Quand Mandela était un «terroriste» pour l’Occident

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Nelson Mandela, symbole et mythe de son vivant, est honoré de par le monde depuis l’annonce de sa mort.

Des hommages fusent de tous les coins de la planète ; chefs d’Etat, personnalités et opinions publiques sont unanimes à reconnaître les qualités de l’homme et la valeur du leader. Certains hommages sonnent toutefois mal aujourd’hui et confirment cette hypocrite attitude de ne reconnaître l’effort qu’après que le verdict de l’histoire ait prouvé qu’il est encore plus grand que les basses manœuvres politiciennes et les intérêts mercantilistes de quelques puissants. Où se trouvaient ces puissants lorsque Mandela luttait contre l’apartheid ? Où était l’Occident lorsque Madiba et ses compagnons se battaient contre un régime raciste et répressif ? Le soutien de l’Occident aurait été d’un grand secours pour éviter à Mandela 27 longues années de détention. Il aurait été le bienvenu pour mettre fin le plus tôt à la condition de sous-citoyens dans laquelle vivaient les Noirs sous le pire des régimes. Ce même Occident, héritier d’une longue histoire colonialiste, se trouvait du côté de ce régime. Il s’émeut aujourd’hui et verse des larmes de tristesse après la mort de celui qui a donné au monde entier une leçon de justice et de grandeur d’âme. Un homme qui, faut-il encore le rappeler, était considéré, avec ses compagnons du Congrès national africain (ANC), comme un terroriste.

Il n’y a pas si longtemps, Mandela, leader charismatique de la lutte contre l’apartheid, prix Nobel de la paix, héros de la réconciliation entre les Noirs et les Blancs, premier président de l’Afrique du Sud après la fin de l’apartheid, figurait encore sur la liste noire du terrorisme établie par les Etats-Unis. L’ancien président américain, Ronald Reagan, avait, dans les années 1980, introduit une législation classant l’ANC et tous ses membres dans la case «terroristes». Le pire est que le leader sud-africain a continué à figurer sur cette liste jusqu’en 2008, c’est-à-dire 18 ans après sa libération et 14 ans après son élection à la présidence de l’Afrique du Sud.  Simple oubli ou sceau de la compromission avec les vieux démons de l’apartheid ? Ce maintien de la mention de l’ANC comme groupe terroriste par les Etats-Unis renseigne sur la notion très approximative et opportuniste du mot «terroriste». Comment le combat juste de l’ANC pour la liberté et l’égalité peut-il être considéré comme du terrorisme ? La Grande-Bretagne considérait aussi l’ANC comme un mouvement terroriste et s’opposait fortement aux sanctions contre le régime de l’apartheid.

Le terrorisme devenant une accusation dont on affuble ceux qui sont dans le camp ennemi. Si la France n’a pas usé de ce qualificatif, elle a toutefois adopté une position ambiguë en soutenant l’embargo contre l’apartheid et en le dotant d’un autre côté de la puissance nucléaire, comme le souligne Philippe Hugon, directeur de recherche à l’Institut des relations internationales et stratégiques cité par le journal Le Point. Jean-Luc Mélenchon, président du Front de gauche en France, s’est élevé contre des hommages hypocrites. «Des milliers de bonnes paroles vont se déverser sur la mémoire de Nelson Mandela par ceux qui, le reste du temps, n’hésitent pas à pourchasser les enfants Roms. Ils trouvent magnifique le combat qui a été mené autrefois, il y a très loin», dit-il pour dénoncer la montée du racisme en France. Et d’ajouter : «Dans un pays où des enfants mal élevés jettent des bananes à un ministre qui n’a pas la bonne couleur, il y a quelque chose de surprenant à voir cette unanimité se construire.»  Après sa libération, l’aura et la reconnaissance planétaire dont il a fait l’objet ne l’ont pas fait dévier de la défense de la justice et les droits de l’homme partout dans le monde. Il a autant dénoncé les attaques du 11 Septembre, que l’invasion de l’Irak et la guerre en Afghanistan. Il eut cette parole cinglante sur les Etats-Unis : «S’il y a bien un pays qui a commis les atrocités les plus innommables dans le monde, ce sont les Etats-Unis. Et ils ne s’en soucient guère.»

N. B.

Source El Watan : 09/12/2013

Le passé rattrape les hommages

Voir aussi : Rubrique Afrique , Afrique du Sud,

 

Axel Odelberg : le 11 septembre début d’une nouvelle ère

 

Axel Odelberg

Les attaques terroriste du 11 septembre 2001 supplantent de plus en plus des évènements historiques majeurs comme la fin de la Seconde Guerre mondiale ou la chute du mur de Berlin, estime l’écrivain Axel Odelberg dans le quotidien Svenska Dagbladet : « Le 11 septembre marque de plus en plus nettement le début d’une nouvelle ère. En Afghanistan et en Irak ont lieu actuellement deux guerres qui ont un lien direct avec l’attaque terroriste. Le conflit entre Israël et les Palestiniens, où il a toujours été question de terre et de biens, a pris dans les deux camps les traits de l’extrémisme religieux. … Le 11 septembre a empoisonné l’atmosphère et créé un sentiment de défiance générale à l’égard des musulmans, et ce non seulement parmi les xénophobes notoires, mais aussi parmi des individus tout à fait normaux, ouverts et xénophiles. … Dans les années 1970, les Brigades rouges et Baader-Meinhof ont tenté de créer une situation révolutionnaire en instillant la défiance envers l’Etat démocratique. Ils ont échoué. Osama Ben Laden a connu un succès bien plus important. La défiance envers le monde musulman croît, et par la même, celle des musulmans envers le reste du monde. L’effondrement des tours du World Trade Center fait de plus en plus d’ombre à la chute du mur de Berlin. »

Svenska Dagbladet – ( Suède)