James Noël est né à Hinche (Haïti) en 1978. Poète prolifique, il écrit dans deux langues : « Le créole pour la main gauche, le français pour la main droite. » Son premier recueil de poèmes, Poèmes à double tranchant (Seul le baiser pour muselière), publié en 2005, est ainsi présenté par le poète Frankétienne : « Un recueil de poésie à double tranchant, esthétique et idéologique, à résonance individuelle et collective… Entrez dans l’univers fabuleux du poète, vous en sortirez ébloui, transfiguré ! »
En 2006, il publie Le Sang visible du vitrier, qui reçoit une mention spéciale d’excellence au Grand prix des Amériques Francophones à Montréal en 2007. Considéré comme la révélation de l’anthologie L’Année poétique 2008, James publie régulièrement, chez des éditeurs haïtiens, québécois, français, des livres marqués par le sceau d’une grande originalité : Le Pyromane adolescent (2013), Cheval de feu (2014), La Migration des murs (2012/2016). Ses publications lui valent de nombreuses distinctions, et il est pensionnaire de la Villa Médicis en 2012.
Mardi 13 décembre, 19h: Maison de la Poésie Jean-Joubert ; mercredi 14 décembre, 16h-18h : site universitaire Saint-Charles de l’Université Paul-Valéry ; mercredi 14 décembre, 20h-21h30 : boutique d’écriture & Co ,
Pour sentir ce qui se joue dans nos sociétés, les journalistes devraient passer plus de temps à flâner. Notamment dans les réseaux.
Etienne Carjat portrait of Charles Baudelaire 1862
Dans l’énorme masse de ce qu’on a lu et entendu sur la crise du journalisme et son incapacité à sentir – et donc rendre compte de – ce qui se jouait dans nos sociétés, rares sont les analyses éclairantes.
Plonger dans un lac gelé avec Lordon
Celle de Frédéric Lordon attaquant le fact-checking (la vérification des faits) – et l’idéologie de l’absence d’idéologie – dans Le Monde diplomatique faisait l’effet d’une plongée dans un lac gelé : on sait que ça fait du bien de subir ça, mais le problème, c’est qu’après, on a juste envie d’aller sous la couette.
Or, hier, une aimable correspondante m’a adressé un article qui est à la fois d’une dureté nécessaire, mais ouvre des pistes.
L’auteur s’appelle Dominique Trudel, il est chercheur en sciences de la communication au CNRS, et son texte a été publié dans le quotidien canadien Le Devoir.
Pour comprendre le succès de Trump – mais l’ambition peut s’étendre à d’autres mouvements politiques en Europe – il relit les réflexions des intellectuels des années 1930, 1940 et 1950 – parmi lesquels Adorno, Fromm ou Benjamin – qui eux aussi se sont interrogés sur le rôle des médias en époque trouble.
Or ces théoriciens, de manière tout à fait contre-intuitive, s’en sont pris à l’objectivité, incapable selon eux de rendre compte de la subjectivation à l’oeuvre dans la montée du fascisme.
Crise du journalisme
Voici un des enseignements que Dominique Trudel en retire pour aujourd’hui (je vais le citer longuement, désolé, mais c’est tellement bien…) :
« Aujourd’hui, à l’ère de la crise du journalisme et de la multiplication des plateformes, les épistémologies et les pratiques du journalisme convergent autour d’un modèle dominant adopté par les grands médias. Le journalisme de données, les pratiques de vérification des faits et les sondages se sont imposés comme les instruments par excellence de l’objectivité journalistique. Qui sera en mesure de produire le tableau le plus juste, le visuel le plus frappant ? Qui sera capable d’accomplir le vieux rêve objectiviste d’une carte coïncidant parfaitement avec le territoire ?
Cet horizon n’est pratiquement pas remis en question aujourd’hui par les institutions dominantes du journalisme. Or c’est précisément l’objet de la critique du journalisme proposée par Walter Benjamin. Dénonçant la chimère d’une “ information impartiale ”, [Benjamin] s’inquiétait non seulement de ce que le journalisme défend, “ mais encore de la manière dont il le fait ”.
Au journalisme d’information alors triomphant, Benjamin oppose la figure du journaliste-flâneur qui privilégie l’expérience et la narration. Dans cette perspective, la vérité ne découle pas d’un ensemble de faits objectifs […], mais [consiste] à “ s’emparer d’un souvenir, tel qu’il surgit à l’instant du danger ”. »
Foule électrique
Voilà qui est passionnant. Ce que Frédéric Lordon dénonçait d’un point de vue politique dans l’illusion du fait objectif, Trudel le voit à l’oeuvre dans des pratiques journalistiques contemporaines en tant qu’elles sont travaillées par le numérique, son goût du chiffre, de la donnée, du visuel définitif.
Mais, si l’on en conclut avec Benjamin qu’il faut substituer un journalisme flâneur, se pose une question : où flâner ? Là, il faut aller voir comment Baudelaire décrit le flâneur :
« Pour le parfait flâneur, pour l’observateur passionné, écrit Baudelaire dans “Le Peintre de la vie moderne”, c’est une immense jouissance que d’élire domicile dans le nombre, dans l’ondoyant, dans le mouvement, dans le fugitif et l’infini […] Ainsi l’amoureux de la vie universelle entre dans la foule comme dans un immense réservoir d’électricité. »
Cette foule électrique, où la trouve-t-on aujourd’hui ? Dans la rue, bien sûr, toujours. Mais – vous me voyez venir… – « élire domicile dans le nombre, dans le mouvement, le fugitif », c’est aussi sûrement plonger dans Internet et les réseaux sociaux. La « modernité », dont parle Baudelaire, qu’il faut à la fois saisir et critiquer, n’est-elle pas là aussi ?
Flâner dans les réseaux
Il faudrait donc, pour qu’il produise quelque chose d’intéressant, définir les conditions de ce journalisme qui flâne dans les réseaux (perso, je passe beaucoup de temps à traîner dans les réseaux, mais je ne suis ps sûr d’être un rempart contre le fascisme). Car ce que fait le flâneur de Benjamin dans la rue – marcher, observer, interpréter –, n’est pas si simple à faire dans Internet où la technique conditionne toujours un peu les actions, et où le réseau nécessite une forme d’appartenance que la rue permet d’éviter.
Mais voilà, s’il faut faire ce travail pour moins se tromper, et ne pas reproduire les erreurs du passé, ça vaut le coup.
Le revolver avec lequel le poète Paul Verlaine a tenté de tuer son amant Arthur Rimbaud en juillet 1873 à Bruxelles a trouvé preneur, mercredi soir, au prix de 434 500 euros lors d’une vente aux enchères chez Christie’s, à Paris.
C’est l’arme d’un crime passionnel… qui a déchaîné les passions, mercredi 30 novembre, lors d’une vente aux enchères chez Christie’s, à Paris. Le revolver à six coups avec lequel Paul Verlaine tenta de tuer Arthur Rimbaud, un après-midi de juillet 1873, à Bruxelles, a trouvé preneur au prix phénoménal de 434 500 euros.
« Le revolver a trouvé preneur à 434 500 euros, frais inclus », a indiqué à l’AFP une responsable de la communication de la maison de vente. L’arme, un Lefaucheux (célèbre marque de l’époque) à la crosse de bois, de calibre 7 millimètres, était estimé entre 50 000 et 60 000 euros.
Le 10 juillet 1873, il est 14 heures lorsque Paul Verlaine, célèbre poète français, tire sur Arthur Rimbaud, lui aussi poète, de 10 ans son cadet. Une balle blesse le jeune homme au-dessus de l’articulation du poignet. L’autre va se loger dans le plancher. S’achève ainsi le coup de feu le plus célèbre de la littérature française et une querelle qui, heureusement, aura fait couler plus d’encre que de sang.
La brouille entre les deux hommes a commencé à Londres en mai 1873. Le torchon brûle entre les deux amants. Verlaine a envie de renouer avec sa femme, Mathilde, épousée en 1870, un an avant sa rencontre avec l’auteur du « Bateau ivre ». Après une énième dispute, il plaque son jeune amant et part pour Bruxelles. Rimbaud le rejoint.
À peine pansé, Rimbaud songe à quitter Bruxelles pour Paris. Verlaine, qui a gardé l’arme avec lui, le menace à nouveau en pleine rue. Rimbaud hèle un policier qui arrête les deux hommes.
Verlaine est alors condamné à deux ans de réclusion à la prison de Mons. Derrière les barreaux (où il passera 555 jours), il écrira les 32 poèmes de « Cellulairement » qu’il dispersera dans les recueils « Sagesse », « Jadis et naguère », « Parallèlement » ou « Invectives ». Rimbaud, rentré chez sa mère, se met à l’écriture d' »Une saison en enfer ».
Paul Verlaine avait acheté le revolver le matin même de l’incident chez un armurier bruxellois avec une boîte de 50 cartouches. Confisqué par la police, le revolver sera rendu à l’armurerie Montigny avant d’être cédé en 1981 à son actuel propriétaire, un huissier de justice belge, amateur d’armes à feu, nommé Jacques Ruth.
C’est en voyant au début des années 2000 le film sur les amours entre Rimbaud et Verlaine, « Rimbaud Verlaine (Éclipse totale) » avec Leonardo DiCaprio que Jacques Ruth se rend compte qu’il possède un trésor.
La ville natale de Rimbaud, Charleville-Mézières, a lancé une souscription publique pour acquérir ce revolver et enrichir la collection du musée consacré au poète.
Expérimenter la pluridisciplinarité photo Fred Trobrillant
Littérature La sixième Zone d’Autonomie littéraire ZAL se tient ce samedi salle Pétrarque. Quand les auteurs donnent vie à des expériences scèniques.
Balayée la tragédie de l’auteur(e) qui sort fébrile de sa tanière pour affronter ses lecteurs. Celle des plateaux littéraires traditionnels où il doit jouer à l’écrivain en répondant aux questions de l’animateur qui se prend pour un érudit.
La ZAL envisage et expérimente les nouveaux champs du littéraire à l’aune des années 90. Avec des textes qui montent sur scène, accompagnés de création sonore, vidéo, plastique, théâtrale, dans des formats courts, entre 15 et 20 minutes qui s’amorcent vite et nous saisissent par leur intensité. De quoi donner des cauchemars à Modiano.
« La ZAL concourt à une désacralisation du personnage de l’écrivain. On s’émancipe de l’image du génie solitaire et élitiste en ouvrant le champ littéraire à tous les domaines du spectacle vivant », indique Renaud Vischi, membre fondateur de la manifestation et partie prenante de la revue montpelliéraine Squeeze.
Le projet philanthropique de cette structure d’édition s’inscrit dans une redéfinition « des critères d’appréciation, des règles d’élaboration, des goûts et du jugement qualitatif sur la création littéraire. »
L’opération, qui vise au dépoussiérage, ne jette pas pour autant le bébé avec l’eau du bain. « Le support privilégié reste le livre et les relations intimes qui s’opèrent entre l’auteur, le texte et le lecteur. On ne défend pas une école. On se voit comme une porte d’accès pour intervenir sur l’image de la littérature qui n’est pas séparée des influences contemporaines », précise Renaud Vischi. « L’écriture et la mise en scène sont deux compétences très différentes, on ne se situe pas dans l’analyse. La ZAL reste périphérique par rapport au champ littéraire, le défi est de trouver des point d’accès variés, de proposer des moyens pour servir le travail d’un auteur sur scène.»
L’accent sur la poésie
La programmation 2016 s’est construite autour du texte, une implantation sélective d’éditeurs, et un bar convivial. Une place de choix est réservée à la poésie. 25% des invités sont de la région. La manifestation rayonne de plus en plus au niveau national. L’an dernier, le rendez a accueilli 2 000 visiteurs curieux de découvrir les travaux d’auteurs mal représentés ou restés dans l’ombre.
Ce mariage de la littérature aux arts visuels et sonores est une fête, une occasion à saisir pour interagir avec les textes et leurs auteurs.
JMDH
Entrée libre salle Pétrarque ce samedi de 14h30 à 23h.
Rémi Checchetto associe ses écrits à une pluralité d’expressions. Photo dr
Auteur Rémi Checchetto lira ses poèmes vendredi à la Maison de la poésie Jean-Joubert et évoquera ses textes dramatiques le lendemain dans le cadre de la 6ème édition de la Zone d’autonomie littéraire.
La Maison de la Poésie Jean Joubert invite vendredi le poète Rémi Checchetto pour une lecture performance extrait de son dernier recueil Ici même paru aux éditions Tarabuste. La lecture sera donnée par l’auteur accompagné à la contrebasse par Lina Lamont. Un moment de choix, à partager entre amoureux de la poésie vivante.
La Maison de la poésie conduit sa mission de diffusion avec goût et finesse dans le choix de ses propositions. La structure associative fraîchement rebaptisée en hommage à son fondateur Jean-Joubert, poursuit son objet sur une voie résolument ouverte sur le monde, saisissant toutes les occasions d’initier des instants exquis, comme récemment avec le poète Alain Lance. Elle offre par ailleurs un appui aux nombreux poètes qui oeuvrent au partage du rêve dans la région.
Gageons que Rémi Checchetto qui est aussi dramaturge, ne se trouvera pas en terre étrangère dans cette phase, souvent complexe, de l’adaptation du texte à la scène. Il donne à l’occasion des lectures de son travail et collabore régulièrement avec des musiciens comme Titi Robin, Louis Sclavis, Bernard Lubat. Pour paraphraser Vitez, il a su faire poésie du tout .
Faut-il, dans cet extrait du recueil Boomerang, paru aux éditions Potentille (2015), trouver quelques pistes éclairantes sur sa démarche ? Ma singularité ? / je suis sorti d’une mère mauvaise/ ainsi je le dis / ainsi puis-je le dire puisque c’est ainsi / mais on ne sort pas d’une mère mauvaise, elle nous rejoint toujours, c’est une vérité éprouvée / la mère mauvaise ne nous rejoint pas /la mère mauvaise ne sort pas de nous / elle n’a nul besoin de nous revenir en boomerang / elle est là / elle brise une à une les brindilles de lumière.
Photo Rémi Checchetto
Auteur de théâtre Les écrits poétiques de Rémi Checchetto se complètent par un goût pour la photographie et une abondante activité d’auteur. La force de sa langue est totalement mise au service du propos. Ce qui l’a sans doute conduit à associer ses écrits à une pluralité d’expressions : metteurs en scène, musiciens, danseurs, photographes ou plasticiens.
Rémi Checchetto ne semble pas vouloir compartimenter son écriture entre théâtre et poésie, mais il contribue assurément au renouvellement de l’écriture dramatique en dépassant les formes arrêtées de la représentation. « Cela n’était pas déjà des mots, mais une vision qui réclamait et proposait des mots » commente l’auteur à propos de son texte L’Homme et cetera. Bela Czuppon et Jean-Marc Bourg notamment ont mis en scène ses textes pour le théâtre.
Checchetto fait partie des auteurs que l’éditrice Sabine Chevallier défend dans la durée. C’est une des références de l’excellente collection Théâtre contemporain des Editions Espace 34 qui a publié ses cinq dernières pièces.