Les étangs, la mer et la misère

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Les noirs de l’été. « La maudite » de Waldeck aux éditions du Fil a retordre.

Dans le pedigree provisoire de Waldeck, petit fils d’immigré Républicain, figure entre autres faits d’armes une tentative en politique et différents engagements dans des mouvements sociaux pour des luttes foutues d’avance, une activité apparemment licite de plasticien et de constructeur de roulotte, sans vol de poule déclaré, une implication avérée dans la création de la FAR, maison d’édition associative du Fil à retordre, basée à Villeneuve-les-Maguelone et trois bouquins dont le dernier a pour nom La maudite

 L’auteur se fait à nouveau remarquer avec cet ouvrage qui met en scène des gens pas du tout fréquentables autour du village de Floréargues. Un nom fictif, mais qu’il situe tout de même précisément entre Montpellier et la plage des Aresquiers. Il peuple son livre de personnages dénués de valeurs, dopés à mort, ou qui s’accrochent sempiternellement à des commérages idiots, tels Jacqueline la fouineuse, Maryse-couche-toi-là, Jérémie le fumeur de chichon, Franck le fouille-merde…

Tout ce petit monde auquel l’auteur associe un élu local et un patron de pêche sétois qui fait régner la loi du silence, se retrouve mêlé à plusieurs meurtres et une disparition. On suit plusieurs versions de l’intrigue à partir des protagonistes qui éclairent partiellement les mêmes scènes de leurs illusions.

Tout se passe comme un cauchemar glauque dont on ne pourrait sortir. Les personnages subissent et s’agitent dans le vide absolu d’une société centrée sur la vie paisible des propriétaires à crédits. Un beau désenchantement local qui questionne.

JMDH

www.polar-dufilaretordre.com/

Source : La Marseillaise 18/08/2015

Voir aussi : Rubrique LivreRoman noir, Editions,

Une encyclopédie du nu au cinéma

Par Alain Bergala Jacques Déniel Patrick Leboutte

encyclopédie nuAu cinéma, le moment du nu n’est jamais un moment comme les autres. Il s’accompagne, de façon grave ou ludique, solennelle ou enjouée, du sentiment diffus de franchir une frontière, un point de non-retour de la représentation. Epreuve pour l’acteur, dont elle expose l’image la moins protégée qui soit, la nudité représente pour tout cinéaste cet instant de vérité révélateur de son art comme de sa manière.  » Montre-moi comment tu filmes le nu, je te dirai quel cinéaste tu es « , pourrait-on lui dire, infailliblement. Le traitement du nu témoigne également des rapports qu’une civilisation (un pays, une idéologie) entretient à un moment de son histoire avec ses tabous, ses refoulements ou ses seuils de tolérance. L’étudier revient donc aussi à dresser l’inventaire d’un siècle d’évolution des mentalités et de subversion des valeurs, vu par le prisme ou le trou de la serrure de ses fantasmes et de ses inhibitions. Livre d’un gai savoir, considérant à la fois Carl Th. Dreyer et Russ Meyer, Marco Ferreri et Jess Franco, un tel ouvrage n’avait pas d’équivalent. Du Bain de la Parisienne à Basic Instinct en poussant par Monika, Mademoiselle Strip-Tease et Sal?, des classiques du burlesque aux plus navrants des nudies et du documentaire aux romans-pornos de la Nikkatsu, du Brésil à la Scandinavie et de Betty Boop à Madonna, de dévoilements en évitements et de prête-corps en ribambelles, de cinéastes pudiques, privilégiant aux ébats sous la couette la nudité en gros plans des mains et des visages, en boucaniers rentre-dedans de la sexploitation, dont on trouvera ici, pour la première fois, la véridique histoire, une encyclopédie du nu au cinéma visite les grands modèles culturels, parcourt tous les genres, observe la nudité dans toutes ses postures, sous toutes les coutures, et dessine une étonnante géographie du corps. A sa manière, elle constitue une première qui aborde une face encore vierge du massif-cinéma. Alain Bergala. Né à Brogmoles (Var). Après dix ans d’activité aux Cahiers du cinéma comme critique, rédacteur en chef-adjoint et directeur de collection, il partage son temps depuis 1983 entre la réalisation, l’écriture et la transmission – dans les trois cas – du cinéma qu’il aime. Cite plus volontiers MacLaine que Marlene et Riz amer que Marienbad. Jacques Déniel. Né en 1953 à Brest. Dirige depuis 1985 le Studio 43 de Dunkerque où il a crée, en 1987, les Rencontres cinématographiques. On lui doit les premières rétrospectives intégrales des films de Kiarostami, Tomes, Monterio. Cite plus volontiers Georges Bernonos et Sonic Youth que Louis Aragon et Peter Gabriel. Patrick Leboutte. Né en 1960 à Berchem-Sainte-Agathe. Peut le prouver. Critique itinérant, il épuisa les médias les plus divers. Directeur de collection aux éditions Yello Now, il a coordonné Cinémas du Québec / Au fil du direct et Une encyclopédie des cinémas de Belgique (avec Guy Jungblut et Dominique Païni). Il enseigne à l’Insas de Bruxelles. Cite plus volontiers Claudio Chhiappucci et le petit Zérard que Gérard Holtz et les pots d’échappement Midas.

éditeur : Yellow Now parution : 1993

Mosconi roi de coeur discret

patrick-mosconi-3153869-jpg_2803720Lecture d’été. « On ne joue pas avec le diable ». Spirale de vie, d’éros et de mort.

Dans notre série des lunettes noires pour mieux voir l’été, nous revenons sur une figure emblématique du roman noir français, qui était il y a peut à Frontignan pour conduire un atelier avec le groupe des femmes de l’épicerie solidaire. Atelier au sortir duquel l’auteur confiait réjoui :  » Ils sont géniaux. C’est un public qu’on n’embarque pas avec des belles paroles. Le préalable à toute chose c’est d’être vraiment avec eux, dans le présent.»

Patrick Mosconi est romancier, scénariste, et peintre. Il a sévi dans l’édition. En 1979, il créé les éditions Phot’œil, et la célèbre collection « Sanguine », qui révèle, au début des années 80, les précurseurs du nouveau roman noir français (néopolar). C’est l’époque où Mosconi découvre Thierry Jonquet, Jean-Bernard Pouy, Patrick Raynal, Jean-Pierre Bastid, Michel Quint, Tonino Benacquista, Gérard Delteil…pour ne citer qu’eux.

L’homme discret et sensible contribue à la diffusion de l’œuvre de Guy Debord. C’est aussi un fidèle compagnon de route de Fred Vargas et un contributeur  à la bonne destinée du FIRN. Il est l’auteur d’une vingtaine d’ouvrages.

Dans le dernier en date, On ne joue pas avec le diable, paru cette année chez Calmann-lévy, l’auteur met en scène un richissime et cynique homme d’affaire à l’intelligence exceptionnelle. Michaël Turner tire manifestement plaisir des humiliations qu’il inflige à ses semblables et particulièrement aux femmes qu’il séduit pour finalement les pousser dans le lit de son chauffeur Rachid.

Jusqu’au jour où il croise la route de la jeune slave Elena grande amatrice de poker menteur. Le jeu de fascination auquel se livrent les personnages nous entraîne par effet de miroir au coté d’un flic désabusé et admiratif qui file les protagonistes, en dehors des clous,  à la recherche d’une trace d’humanité.

On aurait tort de réduire ce récit à un larmoyant conflit entre bonne et mauvaise conscience, car c’est bien une irrésistible aventure humaine que nous propose Mosconi. Embarqué, on touche un état de conscience permettant d’embrasser plusieurs vérités contradictoires qui sont les faces d’une même vérité, fondamentale et inaccessible…

JMDH

Source : La Marseillaise 12/08/2015

Voir aussi : Rubrique LivreRoman noir, FIRN, Les amoureux du noir, Editions,

Poètes méditerranéens sous le signe d’une alternance temporelle

La poésie en liberté dans l’espace public sétois. Photo dr

La poésie en liberté dans l’espace public sètois. Photo dr

Bilan. Après neuf jours de transmission le festival de poésie méditerranéenne Voix Vives enregistre une hausse de sa fréquentation et de son intensité.

En dépit de la situation alarmante qui enflamme les pourtours du bassin méditerranéen, en dépit des réductions de la dotations d’État aux villes et aux communes qui se répercute comme une malédiction sur les budgets culturels, en dépit de la mort mais pas de la vie, le bilan de la sixième édition du festival de Poésie Voix Vives à Sète s’avère positif et réjouissant !

« Au delà des chiffres de fréquentation, il y avait cette année une densité des êtres présents, esquisse la directrice Maïthé Vallès-Bled, une conscience aiguë chez les poètes de l’espace de douceur et de rencontres offert par la ville de Sète et ses habitants
Il ne serait pas étonnant que ce sentiment global fort saisissant  « d’échange fraternel permanent », s’exprime par contraste au spectacle de la guerre et de la misère.

« On a senti le public et les poètes liés par les uns et les autres à la situation en méditerranée. J’ai pour la première fois entendu des poètes me dirent : Je n’ai pas envie de revenir dans mon pays » confie la directrice. Peut-être cette rançon de l’intelligence sensible qui faisait dire à Bergson que l’homme ne peut pas exercer sa faculté de penser sans se représenter un avenir…

Et toujours cette forte détermination pour le combat des poètes, occupés à faire grandir l’être qui est en eux. Combat que résume bien la phrase de la poétesse canadienne Louise Dupré qui trônait derrière la scène de la place aux livres : « Non, j’écris tes lettres à l’envers, c’est toujours non », ou les textes révoltés contre les marchés du poètes portugais Luis Filipe Sarmento dont on se demande bien pourquoi ils n’ont pas trouvé d’éditeur français pour être traduits.

La poésie sait attendre, sa force est douce et inébranlable. On ne résiste pas avec l’écriture, affirme le tunisien Abdelwaheb Melaoueh mais en étant poète. « Un poète file en TGV vers la mort sans savoir qu’il est le train », dit-il encore. C’est beau comme un avion sans aile.

Sous d’autres cieux, il fut question d’amour, autre grand combat de la vie qu’ont notamment célébré les trois grands poètes libanais Salah Stétié (de son lit d’hôpital) Vénus Khoury-Ghata et Adonis. « Quelle chance inouïe de pouvoir écouter de la poésie en allant faire son marché », s’exclamait une femme sétoise qui garde le mot de la faim.

 JMDH

Les retrouvailles avec les poètes entendus durant le festival sont permises avec l’Anthologie Voix Vives 2015 disponible aux éditions Bruno Doucey.

Source : La Marseillaise 08/08/2015

Voir aussi : Rubrique Festival, Voix vives 2015, site officiel, Sans frontières les poèmes disent l’essentiel, rubrique Livre, Poésie, rubrique /Méditerranée,

Montpellier. Yeux ouverts derrière des lunettes noires

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Roman d’été. Antoine Chainas et Anthony Pastor signent «Le soleil se couche parfois à Montpellier ». Un captivant petit polar de la collection SNCF Le Monde.

C’est un lieu commun pas dénué de charme. On voit mieux l’été, derrière des lunettes noires. Avant d’arpenter Montpellier la nuit, on vous conseille de trouver un coin à l’ombre pour vous délecter de « Le soleil se couche parfois à Montpellier» un petit polar qui arrose les idées bien en place d’un petit coulis de fruit rouge avec un sens inné de la mise en scène qui met en lumière l’obscure nature du pouvoir.

Pour répondre à la commande du Monde et de la SNCF qui traversent cet été une dizaine de villes françaises pour la saison 4 Les Petits polars, Antoine Chainas, grand prix de la littérature policière 2014 pour son roman Pur, et le dessinateur Anthony Pastor, prix Fauve à Angoulême en 2013 pour son album Castilla Drive, croquent la cité Montpelliéraine.

« Cette histoire se déroule à Montpellier, l’ancienne Surdouée (…) A dix kilomètres au sud, la Méditerranée, plate et lourde. En saison estivale, les flots adoptent une teinte d’huile de vidange usagée. L’été paraît ici plus féroce qu’ailleurs. Le soleil, boule de magma vorace, pétrifie la cité, étend son empire ardent jusqu’aux confins du département. Le Lez, à l’est, s’essouffle. La Mosson et le Verdanson, à l’ouest, deviennent des filet d’eau à peine perceptibles, des chuchotement sur un lit de béton

Le décor planté en 2018, laisse place aux retrouvailles de MZ et d’Anna un couple de sexagénaires qui ont oeuvré 50 ans plus tôt, aux basses oeuvres des constructeurs, Frêche, Bofill et autres Dugrand, pour réaliser le grand rêve de gauche post  soixante-huitard « coulé avec un naturel confondant dans les aspirations du libéralisme des années 80. Aujourd’hui, en 2018, le rêve a pâle figure. Le capitalisme ne survit plus aux désastres économique et écologique qu’il a lui-même enfantés que par la perfusion des instances publiques

Le récit fait des aller-retours dans le temps exhumant, contextes politiques, luttes intestines, réalisations urbaines sans omettre les faits d’armes sur les terrains vagues attenants. Cette approche singulière de l’histoire contemporaine de Montpellier passe comme un songe. On n’en sort pas indemne, avec une légère mais tenace odeur de sous-sols qui persiste.

« Le réel n’existe pas, le réalisme non plus. L’ennemi de la vérité s’incarne dans la certitude »; rappelle Antoine Chainas, rien n’est donc moins sûr que les événements relatés dans ce précieux petit livre.

JMDH

En vente en kiosque jusqu’au 31 août 2015 . En septembre un Petit Polar sera diffusé dans l’émission « Samedi noir », et tout l’été sur le site Fictions. franceculture.fr !

Source La Marseillaise  05/08/2015

Voir aussi . Rubrique Livre, Roman noir, rubrique MontpellierMontpellier : Métamorphose aoûtienne, Pas de bouchon sur la voie du milieu, rubrique Politique, Politique locale, Un regard  sans fard sur le Languedoc-Roussillon,