Dans
A l’heure où le mythe émancipateur de l’insertion s’écroule sous le joug de la politique libérale en disqualifiant la profession pour la renvoyer à de l’assistance, la question posée est plutôt d’actualité. Elle s’inscrit avec pertinence au moment où la politique de répression et de contrôle social rend les plus démunis responsables de leur propre échec. Sous-tendu par des valeurs de justice sociale, le travail social se retrouve de fait projeté comme un maillon du système de domination économique. Alors que faire ?
Les différents contributeurs mettent le doigt sur l’incertitude identitaire qui transparaît tant dans les définitions du travailleur social – dont les fonctions se caractérisent par des contours flous comprenant l’accompagnement, le contrôle, l’assistance, l’insertion, la rééducation, la médiation, l’action thérapeutique, le soutien juridique… – que dans celle, non moins incertaine d’être de gauche.
» Sortir du romantisme de gauche «
Tout attachement idéologique à une identité gauchiste condamne à l’immobilité, constate Dominique Depenne, qui invite » à sortir du romantisme de gauche pour devenir acteur du politique. » Sans offrir de prise politicienne, la ligne de front ne se situant pas toujours entre droite et gauche. » Tant que le travail social relèvera de la catégorie politicienne, il ne sera rien d’autre qu’un moyen utilisable et utilisé, manipulable et manipulé à d’autres fins que les siennes. » Le sociologue prône un retour vers l’impulsion première dans la rencontre avec l’autre. L’évolution indispensable du travail social n’est pas condamnée à céder aux sirènes du libéralisme, précise Pierre Savignat. Pierre Boiral souligne, lui, l’inversion des priorités, en précisant que le travailleur social n’a pas aujourd’hui qu’une fonction d’assistance. » Il a aussi, nécessairement, celle de créer de l’activité économique dont les destinataires réels, les bénéficiaires, ne sont pas les assistés. «
Le travailleur social ne peut pas être » de gauche » lorsqu’il intervient auprès des publics en difficultés. Le travail social doit promouvoir une vision indépendante, défend Philippe Roppers. » Il convient de promouvoir et de soutenir dans le respect d’une éthique susceptible de structurer des libertés de penser et d’agir. Et cela, ce n’est être ni de droite, ni de gauche. «
Jean-Marie Dinh
Le travail social est-il de gauche ? Le Sociographe, septembre 2009, 10 euros, disponible en librairie ou via www.lesociographe.org
Voir aussi : rubrique société, la question religieuse dans le travail social,