Legislatives en Russie

Consolidation du régime, crispation face à l’Occident, intégration eurasiatique… L’étape qui débute avec les législatives du 4 décembre et la présidentielle de mars 2012 sera, sauf énorme surprise, celle du retour de Vladimir Poutine au Kremlin pour les six, voire les douze prochaines années. Bienvenue dans la nouvelle ère Brejnev !

(Le courrier International)

 

Des centaines de personnes ont manifesté contre les multiples fraudes aux élections législatives du 4 décembre, qui ont vu la victoire du parti de Vladimir Poutine, Russie unie. Des dizaines d’opposants, dont le blogueur anti-corruption Alexeï Navalni, ont été interpellés à Moscou ce lundi soir. Ils tentaient d’organiser une marche de protestation pour dénoncer les fraudes aux législatives.

Selon le site d’information en ligne Gazeta.ru, près de 5000 personnes, pour la plupart des jeunes, se sont rassemblées sous une pluie battante dans le centre-ville en fin d’après-midi pour dénoncer la manière dont ont eu lieu les élections du 4 décembre, qui ont vu la victoire du parti de Vladimir Poutine, Russie unie, et ont été marquées par de multiples accusations de fraudes. La police a quant à elle fait état de 2.000 manifestants, d’après l’agence Interfax.

AFP (05/12/11)

 

Le grand perdant du scrutin ? Medvedev !

Dessin Tiounine.

Lors des législatives du 4 décembre, le parti au pouvoir, Russie unie, a perdu près de 15 millions d’électeurs par rapport à 2007. Le destin politique du président pourrait en être compromis.

Après examen de 95,1 % des procès-verbaux remis par les bureaux de vote, Russie unie, le parti au pouvoir, recueille 49,54 % des voix, ce qui lui donne 238 sièges à la Douma [sur 450, la majorité se situant donc à 226], le Parti communiste en obtient 19,6 % (92 sièges), Russie juste 13,22 % (64 sièges) et le Parti libéral-démocrate (LDPR) 11,6 % (56 sièges). C’est ce qu’a annoncé ce matin Vladimir Tchourov, le président de la Commission électorale centrale, précisant que Russie unie avait perdu sa majorité des deux tiers. Mais, selon nos experts, une trop nette victoire du parti au pouvoir n’aurait pas été une bonne chose pour Vladimir Poutine [candidat à la présidentielle de mars prochain].

Les décomptes provisoires montrent que les trois autres partis qui siégeaient déjà à la Douma ont amélioré leurs scores : le Parti communiste avait plafonné à 11,57 % en 2007 et Russie juste avait alors quasiment séduit moitié moins d’électeurs (7,74 %). Le parti nationaliste de Vladimir Jirinovski (LDPR) affichait à l’époque un score de 8,14 %.

Russie unie est donc le seul parti à avoir fait moins bien. A l’heure actuelle, on dénombre 30,38 millions de personnes qui ont voté pour ce parti, contre 44,7 millions en 2007, où son score avait été de 64,3 %. En 2003, en revanche, les chiffres étaient de 37,56 %, soit 22,77 millions d’électeurs en sa faveur. La majorité des deux tiers s’établit à 300 députés. Russie unie ne les obtiendra pas, alors qu’elle avait disposé de cette majorité absolue lors des deux précédentes législatures.

« Ce résultat en baisse s’explique entre autres par l’atmosphère consécutive à la crise, par le fait que le parti n’était pas emmené par Poutine lui-même [c’est Dmitri Medvedev qui était la tête de liste] et par la multiplication des critiques contre Russie unie durant la campagne. Mais la raison principale de cette chute est certainement que Vladimir Poutine n’avait pas besoin que Russie unie fasse un score impressionnant », estime le politologue Sergueï Tcherniakhovski. D’après lui, toutes les lois indispensables ont déjà été adoptées, et c’est sous le mandat de la Douma sortante que Poutine avait besoin de pouvoir provoquer un impeachment, tant que Dmitri Medvedev était président. « Vu le résultat d’aujourd’hui, on se demande ce que pèse Medvedev », poursuit Tcherniakhovski, pour qui Russie unie l’emportait largement quand Poutine était à la tête du parti.
« Ces législatives remettent en question le destin politique de Medvedev », renchérit le politologue Rostislav Tourovski. Le vice-président du Centre de communication politique, Gueorgui Tchijov, partage cet avis : en cédant la direction du parti à Dmitri Medvedev, Poutine a « bien joué et a évité de se retrouver associé à un parti qui est sur la pente descendante ».

Hier, le chef de l’administration présidentielle, Sergueï Narychkine, a déclaré que Dmitri Medvedev pourrait à l’avenir se contenter de diriger le parti. Evgueni Mintchenko, directeur de l’Institut international d’expertise politique, pense que « Medvedev a à plusieurs reprises été chargé de faire le ménage dans les institutions, que ce soit parmi les gouverneurs ou au sein des forces de l’ordre, et il n’est pas exclu qu’il lui incombe désormais de ‘nettoyer’ le parti ». Il note toutefois que la perte de popularité de Russie unie est patente. « Reste à savoir si un point de non-retour a été atteint. »
Cela dit, au siège même de Russie unie on se montre satisfait du résultat. Le secrétaire du présidium, Sergueï Neverov, estime qu’avec sa majorité simple dans la prochaine Douma le groupe Russie unie pourra « faire adopter sans hésiter les lois proposées par le parti afin de mettre en œuvre ce qui est prévu dans son programme ». Il précise que le parti continuera à appliquer la politique de Dmitri Medvedev et de Vladimir Poutine, et conservera Boris Gryzlov comme président de l’assemblée.

Rappelons que, dès hier soir, le président Medvedev en personne qualifiait l’issue de ces élections de « résultat d’une démocratie réelle ».

Natalia Bachlykova (Kommersant)

Voir aussi : Rubrique Russie, Poutine revient…fichons le camp !,

Poutine revient… Fichons le camp !

Après celle des années 1990, une nouvelle vague d’émigration pourrait frapper le pays. Cette fois, elle concernerait les éléments les plus dynamiques de la société, qui en ont assez d’attendre toujours de meilleures perspectives.



Alors, on fiche le camp ?” Les premiers messages ponctués par cette question rhétorique sont apparus sur les réseaux sociaux russes à partir du 24 septembre en fin d’après-midi – soit quelques minutes après l’annonce par Dmitri Medvedev qu’il ne serait pas candidat à la présidentielle de mars prochain et que Vladimir Poutine reprendrait son fauteuil au Kremlin. Dans la soirée, la plupart des internautes qui partageaient leur déception sur la Toile en réaction à cette nouvelle n’utilisaient déjà plus de point d’interrogation après “on fiche le camp”, mais un simple point, voire un point d’exclamation.

Les jeunes les plus motivés

Les lecteurs de blogs et accros de Facebook ne sont pas les seuls à refléter cette montée en flèche du désir d’émigration ; tous les instituts de sondages du pays relèvent la même tendance. En mai, le centre Levada repérait 22 % de Russes souhaitant aller s’installer à l’étranger, un chiffre encore jamais atteint. En avril 2009, année de crise pourtant, 13 % seulement des personnes interrogées avaient manifesté l’envie d’émigrer. En juin 2011, deux autres instituts considérés comme plus proches du pouvoir confirmaient les résultats dégagés par celui-ci : selon la fondation Opinion publique, 16 % à 20 % des adultes russes voudraient partir, et le Centre national d’étude de l’opinion (VTsiom) aboutit au même taux, environ 20 %. Les jeunes (moins de 25 ans) sont les plus décidés. D’après le centre Levada, ils sont 59 % à songer à un départ “provisoire, pour aller gagner de l’argent”, 48 % “pour faire des études” et 28 % envisagent une émigration “définitive”. Le VTsiom note également que “les jeunes sont les plus déterminés”. Le célèbre blogueur Anton Nossik, qui anime régulièrement des séminaires sur l’émigration, explique que son public est surtout composé de personnes au sommet de leurs capacités : patrons, scientifiques et employés autour de 35 ans. Il assure être dépassé par son succès. Mais “la perspective du retour de Poutine n’est pas la motivation principale des candidats au départ. Les raisons sont plus profondes, on voit un fort pessimisme gagner les gens qui cherchent à entreprendre. Stagnation, corruption, criminalité, mauvaise qualité des services publics, ils en ont assez.”

L’émigration de la décennie 2000, période “stable” [selon la devise de Poutine] est différente de celle des “folles années 1990” [décennie agitée qui a suivi l’éclatement de l’URSS]. Lev Goudkov, qui dirige le centre Levada, constate que personne ne dispose de chiffres précis sur la question. “Les spécialistes ont calculé qu’une centaine de milliers de personnes partaient chaque année, une quantité stable qui pourrait augmenter avec le retour de Poutine à la présidence, mais sans excès, peut-être 20 000 émigrés de plus par an”, hasarde-t-il. Selon lui, le principal changement survenu depuis l’an 2000, année de la première élection de Poutine, réside dans la nature de l’émigration. “Dans les années 1990, on voyait surtout partir des scientifiques qui avaient perdu leur travail, mais, aujourd’hui, ce sont les personnes les plus riches qui s’en vont. Jeunes, dynamiques, elles aspirent à réussir encore mieux et s’inquiètent pour l’avenir ; elles ne se voient pas vivre dans la Russie de Poutine.”

Communautés russes en Chine

Vladimir Maou, recteur de l’Académie d’économie nationale auprès du gouvernement russe, voit dans cette émigration qui ne diminue pas un résultat de la “nettement plus grande facilité à partir”. Beaucoup de Russes parlent désormais l’anglais avec un niveau suffisant pour travailler à l’étranger. En outre, on peut toujours revenir si on le souhaite, alors qu’auparavant c’était quasi impossible. Les pays de destination sont devenus beaucoup plus nombreux. Selon Rosstat [l’institut national de la statistique], l’Occident reste le choix privilégié. Ainsi, en 2010, l’UE a accueilli près de 60 % de l’ensemble des personnes qui ont quitté la Russie. Une façon plus modeste d’intégrer l’Union européenne est de s’installer dans l’un des trois Etats baltes. L’an dernier, la Lettonie a modifié sa législation afin de permettre aux étrangers qui achètent à Riga [la capitale] un bien immobilier d’une valeur supérieure à 100 000 lats (141 000 euros) d’obtenir le droit de résidence. Depuis un an, 1 079 personnes, dont 633 Russes, ont demandé un certificat de résidence. Le pays compte 28 % de Russes [héritage de l’URSS], et y investir dans l’immobilier semble une bonne solution pour la classe moyenne des grandes villes russes. Les pays aspirant à entrer dans l’UE attirent eux aussi beaucoup les Russes. Parmi eux, le Monténégro arrive en tête. L’année dernière, la cité touristique de Boudva, 15 000 habitants, a ouvert sa première classe offrant un enseignement en russe, avec 30 enfants inscrits.

Malgré les atouts de l’Occident, les problèmes économiques actuels en Europe et aux Etats-Unis font que les jeunes Russes se tournent de plus en plus vers l’Asie. Cela ne concerne pas que les hippies modernes en quête de cieux plus cléments, en Thaïlande ou à Bali, mais également les jeunes diplômés sibériens qui lorgnent vers la Chine. Il y a vingt ans, personne n’aurait songé à aller vivre dans la Chine communiste arriérée, mais, avec un PIB qui augmente en moyenne de 10,5 % par an, le pays offre aujourd’hui à beaucoup de jeunes Russes une chance de participer au miracle économique. Aucun chiffre n’est disponible car presque personne ne déclare officiellement son intention de partir se fixer en Chine, mais les grandes villes comptent d’importantes communautés russes, phénomène qui n’est pas sans rappeler l’époque de l’émigration blanche [début des années 1920] à Harbin et à Shanghai. Albert Krisski, 37 ans dont dix-huit passés en Chine, est l’un des membres du bureau du Club russe de Shanghai : “Ici, nous sommes dans le TGV de la modernisation. Rentrer en Russie serait comme en descendre et rester bloqué à la gare.”

Les libertés publiques sont encore plus restreintes qu’en Russie, mais ce n’est pas ce que l’on vient chercher ici. Ce qui séduit, c’est la mobilité sur l’échelle sociale. “Cela fait près de dix ans que je suis à Hong Kong. C’est un endroit où l’on vous juge vraiment sur vos capacités et votre savoir”, estime Sergueï Men, 37 ans, copropriétaire du fonds d’investissement Eurasia Capital Partners.

“C’est malheureux, mais ceux qui quittent le pays sont justement ces fameux agents de la modernisation que Dmitri Medvedev a tellement invoqués, conclut Lev Goudkov. Ils ne croient pas à l’avenir de la Russie et veulent assurer une vie meilleure à leurs enfants.” Cette préoccupation est citée comme raison principale d’un départ prochain par 93 % des personnes interrogées en mai par le centre Levada ; on trouve aussi “accéder à de meilleures conditions de vie” (92 %), “vivre dans un Etat de droit” (86 %), “bénéficier d’un meilleur système de santé et de retraite” (85 %) ou “exprimer son potentiel” (80 %). Selon Lev Goudkov, la partie la plus dynamique de la classe moyenne a conscience que tous ces bienfaits ne lui seront pas offerts sur place dans les prochaines années.

Alexandre Gabouïev et Elena Tchernenko

(Kommersant -Vlast)

Voir aussi : Rubrique Russie, Législatives déc 2011,

Crise de la dette : «Les Brics sont en position de force»

 

Alors que les pays de la zone euro traversent une crise majeure de leurs dettes souveraines, les grands pays émergents (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) ont fait savoir qu’ils allaient discuter la semaine prochaine de la possibilité de venir en aide à l’Europe. Tout un symbole, nous explique Alexandre Kateb, économiste, directeur de Competence Finance et maître de conférence à Sciences-Po.

En quoi l’annonce des Brics est-elle symbolique ?

C’est un véritable retournement. Un bouleversement du centre de gravité de l’économie financière de la planète. Les pays émergents ont été aidés par les pays développés durant les années 1990 lorsqu’ils étaient traversés par des crises. Aujourd’hui, l’inverse va peut-être se produire.

A l’aune de cette crise, les pays émergents apparaissent désormais comme les plus solides. Ils sont en position de force. Se portent garants de la croissance économique mondiale et de la santé des pays européens en convalescence ou gravement atteints. Et sont prêts à prendre une responsabilité plus grande dans la gouvernance économique et financière mondiale. C’est très fort symboliquement.

Il faut dire que par le passé, les Brics ont longtemps été économiquement inféodés à l’occident.

Parmi les Brics, le seul pays qui a conquis très tôt son autonomie est la Chine. A partir de 1949 et pendant les années de libéralisation sous Deng Xiaoping, elle n’a jamais souscrit une dette importante au niveau international.

La Russie, l’Inde, le Brésil… Tous les autres grands pays émergents ont en revanche eu recours à l’aide internationale via le FMI ou bien à travers les aides du Trésor américain.

L’Inde a eu recours au FMI en 1991 pour éviter une crise de sa balance courante après plusieurs crises économiques. En contrepartie, le Fond monétaire exige alors une libéralisation de son économie et une gestion très prudente au niveau macroéconomique.

Pendant des années, la Russie a été portée à bout de bras par le FMI, mais celui-ci ne parvient pas à éviter le défaut de la dette souveraine russe en 1998. Elle aussi a dû mettre en place des réformes économiques majeures.

Le Brésil a quant à lui connu des crises à répétition pendant les années 1980 et 1990. La dernière, qui date de 1999, a mené à une dévaluation très forte de sa monnaie vis-à-vis du dollar. Le FMI lui est alors venu en aide, et lui a imposé une remise en ordre économique. Il a aussi demandé au Brésil des privatisations et des dégraissages massifs parmi les fonctionnaires. Plusieurs millions d’emplois ont été perdus. Depuis, le pays a pris ses distances vis-à-vis du FMI.

On se doute que les Brics ne proposent pas leur aide à l’Europe par altruisme. Quel intérêt auraient-ils à acheter davantage d’obligations européennes?

En soutenant la zone euro, ils se soutiennent eux-mêmes. Leurs économies sont dépendantes de la croissance de la zone euro. Les Brics ne veulent pas que le moteur de la consommation s’arrête en Europe. C’est particulièrement vrai pour la Chine. Et le Brésil et la Russie seraient très impactés par ricochet en cas de récession mondiale, car ils fournissent les matières premières. L’Europe absorbe les deux tiers des exportations énergétiques russes.

Investir davantage dans les obligations européennes permettrait également aux Brics de réduire leurs dépendance vis-à-vis du dollar. Notamment pour la Chine, qui dispose de 3000 milliards de réserve de change. Elle a toutes les réserves nécessaires pour venir au secours de l’euro tout en diversifiant ses risques et en prenant pied dans la zone euro. Ce faisant, elle permet aussi à ses entreprises d’être accueillies plus positivement dans la zone. C’est donnant-donnant.

Soutenir l’euro, c’est également favoriser la consolidation de cette monnaie, véritable alternative au dollar, et donc sortir de l’hégémonie américaine.

Les Brics pourront-ils observer une coordination politique pour venir en aide à l’Europe ?

C’est surtout le symbole qui est recherché. Après, chaque pays va mettre en oeuvre les mesures qu’il jugera conformes à son intérêt. En terme de diversification des réserves de change, par exemple, la Chine n’a pas la même marge de manoeuvre que l’Inde.

Il y aura en tout cas des signaux forts pour montrer que les Brics vont soutenir l’euro et augmenter leurs achats d’obligation. Pas question pour eux d’acheter de la dette grecque ou portugaise. Mais plutôt de la dette allemande ou française, voire italienne. Les Chinois souhaitent notamment acheter des obligations en Italie. Mais ils sont prudents. Ils sont prêts à prendre des risques en pensant au long terme, mais ils ne veulent pas non plus hypothéquer leur trésor de guerre.

Concrètement, cela pourra rassurer les marchés, montrer que les pays européens ne sont pas les seuls à se préoccuper de la crise de la zone euro. Et qu’une solution internationale peut être mise en place.

Recueilli  par Laura Thouny (Libération)

Alexandre Kateb est économiste, directeur de Competence Finance et maître de conférence à Sciences-Po. Il a écrit «Les nouvelles puissances mondiales : pourquoi les Brics changent le monde» aux éditions Ellipses.

Voir aussi : Rubrique Brics, rubrique UE, rubrique Finance, rubrique Co Developpement,

 

L’Allemagne renonce au nucléaire

L'Allemagne renonce au nucléaire

 

Dans la nuit de dimanche à lundi, la coalition libérale-conservatrice allemande s’est entendue sur une sortie du nucléaire. D’ici 2022 au plus tard, la dernière des 17 centrales nucléaires allemandes devra avoir fermé ses portes. Une initiative visionnaire qui profitera à l’économie allemande pour certains commentateurs, une mise en péril de l’approvisionnement énergétique européen pour d’autres.

Aftonbladet – Suède 

Berlin montre la voie

En décidant de sortir du nucléaire, l’Allemagne assume au moins dans le domaine de l’énergie la position de précurseur qui lui échoit en Europe, salue le journal à sensation de gauche Aftonbladet : « L’Allemagne est la quatrième nation industrialisée de la planète, la première économie européenne et vient de décider de prendre les devants. La décision d’hier constitue une avancée inédite pour les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique. Le Financial Times écrit que la liquidation du nucléaire allemand déclenchera un boom en Europe pour l’utilisation des énergies renouvelables et la réalisation d’économies d’énergie. … Ce changement nécessite des investissements massifs mais générera aussi des coûts d’électricité plus élevés. L’efficacité énergétique revêt donc une importance primordiale. Les études montrent que l’Allemagne pourrait réduire ses coûts énergétiques de 10 à 20 pour cent en améliorant son efficacité. … Ces derniers temps, l’Allemagne n’a cessé de temporiser et de refuser à assumer le rôle de leader que l’Europe attend de son meilleur représentant. C’est précisément ce que fait le pays aujourd’hui dans le domaine de l’énergie. » (31.05.2011)


Polityka – Pologne 

Les énergies vertes à la place du nucléaire

Sortir du nucléaire en Allemagne d’ici 2022 est véritablement audacieux mais faisable du fait de l’économie innovante du pays, estime l’édition en ligne du magazine d’information Polityka : « L’Allemagne s’est donc décidée à mettre fin à l’ère du nucléaire sur son territoire et ce bien qu’elle ait construit 17 centrales qui couvrent 23 pour cent des besoins en électricité du pays. Ils ont eu le courage de prendre cette grande initiative mais on ignore encore comment les choses se poursuivront. L’objectif est clair et décrit du reste précisément depuis longtemps : miser sur les énergies vertes. Cela est-il possible ? Dans le cas de l’Allemagne, il semble que oui. L’Allemagne est aujourd’hui déjà le leader incontesté du marché en Europe dans l’exploitation des sources d’énergie renouvelables. » (31.05.2011)

 

De Tijd – Belgique 

Une décision bénéfique à l’économie

La décision de l’Allemagne de sortir du nucléaire est légitime mais constitue aussi un défi pour l’économie, estime le journal économique De Tijd : « L’accident de Fukushima a montré que l’énergie nucléaire n’est pas fiable à 100 pour cent. Les tests de résistance peuvent au mieux réduire les risques de catastrophe nucléaire sans toutefois complètement les exclure. Si la population allemande n’est pas prête à prendre ce risque, elle est dans son bon droit. Mais le pays doit alors accepter toutes les conséquences. Ce sera un défi important de garantir l’approvisionnement énergétique à un prix acceptable sans affaiblir la position concurrentielle des entreprises allemandes. La décision de sortir du nucléaire d’ici 2022 a le mérite d’être claire. Cela pourrait constituer une formidable impulsion pour le secteur des énergies renouvelables et pour la recherche de techniques permettant de rendre les centrales conventionnelles plus écologiques. Si l’Allemagne y parvient, elle aura une longueur d’avance sur les autres pays. » (31.05.2011)


Blog Géopolitique – France 

Les écolos allemands importeront du nucléaire

La sortie du nucléaire en Allemagne est une initiative électoraliste et hypocrite qui affaiblira l’Europe, estime Pierre Rousselin dans son blog Géopolitique : « Face à l’effondrement de ses alliés libéraux du FDP, Angela Merkel parie sur une alliance avec les Verts. Cette équation politique a des répercussions pour toute l’Europe. Notre continent renonce pour longtemps à toute indépendance énergétique. Sa dépendance à l’égard de la Russie et de son gaz va s’aggraver. La France, elle, exportera davantage de son électricité. Comble de l’hypocrisie?: ce sont nos centrales qui éclaireront et chaufferont les écolos allemands. Quant à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, ce n’est déjà plus une priorité. » (31.05.2011)

» article intégral (lien externe, français)

Die Welt – Allemagne 

La pression écologique menace la démocratie

Deux mois après l’accident de Fukushima, le gouvernement allemand a décidé de sortir définitivement du nucléaire. Le quotidien conservateur Die Welt s’irrite d’un rythme décisionnel qui nuira selon lui à la démocratie : « Hans-Jürgen Papier, ex-président de la Cour constitutionnelle, juge ‘illégal’ le moratoire que la magicienne Angela Merkel a sorti de son chapeau quelques jours après Fukushima. … Et cela ne semble choquer personne que l’instance établie par Merkel pour imposer la sortie du nucléaire ait été effrontément nommée ‘Commission d’éthique’. … Si un membre fondateur de l’UE aussi puissant que la République fédérale d’Allemagne souhaite autant une nouvelle voie énergétique pour l’Europe et la planète, il aurait été indispensable de mener cette entreprise au niveau européen. … Il se forme déjà une alliance impie entre ceux qui veulent enfin pouvoir gouverner comme ils l’entendent et ceux qui souhaitent occulter le Parlement et l’opinion publique en exerçant une pression écologique ‘morale’. » (31.05.2011)

Voir aussi : Rubrique Ecologie, rubrique Politique24 réacteurs nucléaires à fermer, rubrique UEParlement européen et corruption, rubrique internationale Fukushima désinformation,

Le souvenir de Tchernobyl :Un manque d’informations

Les cérémonies de commémoration des victimes de l’accident nucléaire de Tchernobyl ont débuté ce mardi en Ukraine. Il y a 25 ans, le réacteur numéro quatre de la centrale nucléaire soviétique explosait pendant un exercice de sécurité.

Un manque d’informations

L’ampleur de la catastrophe nucléaire de Tchernobyl est toujours passée sous silence, écrivent les députés européens Daniel Cohn-Bendit et Monica Frassoni dans une lettre ouverte publiée par le quotidien de centre-gauche La Repubblica : « Les gouvernements de l’ex-URSS, la Biélorussie, l’Ukraine et la Russie, ne sont pas parvenus à surmonter les problèmes considérables engendrés par l’accident de Tchernobyl. L’une des raisons principales de cet échec est le manque d’informations objectives sur les effets des radiations radioactives sur la santé. Pendant des années, la publication d’études scientifiques sur le rôle de la radioactivité dans l’apparition de maladies entraînant des handicaps ou même la mort a été bloquée par les autorités locales. … La censure s’explique en outre par l’accord secret entre le lobby nucléaire et le régime autocratique biélorusse. »

La Repubblica (Italie)

 

Voir aussi :  Rubrique Japon, Fukishima information et désinformation, Une légende à réinventer, L’accident nucléaire, Politique internationale, Fillon et Sarkozy misent sur l’aide de tokyo pour défendre le nucléair civil, rubrique Economie, Nucléair civil:  tour du monde des nouvelles puissances, Rubrique Santé, Manifeste pour l’indépendance de l’OMS, On Line «Areva au cœur du réacteur de Fukushima»