« Les journalistes font face à l’accélération du temps »

 

Web journalisme, photo Lionel Charrier (Myop)

Qui l’aurait dit il y a dix ans : pour un journaliste, passer au Web est majoritairement perçu comme une opportunité aujourd’hui. Mais la formation pèche. C’est l’un des résultats de l’enquête sur les pratiques et les représentations professionnelles réalisée par l’Observatoire du webjournalisme (1). Une quinzaine de rédactions nationales ou régionales, papier et audiovisuelles, soit 90 journalistes ont répondu. Les questionnaires n’ont pas encore été totalement exploités, mais quelques tendances ont été dévoilées lors des premiers Entretiens du webjournalisme à Metz, organisés lundi et mardi par le Centre de recherche sur les médiations de l’université Paul-Verlaine et par l’Observatoire du récit médiatique de Louvain. «L’objectif est de confronter des universitaires et des professionnels et de faire que l’Obsweb soit un lieu de réflexion des journalistes sur leurs propres pratiques», a expliqué en préambule Arnaud Mercier, l’initiateur du projet.

Stratégies.Dans l’amphi, cette observation de soi-même a son pendant logique. Des caméras et des boîtiers se baladent, les ordinateurs portables sont déployés et les tweets de mise (#obsweb). Il y a là la deuxième promotion de la licence professionnelle journalisme et médias numériques (16 élèves), qui captent les débats et vont alimenter leur webzine école Webullition. Il y a aussi Denis Robert, le parrain de la première promo qui a décidé de faire un docu sur la suivante, parrainée, elle, par John-Paul Lepers. Les cours vont du «Rich Media» à la «datalyse», en passant par l’économie des médias. Côté recherche, les premiers Entretiens s’annoncent comme le prélude à la construction d’un réseau européen et la réalisation d’enquêtes dès 2011 avec Louvain, Genève et Laval sur les stratégies locales et les métiers de l’information numérique.

Desk. Autre enseignement de l’enquête d’Obsweb : «Les directeurs et rédacteurs en chef mettent en avant la nécessité d’être visibles sur les réseaux sociaux», rapporte la chercheuse Brigitte Sebbah, qui précise que les journalistes de base sont plus nuancés. «La majorité ne voit pas l’intérêt de tenir un blog ou d’être sur les réseaux sociaux, considérant leur plus-value utopique.» Cette nécessité de la visibilité et de la différenciation apparaît comme un moteur du personal branding. Pour Steven Jambot, qui collabore notamment au desk de France24.com, «la profession se trouve en plein bouleversement et les jeunes journalistes doivent se faire remarquer. Mais être sur les réseaux ne suffit pas, il faut être un bon journaliste.» L’ utilisation de Facebook ou de Twitter constituent pour certains un laboratoire d’apprentissage pour se protéger et jouer des commentaires.

Journaliste et community manager à France 3-Lorraine, Jean-Christophe Dupuis-Rémond a repris en main le site depuis septembre et demandé aux internautes ce qu’ils en attendaient. La page Facebook a été vivifiée, et a doublé son nombre de fans, dont une surreprésentation des jeunes (70% entre 18 et 44 ans) par rapport au petit écran. Samuel Goldschmidt, journaliste-reporter à RTL, ne se déplace jamais sans Twitter… Il évoque le plaisir d’être le premier à informer. Main sur l’iPhone, prêt à appuyer sur «envoi», il avait préparé le message avant même que le procureur dans l’affaire du petit Grégory n’annonce la réouverture de l’enquête.

(1) http://obsweb.net

Interview Arnaud Mercier

L ‘universitaire, analyse les difficiles conversions des rédactions aux nouveaux modes d’information.Arnaud Mercier, directeur de la licence professionnelle journalisme et médias numériques à l’université Paul-Verlaine à Metz, lancée à la rentrée 2009, explique la montée du webjournalisme.

Pourquoi une formation et un observatoire spécifique au webjournalisme, Obsweb ?

Nous participons tous à un vrai moment internet. Aujourd’hui, quelque chose se joue dans les pratiques, qu’il est nécessaire de restituer dans la recherche. Il faut permettre aux journalistes de descendre de leur vélo pour se regarder pédaler. Personne n’a la recette et n’expérimente le même modèle. Moi aussi, j’ai tâtonné dans l’élaboration de cette formation. Mais je suis parti d’un constat de base. Si un webjournaliste est un journaliste comme un autre, il y a une culture web, une dimension plurimédias, des compétences qui justifient une différenciation.

Qu’on le veuille ou non, un journaliste web dans un média «NEL» [«né en ligne » pour remplacer l’expression « pure player », certains ayant désormais des déclinaisons papier, ndlr], doit acquérir d’autres formes de compétences par rapport à un journaliste traditionnel. Nous dispensons ainsi un cours de datalyse et il faut pour cela bouffer de la ligne de code et savoir se servir d’outils web pour enrichir le contenu. Cela s’apprend et s’acquiert comme un réflexe. Il y a des résistances. Dans le cadre d’Obsweb, un doctorant va ainsi travailler sur les changements dans les rédactions et les résistances à ces changements. Par ailleurs, beaucoup de journalistes, qui se plaignent de ne pas être assez accompagnés dans le passage au Web, sont très critiques vis-à-vis de leur hiérarchie dans la construction de leur stratégie en ligne.

Certains des intervenants aux Entretiens ont avancé que les journalistes étaient réticents au changement, technophobes et nuls en sécurisation de leurs données. Qu’en pensez-vous ?

C’est un retard qui peut être lié à une appréhension du changement. Toute la sociologie de l’innovation montre que les passages s’accompagnent de freins culturels et mentaux. L’autre obstacle évoqué est l’absence de modèle économique pertinent des expériences en ligne. Dans le cadre de notre enquête réalisée dans une quinzaine de rédactions, la hiérarchie de l’une d’elles nous a expliqué ceci : nous avons changé tout le système informatique pour un process multimédia, comme ça nous sommes prêts quand le modèle économique sera là. Mais c’est attendre l’arme au pied ! Est-ce qu’on se lance dans l’eau froide ou on attend qu’elle devienne tiède au risque que la baignoire ait disparu ?

Pourquoi dites-vous «pas de professionnalisation sans déprofessionnalisation»?

Les nouvelles compétences peuvent contribuer à effacer le sentiment de professionnalisation ancré sur leurs anciennes compétences. C’est un défi pour les médias qui doivent continuer à attirer leur public en capitalisant sur la marque, tout s’en adaptant à l’immédiateté et en intégrant les aspirations participatives.

Les journalistes doivent faire face à l’accélération du temps, suivre le rythme des innovations, apprendre à gérer la relation directe avec les internautes, devenir homme-orchestre et être réactif à l’écoute des aspirations du public… Pour la presse quotidienne régionale qui souffre d’un problème de vieillissement de leur lectorat, le Web est le moyen de retrouver un rajeunissement d’une audience. Ce moment-là nécessite un esprit pionnier. Il faut se lancer.

Il n’y a pas de modèle et vous dites qu’il faut foncer…

Le bout du chemin est sûr mais la trajectoire pour l’atteindre ne l’est pas. Tout le monde sait que l’essentiel des pratiques d’information demain se fera par Internet et les supports mobiles. Ne serait-ce que parce que les jeunes générations élevées dans les nouvelles technologies vont vieillir. Je ne crois pas du tout que tout d’un coup, à 40 ans, elles se mettront au papier. La consommation en ligne n’est pas comme les joints qu’on fume à 17 ans et qu’on stoppe en disant j’arrête les bêtises. Ce n’est pas une phase de transition liée à un moment de rébellion. Obsweb accueille aussi un doctorant qui va plancher sur les pratiques d’informations des 15-25 ans. Si on arrive à comprendre leurs usages, on pourra alors trouver les chemins y pour arriver.

Que vous inspire l’événement WikiLeaks ?

Sans le Web, il n’y aurait pas de WikiLeaks. Je suis estomaqué de la réaction frileuse de vieilles bigotes des journalistes traditionnels par rapport à l’idée qu’ils ont des sources confidentielles. Et pourtant, c’est ce qu’ils cherchent à faire au quotidien. C’est peut-être un blocage mental et culturel lié à la modernité de WikiLeaks. Owni a développé un outil qui amène à une valorisation des Warlogs, des données tellement vastes qu’elles ne peuvent pas être exploitées par un journaliste seul. Ce qui est peut-être dur à entendre aussi, c’est que la parole publique n’est plus seulement aux journalistes patentés.

Frederique Roussel ( Libération)

 

Wikileaks : l’Empire contre-attaque

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« Je n’est jamais vu un tel acharnement »

Cédric Manara est professeur de droit à l’Edhec et membre du comité scientifique de Juriscom.net. Depuis 1995, il travaille sur les questions liées à Internet.

La démarche d’Eric Besson, qui a demandé l’arrêt de l’hébergement de WikiLeaks en France, est-elle légitime ?

La communication du ministre, c’est surtout une façon d’attendrir la viande. Il sait très bien que seule une décision de justice peut aboutir à ce résultat. Mais le juge ne peut statuer qu’en fonction d’un texte de loi, et il n’en existe pas qui protège les télégrammes diplomatiques américains. Et quand il n’y a pas de texte, la seule solution, c’est de faire appel au trouble à l’ordre public, qui permet d’interdire un acte contraire aux valeurs portées par la nation. Eric Besson veut donc convaincre l’éventuel futur juge en charge de l’affaire que WikiLeaks entre précisément dans ce cadre. Et il y a des chances pour que ça passe.

C’était aussi une manière de faire pression sur l’hébergeur OVH, qui aurait pu céder et fermer son serveur avant même l’intervention d’un juge…

Oui, ce qui aurait sans doute beaucoup nui à son image. La réaction d’OVH a été très intelligente. Ils savent que selon la loi, ils doivent retirer tout contenu «manifestement illicite» dès qu’ils ont connaissance de son existence. Ils ont appris la présence de WikiLeaks chez eux, mais ils ne pouvaient pas décider du caractère «manifestement illicite», et ils ont donc saisi la justice, qui a finalement refusé de se prononcer, car il faut un débat contradictoire.

Le service de paiement Paypal, qui a clôturé brutalement le compte de WikiLeaks, Amazon, qui a refusé de continuer à les héberger, et EveryDNS qui s’occupait du nom de domaine Wikileaks.org, ont eu moins d’états d’âme…

Ils dépendent du droit américain, qui est très libéral sur le sujet. Dans tous les contrats de ce genre d’entreprises, dans la partie CGU (conditions générales d’utilisation), il y a toujours une clause qui explique, en gros, «on arrête quand on veut, et vous êtes d’accord». Et c’est un des problèmes : Internet, aujourd’hui, est devenu très dépendant de ce droit-là, qui ne garantit pas les droits élémentaires des internautes. Dans le cas présent, il a sans doute suffi d’une pression insistante, directe ou indirecte, du gouvernement des Etats-Unis, et les prestataires se sont très vite exécutés.

Que pensez-vous de l’emballement des derniers jours dans les mesures contre WikiLeaks ?

Ça fait quinze ans que je travaille sur le sujet d’Internet, et je n’ai jamais vu un tel acharnement ! Que ce soit pour des affaires de contrefaçon, pour des ventes aux enchères d’objets nazis, pour le cybersquatting ou pour des sites illégaux de jeux d’argent, les affaires prenaient du temps. On passait soit par l’hébergeur, soit par le fournisseur d’accès, et la justice finissait par se prononcer. Mais pour Assange et WikiLeaks, c’est invraisemblable : on a utilisé en quelques jours tous les leviers possibles. Il ne manque plus que le filtrage, et qu’on interdise l’accès de WikiLeaks aux internautes, et on pourra comparer le tout au modèle chinois. Je trouve cette accélération très inquiétante.

Jusqu’à quel point ?

Jusqu’ici, les problématiques liées à Internet, c’était de la pacotille. Elles répondaient presque exclusivement à une logique économique, comme dans le cas de la contrefaçon. Aujourd’hui, on a l’impression que les Etats viennent de se rendre compte qu’ils ne contrôlent pas vraiment Internet et qu’ils exercent leur pouvoir grâce à des dispositifs techniques qu’ils ne maîtrisent pas totalement. A l’époque des pneumatiques, c’était gérable. Plus maintenant. Quelques jours après le 11 Septembre, les Etats-Unis publiaient un texte d’exception, le Patriot Act, qui mettait en place des mesures liberticides pour, soi-disant, lutter contre le terrorisme. J’ai peur qu’on ait à faire face rapidement à un Patriot Act version Internet pour reprendre la main sur ce qui circule sur le réseau. Et s’affranchir des délais et des contraintes de la justice. Il va sans dire que tous ceux qui réclament plus de contrôle depuis des années, comme les ayants droit, profiteront de cette nouvelle donne.

Les répercussions risquent donc de dépasser le cadre de l’affaire WikiLeaks…

Oui, et finalement on peut penser ce qu’on veut des révélations et du fonctionnement de WikiLeaks. On peut même ne pas avoir d’avis. Mais je crois qu’il faut être plus vigilant que jamais. Ce qui est en train de se passer peut mettre en péril l’Internet que nous connaissons. Et ça peut aller très vite.

Recueilli par Erwan Cario (Libération)

 

Voir aussi : Rubrique Médias , rubrique Rencontre Ignaciao Ramonet l’info ne circule plus à sens unique,


Réactions en chaîne après les révélations de Wikileaks

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Il est encore trop tôt pour évaluer les conséquences de la publication de documents secrets par Wikileaks. Quelques réactions à chaud après la bombe diplomatique…

La France solidaire de l’administration us

François Baroin, porte-parole du gouvernement, considérant comme «une menace» la publication par WikiLeaks de documents secrets, a dit la France «très solidaire de l’administration américaine». «Nous sommes très solidaires de l’administration américaine sur la volonté d’éviter ce qui, non seulement porte atteinte à l’autorité des Etats, à la qualité de leurs services, mais met en danger des hommes et des femmes qui ont travaillé au service du pays», a déclaré Baroin sur Europe 1. Il a indiqué que le gouvernement français avait «été informé par les autorités américaines de la réalité de ces publications». «Il faut qu’on soit très attentifs et très solidaires au niveau des Etats pour lutter contre ce qui est une menace» contre «l’autorité et la souveraineté démocratique», a-t-il insisté.

Selon le ministre, s’il y avait un tel site en France qui révélait des secrets d’Etat, «il faudrait être intraitable», le «poursuivre». «Moi j’ai toujours pensé qu’une société transparente, c’était une société totalitaire», a dit le ministre. «La protection des Etats, c’est quelque chose de sérieux, c’est la protection des hommes, des femmes, des citoyens» qui est en jeu, a expliqué le porte-parole.

Bogota regrette les fuites

Le président colombien Juan Manuel Santos a regretté lundi la diffusion par le site WikiLeaks de 250.000 notes diplomatiques américaines et manifesté sa solidarité envers les Etats-Unis, face à ce qu’il considère un « risque énorme » pour sa sécurité.

« Le gouvernement de Colombie regrette la fuite de documents diplomatiques des Etats-Unis et se solidarise avec l’administration du président Barack Obama face à ce qu’il considère un énorme risque pour la sécurité du peuple américain et de ses fonctionnaires », a déclaré la présidence dans un communiqué. La Colombie, l’un des principaux alliés des Etats-Unis en Amérique latine, serait évoquée plus de 2.000 fois dans ces notes, selon la presse colombienne qui n’a toutefois pas à ce stade publié de documents la concernant.

Depuis l’an 2000, Bogota a reçu plus de six milliards de dollars d’aide américaine dans le cadre du Plan Colombie de lutte contre les guérillas d’extrême gauche et le trafic de cocaïne, dont elle a longtemps été le premier producteur mondial. Lundi l’ambassadeur des Etats-Unis en Colombie, Michael Mckinley, a affirmé pour sa part que les relations entre les deux pays resteraient étroites en dépit des fuites, tout en assurant que le contenu des éventuels rapports diffusés sur la Colombie n’était pas le résultat d’activités d’espionnage.

Chavez demande à Clinton  de démissionner

Le président vénézuélien Hugo Chavez a appelé lundi la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton à démissionner au lendemain de la publication de notes diplomatiques confidentielles américaines par le site WikiLeaks.

« L »empire (américain) est mis à nu (…) Mme Clinton doit démissionner », a affirmé Hugo Chavez lors d’un discours retransmis par la chaîne de télévision VTV. « C’est le moins que vous puissiez faire: démissionner. Ainsi que les autres délinquants travaillant au département d’Etat », a ajouté le chef de file de la gauche radicale latino-américaine. « Quelqu’un devrait étudier l’équilibre mental de Mme Clinton », a suggéré Hugo Chavez faisant référence à un document relatif à l’état de santé mentale de la présidente argentine Cristina Kirchner. « Je crois que quelqu’un doit démissionner. Je ne dis pas que çà doit être le président (Barack) Obama », a-t-il ajouté. « Les Etats-Unis attaquent les gouvernements et leur manquent de respect, y compris ceux de leurs alliés », conclut le président vénézuélien qui a félicité WikiLeaks pour « son courage ».

Les contacts de l’Iran avec le renseignement canadien

Le renseignement canadien a eu des contacts en 2008 avec le ministère iranien du Renseignement et de la Sécurité, à la demande de ce dernier, qui a proposé son « aide » en Afghanistan concernant d’éventuels attentats, révèle lundi un document provenant des fuites de WikiLeaks.

Ce document, rendu public par le New York Times, rend compte d’une rencontre à Ottawa, le 2 juillet 2008, entre le chef du service canadien de renseignements CSIS, Jim Judd, et un conseiller du département d’Etat Eliot Cohen. Il révèle un épisode inédit, les relations entre Ottawa et Téhéran étant très fraîches depuis plusieurs années. M. Judd a indiqué à son interlocuteur que son service était « très, très préoccupé » par l’Iran. « Le CSIS a récemment parlé avec le ministère du Renseignement et de la Sécurité, après que cette agence eut demandé un canal de communication avec le Canada », a-t-il dit. « Les Iraniens ont accepté d’+aider+ (le Canada) sur des questions afghanes, y compris en partageant des informations sur des attentats potentiels », poursuit le câble diplomatique envoyé par l’ambassade américaine à Ottawa.

La Chine « prête à abandonner la Corée du Nord »

Cependant, a confié M. Judd, « nous n’avons pas compris ce qu’ils voulaient vraiment », car il est clair que « les Iraniens veulent saigner la FIAS (Force internationale d’assistance à la sécurité en Afghanistan, ISAF)… lentement ». Un responsable sud-coréen estime que la Chine est « prête à abandonner la Corée du Nord » et accepterait l’unification de la péninsule coréenne, selon un document officiel américain divulgué par le site WikiLeaks et publié lundi par le Guardian. Ce responsable, le vice-ministre sud-coréen des Affaires étrangères Chun Yung-Woo, a fait cette déclaration à un ambassadeur des Etats-Unis, d’après le document cité par le quotidien britannique. Toujours selon ce document, M. Chun pense que les dirigeants du Parti communiste chinois « ne considèrent plus la Corée du Nord comme un allié utile ou fiable ». Le responsable sud-coréen estime aussi que la Chine « ne sera pas capable d’arrêter l’effondrement de la Corée du Nord après la mort de son leader Kim Jong-Il », indique la note citée par le Guardian.

Clinton s’excuse pour les fuites sur la Turquie

La secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton a présenté ses excuses pour les fuites concernant la Turquie de notes diplomatiques américaines orchestrées par le site WikiLeaks, a annoncé lundi à Washington le ministre turc des Affaires étrangères Ahmet Davutoglu. « Mme Clinton s’est excusée auprès de la Turquie du fait qu’elle était citée dans ces notes confidentielles rendues publiques », a-t-il dit dans une déclaration à des journalistes à Washington après avoir rencontré son homologue américaine dans le cadre de sa visite de travail aux Etats-Unis.

Le ministre était cité par les chaînes de télévision turques. M. Davutoglu a affirmé que les câbles ne mettaient pas en cause les bons rapports entre son pays et les Etats-Unis. « Ces notes ne changent pas le regard que nous portons sur les Etats-Unis », a-t-il déclaré. Dans certains télégrammes diplomatiques rendus publics par WikiLeaks, Ahmet Davutoglu est qualifié d' »exceptionnellement dangereux » par un informateur des diplomates américains en poste à Ankara. Les télégrammes américains obtenus par WikiLeaks montrent la suspicion grandissante des Occidentaux à l’égard de la Turquie, pays membre de l’Otan mais dont le Premier ministre « hait Israël », selon les termes de diplomates américains. « Ces publications ne représentent pas seulement une attaque contre les intérêts diplomatiques américains. Elles représentent aussi une attaque contre la communauté internationale », a estimé Hillary Clinton au cours d’une brève conférence de presse après avoir rencontré le ministre turc.Au cours de cette conférence de presse, le chef de la diplomatie américaine a « condamné » la publication la veille par WikiLeaks de 250.000 documents confidentiels et a déclaré que les Etats-Unis « regrettaient vivement la divulgation d’informations destinées à être confidentielles ».

Voir aussi Rubrique Médias Wikileaks fait péter un cäble à Washington,

Wikileaks publie 400.000 documents secrets sur la guerre en Irak

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109.032 morts en Irak dont plus de 60% de civils

La coalition internationale a torturé des prisonniers irakiens et fermé les yeux sur des exactions commises par les forces irakiennes, a affirmé vendredi le site WikiLeaks, en publiant près de 400.000 documents secrets de l’armée américaine sur la guerre en Irak. «L’administration Obama a l’obligation (…) d’enquêter» sur ces révélations, a jugé le rapporteur spécial de l’ONU sur la torture, Manfred Nowak.

Après des semaines de suspense, le site spécialisé dans le renseignement a commencé à diffuser vendredi soir 391.831 documents qu’il a présentés comme «la plus grosse fuite de documents militaires secrets de l’Histoire». Les documents mettent en évidence «de nombreux cas de crimes de guerre qui semblent manifestes de la part des forces américaines, comme le meurtre délibéré de personnes qui tentaient de se rendre», accuse le site dans un communiqué.

Ces documents révèlent «la vérité» de la guerre en Irak, a déclaré le fondateur du site Julian Assange, samedi lors d’une conférence de presse à Londres. WikiLeaks évoque aussi le comportement de soldats américains «faisant sauter des bâtiments entiers parce qu’un tireur se trouve sur le toit».

Tortures

Les documents révèlent «plus de 300 cas de torture et de violences commis par les forces de la coalition sur des prisonniers», ajoute WikiLeaks, qui a aussi dénombré plus d’un millier d’exactions de la part des forces irakiennes. «On parle de cinq fois plus de morts en Irak, un vrai bain de sang comparé à l’Afghanistan», a déclaré sur CNN le fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, jugeant que «le message de ces dossiers est puissant et peut-être un peu plus facile à comprendre que la complexe situation en Afghanistan».

L’AFP a pu consulter une partie des documents à Londres avant leur diffusion sur internet. Une grande partie des textes sont expurgés des noms pouvant mettre en danger des personnes, a expliqué WikiLeaks. WikiLeaks a également remis à l’avance ses documents à plusieurs médias internationaux comme le New York Times, le Guardian, le Monde, Der Spiegel et la chaîne Al-Jazira, qui a la première révélé leur contenu.

15.000 décès de civils non révélés

Selon la chaîne de télévision du Qatar, l’armée américaine a «couvert» des cas de torture de détenus par les autorités en Irak, où des centaines de civils ont en outre été tués à des barrages tenus par les alliés. Au vu des documents, «les autorités américaines n’ont pas enquêté sur les centaines de cas de violences, tortures, viols et mêmes des meurtres commis par des policiers et des militaires irakiens», écrit le Guardian.

Selon le communiqué de WikiLeaks, les documents secrets couvrent la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2009, après l’invasion américaine de mars 2003 qui a renversé le régime de Saddam Hussein.

Les documents révèlent que le conflit a fait 109.032 morts en Irak, selon le communiqué, qui précise que plus de 60% sont des civils, soit 66.081 personnes. Sur ce total, 15.000 décès de civils n’avaient jusqu’à présent pas été révélés, selon WikiLeaks.

Nouveaux cas impliquant la société Blackwater

Ces chiffres montrent «que les forces américaines disposaient d’un bilan recensant morts et blessés irakiens même si elles le niaient publiquement», a relevé Al-Jazira. Un bilan américain publié officiellement fin juillet faisait état de près de 77.000 Irakiens civils et militaires tués de 2004 à août 2008.

Selon Al-Jazira, les documents font également état de liens entre le Premier ministre irakien sortant Nouri al-Maliki et des «escadrons de la mort» qui semaient la terreur au début du conflit. D’autres documents «révèlent de nouveaux cas impliquant (l’ancienne société de sécurité américaine privée) Blackwater dans des tirs contre des civils», sans qu’aucune charge ne soit retenue contre elle.

«L’administration Obama a l’obligation d’enquêter»

Le rapporteur spécial de l’ONU sur la torture, Manfred Nowak, a appelé le président américain Barack Obama à lancer une enquête sur les cas de torture révélés dans une série de documents de l’armée américaine publiés vendredi par le site WikiLeaks.

«L’administration Obama a l’obligation, quand surgit des accusations sérieuses de torture contre un responsable américain, d’enquêter et d’en tirer les conséquences… Cette personne devrait être traduit en justice», a déclaré M. Novak sur la radio BBC 4.

M. Nowak a cependant reconnu qu’il ne pourrait s’agir que d’une enquête américaine. Des poursuites par la Cour pénale internationale (CPI) ne sont pas possibles car les Etats-Unis ne reconnaissent pas la cour, a-t-il admis.

Au cours de la même conférence de presse, un responsable de WikiLeaks, Kristinn Hrafnsson, a annoncé la diffusion prochaine de nouveaux documents militaires américains, sur la guerre en Afghanistan cette fois.

AFP

Voir aussi : Rubrique Médias Wikileaks fait péter un câble à Washington, Irak Un premier bilan de la guerre, Bagdad : une série d’attentat marque l’ouverture du scrutin, Pétrole contre nourriture : l’Irak réclame des réparations, rubrique Afghanistan Enlisement total, Rubrique politique internationale Le président Irakien à Paris pour une normalisation des contrats, rubrique Rencontre Michel Terestchenko Torture une pratique institutionnelle