Voix Vives 2016. Les yeux brillants d’un monde vrai

Voix Vives en mer face au cimetière de Paul Valéry. Photo dr

Voix Vives en mer face au cimetière de Paul Valéry. Photo dr

La paix comme un souffle qui monte avec Voix Vives et ses invités…

Comment le port de Sète qui a 350 ans cette année  n’aurait-il pas vibré aux ondes de la poésie  portées par les cents poètes invités au festival Voix Vives ? Celui-ci vient de s’achever. Ils sont venus de toutes les rives, pas pour faire des ronds de jambe à l’attention des élites cultivées qu’il leur arrive de fréquenter. Juste pour échanger avec les gens dans la rue, les parcs, les petites places du quartier haut, pour parler avec simplicité, profondeur et apaisement.

En écho paradoxal au monde qui semble se déchaîner autour de cette petite mer que l’on nomme grande bleue. « La Méditerranée, c’est la quiétude face à l’avalanche de l’Atlantique mais actuellement ce n’est pas la mer de la baleine blanche, a souligné  la poétesse madrilène Maria Antonia Ortéga. Les tragédies de la Méditerranée sont les conséquences de l’égoïsme des hommes qui n’ont pas la capacité de surpasser  leurs contradictions. »

Vision de la tragédie, au sens classique des héros abandonnés par leurs dieux qui  ne parviennent plus à affronter leur destin. « La poésie a cette capacité de saisir  la vie  dans ce qu’elle a d’immédiat et d’universel », rappelle la directrice du festival Maïthé Vallès-Bled.

Ainsi est-il toujours possible d’interpréter le présent à travers le prisme de la tragédie grecque. Mais le questionnement permanent qui aiguise l’interrogation du poète comme son désir de dire et d’écrire ne se limite pas à la tragédie. Durant neuf jours, Voix Vives l’a une nouvelle fois démontré.

Le festival  a ouvert grand les vannes, libérant les poèmes par milliers sous toutes les formes, en provenance des horizons proches et lointains de la culture méditerranéenne. Pour la première fois depuis sa création, le festival s’est affublé d’un sous titre : La poésie chemin de paix. A l’évidence, ces chemins ont été pluriels, comme le sont, les douleurs et expériences que peuvent traverser les membres d’une même famille face à un déchirement.

Au-delà de ce sous-titre, qui n’a contraint aucun des poètes invités, le ciel de cette 7e édition sétoise du festival  fut chargé d’implication, de présence, et d’écoute tant de la part des poètes que de celle de l’équipe et du public et même d’une ministre de la Culture. Comme si l’espace du festival s’ouvrait plus que de coutume aux relations directes avec le monde et au bonheur d’une altérité affûtée.

Avant que les mots qui nous ont traversé ne s’égarent aux confins mystérieux de nos pensées ou de nos sens, les éditions Bruno Doucey proposent une anthologie 2016 qui porte traces des mots de chaque poète présent. A nous de  savoir encore les faire danser dans nos bouches. Et de saisir ceux de Maria Antonia Ortéga : « On ne réussit à s’approcher des êtres humains que par le chemin de la liberté et il ne peut y avoir de paix sans liberté. »

JMDH

Source La Marseillaise 03/08/2016

Voir aussi : Rubrique Festival, Voix Vives 2016, 100 poètes dans la ville, Voix vives 2015, site officiel, Sans frontières les poèmes disent l’essentiel, rubrique MéditerranéeLybie, Liban, Tunisie, rubrique Livre, Poésie, rubrique /Méditerranée,

Voix Vives se décentralise en Méditerranée, après Gènes en Italie, les 17 et 18 juin et Sète  du 22 au 30 juillet, l’édition de Tolède en Espagne se tiendra du 2 au 4 septembre. Et le projet d’une édition à Ramallah, Naplouse, et Bethléem , devrait voir le jour au printemps  2017.

Voix Vives : 100 poètes dans la ville

bgvoixvive

Sète. La poésie est une fête globale et lucide sur la réalité du monde.

Poésie, chemin de paix

« Quand la société est en crise le poète ne peut que prendre note dans sa poésie de la crise traversée », constate le poète libanais et président d’honneur du festival Salah Stétié. « Il arrive dans certains cas très rares qu’un souhait bien exprimé par un poète puisse se retrouver mobilisateur », ajoute-il encore.

A l’instar de ce vers du poète Abou Kacem Al Chebbi « Lorsque le peuple un jour veut la vie / Force est au destin de répondre / Aux ténèbres de se dissiper » devenu un élément de l’hymne national tunisien. Mais combien de poètes empêchés, emprisonnés, exilés pour leur amour de la liberté… Le festival Voix Vives qui bat son plein à Sète jusqu’au 30 juillet offre l’immense plaisir et privilège de les rencontrer dans les rues et d’éprouver le souffle de leur poésie et de leurs réflexions.

imagesAshur Etwebi est né à Tripoli, c’est un poète renommé en Libye qui a contribué à faire renaître une culture libre après la chute du président Kadhafi. Il a du quitter son pays en 2015  pour émigrer en Norvège. « Il n’est pas aisé de vivre cet exil… » Si le système intellectuel d’un Clausewitz a fait beaucoup de petits en s’évertuant à penser et à comprendre la nature et l’essence de la guerre, celui des poètes de la Méditerranée qui la subissent, cherchent les chemins de la paix.

« Il n’y a aucun courage dans la guerre. La guerre prend votre air, votre inspiration, la guerre prend votre ombre, la guerre prend ton âme, affirme Ashur Etwebi. Pendant 42 ans nous avons été sous le joug d’un dictateur fou. On attendait juste qu’une fenêtre s’ouvre à nous pour un lendemain. Lorsque le Printemps arabe a éclaté, nous avons vraiment cru que le paradis était juste à un bras de nous. Mais on s’est confronté quelques mois après à la réalité. Ce que nous pensions être un paradis n’était autre qu’un vrai enfer. Après avoir liquidé un gouverneur fou, on s’est retrouvé face à des milliers de fous sanguinaires qui ont mis le feu au pays. »

L’art des poètes est de nous toucher par leur sincérité. A Sète, les artistes témoignent parfois aussi de leur expériences politiques et sociétales apportant d’autres regards.

« La première année après la chute de Kadhafi, la société civile s’est développée. Pendant que nous essayons de la consolider, les islamistes extrémistes, travaillaient en toute intelligence à mettre la main sur le gouvernement. Le résultat du match fut la perte de la société  civile et la réussite des groupes extrémistes islamistes. Ce qui est  à noter, c’est que des pays étrangers, qui  pratiquent la démocratie en paroles et en apparence, ont appuyé et armé ces groupes terroristes extrémistes. C’est pour cela que les Libyens connaissent aujourd’hui une grosse déception. C’est un désastre dans les âmes, dans l’économie et dans tous les domaines de la vie finalement. »

Que font les poètes dans ce contexte ?  « Ils ont  à leur disposition leur inspiration, parfois un organe de presse mais si cet organe déplaît à telle ou telle faction, ou au gouvernement, on a vite fait de l’étrangler et le poète se retrouve muet et souvent jeté dans les caves et les prison du régime jusqu’à ce que mort s’en suive, indique Salah Stétié, C’est arrivé en Europe. Il ne faut pas croire que l’Europe est descendue du ciel avec l’idéal démocratique. Les poètes peuvent ramener un peu de paix, demain un peu plus de paix, et peut être un jour la Paix..

JMDH

Source La Marseillaise 28/07/2016

 

L'ouverture du festival Sètes quartiers hauts

L’ouverture du festival Sètes quartiers hauts dr

 

Poésie
Le festival Voix Vives de Méditerranée en Méditerranée a débuté hier dans l’île singulière un marathon poétique de neuf jours qui éprouve les sens. L’entraînement n’est pas requis, il suffit de tendre l’oreille, sentir, voir… pour éprouver les embruns de toutes les rives.

La saison Voix Vives a débuté. Au bord de la grande bleue, c’est le moment où la ville de Sète s’ouvre à la mer comme un livre ivre.  Celui où les lettres s’émancipent pour tracer tous les sens imaginables de la liberté. Profitant de la léthargie temporaire des cahiers scolaires, les milliers de mots se rebiffent pour célébrer le culte de la poésie vivante. Cent poètes traversent les rives tels des prophètes, pour investir la ville de Sète où ils vont se croiser durant neuf jours dans pas moins de six cent cinquante rendez-vous  !  Les poèmes sont livrés par leur auteur en langue originale, puis traduit par des comédiens. Ils résonnent parfois aux rythmes des  musiciens, du balancement des hamacs, ou du frémissement des feuilles, ou encore de la houle des vagues pendant les lectures en mer…

Quarante pays représentés

Parmi les poètes invités on pourra notamment croiser dans les rues cette année Jacques Ancet (France), Horia Badescu (Roumanie), Mohammed Bennis (Maroc), Jean-Pierre Bobillot (France), Denise Boucher (Francophonie/Québec), Philippe Delaveau (France), Haydar Ergülen (Turquie), Déwé Gorodé (Francophonie/Nelle-Calédonie), Vénus Khouy-Ghata (Liban/France), Paulo Jose Miranda (Portugal), María Antonia Ortega (Espagne), Anthony Phelps (Francophonie/Haïti), Liana Sakelliou (Grèce), Yvan Tetelbom (Algérie) sans oublier son président d’honneur, Salah Stétié (Liban) empêché l’an passé pour des raisons de santé.

Cette liste pourrait se prolonger. Elle révèle l’ouverture du festival sur un monde que les visions éthnocentriques ignorent bien dangereusement. Quarante pays sont représentés  à Voix Vives cette années. On y accède gratuitement,  de l’aube à la nuit par le plus sûr des moyens, la poésie comme regards portés sur le monde et comme chemin vers l’humain.

 JMDH

Concerts du festival au Théâtre de la Mer avec Pierre Perret, Tiken Jah Fakoly et Misa Criolla. Réservation : 04 99 04 72 51

Source : La Marseillaise samedi 23 juillet 2016

Voir aussi : Rubrique Festival, Voix vives 2015, site officiel, Sans frontières les poèmes disent l’essentiel, rubrique MéditerranéeLybie, Liban, Tunisie, rubrique Livre, Poésie, rubrique /Méditerranée,

Concert Inaugural. Ravissement sur les ondes de Radio France

Le public conquis par le concert inaugural  Crédit Photo Marc Ginot

Le public du Corum conquis par le concert inaugural Crédit Photo Marc Ginot

Depuis lundi les auditeurs du Festival ne savent plus où donner de l’oreille. De l’electro avec Tohu Bohu  à la programmation jazz du domaine D’O en passant par les concerts symphoniques, les récitals et les  Rencontres Pétrarque de France-Culture Montpellier et la Région célèbrent la richesse et la diversité de la programmation .

Double ouverture du festival au Corum lundi avec une dimension découverte à travers le récital de Béatrice Rana et une création symphonique composée pour ciel étoilé intitulé Les mille et une nuits sous la baguette de Michael Schonwandt dirigeant l’Orchestre national de Montpellier accompagné par Karine Deshayes et Lambert Wilson dans le rôle de récitant.

Forte de ses 23 ans, la pianiste Beatrice Rana débute le festival avec les Variations Goldberg élaborées par Jean-Sébastien Bach en 1741.  Dès 18h, la grande salle Berlioz du Corum est quasiment pleine. Consacrée sur la scène internationale la jeune pianiste émergente s’attaque pour la première fois aux parcours redoutable des trente variations avec une tonicité régénérante. La technique parfaite de Béatrice Rana  vient à bout des vertigineux croisements de mains qu’exigent l’interprétation composée à l’origine pour un clavecin à deux claviers. La pianiste italienne fait preuve d’une impressionnante maîtrise  de l’oeuvre. Répondant aux nombreuses superpositions de formes, d’harmonies, et de rythmes. Mais la technique prend le dessus sur l’interprétation et la rigueur d’exécution s’exerce au détriment de la dimension spirituelle.  Béatrice Rana offre cependant la démonstration d’une précoce maturité annonçant l’aube d’une brillante carrière.

Sous le signe de l’Orient

Le concert de 21h, Les Mille et une nuits, suit le fil naturel de la thématique  de cette 32e édition,  Le Voyage d’Orient proposé par Jean-Pierre Rousseau. Il s’agit moins de piocher au rayon exotique, où s’entassent les centaines de compositeurs européens de Mozart à Berlioz en passant par Debussy, Schönberg et Szymanowski… ayant cédé à cet appel pour modifier leur rapport au monde, que de considérer la musique comme un vecteur d’altérité qui élude la question des différences, religieuses, sociales et culturelle.

L’adaptation musicale des Mille et une nuits proposée en guise de grand concert d’ouverture a répondu joliment à cette volonté en associant, sur le modèle de Maurice Ravel, poèmes, voix et orchestre. L’orchestre national de Montpellier dirigé par Michael Schonwandt et leurs deux invités, la mezzo soprano Karine Deshayes, et l’acteur et comédien Lambert Wilson, ont interprété des extraits de la Shéhérazade de Maurice Ravel de celle de Rimski-Korsakov et d’Aladin composé par Carl Nielsen pour la pièce d’Adam Oehlenscläger.

L’ensemble s’affirme avec cohérence et respiration en résonance avec l’esprit d’ouverture du festival. Il  éveille aussi la curiosité et capte l’attention comme  le mouvement de Nielsen La place du marché où l’Orchestre se sépare pour occuper différents espaces de la salle et rendre compte de l’ambiance populaire du marché.

L’idée des Mille et une nuits était heureuse, elle s’est révélée captivante. Shéhérazade a encore de beaux jours devant elle, si elle occupe nos soirées de la sorte.

JMDH

Source : La Marseillaise 14/07/2016

Voir aussi : Actualité France, Rubrique Festival, rubrique Musique, rubrique Montpellier,

Quand la ville ouvre la porte au polar pour favoriser la lecture

1- L’auteur de l’affiche 2016 du festival Jorge Aderete expose son oeuvre dans les rues et sur les places de la ville

1- L’auteur de l’affiche 2016 du festival Jorge Aderete expose son oeuvre dans les rues et sur les places de la ville

Ils sont 43 auteurs à venir célébrer le genre sous le signe de l’humour pour cette 19e édition du FIRN qui bat son plein à Frontignan. Les coups de feu vont résonner jusqu’à dimanche très tard dans la nuit…

A la fin du printemps, la ville n’attend qu’une chose : que les manettes du festival ouvrent les vannes de la saison chaude qui démarre depuis dix-neuf ans à Frontignan par un grand bain de liberté  autour du roman noir. L’origine de l’événement en 1997/98 tient à une conjonction de planètes.

« Le contexte local était morose après les fermetures successives des sites industriels sur la commune, se souvient le maire Pierre Bouldoire (PS),  et la société  de cette ville ouvrière nourrie par différents apports migratoires se trouvait  face  à un grand vide. C’est à ce moment que nous avons pris la décision de relancer une dynamique à partir d’une politique culturelle avec deux grands axes. Le cinéma, en s’impliquant  dans le miniplexe Cinémistral, qui programme des films à la fois grand public et Arts et essais; et la lecture publique. Nous nous sommes engagés dans un plan local d’éducation artistique, un fait rarissime pour une commune de notre taille, et nous avons pleinement soutenu le festival. Le genre du roman noir est populaire. C’est aussi une littérature sociale qui évoque parfois un univers assez proche de ce qu’a pu vivre la ville. »

Suite à l’ouverture de la médiathèque l’année dernière, la structure enregistre une fréquentation 30% supérieure aux villes de taille comparable. « Ce qui couronne nos efforts en matière de lecture publique et nous encourage à poursuivre notre engagement dans le festival. »

Voilà un feu vert politique qui s’ouvre au noir avec discernement ! Pour ceux qui n’auraient pas compris le discours, c’est une façon de dire que dans un monde à feu et à sang, on oublie facilement les humains pour une poignée de pognon. Et que faire confiance à des écrivain(e)s comme les auteurs de roman noir qui n’ont pas la mémoire courte et réfléchissent un brin sur ce qui se passe, ça peut faire avancer les choses…

L’humour dans le roman noir

Le FIRN s’est donné pour mission d’apporter un regard neuf sur la littérature noire contemporaine – à l’époque de son lancement, largement sous-estimée -, de donner ses lettres de noblesse à un genre qui n’a rien de mineur et qui a considérablement enrichi la littérature.

Les spécificités de ce festival consistent en une thématique forte autour de laquelle sont invités des auteurs venus d’horizons différents. Le thème de cette édition : Mort de rire, ouvre cette année sur les différentes facettes de l’humour dans le roman noir. Elles seront déclinées dans de multiples rencontres : Rire, c’est bon pour les rides, le royaume des déjantés, la langue dans tous ses états, à gorge déployée ; l’humour, arme de critique sociale.

Situé dans un environnement populaire, au centre-ville et au coeur de la vie, le festival est aussi l’occasion de faire le plein de lectures pour l’été.  On peut se faire dédicacer les ouvrages et échanger avec les auteurs qui apprécient le contact direct qui s’opère avec le public dans une approche sensible, décomplexée et décomplexante.

Cette année le FIRN accueille deux nouvelles librairies aux côtés de La plume bleue frontignanaise. La librairie toulousaine Série B , spécialisée dans le genre, où le festival est allé présenter son édition à l’ouest de notre grande région, et la Nouvelle librairie sétoise qui accueille régulièrement des  auteurs dans ses murs. A Frontignan, on considère l’ensemble de la chaîne du livre et notamment son dernier maillon souvent oublié, le lecteur !

l Infos pratiques : http://www.firn-frontignan.fr/

Consignes de survie dans le noir absolu

Martine Gonzalez Soleil noir.

Martine Gonzalez Soleil noir.

Note de service
La ville semble désormais sous l’emprise de cette sombre littérature…

FrontiGang

Pour satisfaire à l’ère sécuritaire que nous traversons, nous rappelons en premier lieu aux personnes ayant récemment subi une opération de l’appendicite que la ville de Frontignan leur est rigoureusement interdite durant trois jours sous peine d’entrer une fois pour toutes dans les annales du FIRN sous l’épitaphe « Ci-gît un amateur trop zélé du festival mort de rire ».

Force est de constater qu’il est en effet difficile d’échapper au noir dans cette ville. Le ver est entré dans le fruit, s’il m’est permis de m’exprimer ainsi, après qu’un couple surnommé les Bonnie & Clyde de Frontignan, répondant aux noms civils de Martine Gonzalez et Michel Gueorguieff, ont introduit le virus. Ce dernier décédé en septembre 2013 était un redoutable diplomate dont le passé trotskiste ne l’a pas empêché de pactiser avec un représentant du Vatican, en la personne du curé du village, pour déréglementer la sonnerie des cloches de l’église. Il était aussi en contact avec le premier magistrat de la ville qui a fait citoyens d’honneur de Frontignan, présumons-nous sous son influence, l’activiste italien reconverti dans le roman noir Cesare Battisti. Le maire a également baptisé Gueorguieff un passage vers le Square de la Liberté pour rendre hommage à cet individu. Sa compagne Martine Gonzalez continue de sévir au sein de Soleil noir.

Depuis l’ouverture de cette 29e édition, les  activistes ont infiltré la population, des écoles aux maisons de retraite. Aujourd’hui nos services nous rapportent qu’une cinquantaine d’auteurs venus de France mais aussi des Etats-Unis, de Grande Bretagne, du Portugal, de Suisse et d’Argentine animent des réunions en présence des citoyens auprès de qui ils diffusent leurs livres. Ce soir ils iront boire et manger ensemble sur la plage des Mouettes. Et demain écouter la musique de Despentes et du groupe Zéro.

Avec La nuit des durs à cuire, on pourra voir trois films sur la plage. Des dessins bizarres d’un certain Alderete sont partout sur les maisons. Salle Izzo se tient une expo collective en lien avec le dessinateur Goossens connu pour nous ridiculiser. Le mal pénètre le coeur même de nos services. Certains de nos agents lisent des polars en cachette, d’autres voudraient se mettre à écrire. Je crains bien que nous ayons perdu le contrôle. Je dois vous quitter, pour rejoindre une table ronde qui va commencer…

JMDH

Source : La Marseillaise 27/06/2016

Voir aussi : Rubrique Livre, rubrique  Roman noir, FIRN, Les amoureux du noir, Christa Faust,

Christa Faust. Self–made–women dans le monde du X

Christa Faust auteur US à découvrir à Frontignan  Crédit Photo dr

Christa Faust auteur US à découvrir à Frontignan Crédit Photo dr

Le festival international du roman noir de Frontignan accueille une cinquantaine d’invités sur trois jours. L’écrivaine Christa Faust qui a fréquenté le milieu du fétichisme et de la domination à NY vient évoquer « Money Shot » un roman noir sans concession qui expédie le lecteur derrière le décors des dociles jeunes filles qui font de l’œil en vitrine.

 Ex-star du porno, Angel Dare s’est reconvertie en fondant une agence qui fournit les services de jeunes actrices et danseuses pour les clubs de strip-tease. Mais, lorsqu’elle reçoit un appel de son vieil ami le réalisateur de films X Sam Hammer, qui la supplie de venir le dépanner sur un tournage, Angel ne peut résister à l’appel de sa gloire passée. C’est ainsi qu’elle va se jeter dans la gueule du loup : tabassée, violée et laissée pour morte, avec plusieurs balles dans le corps, Angel se réveille quelques heures plus tard dans le coffre d’une voiture, abandonnée sur un parking.

C’est dans le coffre de cette vieille Civic pourrie que débute Money Shot. L’héroïne, Gina Moretti, dites Angel Dare, s’en extirpe meurtrie avec une rage au ventre qui ne la lâchera pas jusqu’à la dernière page du roman. Le coffre, réceptacle courant des macchabés et autres passagers de l’oubli s’impose d’entrée comme une unité de lieu délabré, à l’image du milieu américain du porno sud californien peuplé de cannibales sans scrupule qui font tourner le business juteux de l’industrie pornographique.

«Personnellement, je n’ai jamais compris ce qui attirait les gens dans cet endroit. L’Eye Candy était une machine bien huilée, qui n’existait, comme tout à Vegas, que pour une unique raison : vider les portefeuilles (…) L’Eye Candy ne vendait pas de la chatte. Il vendait du rêve de chatte. C’était un miroir aux alouettes sans fin, que du fantasme et rien de concret au bout

Il est perceptible à la lecture, que Christa Faust, ancienne professionnel du X, parle en connaissance de cause. Elle compte plusieurs livres érotiques à son actif et signe avec Money shot, un premier polar sans bavure. Il n’est pas plus question de dériver dans des scènes hot que de donner dans l’angélisme féminin puritain. Le personnage d’Angel Dare n’a pas froid aux yeux. Elle assume son goût pour le sexe et le risque qui n’est du reste pas tout à fait étranger avec la situation inextricable dans laquelle elle va se retrouver.

C’est une femme pragmatique qui a su décrocher à temps pour monter son agence de jeunes actrices, une sorte de mère maquerelle qui connaît la vie hard et offre des garanties à ses filles. C’est aussi une femme tout court, attachée à son pouvoir de séduction qui peut parfois jalouser les propositions de tournage dont elle s’est mise bien raisonnablement à l’abri. Un des ressorts du roman réside dans cette ambivalence. On sait la piètre capacité du bonheur en matière de séduction.

Ce qui nous séduit rappelle l’auteure, répond généralement à une voie qui nous détourne de celle qu’on serait naturellement destinée à suivre. C’est notamment le cas d’un paquet de filles qui tombes dans les pattes cruelles et sordides que nous décrit Christa Faust. Son héroïne sort des sentiers battus telle  « Une méchante brune dans un monde de gentilles blondes » comme l’a dit à son sujet Quentin Tarantino.

Animée par l’énergie de la haine, elle inverse le processus d’exploitation en tirant partie de son pouvoir de séduction pour faire bouffer la poussière aux gros nazes avec l’aide d’un ancien flic au passé louche et quelques unes de ses copines. L’écrivaine nous baigne dans le côté sombre et glauque du milieu X mais avec beaucoup d’humour et un goût achevé de l’autodérision. Christa Faust  démontre avec ce premier roman traduit en français, son sens du récit et de l’insoumission.

JMDH

Christa Faust Money Shot Editions Gallmeister. Rencontre avec l’auteure aujourd’hui à 17h Tente de la liberté et dimanche à 16h

Source : La Marseillaise 24/06/2016

Voir aussi : Rubrique Festival  Livre, rubrique  Roman noir, FIRN, La ville ouvre la porte au polar, Les amoureux du noir,