créer l’animal. Ce qui donne au cheval un statut particulier. Mais aujourd’hui les Fantasias font partie du folklore. Ce sont surtout des mises en scène qui donnent à voir le savoir-faire des cavaliers.
De quelle façon ?
L’équipe de cavaliers se met en place. Elle vient saluer le jury puis exécute une charge suivie d’un arrêt brusque et d’une salve de tirs. La rapidité de la charge et la simultanéité de l’arrêt et des coups de feu donnent toute la beauté à la chevauchée.
L’invitation d’Arabesques concernait la troupe cavalière de Sofia Balouk. A l’arrivée on trouve des cavaliers n’est ce pas significatif d’une certaine crispation à l’égard des femmes ?
La société royale d’encouragement du cheval est le principal levier du développement de la filière équine au Maroc. Elle est dirigée par la princesse Lalla Anima qui avait donné son accord. Le fait que cette tradition marocaine soit représentée par des femmes qui sont pourtant de plus en plus nombreuses à accéder à cette discipline, n’a pas été apprécié au plus au niveau marocain. Ce qui est de mon point de vue assez significatif ».
Jean-Marie Dinh
Agnès Carayon évoquera les origines de la Fantasia lors des veillées équestres les 20 et 22 mai au Domaine d’O.
Mine G. Kirikkanat : " L'Europe a oublié l'histoire"
Mine G. Kirikkanat. Invitée dans le cadre du Festival International du Roman noir de Frontignan, l’auteur turque rappelle la place de sa culture dans l’identité européenne.
Mine G. Kirikkanat est née à Istanbul. Journaliste, sociologue et écrivain c’est une intellectuelle laïque qui a décidé de rester dans son pays pour défendre ses idées. Dans La Malédiction de Constantin (Métailié, 2006) et Le sang des rêves (1) qui vient de paraître, elle soutient une vision historique de la culture ottomane constitutive de l’identité européenne.
Le sang des rêves est un roman politique d’anticipation dont l’action principale se situe à Chypre. Istanbul est passé sous le contrôle des Nations Unies. La ville rebaptisée Nova Roma est devenue l’enjeu d’une nouvelle guerre froide. La Russie orthodoxe rivalise avec le Vatican et une hétéroclite union chrétienne occidentale. Trois agents européens d’origine turque sont chargés de retrouver des descendants d’un chef historiquement indiscutable afin de légitimer le pouvoir en place. La quête passe notamment par l’exploration des rêves de l’héritier supposé de Constantin le Grand qui porte la mémoire génétique du meurtre de son ancêtre.
Pourquoi réinstaurer la vision d’un affrontement entre deux blocs, alors que nous sommes sortis si péniblement de la guerre froide. L’idée d’une gouvernance mondiale multipolaire n’a-t-elle pas d’avenir à vos yeux ?
C’est mon côté métaphysique. Ying-Yang ou blanc noir si vous préférez, un jeu de forces contraires qui s’équilibrent. Cela vient aussi d’une analyse sociologique ; je pense que le bipolaire est une étape pour aller vers le multipolaire. Aujourd’hui, ce type de gouvernance nous conduirait objectivement vers beaucoup plus de guerres. Je considère la gouvernance bipolaire comme une période transitoire en attendant que les races soient suffisamment mélangées pour accéder aux multipolaires. Mais pour l’heure, l’histoire se répète. Le conflit génocidaire serbo-croate qui a secoué l’Europe dans les années 90, s’était déjà produit il y a un millénaire entre l’église d’Anatolie et l’église orthodoxe de Constantinople. Les Bosniaques (appelés Bogomiles) ont un lien de filiation avec les Cathares. Dans les Balkans, à l’époque de la première croisade, ils ont demandé la protection du sultan ottoman. Celui-ci les a laissés libres de choisir leur religion assurant qu’ils les protégeraient s’ils devenaient musulmans.
En ce début de XXIe siècle, la religion vous paraît-elle l’instrument du pouvoir politique ou directement à l’origine des conflits de pouvoir auxquels elle donne lieu ?
Je me suis beaucoup intéressée à la sociologie des religions et notamment à l’apparition de la religion. Au commencement, la religion est liée à la peur de la mort. S’étant forgé une conscience, il fallait que l’homme invente quelque chose face à ce vide, une vie dans l’au-delà, un espace magique, une religion… Les choses se sont gâtées avec l’apparition des religions monothéistes. C’est à partir de là que la religion est devenue une arme politique. C’est pour cette raison que la laïcité est si importante.
On constate en France un recul de la laïcité alors qu’elle est au cœur même du principe républicain…
C’est vrai que cet axe est mis à mal en France qui est le seul pays laïque de l’UE. De la même façon que les valeurs universelles qui n’occupent plus la même place. Tous les Etats ont mué pour devenir des structures économiques. De ce fait, les gens ont perdu le sens des choses. Aujourd’hui, l’UE est une machine kafkaïenne qui n’a aucune vision européenne.
Sur quoi se fonde, selon vous, l’identité européenne ?
L’identité européenne ne doit pas se construire sur les valeurs judéo-chrétiennes mais sur une vision séculaire laïque. La charte des droits fondamentaux dirigée par Guy Braibant et soutenue à l’époque d’une seule voix par Chirac et Jospin allait dans ce sens. L’Allemagne souhaitait faire figurer l’héritage judéo-chrétien. En définitive, pour faire adopter la constitution, on a déformé cette charte en faisant des concessions à tous les courants et en entamant l’identité même de l’Europe. En substance, la charte conditionnait l’entrée dans l’UE au fait de se déshabiller de ses relents fascistes et religieux. On connaît la suite. Avec l’élargissement aux pays de l’Est sous l’influence des Etats-Unis on a, au détriment de toute raison, obligé l’UE à devenir une machine à sous. L’OMC a imposé sa logique globale et glauque. D’ailleurs, cela a surtout servi la Chine et l’Inde, tant mieux pour eux. Les Etats-Unis qui croyaient sortir leaders de cette manœuvre mangent leur chapeau. C’est comme la ligne Maginot, on attend avec obstination les choses d’un côté et elles arrivent d’ailleurs.
Que pense le peuple turc de tout ça ?
La population turque n’est pas un bloc monolithique. Sur 75 millions d’habitants, nous avons 30% d’islamiques, 30% d’Alévis, un courant proche des traditions soufies et favorables à la laïcité, et 40% de laïques qui ne sont pas près de démordre des valeurs républicaines. Pour se faire élire le président Gül* a pris l’engagement de respecter les valeurs laïques mais il ne s’y tient pas vraiment. Une poignée d’intellectuels a tout de suite décelé la posture du président et dénoncé l’hypocrisie. Mais en Europe tout le monde a applaudi. Dès 2003, il fallait dire à la Turquie qu’elle serait intégrée à l’UE après le bannissement de l’enseignement coranique obligatoire et le respect intégral des règles démocratiques. Mais l’UE a temporisé. Avec la crise de Gaza, elle commence à prendre conscience de la situation. En feignant d’oublier que les Ottomans ont fait l’histoire de l’Europe avec les judéo-chrétiens, elle a joué avec le feu et aujourd’hui il y a le feu.
Que voulez-vous dire ?
Si les Turcs deviennent hostiles à l’UE qui pourra arrêter l’influence de l’Iran, de l’Afghanistan, et du Pakistan ? Les Turcs font aujourd’hui les cerbères aux portes de l’Europe, ils filtrent le flux migratoire en provenance de toute l’Asie centrale. L’UE est complètement dépendante de la Turquie. La population turque est jeune. La Turquie est un pays plein d’avenir et il constitue la seconde force armée de l’Otan.
La Turquie semble amenée à jouer un rôle de plus plus important dans le conflit israélo-palestinien ?
Je me considère personnellement comme une amie d’Israël, qui voulait être un exemple d’humanité et de démocratie au Moyen-Orient. Mais à la place de cela, les Israéliens ont mis leur existence en danger parce qu’ils sont entourés de haine dont ils sont en grande partie responsables. Et cela les rend fous. Aujourd’hui la stupidité de leur politique leur a fait perdre la notion de l’espace et du temps. La Turquie demeure un interlocuteur privilégié dans la région. Sur les tee-shirts des jeunes de Gaza, on voit plus l’effigie du Premier ministre turc Erdogan que celle des membres du Hamas. Là encore, l’UE ne mesure pas les enjeux qui concernent aussi ses relations avec le Maghreb. A travers l’intégration de la Turquie au sein de l’UE se joue aussi la reconnaissance identitaire des pays d’Afrique du nord. L’Europe a oublié l’Histoire.
Receuilli par Jean-Marie Dinh
* Abdullah Gül est membre du parti musulman de centre droit AKP il a été élu pour 4 ans en août 2007.
(1) Le sang des rêves, éditions Métailié 2010, 18 euros.
ELIAS SAMBAR est Ambassadeur de la Palestine auprès de l’Unesco son dictionnaire amoureux de la Palestine livre une approche à la fois profonde et fluide.
A propos de la Palestine, vous évoquez le trouble comme la difficulté d’évoquer un pays qui n’existerait pas encore. La rédaction de ce dictionnaire a-t-elle contribué à un éclaircissement ?
« Cela n’a pas éclairci ma position sur le fond. Mais chaque mise en forme écrite implique une reprécision qui n’est pas une redécouverte. Ce qui est intéressant et sympathique dans la rédaction d’un dictionnaire, c’est la forme éclatée en apparence. Ce ne sont pas des informations parcellaires, il revient au lecteur de faire les liaisons. A première vue ces liaisons n’existent pas en réalité, elles font partie d’un squelette invisible qui suppose que l’auteur soit parfaitement clair dans ses idées.
Comment avez-vous travaillé sur les entrées ?
Les entrées fonctionnent en écho. Un dictionnaire peut être lu par tous les bouts. Ce qui offre au lecteur un rapport plus libre. J’ai pris plaisir à construire ce livre. Le jeu des échos correspond à ma façon de travailler. Je commence sur une entrée et je poursuis en me demandant ce qui résonne avec ces propos.
Vous rendez hommage à beaucoup de vos amis, Darwich, Farouk Mardam-Bey, Genet, G.Deleuze, Daniel Bensaïd… dont la pensée trouve place au sein du livre. A propos d’Edward Saïd* vous évoquez un différent relatif aux accords d’Oslo ?
Il pensait que l’analyse n’était pas la bonne et la façon de s’y prendre non plus, ce en quoi je le rejoignais. Notre éloignement n’était pas lié au bilan des accords mais au fondamental. Pour moi la négociation n’était pas le plus important. J’avais la conviction et je l’ai toujours, que l’élément majeur se situait dans le principe d’une reconnaissance mutuelle. Oslo marque le point à partir duquel le nom Palestine redevient réel. Il y a évidemment les reculs et les épisodes en dents de scie, le développement monstrueux des colonies qui ont triplé depuis l’accord (signé en septembre 1995) mais après avoir été nié par la terre entière le nom Palestine a resurgi de l’absence. Pour moi Arafat reste l’homme qui a symbolisé le retour de ce nom.
En quoi consiste votre fonction au sein de l’Unesco ?
Sur les 193 Etats membres, la Palestine est le seul pays occupé. Je m’occupe des questions relatives à l’éducation, la science, la culture, le patrimoine mais dans un contexte plutôt particulier. Il est difficile d’imaginer les efforts qu’il faut déployer pour attribuer des bourses aux étudiants de Raza. Il faut par exemple trois mois pour acheminer un simple virement puisque l’argent est systématiquement suspecté d’alimenter la résistance.
Ce dictionnaire permet d’éclairer l’actualité à partir du regard d’un intellectuel…
J’ai tenté d’aborder cet ouvrage avec sérieux et une certaine légèreté. Il me semble très important de briser la déhumanisation du peuple palestinien. Car celle-ci existe à travers le traitement infligé par Israël mais aussi par leurs propres amis qui ne considèrent les Palestiniens que comme des héros ou des victimes. Moi je suis quelqu’un comme tout le monde, rien d’autre qu’un passeur de l’humanité palestinienne.
Quel est votre regard de diplomate cette fois, sur ce qui vient de se passer ?
Par delà la grosse infraction au niveau du droit, Israël vient de commettre une erreur politique grave. On en voit les résultats aujourd’hui. Au-delà des condamnations unanimes il y a, le fait que le gouvernement israélien vient de casser le discours qu’il a toujours tenu à savoir que le pays est menacé. Avec cette affaire, tout le monde a compris qui est l’agresseur. Le second point c’est que par cette action Israël vient elle-même de mettre fin au siège de Gaza. Puisque dans les heures qui ont suivi, l’Egypte a réouvert ses frontières sans limite de délais. De facto la frontière est ouverte ».
Recueilli par Jean-Marie Dinh
Dictionnaire amoureux de la Palestine, éditions Plon 24,5 euros.
Les attaques terroriste du 11 septembre 2001 supplantent de plus en plus des évènements historiques majeurs comme la fin de la Seconde Guerre mondiale ou la chute du mur de Berlin, estime l’écrivain Axel Odelberg dans le quotidien Svenska Dagbladet : « Le 11 septembre marque de plus en plus nettement le début d’une nouvelle ère. En Afghanistan et en Irak ont lieu actuellement deux guerres qui ont un lien direct avec l’attaque terroriste. Le conflit entre Israël et les Palestiniens, où il a toujours été question de terre et de biens, a pris dans les deux camps les traits de l’extrémisme religieux. … Le 11 septembre a empoisonné l’atmosphère et créé un sentiment de défiance générale à l’égard des musulmans, et ce non seulement parmi les xénophobes notoires, mais aussi parmi des individus tout à fait normaux, ouverts et xénophiles. … Dans les années 1970, les Brigades rouges et Baader-Meinhof ont tenté de créer une situation révolutionnaire en instillant la défiance envers l’Etat démocratique. Ils ont échoué. Osama Ben Laden a connu un succès bien plus important. La défiance envers le monde musulman croît, et par la même, celle des musulmans envers le reste du monde. L’effondrement des tours du World Trade Center fait de plus en plus d’ombre à la chute du mur de Berlin. »