Martine Aubry (PS) s’est dite mercredi « extrêmement étonnée » par la tribune de Nicolas Sarkozy sur l’identité nationale reprochant au chef de l’Etat de continuer à « parler de la France comme d’un pays de croyants les uns à côté des autres qui s’opposeraient ».
« Cette tribune du président de la République avait pour objectif peut-être de reprendre la main par rapport à un débat qu’il a voulu lancer comme d’habitude pour masquer des échecs », a déclaré la première secrétaire du PS sur France Inter. Mais « j’ai été extrêmement étonnée », a-t-elle poursuivi, car « il continue, il appuie les choses, il nous parle de la France comme d’un pays de croyants les uns à côté des autres qui s’opposeraient ». « Est-ce que vraiment le problème aujourd’hui de la France c’est de savoir comment vivent ensemble des catholiques, des agnostiques, des musulmans, des juifs », a-t-elle demandé. « Nous ne sommes pas un pays confessionnel », a-t-elle dit.
« Ce climat délétère qui vise à montrer l’étranger, celui qui est différent, est contraire ce que nous sommes », a-t-elle affirmé. « Avec un discours un peu populiste », Nicolas Sarkozy « nous explique qu’il faut écouter les souffrances des gens, qu’il faut écouter le peuple. Eh bien qu’il écoute aujourd’hui l’angoisse des gens, des retraités, des salariés » face à la crise, a dit la maire de Lille. « Une fois de plus, le président donne une impression d’une identité figée remise en cause par ceux qui viendraient d’ailleurs » et « ce n’est vraiment pas digne d’un président de la République », a-t-elle ajouté.
Interrogée sur la demande d’élus UMP d’interdire les drapeaux étrangers lors des mariages en mairie, elle a affirmé n’en avoir pour sa part « jamais vu », avant de déclarer : « c’est quoi ce climat qu’on est en train de nous installer en France : un jour c’est les mariages gris, le lendemain c’est la burqa, le troisième jour ce serait les drapeaux étrangers dans les mairies ». Qu' »on s’occupe plutôt des problèmes des Français », a-t-elle conclu.
Le secrétaire général de l’Otan Anders Fogh Rasmussen a lancé mercredi un avertissement aux pays alliés réticents à envoyer des renforts de soldats en Afghanistan dans le sillage des Etats-Unis, en prévenant que Washington pourrait abandonner son approche « multilatérale ».
« Les Américains ont opté pour une approche multilatérale et je crois que les Etats-Unis commenceront à mettre en doute cette approche si les autres alliés ne prennent pas leur part du fardeau » en Afghanistan, a-t-il dit lors d’un débat à Bruxelles. « Le président (Barack) Obama a annoncé une augmentation significative du nombre de troupes en Afghanistan, dans cette situation il est crucial que les autres alliés suivent », a-t-il déclaré.
« L’équilibre de l’Otan est en jeu, il est important que l’opération en Afghanistan ne soit pas perçue comme une opération américaine pure et simple », a ajouté M. Rasmussen. Donc « j’appelle tous les alliés à augmenter leur contribution en Afghanistan », a dit le secrétaire général. Invité à dire s’il n’était pas déçu par la position du président français Nicolas Sarkozy qui exclut l’envoi de troupes de combat en renfort en Afghanistan mais pas celui de nouveaux formateurs militaires, M. Rasmussen a répondu: « Au contraire je suis encouragé par les commentaires du président Sarkozy ».
La France comme l’Allemagne veulent attendre la conférence de fin janvier sur l’Afghanistan avant de se prononcer sur leur contribution. M. Rasmussen a aussi appelé les Pays-Bas à poursuivre leur engagement. « J’espère que tous les alliés vont prendre en considération (le fait) que c’est une opération de l’Otan, j’ai confiance dans le fait que le gouvernement néerlandais et les autres tiendront compte de cela », a-t-il dit. Les Pays-Bas contribuent à raison d’environ 1.770 hommes à la Force internationale de l’Otan en Afghanistan (Isaf). Ils sont déployés pour la plupart dans la province d’Uruzgan (sud), où les talibans sont très virulents. Les Pays-Bas ont décidé de retirer leurs troupes en 2010 et ils doivent encore décider quelle suite ils donneront aux demandes qui leur sont faites de rester présents.
La France risque d’être prise « dans l’engrenage » (Hollande, PS)
François Hollande (PS) a souligné mercredi le risque pour la France d’être pris « dans l’engrenage » après la décision des Etats-Unis d’envoyer des troupes supplémentaires en Afghanistan en raison de sa présence dans l’organisation militaire de l’Otan. « Pour l’instant, Nicolas Sarkozy dit non, je n’enverrai que des formateurs, mais nous ne sommes pas certains qu’il ne sera pas lui-même, dans le cadre de cette alliance militaire (l’Otan), pris dans l’engrenage », a déclaré l’ex-premier secrétaire du PS sur France 2.
Il a rappelé que c’est « sous l’autorité de Nicolas Sarkozy » que la France y est « entrée » et « donc de plus en plus nous allons être liés aux décisions des Etats-Unis ». Selon le député de Corrèze, « le risque de la mission d’Obama c’est l’escalade : on va envoyer sans cesse plus de troupes pour maintenir un ordre de plus en plus précaire ». « Ce que nous devons faire, selon lui, c’est changer l’orientation de la présence des troupes » en insistant sur « la formation, l’afghanisation, la reconstruction, la lutte contre la corruption et les trafics ».
Le chef de la diplomatie française, Bernard Kouchner, a déclaré mercredi qu’un nouvel ajustement du dispositif militaire français en Afghanistan était possible, après l’annonce de renforts américains massifs dans ce pays. La veille, le président Nicolas Sarkozy avait apporté son « plein soutien » à son homologue américain Barack Obama sans annoncer de renforts.
Afghanistan: la France « coincée » par l’engagement dans l’Otan (Chevènement)
Le président du Mouvement républicain et citoyen (MRC) Jean-Pierre Chevènement a estimé mercredi que la France est « coincée » par sa réintégration dans le commandement militaire de l’Otan et devra probablement suivre ses alliés en envoyant des renforts militaires en Afghanistan.
« La France est coincée par la réintégration de l’organisation militaire de l’Otan », décidée par Nicolas Sarkozy, a affirmé l’ancien ministre PS de la Défense sur i-Télé. « A partir du moment où (Barack) Obama met 30.000 hommes de plus, en demande 10.000 aux alliés de l’Otan, où les Allemands malgré leurs réticences vont envoyer des renforts, où les Britanniques ont déjà annoncé qu’ils allaient en envoyer, la France est prise dans le sifflet », a-t-il déclaré.
« Je pense que le gouvernement ne tiendra pas, que le président de la République, vraisemblablement à la Conférence de Londres le 28 janvier, annoncera des renforts », a jugé le sénateur du Territoire-de-Belfort. Selon M. Chevènement, « ces renforts ne régleront rien du tout ». « Ce qui compte c’est la définition des objectifs politiques et le militaire vient après », a-t-il dit.
Renforts en Afghanistan: « fuite en avant » vouée à l’échec, selon le PCF
Le Parti communiste français (PCF) a dénoncé mercredi la décision du président américain Barack Obama d’envoyer 30.000 soldats américains supplémentaires en Afghanistan, y voyant « une fuite en avant lourde de menaces ».
« Barack Obama vient d’annoncer l’envoi de 30.000 soldats américains supplémentaires en Afghanistan. Consternante pour un prix Nobel de la Paix, cette fuite en avant dans la guerre est lourde de menaces pour les peuples afghan mais aussi américain », écrit le PCF dans un communiqué.
« L’échec de la stratégie de l’OTAN est chaque jour plus criant. Il serait inacceptable que la France choisisse de s’aligner sur l’Administration des Etats-Unis dans cette stratégie belliqueuse en participant de quelque manière à l’envoi de nouvelles troupes. Le Président de la République doit refuser une telle perspective », ajoute le texte, rappelant que le Parti exige le retrait des troupes de l’OTAN d’Afghanistan.
Ayrault demande à Sarkozy une clarification et un calendrier de retrait
Le président du groupe PS à l’Assemblée nationale, Jean-Marc Ayrault, a demandé mercredi au président Nicolas Sarkozy de « clarifier sa position » sur l’Afghanistan, « de s’engager dans une stratégie de solution politique et d’annoncer un calendrier de retrait » des troupes françaises.
Invité de Questions d’info/LCP/France Info/AFP, M. Ayrault s’est félicité du « changement de stratégie » du président américain Barack Obama, qui, en annonçant un renforcement des effectifs américains de 30.000 hommes a donné « une date », 2011, pour « l’amorce d’un retrait ». Cela démontre, a dit M. Ayrault que Barack Obama considère qu’il « n’y a pas de solution militaire en Afghanistan. Il y a une solution politique ».
S’agissant de l’engagement de la France, le chef de file des députés socialistes a rappelé sa demande d’un débat à l’Assemblée nationale. « Nous redemandons un changement de stratégie (…) il n’est pas question d’envoyer des militaires supplémentaires », a insisté M. Ayrault en faisant observer que dans ce dossier « la France ne pèse pas dans la décision » et « Nicolas Sarkozy est spectateur et non acteur ».
« La France doit clarifier sa position, s’engager dans une stratégie de solution politique et annoncer un calendrier de retrait », a poursuivi le député-maire de Nantes. « Il faut un calendrier. L’objectif est une sortie par le haut », a-t-il ajouté, en estimant que « l’objectif de date » de Barack Obama était « audacieux ».
Il a jugé que la France en Afghanistan avançait « au fil de l’eau sans peser sur la décision, sans être associée aux orientations nouvelles malgré sa présence dans le commandement intégré de l’Otan ».
Depuis la création du « classement mondial de la liberté de la presse » de RSF en 2002, la France n’a cessé de dégringoler (de la 11ème à la 43ème place en 2009) en raison de « l’ingérence des politiques, des perquisitions à répétition et de la faible protection des sources ».
Lors de la mise en place du classement de Reporters sans frontières, la France (11ème) figurait dans le prestigieux top 20 des pays respectant le mieux la liberté de la presse, devant l’Australie, la Belgique et la Suisse et juste derrière le Danemark, la Suède ou l’Allemagne.
A la 43ème place sur 175 cette année, la France est désormais bien loin du Danemark, de la Suède, de la Suisse, de la Belgique ou de l’Australie, restés dans le top 20. Elle se retrouve également derrière les Etats-Unis, mais aussi le Ghana, le Costa Rica, Trinidad et Tobago ou le Mali.
« Nous sommes forcément plus sévères avec la France, parce que c’est un Etat membre de l’Union européenne et qu’à ce titre elle doit être scrupuleuse en matière de respect de la presse », explique à l’AFP Jean-François Julliard, secrétaire général de RSF.
La dégringolade de la France en 2009 est notamment liée à l’interpellation controversée de l’ancien directeur de la publication de Libération, Vittorio de Filippis, à son domicile dans une affaire de diffamation. RSF rappelle également une plainte de France 3 contre le directeur du site d’information Rue89, Pierre Haski, suite à une diffusion de propos tenus hors antenne par le président Nicolas Sarkozy.
Globalement, la descente de la France dans le classement de RSF depuis 2002 est liée à la multiplication des perquisitions des locaux de médias, des gardes à vue ou des mises en examen des journalistes et du manque de garanties concernant la protection du secret des sources.
Le projet de loi sur la protection des sources n’est toujours pas adopté, malgré une « promesse de campagne de M. Sarkozy », rappelle M. Julliard. RSF s’inquiète en outre de « l’ingérence des autorités politiques, notamment du chef de l’Etat ». « Un chef d’Etat ne doit pas porter plainte lui-même contre un média, c’est un signal fort aux juges et aux procureurs qui croient ensuite avoir toute la liberté pour envoyer la police » chez un journaliste, estime M. Julliard. En référence à une plainte, finalement retirée, de Nicolas Sarkozy contre le site internet du Nouvel Observateur, qui avait publié un supposé SMS adressé à son ex-épouse, Cécilia Albeniz-Ciganer.
Invité d’honneur lundi des festivités de la fête nationale brésilienne, M. Sarkozy est arrivé peu avant 19h30 locales (22h30 GMT), sans son épouse Carla, dans la capitale fédérale, Brasilia, où il a été accueilli par son homologue Luiz Inacio Lula da Silva, qui l’a immédiatement conduit à sa résidence pour un dîner privé.
Présenté du côté français comme le « temps le plus important en substance » du séjour, ce premier rendez-vous doit permettre aux deux hommes de passer en revue l’essentiel de leur ordre du jour, notamment l’appel d’offres lancé par le Brésil pour la fourniture de 36 avions de chasse.
A quelques semaines du verdict attendu d’une compétition acharnée qui porte sur un contrat d’environ 4 milliards d’euros, le Rafale de Dassault fait figure de favori devant le Gripen du suédois Saab et le F/A-18 Hornet de l’américain Boeing.
Pour séduire le géant sud-américain, qui souhaite développer sa propre industrie de défense, la France a consenti dans son offre des transferts de technologies jugés « sans précédent » et compte désormais sur les liens privilégiés noués entre les deux chefs d’Etat pour emporter la mise.
« Entre le Brésil et la France, il ne s’agit pas d’une relation de fournisseur à client, mais d’un partenariat », a affirmé Nicolas Sarkozy dans un entretien paru dimanche dans le quotidien O Globo. « Et si nous voulons faire ensemble, c’est parce que nous partageons les mêmes valeurs et une même vision des grands enjeux internationaux », a-t-il insisté.
Le président Lula s’est montré sensible à ces arguments en laissant paraître sa préférence pour l’avion tricolore. « La France s’est montrée le pays le plus flexible pour le transfert de technologie », a-t-il confié mercredi à l’AFP, « évidemment, c’est un avantage comparatif exceptionnel ».
Malgré ce coup de pouce, l’entourage du chef de l’Etat, échaudé par les précédents échecs du chasseur français à l’export, reste d’une prudence extrême et s’est refusé à anticiper une éventuelle annonce pendant sa visite.
« Nous envisageons l’avenir de l’appel d’offre brésilien avec sérénité », a pour sa part déclaré un porte-parole de Dassault. A défaut de Rafale, M. Sarkozy formalisera les contrats conclus en décembre, lors de son précédent séjour brésilien, pour la fourniture de quatre sous-marins d’attaque Scorpène, de 50 hélicoptères de transport militaire et la fabrication d’une coque de sous-marin nucléaire.
D’un montant estimé à 8,5 milliards d’euros, ces commandes constituent le « plus gros contrat militaire » jamais signé par le Brésil, a titré dimanche le quotidien Folha de Sao Paul, pronostiquant que les Rafale devraient « probablement » s’y ajouter.
Nicolas Sarkozy compte également pousser les entreprises françaises qui se battent pour décrocher des contrats sur le marché brésilien, comme celui de la ligne TGV entre Rio de Janeiro et Sao Paulo.
Il sera d’ailleurs accompagné à Brasilia d’une escorte de patrons de grandes entreprises (EADS, Safran, Alstom, GDF Suez, Dassault), qui lanceront la semaine prochaine avec les Brésiliens un « groupe de haut niveau » chargé, selon l’Elysée, de « préparer la prochaine étape du partenariat ».
Lundi matin, il doit assister à la traditionnelle parade de la fête nationale avant un nouvel entretien avec Lula et une conférence de presse. Après une visite du chantier du tramway de Brasilia, confié à Alstom, puis une brève rencontre avec la communauté française, il remettra le cap sur Paris.
Rafale pour le Brésil : Fillon se « réjouit »
Le Premier ministre François Fillon s’est « réjoui » de la décision du président du Brésil Luiz Inacio Lula da Silva d’engager des négociations pour l’acquisition de 36 avions de combat Rafale.
« Cette décision, obtenue par le président de la République, s’inscrit dans le cadre d’un partenariat stratégique renforcé avec le Brésil, dont le rôle majeur sur la scène internationale est encore appelé à se développer dans les années à venir », écrit le Premier ministre dans un communiqué. François Fillon « salue cette excellente nouvelle pour l’ensemble de l’industrie aéronautique française ».
Le Brésil a annoncé lundi sa décision de principe d’acquérir 36 avions de combat français Rafale. Le président brésilien a fait part de cette décision à Nicolas Sarkozy qui effectue une visite d’Etat de 24 heures à Brasilia.
Pendant la campagne des élections présidentielles en 2007, le candidat Nicolas Sarkozy a multiplié les annonces de rupture avec la politique africaine de ses prédécesseurs, dénonçant le soutien aux dictatures, la diplomatie secrète, le clientélisme, ou encore les détournements de l’aide au développement, bref la « Françafrique ».
Pourtant, au regard des actes posés depuis sa prise de fonction à l’Elysée, le président français n’a pas tenu ses promesses : perpétuation de relations clientélistes, discours essentialiste de Dakar sur l’« homme africain », soutien à des dictateurs (Bongo, Khadafi…), défense de l’affairisme français (Bolloré, Bouygues…), intervention militaire au Tchad, rôle joué par certains émissaires officieux (Bourgi, Balkany…), la politique africaine de Nicolas Sarkozy s’inscrit plus dans une continuité que dans une rupture. Elle est une perpétuation de la politique néocoloniale que chaque président français a poursuivit depuis les « indépendances » africaines.
Entretien avec Samuel Foutoyet auteur de « Nicolas Sarkozy ou la Françafrique décomplexée »
« L’objectif principal se sont les matières premières »
Nicolas Sarkozy prône un nouveau modèle de relation franco-africaine quand est-il ?
Lors de sa campagne, le vainqueur des présidentielles a fait des déclarations importantes. Il a promis beaucoup de choses comme la fin du soutien aux dictatures, le remodelage de l’aide au développement, l’arrêt de la diplomatie secrète. Mon livre met en regard les discours et les réalités. Je me suis aussi penché sur le passé africain du Président Sarkozy et notamment sur ses liens avec Charles Pasqua qui sont l’une des clés de lecture pour saisir le rapport en Afrique de N. Sarkozy.
Vous évoquez notamment sa relation avec Omar Bongo ?
Juste après le discours « Nous sommes du côté des opprimés du monde », le Président reçoit la Présidente du Libéria, Mme Sirleaf, une quinzaine de minutes et réserve quelques jours plus tard un accueil fastueux au président gabonais Omar Bongo. Il faut se souvenir que cet ancien membre des services secrets français est arrivé au pouvoir en 1967 de manière très autocratique et qu’il s’y est maintenu grâce à des élections notoirement truquées. Entre 2004 et 2007, Sarkozy l’a rencontré au moins sept fois dans la résidence privée du président gabonais. Pour se dire quoi, on ne sait pas… Ce que l’on sait à travers les révélations de l’affaire Elf, c’est que Bongo a financé les partis politiques français, en particulier le RPR.
L’association Survie a intenté une action en justice à l’encontre de Bongo…
Les associations Survie, Sherpa et la fédération des Congolais de la diaspora ont mené une enquête sur le patrimoine personnel de Bongo à la suite de laquelle elles ont déposé plainte en 2007 pour des biens mal acquis. La plainte a été suivie d’une enquête par les services de la répression de la grande délinquance financière. Dans le cas de Bongo, celle-ci met à jour la bagatelle de trente-trois résidences dans le XVIe arrondissement de Paris et sur la côte d’Azur, de multiples comptes en banque, un parc de voitures de luxe impressionnant mais au mois d’octobre 2007, le couvercle se ferme. Et l’affaire est classée sans suite au motif qu’il n’y a pas assez de pièces au dossier.
Sarkozy paraît moins habile que ses prédécesseurs, comme en témoigne le discours de Dakar ou sa proposition de partage des richesses entre la RDC et le Rwanda ?
Sarkozy pratique effectivement un double discours : d’un côté les grande tirades sur la démocratie et de l’autre un discours choquant, réactionnaire et colonialiste comme celui de Dakar. Cela crée beaucoup de confusion dans l’opinion publique française. En Afrique, les populations sont très remontées par ses discours comme par ses actes. Comme lors de son dernier voyage au Congo Brazzaville où il a soutenu Sassou Nguesso pour les élections de juillet.
La pression des multinationales françaises s’intensifie-t-elle avec le culte que voue Sarkozy à l’idéologie libérale ?
Aujourd’hui, l’Afrique est un nouveau far-west pour les Boloré, Vinci, Total Fina Elf, Véolia, Aréva… Le super VRP Sarkozy est bien loin de ses promesses qui assuraient que la diplomatie française prendraient des distances avec les multinationales. Il brise des tabous on est presque dans la glorification du pillage. Dans un premier temps on a tout bonnement nié l’existence de la Francafrique, puis on a reconnu son existence en disant qu’elle n’existe plus et aujourd’hui on dit la Françafrique existe mais la Chinafrique c’est pire ! L’association Survie critique ce que la Chine fait en Afrique mais il faut aussi continuer à bien voir ce que fait la France en Afrique qui reste le numéro un.
L’émergence d’une nouvelle génération de diplomates défendant une vision multilatérale des relations se pose-t-elle en rupture avec les tenant de la Françafrique ?
On distingue en effet deux tendances au sein de la diplomatie française, celle de Robert Bougi, de Balkany qui sont des anciens du clan Foccart et des gens comme Bruno Joubert, ancien directeur de la stratégie de la DGSE ou Jean David Levitte, le responsable de la cellule diplomatique de l’Elysée, qui ont une vision plus américano-française sur l’Afrique. De là à dire que l’on assiste à un changement des pratiques… La combinaison des deux tendances se retrouve autour de l’objectif principal qui sont les matières premières. La paupérisation de l’Afrique francophone et l’espérance de vie qui décline demeurent à ce titre des indicateur éclairants.
Quel parallèle faite-vous entre se déploiement politico-économique à l’étranger et la politique intérieur de l’immigration ?
Il existe un lien très fort entre l’immigration africaine en France et la Françafrique puisque la plupart des personnes qui quittent leur pays le font pour des causes politiques et économiques dans des pays devenus invivables en partie du fait des responsabilités françaises. L’indignité que l’on constate dans la gestion des sans papier en France rejoint le mépris des populations qui s’exprime en Afrique. Pour soutenir des dictature comme le fait la France en Afrique, il faut avoir une bien piètre image des populations africaines.
recueilli par Jean-Marie Dinh
Sarkozy ou la Françafrique décomplexée, éditions Tribord, 4,5 euros
Depuis l’arrivée au pouvoir de Nicolas Sarkozy la politique de la Françafrique repose sur une défense inconditionnelle des positions économiques acquises (Gabon, Congo, Tchad …) ou à conquérir (Libye, RDCongo, Angola, Afrique du Sud …) a placé la Guinée parmi les territoires de prospection pour les entreprises françaises.