Voix Vives : 100 poètes dans la ville

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Sète. La poésie est une fête globale et lucide sur la réalité du monde.

Poésie, chemin de paix

« Quand la société est en crise le poète ne peut que prendre note dans sa poésie de la crise traversée », constate le poète libanais et président d’honneur du festival Salah Stétié. « Il arrive dans certains cas très rares qu’un souhait bien exprimé par un poète puisse se retrouver mobilisateur », ajoute-il encore.

A l’instar de ce vers du poète Abou Kacem Al Chebbi « Lorsque le peuple un jour veut la vie / Force est au destin de répondre / Aux ténèbres de se dissiper » devenu un élément de l’hymne national tunisien. Mais combien de poètes empêchés, emprisonnés, exilés pour leur amour de la liberté… Le festival Voix Vives qui bat son plein à Sète jusqu’au 30 juillet offre l’immense plaisir et privilège de les rencontrer dans les rues et d’éprouver le souffle de leur poésie et de leurs réflexions.

imagesAshur Etwebi est né à Tripoli, c’est un poète renommé en Libye qui a contribué à faire renaître une culture libre après la chute du président Kadhafi. Il a du quitter son pays en 2015  pour émigrer en Norvège. « Il n’est pas aisé de vivre cet exil… » Si le système intellectuel d’un Clausewitz a fait beaucoup de petits en s’évertuant à penser et à comprendre la nature et l’essence de la guerre, celui des poètes de la Méditerranée qui la subissent, cherchent les chemins de la paix.

« Il n’y a aucun courage dans la guerre. La guerre prend votre air, votre inspiration, la guerre prend votre ombre, la guerre prend ton âme, affirme Ashur Etwebi. Pendant 42 ans nous avons été sous le joug d’un dictateur fou. On attendait juste qu’une fenêtre s’ouvre à nous pour un lendemain. Lorsque le Printemps arabe a éclaté, nous avons vraiment cru que le paradis était juste à un bras de nous. Mais on s’est confronté quelques mois après à la réalité. Ce que nous pensions être un paradis n’était autre qu’un vrai enfer. Après avoir liquidé un gouverneur fou, on s’est retrouvé face à des milliers de fous sanguinaires qui ont mis le feu au pays. »

L’art des poètes est de nous toucher par leur sincérité. A Sète, les artistes témoignent parfois aussi de leur expériences politiques et sociétales apportant d’autres regards.

« La première année après la chute de Kadhafi, la société civile s’est développée. Pendant que nous essayons de la consolider, les islamistes extrémistes, travaillaient en toute intelligence à mettre la main sur le gouvernement. Le résultat du match fut la perte de la société  civile et la réussite des groupes extrémistes islamistes. Ce qui est  à noter, c’est que des pays étrangers, qui  pratiquent la démocratie en paroles et en apparence, ont appuyé et armé ces groupes terroristes extrémistes. C’est pour cela que les Libyens connaissent aujourd’hui une grosse déception. C’est un désastre dans les âmes, dans l’économie et dans tous les domaines de la vie finalement. »

Que font les poètes dans ce contexte ?  « Ils ont  à leur disposition leur inspiration, parfois un organe de presse mais si cet organe déplaît à telle ou telle faction, ou au gouvernement, on a vite fait de l’étrangler et le poète se retrouve muet et souvent jeté dans les caves et les prison du régime jusqu’à ce que mort s’en suive, indique Salah Stétié, C’est arrivé en Europe. Il ne faut pas croire que l’Europe est descendue du ciel avec l’idéal démocratique. Les poètes peuvent ramener un peu de paix, demain un peu plus de paix, et peut être un jour la Paix..

JMDH

Source La Marseillaise 28/07/2016

 

L'ouverture du festival Sètes quartiers hauts

L’ouverture du festival Sètes quartiers hauts dr

 

Poésie
Le festival Voix Vives de Méditerranée en Méditerranée a débuté hier dans l’île singulière un marathon poétique de neuf jours qui éprouve les sens. L’entraînement n’est pas requis, il suffit de tendre l’oreille, sentir, voir… pour éprouver les embruns de toutes les rives.

La saison Voix Vives a débuté. Au bord de la grande bleue, c’est le moment où la ville de Sète s’ouvre à la mer comme un livre ivre.  Celui où les lettres s’émancipent pour tracer tous les sens imaginables de la liberté. Profitant de la léthargie temporaire des cahiers scolaires, les milliers de mots se rebiffent pour célébrer le culte de la poésie vivante. Cent poètes traversent les rives tels des prophètes, pour investir la ville de Sète où ils vont se croiser durant neuf jours dans pas moins de six cent cinquante rendez-vous  !  Les poèmes sont livrés par leur auteur en langue originale, puis traduit par des comédiens. Ils résonnent parfois aux rythmes des  musiciens, du balancement des hamacs, ou du frémissement des feuilles, ou encore de la houle des vagues pendant les lectures en mer…

Quarante pays représentés

Parmi les poètes invités on pourra notamment croiser dans les rues cette année Jacques Ancet (France), Horia Badescu (Roumanie), Mohammed Bennis (Maroc), Jean-Pierre Bobillot (France), Denise Boucher (Francophonie/Québec), Philippe Delaveau (France), Haydar Ergülen (Turquie), Déwé Gorodé (Francophonie/Nelle-Calédonie), Vénus Khouy-Ghata (Liban/France), Paulo Jose Miranda (Portugal), María Antonia Ortega (Espagne), Anthony Phelps (Francophonie/Haïti), Liana Sakelliou (Grèce), Yvan Tetelbom (Algérie) sans oublier son président d’honneur, Salah Stétié (Liban) empêché l’an passé pour des raisons de santé.

Cette liste pourrait se prolonger. Elle révèle l’ouverture du festival sur un monde que les visions éthnocentriques ignorent bien dangereusement. Quarante pays sont représentés  à Voix Vives cette années. On y accède gratuitement,  de l’aube à la nuit par le plus sûr des moyens, la poésie comme regards portés sur le monde et comme chemin vers l’humain.

 JMDH

Concerts du festival au Théâtre de la Mer avec Pierre Perret, Tiken Jah Fakoly et Misa Criolla. Réservation : 04 99 04 72 51

Source : La Marseillaise samedi 23 juillet 2016

Voir aussi : Rubrique Festival, Voix vives 2015, site officiel, Sans frontières les poèmes disent l’essentiel, rubrique MéditerranéeLybie, Liban, Tunisie, rubrique Livre, Poésie, rubrique /Méditerranée,

Les mille feux d’une conviction poétique

Un festival pas comme les autres se tient chaque année à Lodève. Il est question d’y explorer tous les possibles de la poésie et assurément d’en repousser les limites. On vient aux Voix de la Méditerranée pour découvrir, entendre, échanger et voir sortir les mots de la bouche des poètes. Et on y revient par plaisir, pour les libertés qui sont en résonance. Pas de thématique, pas de lieux réservés aux critiques littéraires, pas de commémoration, on affirme à Lodève, que les poètes sont bien vivants et on le démontre.

Les organisateurs le savent bien, comme ils savent qu’accompagner la poésie, c’est la laisser se répandre. La vivre avec toute la population, dans sa profusion, profiter de ce souffle immense pour faire de la ville une terre hospitalière.

Il faut chaque année assurer la diversité des provenances géographiques, sensitives, et culturelles. Les rencontres avec d’autres formes d’expressions artistiques comme la musique, le théâtre, la danse, le conte, les arts plastiques… contribuent au développement créatif. Cet élargissement de la gamme des sens se conjugue avec la gratuité préservée des manifestations qui demeure, même par vent de tempête, un principe important. Un nouveau maire reprend cette année le flambeau qui brille toujours de mille feux. Après le député UMP Robert Lecou, la socialiste Marie-Christine Bousquet s’est engagée à trouver de nouveaux modes de financement, (avec le transfert de cette compétence à l’Agglo, de nouveaux partenariats sont en cours.)

Le festival soulève un temps le voile de représentations aveugles qui flotte sur l’identité méditerranéenne. Comme suspendue, la violence politique cède la place à d’autres réalités, aux maux et aux réconforts des hommes et des femmes dont on peut saisir l’outrance. Une trentaine de lieux sont occupés pour cela dans la ville, places ombragées, hôtels particuliers, petites ruelles, jardins, cloître, berges aux pieds des ponts…

Sous la houlette de sa directrice Maïthé Vallès-Bled, l’événement a su conserver l’alchimie et la fertilité des rencontres, en ne cédant pas au phénomène de mode ou au développement incontrôlable. La ville entière s’offre à l’incessant travail du style et de la pensée des poètes venus de toutes les rives, tel un espace qui s’offre au vent.

Cet esprit porte la réputation du festival comme un temps fort de la culture méditerranéenne en Europe. L’année dernière, le festival a reçu le patronage de l’Unesco, une reconnaissance de l’événement artistique en matière de tolérance et du dialogue entre les cultures.

Dix années ont permis la difficile conquête d’un public attentif, heureux d’être là, tranquille, cosmopolite. Public actif dans l’orientation de ses choix, pour se tailler une voie souple et variable. Tout est permis. On peut se mettre au petit trot matinal, pour multiplier les rencontres parmi les 350 lectures et spectacles que propose le festival, démarrer plus relaxe, en respectant son horloge biologique… ou carrément farniente, chaise longue et pieds dans l’eau.

Voir aussi : Rubrique Poésie, Voix de la Méditerranée le contenu d’une union , rubrique Rencontre Sapho,